Sexe après l'accouchement: comment se réapproprier sa sexualité
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Par Caroline Franc Desages, publié le 27/12/2015 à 07:00 , mis à jour à 23:21
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"Le bon moment pour refaire l'amour, c'est à la femme de le décider.""Le bon moment pour refaire l'amour, c'est à la femme de le décider." iStock
Après avoir accouché, de nombreuses femmes redoutent de refaire l'amour. Peur que ça ne soit plus comme avant, d'avoir mal, baisse du désir... Difficile parfois de conjuguer le statut de nouvelle mère avec celui d'amante.
"Après avoir accouché de Romane, il y a un an, j'ai eu toutes les peines du monde à retrouver une vie sexuelle épanouie, confie Emmanuelle, 35 ans. J'avais eu une épisiotomie assez importante et si la cicatrisation s'était faite plutôt sans encombres, psychologiquement, j'étais bloquée. Surtout, la vérité, c'est que je n'avais envie que d'une chose: être avec mon bébé. Et quand Romane dormait, et bien, mon désir se portait surtout sur mon oreiller. Mon mari a été compréhensif les trois premiers mois, puis il a manifesté des signes d'impatience. Mais comme je suis incapable de faire l'amour en me forçant, il a bien été obligé d'attendre. Petit à petit, l'envie est revenue. Mais aujourd'hui je regrette de n'en avoir parlé à personne, peut-être que cela m'aurait aidée".
Comme Emmanuelle, nombreuses sont les femmes qui après avoir donné naissance à un enfant éprouvent des difficultés à refaire l'amour. Les causes sont souvent multiples: peur d'avoir mal, traumatisme lié à un accouchement difficile, fatigue mais aussi perte des repères due à l'énorme chamboulement que représente l'arrivée de ce nouveau petit être, qui monopolise temps et pensées. Comment gérer cette période de l'après-accouchement? Est-ce normal d'avoir peur de faire l'amour? A qui confier ses appréhensions? Témoignages et conseils.
"Le bon moment pour refaire l'amour, c'est la femme qui le choisit"
"D'une manière générale, à moins d'une grosse complication, il n'y a pas de contre-indication à une reprise de la sexualité après l'accouchement", estime Mélanie Nadal, sage-femme. "Bien sûr, il y a les épisiotomies, mais d'une part depuis dix ans on en pratique beaucoup moins systématiquement et d'autre part, d'importants progrès ont été faits sur les sutures, ce qui permet une meilleure cicatrisation. Personnellement, je conseille aux femmes qui ont subi une épisio ou quelques déchirures superficielles de se laver à la main les jours qui suivent. A partir du moment où ce toucher ne fait plus mal, c'est qu'il est possible de refaire l'amour. En général, c'est le cas trois semaines après l'accouchement. Sachant, témoigne Mélanie Nadal, que certaines femmes attendent beaucoup moins longtemps.3
Pas de contre-indication médicale, donc, hormis des circonstances extraordinaires, comme une césarienne avec cicatrice douloureuse ou une épisiotomie importante. Ce qui n'empêche pas certaines femmes d'attendre bien plus que ces trois semaines "réglementaires". "La plupart des femmes qui se confient à moi lors du suivi post-natal expriment une certaine peur d'avoir mal, rapporte Jean-Daniel Henry, sage-femme et hypnothérapeute. Je leur réponds toujours dans un premier temps que le bon moment sera celui qu'elles auront choisi. Il n'y a pas de délai minimum ou maximum. Le bon délai, c'est celui de la femme. Il n'est pas question de céder à l'injonction du partenaire. Faire l'amour tendue et contre son gré ne risque pas de rendre cette reprise agréable."
"Attendre que le corps et la tête soient prêts"
Cette expérience, Béatrice l'a faite après la naissance de son second enfant et alors que son couple battait de l'aile: "Mon fils est né en 45 minutes et est sorti seul alors que je n'étais pas encore allongée. Pas d'épisio donc et un seul point de couture. Une semaine après sa naissance, je sollicitais mon mari par crainte de le perdre. J'en ai honte aujourd'hui. Ces rapports n'étaient étonnamment pas douloureux, mais plutôt anesthésiés. Mon corps n'était pas prêt et je crois complètement insensible à ce rapport. C'était très troublant." Quelques années plus tard, Béatrice conseille donc "aux jeunes mamans de faire comme elles sentent": "sans pression aucune. Sans urgence. Attendre que le corps et la tête soient prêts. Laisser un temps de transition pour se retrouver soi avec son corps. Et pour cicatriser."
S'il faut se laisser le temps, donc, pas question pour autant de se freiner en raison de peurs infondées. Jean-Daniel Henry constate en effet que "beaucoup de femmes alors même qu'elles ont été enceintes et actives sexuellement depuis longtemps méconnaissent leur corps": "beaucoup craignent que l'accouchement ait causé des dommages irréversibles. Je leur explique que ça n'est pas le cas, mais que bien sûr, il peut y avoir certaines douleurs. Notre travail à nous les sages-femmes est très pédagogique. Il ne faut pas avoir peur de nommer les choses, de les montrer."
La rééducation du périnée, moment propice pour se réapproprier son corps
Pour le thérapeute, "la rééducation du périnée peut aussi servir à parler de tout cela et à se réapproprier ce corps parfois méconnu". "Je ne compte pas le nombre de fois où certaines femmes sont convaincues de contracter leur périnée alors que je constate qu'il ne se passe rien. Difficile dans ce cas là d'éprouver des sensations pendant un rapport sexuel. Cette rééducation est utile pour ne pas souffrir à terme de problèmes urinaires mais aussi et peut-être autant pour reprendre le contrôle et apprendre ou ré-apprendre le fonctionnement de son vagin et de son périnée."
Surtout, insiste Jean-Daniel Henry "j'explique aussi à celles qui sont effrayées à l'idée d'être à nouveau pénétrées alors qu'elles sont encore très sensibles, que l'on n'est pas obligé de recommencer immédiatement par la pénétration." "La lubrification est souvent un peu plus difficile après l'accouchement, en raison du bouleversement hormonal. Le partenaire doit donc être plus attentif aux préliminaires, ne pas hésiter à utiliser un lubrifiant." Certaines positions peuvent faire plus mal que d'autres également, en raison des seins sensibilisés par l'allaitement par exemple, ou de la cicatrice. En d'autres termes, si la sexualité peut reprendre, elle doit souvent s'adapter à ce changement, tout au moins pour un temps.
Une baisse de libido due aux hormones et au bébé, omniprésent
Par ailleurs, si parfois le désir ne revient pas, ce n'est pas uniquement par peur de ne plus être "apte". "La pilule que l'on prescrit juste après l'accouchement peut provoquer une baisse de la libido", prévient Mélanie Nadal. Surtout, observe la sage-femme, "beaucoup de femmes sont concentrées sur leur enfant et ont du mal à se sentir à la fois mère et amante". "Lorsqu'elles m'en parlent, je tente de les rassurer, mais également de leur rappeler que leur enfant n'est pas né par hasard et que l'équilibre de leur couple repose aussi sur l'entente sexuelle. Que parfois, l'appétit vient en mangeant, que faire l'amour peut être aussi un formidable moyen de se détendre, de lâcher du lest sur ce nouveau statut de parent pas toujours facile à investir."
Floriane a connu cette baisse de libido après son deuxième enfant. "A mon retour à la maison, tout était comme avant, le désir était là, voire un peu plus intense qu'avant, du fait des positions limitées quand j'avais mon gros ventre. On s'est refait des câlins quinze jours après l'accouchement. Mais très vite, ça s'est tari, jusqu'à ne plus rien faire du tout. Ça a duré pas loin de deux mois je crois. Je me suis posé quelques questions parce que je n'avais pas connu ça après mon premier accouchement."
Florianne en parle alors à sa sage-femme. "Elle m'a dit que nous n'étions tout simplement pas des animaux, que c'était normal qu'il y ait une baisse de désir, que la vie à quatre c'est une autre organisation qu'à trois, que les nuits sont courtes et que chaque moment de répit sert plutôt à se reposer qu'à faire des galipettes. Mais qu'au bout d'un certain temps (six mois à peu près) sans rapports, il faudrait peut être consulter, que le problème pouvait être d'ailleurs."
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Oser en parler, à son conjoint et au corps médical
"J'ai laissé couler, poursuit Florianne. Je voyais bien que mon mari était en demande, mais je me défilais. Je n'osais pas vraiment lui avouer que, non, je n'en avais pas du tout envie, que je voulais juste mon bébé dans les bras et point barre. Et un jour je le lui ai dit, simplement: 'Je vois bien que tu as envie, seulement je n'ai pas la tête à ça, excuse-moi.' Il ne l'a pas mal pris, bien au contraire, il était rassuré de voir que mes sentiments n'avaient pas changé. Il s'est dit que ça reviendrait bien un jour ou l'autre. Et un soir j'ai eu envie. Depuis ça a repris son cours gentiment. Je crois qu'en réalité, j'avais besoin de ce temps de latence, où j'étais pleinement maman avant d'être femme et épouse." Un cas qui montre une fois encore l'importance de pouvoir parler avec son conjoint dans ces périodes où le désir semble se faire la malle. "Parler à l'autre, mais aussi à son médecin, à un psy ou à sa sage-femme, permet la plupart du temps de résoudre le problème", assure Mélanie Nadal.
Parfois néanmoins, préviennent les deux sages-femmes, la cicatrice de l'épisiotomie peut être réellement problématique. "Il peut arriver que certains points se soient désolidarisés et qu'il y ait une petite asymétrie. C'est rare, mais possible, explique Jean-Daniel Henry. Dans ce cas, il faut consulter un spécialiste en reconstruction vulvaire." Mais souvent, constate-t-il, "c'est l'anticipation de la douleur qui la provoque". Quelques séances d'hypnose permettent alors selon lui de résoudre le problème. Surtout, insiste Jean-Daniel Henry, la plupart du temps, "il n'y a pas de fatalité. Les douleurs finissent par disparaître, la peur aussi. Et le désir par revenir."
Parfois, même, l'après accouchement se traduit au contraire par un regain de désir. "Je n'ai jamais eu autant envie de mon mari qu'après la naissance de mon fils. Je crois que j'étais débarrassée de cette pression que je m'étais mise pour tomber enceinte. Là, c'était du sexe pour le sexe et j'ai adoré ça, justement, que ça n'ait rien à voir avec l'idée de procréer", raconte Sylvie, 37 ans.
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