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Le misogyne Eric Zemmour accusé de violences sexuelles : faut-il s'en étonner ? , femmes, feminisme, sexisme,

30 Avril 2021, 21:45pm

Publié par hugo

 Le misogyne Eric Zemmour accusé de violences sexuelles : faut-il s'en étonner ?
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Le misogyne Eric Zemmour accusé de violences sexuelles : faut-il s'en étonner ?
Le misogyne Eric Zemmour accusé de violences sexuelles : faut-il s'en étonner ?
Clément Arbrun 
Par Clément Arbrun
Publié le Vendredi 30 Avril 2021
Une nouvelle enquête de Médiapart révèle de nombreuses accusations de harcèlement et violences sexuelles visant le journaliste Eric Zemmour. Une personnalité publique qui croule sous les faits de misogynie notoire depuis deux décennies déjà.
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Harcèlement, "drague" insistante, violences sexuelles... Une nouvelle enquête du journal en ligne Médiapart publiée ce 29 avril réunit de nombreux témoignages de femmes, journalistes et autrices notamment, visant le polémiste et misogyne notoire Eric Zemmour. Le 24 avril déjà, l'élue socialiste Gaëlle Lenfant accusait l'éditorialiste d'agression sexuelle, relatant des faits qui auraient eu lieu en 2004 ou 2005. Dans le cadre d'un atelier, le journaliste aurait attrapé l'élue par le cou et l'aurait embrassée de force.

"Il m'attrape par le cou, me dit 'cette robe te va très bien tu sais ?' et m'embrasse de force. Je me suis trouvée tellement sidérée que je n'ai rien pu faire d'autre que le repousser et m'enfuir en courant. Trembler. Pleurer. Me demander ce que j'avais bien pu faire", narre Gaëlle Lenfant sur Facebook. Des témoignages similaires s'énoncent depuis sur les réseaux sociaux et sur Médiapart. Comme celui de la journaliste Aurore Van Opstal. Lors d'un dîner, Eric Zemmour lui aurait "caressé le genou avec sa main" en "remontant jusqu'à l'entrejambe".

"J'étais tétanisée, sous le choc. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait", détaille-t-elle à la journaliste Marine Turchi. Autre accusation d'agression sexuelle, dans la bouche de Nathalie, une maquilleuse du talk show Ça se dispute : "Eric Zemmour m'a plaqué contre le mur et m'a dit : 'Tu ne comprends pas que je veux b*iser avec toi'", narre la victime présumée. Eric Zemmour aurait posé "une main sur [son] bras et l'autre au-dessus du sein, près de l'aisselle" et lui aurait également dit : "Appelle-moi, il faut qu'on se voie, je peux te faire bosser".

On pourrait encore citer le témoignage accablant d'Anne, journaliste, qui narre sa rencontre avec l'éditorialiste dans un café parisien : "Il n'a pas arrêté de me draguer. [...] Je l'ai repoussé gentiment au départ [...] mais il revenait à la charge, profitant de son statut [...] Il m'a demandé de le remercier [d'avoir payé l'addition], s'est penché et m'a embrassé[e]. Il a mis sa langue et tout ! Je l'ai repoussé encore mais pas assez franchement. Quand nous sommes sortis du café, il m'a réembrassée et je me suis laissée faire. [...] Quel goujat !", raconte-t-elle.

Ces nombreuses prises de parole, qui n'ont pas encore été commentées par le principal concerné, nous renvoient volontiers aux déclarations pour le moins anti-féministes du journaliste.

"Prédateur du désir"

Eric Zemmour à propos de #MeToo
Dans cette vidéo : Eric Zemmour
Car cela fait vingt ans qu'Eric Zemmour normalise dans le champ médiatique, d'ouvrages en plateaux télé, la misogynie la plus décomplexée. On pense aux assertions tranquillement réacs de son best-seller Le suicide français, type : "[Avant le féminisme], un jeune chauffeur de bus pouvait glisser une main concupiscente sur un charmant fessier féminin sans que la jeune femme porte plainte pour harcèlement sexuel". Aux "réflexions" de son premier grand succès en librairies, Le premier sexe, comme celle que ravive d'ailleurs Médiapart : "Le poil nous rappelle que la virilité va de pair avec la violence, que l'homme est un prédateur sexuel, un conquérant".

A ce discours on ne peut plus limpide également, prononcée en 2013 face à une Léa Salamé interloquée : "Le sexisme, c'est le délire féministe depuis quarante ans". Dans l'émission Ca se dispute, Eric Zemmour raillait dès lors les accusations de sexisme visant députés et parlementaires. "Comment les femmes sont-elles entrées à l'Assemblée nationale et au Sénat ? Par des lois de parité qui ont obligé les gens à les mettre sur des listes. Et je ne vous dirai pas comment on les a mises là... On a mis les amies, les femmes, les maîtresses", énumérait-il. C'est justement le "délire féministe", comme il l'appelle, qui occupe grand nombre de ses prises de parole.

De cet échange vif face à la femme politique et militante féministe Clémentine Autain sur le plateau de Laurent Ruquier aux "analyses" du journaliste fignolées en live sur le plateau de Face à l'info l'an dernier ("Aujourd'hui, la militante Olympe de Gouges a droit à deux pages dans les livres d'histoire, elle en a plus que Robespierre. Il y a une volonté chez les féministes de réécrire l'Histoire"), la médiatisation de la parole d'Eric Zemmour n'a cessé de traîner avec elle une diabolisation des révolutions féministes et du progressisme.

A tel point d'ailleurs que bien des paroles expertes voient en lui la voix masculiniste (et viriliste) majeure de la télévision française. Dans un article intitulé "Le masculinisme : entre crise de l'identité masculine et volonté d'un retour au patriarcat", Marianne Dalmans explique à ce titre : "Zemmour considère que la demande de parité des femmes a féminisé la politique et la façon de faire de la politique. Les politiciens ne seraient plus des hommes qui tuent leur adversaire, des hommes de pouvoir avec leur trivialité et leur privilège de langage machiste, mais des hommes de consensus avec un vocabulaire féminin".

Dans son ouvrage Le premier sexe, rappelle l'autrice, l'auteur déplore effectivement le triomphe "de la douceur sur la force, du dialogue sur l'autorité, de la paix sur la guerre, de la tolérance sur la violence". Alors qu'Eric Zemmour a décliné la demande d'entretien de Médiapart, c'est, à travers ces accusations, "son comportement envers les femmes" qu'affirme épingler le média en ligne. Soit une "attitude" particulièrement virulente que cristallisent également écrits et interventions médiatiques. Agressive, et particulièrement minimisée.

Et Médiapart de rappeler en ce sens ces lignes pour le moins explicites du journaliste : "L'homme ne doit plus être un prédateur du désir. Il ne doit plus draguer, séduire, bousculer, attirer. Toute séduction est assimilée à une manipulation, à une violence. L'homme n'a plus le droit de désirer, plus le droit de séduire. Il ne doit plus qu'aimer". Curieuse nostalgie s'il en est que celle de regretter les "prédateurs du désir".

SOCIÉTÉ NEWS ESSENTIELLES ENQUÊTE MÉDIAS JOURNALISME HARCÈLEMENT VIOLENCES HARCÈLEMENT SEXUEL
https://www.terrafemina.com/article/eric-zemmour-faut-il-s-etonner-qu-il-soit-accuse-de-violences-sexuelles_a358080/1

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Pourquoi la précarité étudiante touche majoritairement les femmes , femmes, feminisme,

30 Avril 2021, 21:36pm

Publié par hugo

 Pourquoi la précarité étudiante touche majoritairement les femmes
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L'association Gaelis distribue des paniers-repas pour les etudiants en situation de precarite sur le campus universitaire de la Doua en décembre 2020.
L'association Gaelis distribue des paniers-repas pour les etudiants en situation de precarite sur le campus universitaire de la Doua en décembre 2020.
Clément Arbrun 
Par Clément Arbrun
Publié le Mercredi 28 Avril 2021
La pandémie du Covid-19 a aggravé la précarité dont souffrent bien des étudiant·e·s en France. Une situation financière (et sanitaire) accablante qui toucherait majoritairement les jeunes femmes, selon une nouvelle enquête détaillée de l'association solidaire Co'p1.
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C'est une nouvelle enquête de l'association Co'p1 - Solidarités Étudiantes, réseau d'entraide et de solidarité épaulant notamment étudiants et étudiantes à travers des distributions gratuites de denrées alimentaires et de biens de première nécessité, qui le révèle : parmi les étudiants ayant sollicité une aide alimentaire pour la première fois lors de la dernière rentrée universitaire, 67% de ces bénéficiaires seraient... des femmes.

Le rapport chiffré "Enquête sur la précarité étudiante" publié ce 26 avril souligne ainsi que même au sein de ce fléau global qu'est la précarité étudiante, des discriminations genrées subsisteraient. "Les femmes ont des dépenses que les hommes n'ont pas, notamment les protections hygiéniques", détaille à ce sujet Paul Bouscary, directeur des études de l'association et étudiant en troisième année de licence de droit à la Sorbonne.

La réalité de la précarité menstruelle dans le milieu étudiant, par exemple, est indéniable. En France, une étudiante sur 10 doit fabriquer ses propres protections, et 1 sur 20 se contenter de papier toilette.

Et la pandémie de Covid 19 n'a fait qu'exacerber cette précarité étudiante. Et notamment, du côté des jeunes femmes. "Beaucoup de jobs étudiants où les femmes étaient très représentées ne peuvent plus se pratiquer, notamment dans le social ou la restauration", développe encore l'étudiant en droit. Inquiétant.

Des inégalités à plus d'un titre

"Une femme a des dépenses beaucoup plus importantes, en raison des protections périodiques, qui coûtent particulièrement chères, mais aussi sur les produits d'hygiène en général. Quand on entend une étudiante qui nous dit qu'elle doit choisir entre les protections périodiques et se nourrir, c'est alarmant", développe à ce titre Ulysse Guttmann-Faure, membre de l'association, au micro d'Europe 1. Pas étonnant dès lors d'apprendre que près de sept bénéficiaires sur dix de ces aides alimentaires d'urgence soient de sexe féminin.

Comme le développe Le Figaro Etudiant, entre 750 et 800 étudiant·e·s bénéficieraient de colis alimentaires à Paris. Un récent questionnaire préparé par l'association d'aide aux étudiants nous apprend également que plus de 1000 d'entre elles et eux avoueraient "ne pas manger à leur faim" depuis les prémices de la rentrée universitaire. Une situation préoccupante du côté des bourses également, "beaucoup n'étant pas éligibles car les échelons sont calculés sur les salaires des parents d'avant la crise", déplore le directeur des études de Co'p1 - Solidarités Étudiantes. Une situation qui exige de tirer la sonnette d'alarme.

D'autant plus que par-delà la précarité financière (exacerbée par la mise sur pause de bien des jobs étudiant depuis l'an dernier), ce sont également les difficultés d'accès aux soins et la détresse psychologique indéniable des étudiants et étudiantes qui sont mises sur le tapis. 76% des étudiants interrogés dans le cadre de cette nouvelle enquête affirment effectivement être "préoccupés, tourmentés ou anxieux" depuis le début de la pandémie. Un chiffre colossal.


https://www.terrafemina.com/article/etudiants-pourquoi-la-precarite-etudiante-touche-majoritairement-les-femmes_a358056/1

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L'association Solimove aide les victimes de violences conjugales à déménager , femmes, feminisme, violences,

30 Avril 2021, 21:33pm

Publié par hugo

L'association Solimove aide les victimes de violences conjugales à déménager
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L'association Solimove aide les victimes de violences conjugales à déménager
L'association Solimove aide les victimes de violences conjugales à déménager
Clément Arbrun 
Par Clément Arbrun
Mis à jour le 27 Avril 2021 - 17h47
|
Publié le 27 Avril 2021 - 14h05
Depuis quelques mois déjà, l'association Solimove vient en aide aux victimes de violences conjugales, en leur permettant de déménager. Une initiative importante, d'autant plus en période de confinement.
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"On aide les femmes et leur famille à déménager d'un point A à un point B". Voilà comment Guillaume Richebraque résume simplement le principe de l'association dont il est le co-fondateur : SoliMove. Depuis le mois de janvier 2021, cette association basée à Paris aide les femmes victimes de violences conjugales à quitter leur domicile. "On porte leurs meubles, leurs cartons et on propose de stocker leurs affaires le temps qu'elles trouvent un logement pérenne", poursuit le co-instigateur du côté d'Actu.fr.

Offrir une main solidaire, permettre aux victimes de mieux préparer "l'après", oui, mais aussi de récupérer et déplacer leurs biens dans un espace dangereux, synonyme de violences, d'enfermement et de traumatismes (leur ancien appartement, où pourrait résider leur conjoint et agresseur) : voici la démarche de l'initiative, lancée en collaboration avec des structures d'accueil des départements des Hauts-de-Seine et de la Seine Saint Denis.

"Encore aujourd'hui les déménagements restent à la charge des femmes qui sont déjà dans un parcours suffisamment complexe pour ne pas rajouter la question de la logistique. D'autant que souvent, elles ne sont pas véhiculées, alors traverser Paris, dans le métro, avec des dizaines de valises...", déplore à l'unisson Joséphine Libercier, la co-fondatrice de l'association SoliMove, sur le site d'actualités. Des paroles limpides.

Venir en aide aux victimes de violences
Aidez les victimes de violences conjugales dmnager !

Solimove est une jeune asso qui les aide dans cette tape cruciale de leur indpendantisation avec volontaires, vhicule, espace de stockage.

RT c'est dj aider, mais vous pouvez faire un don https://t.co/7jHM2wf28u

— Andrea K. (@AndieCrispy) January 20, 2021
"En effet, si divers services d'aides juridiques sont aujourd'hui proposés, le déménagement en lui-même reste à la charge complète de la victime. Or, l'éloignement rapide et sécurisé du conjoint violent est une étape primordiale à l'indépendentisation des victimes", poursuit à l'unisson le communiqué de l'association. Utilitaire, espace de stockage et déménageurs leur sont donc proposés grâce à SoliMove, et ce jusqu'à l'emménagement au sein d'un centre d'accueil. Des policiers interviennent également lorsque le domicile en question est celui du conjoint.

"On requiert la présence de policiers sur place car c'est obligatoire, on ne peut pas intervenir sans. Un avocat doit également être à nos côtés si toutefois le nom de la femme ne figure pas sur le bail et pour prouver que ses affaires lui appartiennent bien. Enfin, l'ex-conjoint doit être prévenu et nous autoriser à intervenir, ce qui n'est pas une mince affaire", détaille à ce titre le co-fondateur Guillaume Richebraque à Actu.fr. Malgré ces difficultés loin d'être négligeables, huit déménagements de la sorte ont déjà pu être réalisés sur la région Ile de France.

Aujourd'hui cependant, SoliMove requiert une aide supplémentaire afin de pouvoir croître et aider. Un appel aux dons a été lancé. Ce financement participatif a pour but de permettre l'achat futur d'un véhicule utilitaire et son assurance, la location d'un espace de stockage pour les meubles et bagages des victimes, mais également le défrayage de tous les déménageurs volontaires. Tous les détails se trouvent sur le site HelloAsso.


https://www.terrafemina.com/article/violences-conjugales-l-association-solimove-aide-les-victimes-a-demenager_a358044/1

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"Les espionnes racontent" : qui étaient les agentes secrètes de la guerre froide ? , femmes, feminisme, politiques,

30 Avril 2021, 03:04am

Publié par hugo

 "Les espionnes racontent" : qui étaient les agentes secrètes de la guerre froide ?
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24 AVR 2021
 Mise à jour 24.04.2021 à 10:56 par 
TerriennesLiliane CharrierKarine G. Barzegar
L'agent secret 007 sera bientôt incarné par une femme à l'écran, et pour toutes celles qui ont marqué l'histoire du renseignement, ce n'est que justice ! Dans la bande dessinée et la mini-série Les Espionnes racontent, Chloé Aeberhardt et Aurélie Pollet donnent la parole à six ex-espionnes de la guerre froide qui ont joué un rôle décisif dans l'histoire du XXe siècle. Rencontres.

Qui dit "espionne" dit figure mystérieuse, davantage courtisane que professionnelle du renseignement. "On parle souvent de Mata Hari ou de Josephine Baker, des personnages qui appartiennent au passé, explique Chloé Aeberhardt, autrice de Les espionnes racontent. Soit on parle toujours des mêmes figures, un peu sulfureuses, soit on est dans la fiction avec des figures fantasmées par des créateurs masculins : des faire-valoir pour James Bond ou des intrigantes sexy qui couchent pour avoir des infos."

Agentes trop secrètes
Or les grandes espionnes du XXe siècle étaient surtout des femmes discrètes, consciencieuses, cultivées et sportives. "Évidemment qu'il existe des professionnelles du renseignement qui sont tout aussi compétentes que les hommes, mais elles ont peu de place dans la fiction ou dans les œuvres historiques, constate Chloé Aeberhardt. Je me suis rendu compte qu’il existait beaucoup de livres et de documents sur les espions, mais très peu sur les espionnes." L'autrice a donc voulu donner la parole à ces agentes restées trop secrètes : quelle était leur vie, quelles étaient leurs missions ? Alors elle est partie à la recherche de vraies espionnes de la guerre froide, pour voir si la réalité correspondait au mythe.

Tous ces messieurs qui me vantaitent les mérites de femmes que très peu avaient fait travailler...

Chloé Aeberhardt, autrice

Chloé Aeberhardt, qui est aussi journaliste, a enquêté pendant cinq ans entre Paris, Washington, Moscou et Tel-Aviv pour retrouver la trace des espionnes des principaux services de renseignement engagés dans la guerre froide. "Je partais de zéro, n’ayant jamais travaillé sur les affaires de sécurité ou de défense, explique-t-elle. J’ai commencé par me constituer un réseau d’anciens militaires et d’anciens du renseignement – des hommes, car ils sont bien plus nombreux dans ce milieu. Puis il m'a fallu gagner leur confiance, en discutant du sujet des femmes dans le renseignement en général, puis en leur demandant s’ils connaissaient des femmes ou des collègues qui auraient travaillé avec des femmes à l’époque de la guerre froide… D’ami en ami, j’ai fini par entrer en contact avec les bonnes personnes." Chloé Aeberhardt s'amuse encore à la pensée de "tous ces messieurs qui me vantaitent les mérites de femmes que très peu avaient fait travailler..."

Avantage de genre ?
Paru en janvier 2021.
Paru en janvier 2021.
L'exploit des six femmes racontées par la BD de Chloé Aeberhardt et de la dessinatrice Aurélie Pollet fut non pas d'intriguer et de collectionner les amants, mais de s'illustrer par leurs compétences dans un univers dominé par les hommes. Reste que leur condition féminine n'y était peut-être pas pour rien dans leur vocation et la manière dont elles menaient leurs mission. Déjà parce que toutes étaient mues par un fort besoin de reconnaissance, une impérieuse soif de justice.

Peut-être aussi parce que les ressorts des missions de renseignements sont souvent ancrés dans la proximité, la séduction et le sentiment amoureux, et que pour gérer les situations intimes, une certaine intuition féminine est utile ? 

Chloé Aeberhardt n'y croit pas : "Je pense que certaines femmes sont très intuitives, d’autres pas du tout." Pourtant, l'autrice ne nie pas un certain avantage de genre : "Tant que la parité n’existera pas dans ce milieu, on s’attendra à ce qu’un espion soit plutôt un homme et l’on se méfiera moins d’une femme ; elle sera moins soupçonnée. Et comme la principale qualité de l’espion reste de passer inaperçu..." Cela n'est pas prêt de changer, assure l'autrice, car "les femmes  restent beaucoup moins nombreuses dans le renseignement, notamment sur le terrain."


Ma grand-mère avait elle aussi participé de façon indirecte, mais importante, à quelques missions de renseignement.

Aurélie Pollet, dessinatrice

Certaines femmes actives dans l'espionnage sont restées dans l'ombre d'un mari qui les a entraînées dans l'aventure. C'est aussi le cas de la grand-mère de l'illustratrice de Les espionnes racontent, Aurélie Pollet, qui en a imaginé l’ambiance roman-photo stylisée. Elle se dit très touchée par ce projet, qui lui a été proposé au moment où elle venait d’apprendre, après des années de silence, que son grand-père maternel avait travaillé pour les services secrets français : "Son épouse, ma grand-mère, avait elle aussi participé de façon indirecte, mais importante, à quelques missions. L’idée de leur faire un clin d’œil posthume avec cet ouvrage me plaît."

Les espionnes racontent
De Moscou à Los Angeles, six anciennes professionnelles du renseignement ont reçu chez elles Chloé Aeberhardt et lui ont raconté le rôle décisif qu’elles ont joué dans le conflit Est-Ouest. Pénétrer les cercles de pouvoir du bloc adverse, traquer d'anciens nazis en Amérique du Sud ou exfiltrer des falashas d’Éthiopie vers Israël, ces six femmes, aujourd'hui âgées, racontent leurs vies au service de la CIA, du KGB, de la DST ou du Mossad.

Gabriele, taupe par amour et par féminisme
En 1968, la jeune Allemande de l'Ouest Gabriele Gast trouve que son parti, l'Union chrétienne démocrate (CDU), ne se soucie pas suffisamment de l'égalité entre les sexes. Pour sa thèse, sur la situation des femmes en RDA, elle se rend à un rassemblement et tombe amoureuse de l'officier de la Stasi chargé de la surveiller. Les services secrets est-allemands en profitent et lui demandent de collaborer ; si elle refuse, elle ne reverra plus son amant.

Les Espionnes racontent ► Gabriele : La jeune fille et le maître espion de la Stasi

Quand le couple se sépare, Gabriele est désormais acquise à une société communiste bien plus égalitaire pour les femmes. Alors elle continue à espionner pour l'Allemagne de l'Est. A la chute du mur, elle sera condamnée à plus de 6 ans de prison pour trahison, alors que son ex-amant et directeur des services extérieurs de la Stasi, lui, n'écope que de quelques mois. 
 
Qui, d'un homme ou d'une femme, est mieux placé pour gagner la confiance d'une source féminine ?

Martha Duncan

Maria, agente par esprit d'indépendance 
En 1989, Martha Duncan devient Maria pour traquer le général Noriega en cavale. Et pourtant, ce n'était pas gagné : une mission trop stratégique pour une femme, estimaient certains... En se rapprochant de Vicky Amado, la maîtresse du dictateur panaméen, l'agente secrète parviendra pourtant à pousser Noriega à se rendre. Pour Martha, c'est une évidence, être une femme, dans l'espionnage, peut être un atout. Car qui, d'un homme ou d'une femme, est mieux placé pour gagner la confiance d'une source féminine ?

Les Espionnes racontent ► Martha : 14 jours pour débusquer Noriega

Martha et sa mère se parlent tous les soirs au téléphone : "une femme ambitieuse qui, si son mari l'avait laissée faire, aurait fait une grande carrière," dit sa fille. C'est peut-être pour ça que Martha Duncan s'est toujours méfiée des hommes et n'a vécu que pour la traque.

Espionne par patriotisme et goût de l'aventure 
Yola est hôtesse de l'air, polyglotte et passionnée de plongée sous-marine. Approchée par le Mossad, elle se lance dans la mission la plus compliquée qu'une femme, à l'époque, ait menée pour Israël. Pendant trois ans, elle supervise l'exfiltration de 2000 juifs falashas d'Ethiopie. Son secret ? Savoir se faire apprécier de tous, du chef de la police au gouverneur. Yola reste une femme libre, qui n'a voulu appartenir à personne. "Il est capital d'éclairer la place des femmes dans les affaires politiques et internationales," dit-elle aujourd'hui.

Les Espionnes racontent  ► Yola : L'hôtel du Mossad

La liste de Geneviève
A guère plus de 20 ans, Geneviève n'en peut déjà plus de la vie de mère au foyer. Alors son mari la fait entrer à la DST, le contre-espionnage français. Dans les années 1970, elle y occupe ses journées à répertorier les attachés commerciaux soviétiques sur le territoire français - et à repérer, parmi eux, d'éventuels espions. En 1972, elle devient l'une des premières inspectrices de police en France - 16 postes réservés aux femmes sur les 200 à pourvoir ! Mais pour cette jeune mère de deux enfants, pas de promotion ni de mission passionnante en vue...

Les Espionnes racontent  ► Geneviève : la liste russe de la DST 

Reste que l'espionnage, c'est aussi recueillir, éplucher et analyser des données. "Toutes les agentes ne sont pas des officiers de terrain ayant vécu de folles aventures. Beaucoup d’analystes travaillent dans des bureaux et leur travail est capital," souligne Chloé Aeberhardt. Bien avant que l'une des affaires d'espionnage les plus retentissantes de la guerre froide ne vienne assombrir les relations diplomatiques entre la France et l'URSS, Geneviève, elle, avait déjà repéré le colonel Vladimir Vetrov, alias Farewell : "doit être considéré comme un spécialiste du renseignement sur l'électronique", écrivait-elle...

Jonna : "Q" au féminin
En 1989, l’une des taupes de la CIA au sein du KGB est sur le point de se faire démasquer. Jonna Mendez et son mari Tony, spécialistes du service disguise de l'agence américaine, sont alors envoyés à Moscou pour coordonner l’exfiltration du Soviétique et de sa femme. Costumes, bijoux, accessoires et maquillages - tous deux vont superviser l'échange d'identité entre les Russes et leurs doublures, puis leur évasion.

Joanna Mendes se compare elle-même au personnage de Q dans James Bond. Chloé Aeberhardt explique : "Son travail consistait à expliquer aux agents de terrain comment utiliser les gadgets – appareils photo miniatures cachés dans les stylos, masques qui recouvrent le visage et permettent de changer d’identité… Son histoire est plus romanesque qu’un roman, plus cinématographique que le cinéma. La CIA était d’ailleurs aidée par Hollywood, par des maquilleurs qui contribuaient à développer ces gadgets et les astuces pour les utiliser." 

Les Espionnes racontent ► Jonna : Hollywood à la rescousse de la CIA

Ludmila, espionne par amour 
Etudiante à Moscou, Ludmila tombe amoureuse de Vladimir, agent du KGB. Quand il doit partir en Argentine sur la trace d'anciens nazis, elle veut le suivre. En Allemagne de l'Est, elle devient Irma Ackermann, avant de partir pour Buenos Aires. Le jeune couple se retrouve et ouvre un bar, d'où il doit repérer les anciens SS installés en Argentine. Mais tous deux seront trahis, arrêtés et expulsés aux Etats-Unis, où l'on voudrait qu'ils restent et livrent tout ce qu'ils savent sur les méthodes du KGB. En vain. De retour en Russie, soupçonnés de trahison, ils vivront déchus et bannis de Moscou pendant dix ans. Mais Ludmila, dit-elle, ne regrette rien. 

Les Espionnes racontent ► Ludmila : Dans la peau d'une autre pour le KGB

Les espionnes racontent est une bande dessinée et une mini-série, mais aussi un livre, lui aussi  signé Chloé Aeberhardt.

LES ESPIONNES RACONTENT<br />
CIA, Mossad, KGB, par Chloé Aeberhardt<br />
Paru en janvier 2017 chez Robert Lafont.
LES ESPIONNES RACONTENT
CIA, Mossad, KGB, par Chloé Aeberhardt
Paru en janvier 2017 chez Robert Lafont.
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TerriennesLiliane CharrierKarine G. Barzegar
 Mise à jour 24.04.2021 à 10:56
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Annalena Baerbock : une féministe pour prendre la suite d'Angela Merkel en Allemagne ? ,femmes, feminisme,

30 Avril 2021, 02:56am

Publié par hugo

 TERRIENNES
Les femmes politiques
Annalena Baerbock : une féministe pour prendre la suite d'Angela Merkel en Allemagne ?
Annalena Baerbock, le 19 avril 2021 à Berlin. Lors d'une conférence de presse numérique, les Verts allemands ont annoncé qu'ils lançaient leur coprésidente dans la course à la chancellerie.
Annalena Baerbock, le 19 avril 2021 à Berlin. Lors d'une conférence de presse numérique, les Verts allemands ont annoncé qu'ils lançaient leur coprésidente dans la course à la chancellerie.
©Annegret Hilse/Pool via AP
23 AVR 2021
 Mise à jour 23.04.2021 à 17:35 par 
TerriennesLiliane Charrier
Annalena Baerbock, cheffe de file des Verts, les Grünen, pour les législatives du 26 septembre 2021 en Allemagne, sera la seule candidate, et la plus jeune, parmi les trois principales formations politiques. Juriste, pragmatique, ancienne athlète et mère de famille, elle se dit prête à devenir la première chancelière verte. Serait-elle aussi une chancelière féministe ?
"Avec ma candidature, je voudrais faire une offre à l'ensemble de la société", déclare Annalena Baerbock, qui se présente comme la candidate "du renouvellement" pour tenter de remplacer l'actuelle chancelière qui, après seize ans au pouvoir, ne se représentera pas aux législatives du 26 septembre. La course à sa succession d'Angela Merkel est ouverte, avec une seule femme en lice, l'énergique quadragénaire Annalena Baerbock, cheffe de file du parti des Grünen (les Verts).

Coprésidente des Grünen, longtemps cantonnée aux seconds rôles, Annalena Baerbock avait suscité la surprise en décembre 2020 en affichant ses ambitions pour les élections qui verront émerger celle ou celui qui prendra la suite d'Angela Merkel à la tête du pays. Robert Habeck, son partenaire à la tête du parti depuis 2018, faisait alors figure de favori . "Je fais confiance à Robert (Habeck) pour être chancelier, lançait-elle, Mais je me fais aussi confiance pour la chancellerie".  


Plus haut, toujours plus haut
Viser les sommets est une seconde nature pour cette ancienne sportive de haut niveau. Il faut voir Annalena Baerbock sur un trampoline. La jeune femme brune au corps athlétique y effectue de très impressionnants saltos après quelques chandelles. Egalement footballeuse, l'ancienne triple médaille de bronze aux championnats d'Allemagne de trampoline voit des similitudes entre sa discipline de prédilection et  la politique : dans ces deux domaines, "il faut être vraiment courageuse", juge-t-elle dans un documentaire de la chaîne publique NDR (en allemand). "A chaque nouvelle figure qu'on apprend, on ne sait pas si on va atterrir sur la tête ou les pieds".

Annalena Baerbock (2018)
Annalena Baerbock (2018)
©Wikipedia
Après avoir déserté les gymnases en raison de blessures chroniques, la jeune femme qui a grandi dans une ferme de Basse-Saxe, dans le nord-ouest de l'Allemagne, a étudié les sciences politiques et le droit public à l'université de Hambourg, puis le droit international à la London School of Economics and Political Science. Elle envisage d'abord une carrière dans le journalisme, mais sa trajectoire bifurque après un stage auprès d'un député européen des Grünen.

15 ans chez les Verts
Annalena Baerbock prend sa carte du parti en 2005, l'année où les écologistes, partenaires gouvernementaux minoritaires des sociaux-démocrates, quittent le pouvoir. Elle a alors 25 ans, c'est aussi l'année où Angela Merkel entre à la chancellerie, la première femme dans l'histoire allemande. Seize ans plus tard, Annalena Baerbock est depuis près de huit ans députée au Bundestag, élue dans une circonscription du Brandebourg. Avant cela elle a dirigé de 2009 à 2013 la section de cet Etat régional qui entoure Berlin.

Entre télétravail et enseignement à la maison
Annalena Baerbock vit à Potsdam, à la périphérie de Berlin, avec son mari et père de ses deux filles, qui la soutient en tant que "conseiller politique" indépendant. Elle affiche une décontraction qui sied à son étiquette politique, déclinant une panoplie de blousons de cuir de différentes couleurs et circulant à vélo. Alors que le coronavirus afflige la planète et contraint les écoles à fermer en Allemagne, la jeune mère égratigne les décisions gouvernementales et insiste sur la difficulté de concilier en tant que jeune mère télétravail et enseignement à la maison.


Ce n'est que maintenant que je deviens une vraie féministe.

Annalena Baerbock

Ce qui la met hors d'elle ? "Que les femmes et les hommes soient toujours traités et valorisés différemment, même en politique. Ce n'est que maintenant que je deviens une vraie féministe," déclarait-elle en janver 2019 au quotidien allemand Tagesspiegel, peu après sa nomination à la coprésidence du parti. Cheffe des Grünen, elle veut rester une mère présente, autant que faire se peut : "Au moins une fois par la semaine, le dîner en famille est bloqué dans l'agenda. Les anniversaires des enfants sont sacrés et passent avant les réunions de crise."

Le féminisme : dans l'ADN des Grünen
Interrogé sur les raisons qui ont motivé le choix du parti pour Annalena Baerbock, le coprésident Robert Habeck admet que cette décision a "quelque chose à voir avec l'émancipation". Car au même titre que la lutte contre le changement climatique, l'égalité des sexes fait partie de l'ADN des Verts. Dès le départ, le parti s'est affiché en faveur de l'égalité des sexes : de la cofondatrice Petra Kelly à la Feminat, premier exécutif de parti entièrement féminin, en 1984. 

Une femme candidate : un choix stratégique ?
Lors d'un sondage réalisé auprès des lecteurs du bimestriel féministe germanophone Emma à l'automne 2020, 43 % des femmes déclaraient : "Je vote pour les Verts !" Un pourcentage susceptible d'augmenter grâce à la nomination d'une femme candidate.

A l'exception d'Annalena Baerbock, seuls des hommes se présentent aux élections fédérales de septembre pour succéder à Angela Merkel. A la CDU, aucune candidature féminine n'a été sérieusement prise en considération après la démission de la dirigeante Annegret Kramp-Karrenbauer. Et c'est finalement Armin Laschet qui représentera le parti conservateur devant les urnes. Quant aux sociaux-démocrates (SPD), ils n'ont jamais présenté de femme en 150 ans d'existence. "Je comprends les espoirs suscités par la candidature d'Annalena Baerbock., écrit la chroniqueuse féministe conservatrice Jana Hensel sur le site du journal allemand Die Zeit. Après tout, une campagne électorale composée uniquement d'hommes ne rend pas justice à la réalité diverse de ce pays. C'est tout simplement un anachronisme".

Une assurance inspirante
Annalena Baerbock s'affiche volontiers dans la presse, ce que l'on se prive pas de lui reprocher : 


Jana Hensel commente cette gestion de l'image sur le site du journal allemand Die Zeit : "Pour une femme, une telle mise en scène de soi est encore inhabituelle et donc impressionnante... Comme pratiquement aucune autre femme politique, la députée a clairement montré qu'il faudra compter avec elle à l'avenir. Que personne n'arrivera à la dépasser de sitôt. Montrer sa confiance en soi de manière aussi offensive est encore un défi pour les femmes ; elle peut donc être un modèle pour beaucoup. Cela mérite le respect. Car en matière d'égalité des droits, il y a encore beaucoup à faire, notamment en politique. Annalena Baerbock joue le rôle de pionnière à cet égard."

Une politique féministe encore floue
Alors qu'Angela Merkel n'a abordé les questions relatives aux femmes que vers la fin de ses mandats, Annalena Baerbock, qui s'affirme féministe et représente une nouvelle génération de femmes, devra, si elle accède à la chancellerie, adopter une autre approche.

Maintenant qu'elle est officiellement candidate à la chancellerie, quelle va être sa position sur la parité, la protection contre la violence, l'égalité de salaire et des retraites ou le paragraphe 219a (qui vise à abolir l'interdiction de la publicité pour l'avortement) ? Que ferait-elle si elle accédait au sommet de l'Etat dans un monde qui continue d'être dominé par les hommes ? Ferait-elle de la diplomatie féministe ? Instaurerait-elle une justice de genre ? Interrogée sur sa politique en matière de droits et représentation des femmes lors d'une conférence de presse, Annalena Baerbock a plus ou moins éludé la question, témoigne Jana Hensel. 

Le charisme vs l'expertise
Depuis que leur attelage a pris les rênes des Verts en janvier 2018, Robert Habeck est la personnalité médiatique qui charme et qui brille. Brillant orateur, il a été ministre régional du Schleswig-Holstein pendant dix ans, alors que sa partenaire de binôme n'a encore eu aucune responsabilité opérationnelle. Juriste spécialiste de droit international, Annalena Baerbock, elle, est l'experte qui fourbit ses arguments, peaufine ses dossiers, que ce soit sur la sortie du charbon dans sa région du Brandebourg ou sur le financement de l'Otan. Mais sa pugnacité et sa fine connaissance des sujets ont poussé la jeune femme sur le devant de la scène, et lors de la réélection du duo à la tête du parti, en 2019, elle a obtenu un meilleur score que son charismatique partenaire (97,1% contre 90,4%) et même le meilleur résultat jamais enregistré par un dirigeant des Grünen. 

"Annalena, ce sont les racines de notre arbre. Certaines fleurs de Robert se faneraient rapidement sans elle", assure Claudia Roth, vice-présidente du Bundestag, grande figure des Grünen. Plusieurs journaux dont la Süddeutsche Zeitung s'étaient prononcés en faveur de sa candidature. Pour le Spiegel, elle incarne "une femme (...) qui veut et peut beaucoup mais qui devrait se détendre un peu". 

Annalena Baerbock félicite Robert Habeck à l'occasion de son anniversaire au début d'une réunion du conseil d'administration des Grünen à Berlin, en Allemagne, le 2 septembre 2019.<br />
 
Annalena Baerbock félicite Robert Habeck à l'occasion de son anniversaire au début d'une réunion du conseil d'administration des Grünen à Berlin, en Allemagne, le 2 septembre 2019.
 
©AP Photo/Markus Schreiber
Formation longtemps turbulente, puis en proie à des dissenssions internes entre pragmatiques (Realos) et anti-libéraux (Fundis), les Grünen sont largement entrés dans le rang et prennent de plus en plus d'espace au centre du terrain politique. Preuve de leur popularité auprès d'une population préoccupée par les enjeux climatiques, leur nombre d'adhérents a bondi de plus de 50% entre 2016 et 2019.

A la différence des conservateurs, qui se déchirent ouvertement pour la succession d'Angela Merkel, les Grünen ont joué la carte de l'harmonie au moment de désigner leur représentant, s'efforçant de gommer toute éventuelle rivalité. Les codirigeants, tous deux Realos, ont affiché leur entente jusqu'à dévoiler de concert le nom de la candidate, Annalena Baerbock. 

"Sortie de nulle part"
Le manque d'expérience reste sans doute son talon d'Achille. De fait, le parcours d'Annalena Baerbock ne fait état d'aucune expérience ministérielle, ne serait-ce qu'au niveau régional. Les critiques s'en saisissent pour laisser entendre qu'elle n'est pas rompue aux arcanes de la négociation, indispensable dans une coalition gouvernementale. L'ancien ministre des Affaires étrangères (1998-2005), Joschka Fischer, figure tutélaire des Verts allemands, le concède : "pour moi, elle est quasiment sortie de nulle part". Interrogée par le quotidien allemand Bild, elle répond : "Trois ans en tant que chef de parti, députée et mère de jeunes enfants, ça durcit pas mal." C'est sans doute vrai, mais est-ce suffisant ?

Pour Jana Hensel, du Zeit, la jeune candidate des Grünen manque peut-être de bouteille, mais ni de compétences, ni de personnalité : "Lorsque Annalena Baerbock a pris la tête de Verts, il y a plus de trois ans, je ne la connaissais pas. Mais son discours de candidature m'avait impressionnée, parce qu'elle exprimait clairement qu'elle ne serait pas simplement la femme aux côtés de Robert Habeck. Elle a tenu sa parole. Elle a tenu bon à ses côtés, forte de son expertise en matière d'écologie et de société, mais aussi de politique étrangère, et ses apparitions publiques ont marqué les esprits. Ce n'était pas une tâche facile."

Objectif chancellerie ?
L'enjeu est de taille pour les Verts que tous les sondages désignent comme probable deuxième force politique à l'issue du scrutin, derrière l'Union chrétienne-démocrate (CDU) d'Angela Merkel, mais devant le SPD. Crédités de 20% à 23% des intentions de vote, ils talonnent la CDU (27% à 28%) en pleine dégringolade et déboussolée par le prochain retrait de la chancelière de la vie politique. 


Plébiscités lors des élections européennes il y a deux ans où ils ont dépassé les 20% de voix, les Verts participent à l'heure actuelle à 11 des 16 gouvernements régionaux et viennent d'être réélus haut la main à la tête de l'un des Etats régionaux les plus prospères, le Bade-Wurtemberg, coeur de l'industrie automobile.

Jusqu'ici les Verts n'ont été que partenaires minoritaires dans une coalition gouvernementale dirigée par le social-démocrate Gerhard Schröder, entre 1998 et 2005. 

Une alliance entre les Verts et les conservateurs à l'issue du scrutin législatif n'est plus un scénario irréaliste. Comme la chancelière sortante Angela Merkel, le candidat de la CDU Armin Laschet s'est empressé de féliciter Annalena Baerbock en précisant que son parti se réjouissait "d'une campagne électorale juste.

Une autre formule possible, inédite au niveau fédéral, pourrait voir les Verts s'allier au SPD et au parti libéral FDP. Les dirigeants sociaux-démocrates ont dès la désignation d'Annalena Baerbock tendu leur main aux écologistes dans l'optique de former une future "alliance gouvernementale progressiste".

Annalena Baerbock a pour mission de mener le parti écologiste vers une participation décisive au gouvernement. "Même si le changement climatique ne sera probablement pas au premier plan, les chances d'un très bon résultat électoral pour les Verts sont bonnes", juge Uwe Jun, politoloque à l'université de Trèves, qui juge "perceptible une envie de changement en politique" parmi les électeurs.

A lire aussi dans Terriennes 

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TerriennesLiliane Charrier
 Mise à jour 23.04.2021 à 17:35
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https://information.tv5monde.com/terriennes/annalena-baerbock-une-feministe-pour-prendre-la-suite-d-angela-merkel-en-allemagne-405384

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Mettre fin au diktat de la dépigmentation , femmes,

30 Avril 2021, 02:52am

Publié par hugo

 Monde \ Afrique
Mettre fin au diktat de la dépigmentation
dépigmentation
Tristement d’actualité, la dépigmentation continue encore de faire des ravages à l’épiderme de ses adeptes. Des voix s’élèvent sur la toile pour sensibiliser les populations. La dépigmentation volontaire n’est pas nouvelle et a toujours existé dans de nombreux continents. En Afrique subsaharienne, plusieurs personnes s’adonnent à cette pratique et pour en parler les appellations varient d’un pays à un autre. Témoignages de Fatima D. qui a utilisé pendant plusieurs années une crème éclaircissante et de Maimouna Anne Sako qui lutte sur les réseaux sociaux contre la dépigmentation. 

D’un point de vue historique, la colonisation est une cause de la dépigmentation. Pour Ronald Hall, chercheur : « certain·es “colonisé·es” ont cherché à imiter la couleur de peau ou les caractéristiques physiques des colons, dans le but d’améliorer leur condition de vie et leur image. Cette image a été intériorisée par les différentes populations africaines, et ce, pendant des siècles. ».

Aujourd’hui, de nombreux facteurs contribuent encore à la dépigmentation, c’est le cas de la publicité, des médias, de la télévision, du colorisme (1), de l’influence des proches, du manque de confiance, de l’effet de mode, de la séduction etc.

S’éclaircir ou se blanchir la peau n’est pas seulement le fait des femmes, les hommes aussi se dépigmentent en utilisant des savons, des crèmes, du lait, des gélules ou en s’injectant des produits, à base d’hydroquinone ou d’autres produits chimiques. Destruction de la mélanine, hypertension, diabète, brûlure, infection et cancer de la peau, sont quelques résultantes néfastes de la dépigmentation volontaire sur la peau.

A partir de 2015 et pendant trois ans, Fatima D, 23 ans, Camerounaise, s’est dépigmentée la peau. Elle n’était pas réellement consciente des dangers et s’est mise à utiliser une crème éclaircissante.

Quand vous avez commencé à vous plaire dans votre nouvelle peau, que disait votre entourage ? Comment les membres de votre famille ont-elles/ils réagi ?

Mon entourage m’enviait tellement puisqu’en ce temps la peau claire était et continue d’être prisée. Mon père n’acceptait pas mais les autres membres de ma famille n’avaient pas de problème au contraire, elles/ils m’encourageaient.

Mais avant d’utiliser cette crème éclaircissante, avez-vous entendu parler du fait que les hommes étaient attirés par les filles à la peau claire ?

Non, c’est lorsque j’ai commencé à utiliser cette crème que j’ai découvert que les hommes aimaient cette couleur de peau. Et le nombre de prétendants s’est mis à augmenter.

Quel a été le déclic pour que vous arrêtiez cette crème ?

Cela fait plus de deux ans maintenant que j’ai arrêté les produits éclaircissants. J’ai eu ce déclic lorsque j’ai été invitée à un anniversaire. A table, nous étions trois filles y compris moi, les deux autres avaient le teint que j’avais avant de me dépigmenter. Leur teint noir était bien entretenu. A cause de la dépigmentation, mon teint n’était pas uniformisé. Je me suis dit intérieurement : “si je savais comment entretenir ma peau noire, je pourrais redevenir comme avant”. C’est ainsi que ma conscience a commencé à travailler.

Lorsque vous avez pris la décision d’arrêter les crèmes éclaircissantes, avez-vous eu des critiques ? Quel était le regard des autres sur le fait de retrouver votre couleur de peau noire ?

Oui, j’ai eu énormément de critiques. Ce n’était pas facile. On me posait des questions : “pourquoi est-ce que tu as tant changé ?”. Certaines personnes ou des prétendants m’ont même proposé de l’argent pour réutiliser des crèmes éclaircissantes afin que ma peau redevienne claire. Par moment, j’ai été tentée de recommencer, mais je suis restée ferme. Même si, aujourd’hui, mon teint n’est pas totalement uniforme à cause de la dépigmentation, je me plais telle que je suis. Je cherche des produits pour arranger ma peau noire.

Comment avez-vous découvert la page Facebook Ébène sans complexe, qui lutte contre ce fléau en utilisant les réseaux sociaux ? Que vous apporte-t-elle ?

La page Ébène sans complexe m’a conseillé le lait que j’utilise en ce moment. Mon rêve, c’est de pouvoir publier une photo de moi avec ma peau noire, sur la page Ebène sans complexe comme d’autres femmes le font, lorsque les tâches liées à la dépigmentation disparaîtront totalement.

 

Bon nombre d’associations et de personnes luttent contre la dépigmentation volontaire et prône la beauté de la peau noire. C’est le cas de Maimouna Anne Sako, fondatrice de la marque de cosmétiques Melania Black Skin, community manager et diplômée en esthétique. Elle utilise les réseaux sociaux pour lutter contre la dépigmentation.

Qu’est-ce qui vous a amenée à créer une page Facebook intitulée Ebène sans complexe ?

Un jour une de mes copines me dit : « tu es noire  » alors je lui ai répondu : « je suis ébène sans complexe ». C’est ainsi que l’idée m’est venue de créer la page afin d’attirer l’attention de tou·tes ces femmes et ces hommes qui sont complexé·es par leur couleur de peau et qui se tournent vers la dépigmentation volontaire.

Depuis combien d’années tenez-vous cette page ? Quel est son but ?

La page Facebook Ébène sans complexe existe depuis 2007 et compte plus de 27800 abonnées. Elle a pour but d’une part de sensibiliser sur les drames de la dépigmentation et d’autre part de valoriser la peau noire tout en donnant des conseils pour l’entretenir.

Avez-vous des témoignages des personnes qui se sont dépigmentées et qui ont finalement arrêté cette pratique grâce à la page ?

Oui, je reçois plusieurs témoignages sur ce sujet mais également sur les conseils de soins pour entretenir la peau noire. Véritable problème sociétal et médical, la dépigmentation volontaire persiste encore, malgré les lois qui ont été votées dans plusieurs pays africains tels que la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Sénégal.

Alexandra Koffi 50-50 Magazine

Photo de Une : Maimouna Anne Sako.

1. Colorisme : discrimination liée à la couleur de peau et issue du racisme.

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Philosopher pour plus d’égalité , articles femmes hommes ,egalite ,

30 Avril 2021, 02:47am

Publié par hugo

 27 AVRIL 2021
France \ Société
Philosopher pour plus d’égalité
Philosopher pour plus d'égalité
Marie-Jeanne Trouchaud a été enseignante, puis formatrice en relations humaines. Elle est co-fondatrice avec Fréderic Lenoir de l’association Savoir Etre et Vivre Ensemble (SÈVE). Elle propose ses solutions pour une meilleure communication et écoute entre les êtres humains. 

Marie-Jeanne Trouchaud est une drôle de septuagénaire à qui on aimerait bien voler le secret de sa bonne humeur. Après une belle et longue expérience auprès de l’association SOS Amitié en tant qu’écoutante puis comme responsable fédérale de formation, la pétillante Marie-Jeanne continue d’aider les autres en tentant d’apporter des solutions dans la bienveillance et la communication, ses leitmotivs récurrents, qu’elle exprime également à travers ses différents ouvrages (1).

« En écoutant la détresse des gens à SOS Amitié, j’essayais de les aider à continuer à aimer la vie. » explique-t-elle en se remémorant toutes ces années passées suspendue au bout du fil. Et son amour pour la vie, elle le doit à son histoire familiale. Née en Algérie, elle a été marquée par les guerres. D’abord par la deuxième guerre mondiale car deux de ses oncles y ont péri puis par celle d’Algérie.

Depuis 30 ans, Marie-Jeanne Trouchaud anime des stages de formation en relations humaines, supervise des équipes, s’emploie à appliquer la parentalité positive, faire comprendre la manifestation de nos émotions, donner confiance en soi, gérer l’agressivité et à prôner la non-violence par la communication. En 2016, elle rencontre Frédéric Lenoir lors d’un salon du livre. A ses côtés et en compagnie de Martine Roussel-Adam et de Liliana Lindenberg, l’association SEVE est créée.

Des ateliers philo sont alors mis en place dans les établissements scolaires, allant de l’école maternelle au collège. Dans certaines villes, l’Éducation Nationale ou la Mairie ont souhaité que des animatrices et des animateurs interviennent dans des classes de quartiers prioritaires et dans le milieu carcéral. « La philo, c’est sortir de ses certitudes et de ses croyances » explique Marie-Jeanne Trouchaud . Ces interventions ont donc pour objectif de faire réfléchir les enfants afin qu’ils et elles pensent par eux et elles-mêmes. Le ou l’animatrice ne donne pas son opinion mais reformule leurs réponses et demande à ce qu’elles soient argumentées. Personne n’est jugé sur ses dires et chacun·e s’exprime dans le respect et l’écoute réciproques. Les enfants découvrent ainsi par eux-elles mêmes l’intérêt d’élargir leur champ de pensée et la fierté de se sentir des interlocutrices/interlocuteurs valables inclus·es dans une communauté de recherche, ce qui les met à l’abri des dogmatismes, du consumérisme, des fake-news, etc…

Et lorsque la question de l’égalité entre les filles et les garçons est posée, les philosophes en herbe se rendent bien vite compte que les thèmes abordés sont bien plus profonds qu’un simple questionnement sur la différence des sexes. La tolérance, le respect, les violences, la différence, l’amour, le harcèlement, la sexualité ou tout simplement la construction d’un préjugé y sont décortiqués toutes et tous ensemble.

Philosopher, un petit pas vers l’égalité et un grand pas vers l’Humanité… Réveillez donc l’Hypatie (2) qui sommeille en vous !

Laurence Dionigi 50-50 Magazine

1. Marie-Jeanne Trouchaud, La communication sans violence Ed. Eyrolles 2015 – La violence à l’école, Ed. Eyrolles 2016 – Donnez confiance à votre enfant Ed. Plon 2019

2. Hypatie d’Alexandrie (355 – 415 après JC) : philosophe, astronome, mathématicienne grecque assassinée par l’évêque Cyrille d’Alexandrie. Elle fut considérée comme martyre de la philosophie puis comme symbole de l’opposition contre l’Église catholique pendant le siècle des Lumières et enfin comme icône féministe au XXème siècle.

Lire aussi : La puissance des femmes, une autre histoire de la philosophie partie 1 et partie 2. 

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Nom de code : AMNIARIX, ou l’incroyable destin de Jeannie Rousseau , femmes, feminisme,

30 Avril 2021, 02:47am

Publié par hugo

 26 AVRIL 2021
Matrimoine
Nom de code : AMNIARIX, ou l’incroyable destin de Jeannie Rousseau
AMNIARIX Jeannie Rousseau
Jeannie Yvonne Ghislaine Rousseau est née à Saint-Brieuc, le 1er avril 1919. La vie ne semblait pas réserver de destin particulier à cette jeune fille brillante et douée pour les langues, sortie première de sa promotion à Sciences Po en 1940. Le destin de Jeannie Rousseau bascule au début de la Seconde Guerre mondiale, lorsqu’elle s’engage comme espionne au service de la Résistance, sous le pseudonyme AMNIARIX, changeant de façon irrémédiable le cours de sa vie, mais aussi de l’Histoire.  

A comme Alliance

C’est le nom du réseau résistant pour lequel Jeannie Yvonne Ghislaine Rousseau travaille comme espionne à partir de 1942, après avoir retrouvé par hasard un ancien camarade de classe, Georges Lamarque, fondateur du sous-réseau résistant des Druides. Ce n’est cependant pas la première expérience dans le renseignement de la jeune femme, qui commence sa carrière d’espionne dès 1940, alors que les Allemands commencent à occuper le territoire français. Elle vit à cette époque en Bretagne, et sert, à la demande du maire de Dinard, d’interprète entre les services locaux et les soldats allemands, ravis de pouvoir échanger dans leur langue avec une belle jeune fille. Consciente du risque qu’elle prend, elle glane ainsi des informations sur les stratégies allemandes, qu’elle transmet aux Britanniques. En 1941, quand les soupçons qui pèsent sur elle se multiplient, elle est arrêtée et interrogée à Rennes, mais relâchée pour manque de preuves. Elle doit cependant s’engager à quitter la région.

M comme Madeleine 

Elle s’installe alors à Paris, où elle devient interprète au service d’hommes d’affaires français, sous le faux nom de Madeleine Chauffour. Elle traduit et négocie pour eux des contrats avec des officiers allemands, qui contiennent des informations dont elle réalise vite l’importance. Jouant de ses charmes et de son apparente innocence, elle discute avec les Allemands, les flatte, pour obtenir des informations : l’un d’eux va jusqu’à lui montrer les plans des missiles V1 et V2, développés par l’Allemagne nazie. Sa mémoire exceptionnelle lui permet de retenir une quantité phénoménale d’informations qu’elle transmet, sous le pseudonyme d’AMNIARIX, à Georges Lamarque, retranscrivant mot pour mot l’ensemble des documents et des conversations dont elle a connaissance. Ce sont ces informations qui permettent au gouvernement britannique d’organiser, en 1943, le bombardement du centre de recherche de Peenemünde, lors de l’Opération Hydra, qui retarde de plusieurs mois les attaques de l’armée allemande.

N comme Normandie

Alors que le jour du débarquement des Alliés approche, le gouvernement britannique décide d’exfiltrer Jeannie Rousseau afin de la mettre en sécurité et de recueillir ses informations. Lorsqu’elle s’apprête à quitter la côte normande et à traverser la Manche avec cinq autres agents, le groupe est arrêté par les Allemands. Seul un agent parvient à s’échapper. Bien que Jeannie Rousseau tente de faire croire aux Allemands qu’elle n’a aucun lien avec la Résistance et qu’elle rejoint simplement l’Angleterre pour vendre des bas de nylon au marché noir, elle est tout de même emprisonnée, avant d’être envoyée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück.

I comme insoumise

À son arrivée au camp, Jeannie Rousseau a une idée de génie, qui lui sauve sans doute la vie. Alors que son dossier, au nom de Madeleine Chauffour, et ses réels papiers d’identité sont envoyés séparément, elle se présente à l’administration comme Jeannie Rousseau. Elle entre ainsi au camp comme prisonnière, mais non comme coupable d’espionnage, une confusion que les officiers allemands n’éclairciront jamais. Même emprisonnée, Jeannie Rousseau continue de résister. Transférée au camp de travail de Torgau, elle refuse de soutenir l’industrie allemande et rappelle au chef de camp, dans un allemand parfait, que selon la Convention de Genève, les prisonnier·es de guerre n’ont pas à fabriquer des armes. Identifiée comme fauteuse de trouble, elle est envoyée à Königsberg, où elle poursuit son combat pour la liberté en établissant une liste des prisonnières, qu’elle fait passer hors du camp afin d’alerter la Résistance. Dans l’attente des secours, Jeannie Rousseau vit l’enfer à Königsberg, à tel point qu’elle s’échappe en montant dans un fourgon… pour retourner à Ravensbrück.

A comme agonie

Sa ruse est vite découverte, et Jeannie Rousseau est transférée dans une prison interne à Ravensbrück, où les mauvais traitements manquent de peu de lui coûter la vie. Nourrie de demi-rations, forcée de faire les travaux les plus pénibles, elle s’affaiblit et contracte la tuberculose. En 1945, elle pense échapper à l’horreur à l’arrivée d’une délégation de la Croix rouge, munie d’une liste de femmes à secourir sur laquelle figure son nom, mais les officiers allemands l’empêchent de répondre à leur appel. Ce n’est que plusieurs jours plus tard que la Croix rouge suédoise lui porte secours et la libère, alors qu’elle est aux portes de la mort. À l’hôpital, elle est dans un état critique, mais la résistante prouve encore une fois sa force. Elle survit, et rencontre un autre rescapé des camps, Henri de Clarens, qui devient son mari et le père de ses deux enfants.

R comme réservée

Après la guerre, Jeannie Rousseau, désormais Jeannie de Clarens, tente de faire une croix sur son passé. Elle reçoit de nombreuses récompenses, notamment la Légion d’honneur en 1955, dont elle devient grand officier en 2009, et l’Agency Seal Medal de la CIA en 1993, ainsi que la médaille de la Résistance française et la croix de guerre. Elle parle cependant très peu de ce qu’elle a vécu, même à ses enfants, et refuse la plupart des interviews que les journalistes lui proposent. Ce n’est qu’en 1998 qu’elle accepte, de raconter l’intégralité de son histoire, dans un unique entretien avec des journalistes du Washington Post.

I comme interprète

Jeannie de Clarens fait le choix de continuer à servir la communauté internationale, en s’engageant comme interprète pour les Nations unies et auprès d’autres organisations internationales. Elle ne travaille cependant plus qu’en anglais, refusant de laisser un seul mot d’allemand sortir de sa bouche, après les souffrances que lui a infligées l’Allemagne nazie.

X comme dans exploit ou réflexe ?

Son silence et sa discrétion, qui la caractérisent jusqu’à sa mort en 2017, à 98 ans, ne sont pas seulement liés à une volonté d’oublier l’horreur de la guerre, mais aussi à une grande modestie. Elle refuse, jusqu’à la fin de sa vie, d’être érigée en héroïne et de reconnaître les exploits qu’elle a accomplis. Dans son témoignage publié par le Washington Post, elle déclare : « Pourquoi l’ai-je fait ? Je l’ai juste fait, c’est tout. Comment pouvais-je ne pas le faire ? L’héroïsme n’est pas une question de choix, mais de réflexe. »

Lou Cercy 50-50 Magazine

Lire aussi : Bertha von Suttner : Une vie pour la paix

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“Mon corps m’appartient” : un tour d’horizon du droit à l’autonomie corporelle , femmes, feminisme, sexes

30 Avril 2021, 01:39am

Publié par hugo

 
Média
Matrimoine
23 AVRIL 2021
Monde
“Mon corps m’appartient” : un tour d’horizon du droit à l’autonomie corporelle
Mon corps m'appartient
Le rapport “Mon corps m’appartient : revendiquer le droit à l’autonomie et à l’autodétermination” du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) propose un focus sur les droits sexuels et reproductifs des femmes dans le monde. Défini comme un “droit inaliénable de choisir”, le droit à l’autonomie corporelle est une conquête constante face au pouvoir patriarcal. Pour les activistes féministes, il est grand temps que les lois changent et que les hommes se positionnent en alliés.  

Le 14 avril, le rapport “Mon corps m’appartient : revendiquer le droit à l’autonomie et à l’autodétermination” a été publié par l’UNFPA. En France, l’UNFPA a sollicité Equipop, ONG œuvrant pour les droits et la santé des femmes et filles, pour organiser la conférence de lancement du rapport. Étaient présent·es Diene Keita, directrice exécutive adjointe de l’UNFPA et sous-secrétaire générale des Nations unies, des représentant·es du ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères, des parlementaires français·es, ainsi que des jeunes activistes.

Qu’est-ce que le droit à l’autonomie et à l’autodétermination corporelle ? D’après le rapport, “le droit à disposer de notre corps signifie que nous avons le pouvoir et les moyens de faire des choix, sans avoir à craindre des violences ou l’intervention d’autrui pour décider à notre place”. C’est un “droit inaliénable de choisir” d’avoir des relations sexuelles, d’avoir un enfant ou encore d’aller chez le médecin.

Ce rapport s’inscrit dans un contexte hautement symbolique pour la France qui participe au Forum Génération Egalité et qui est championne de la coalition d’action d’action “Autonomie corporelle et droits et santé sexuels et reproductifs”. En parallèle, les revendications pour le droit à l’avortement n’ont jamais été aussi vives, que ce soit en Pologne, en Argentine, mais aussi en France. En proposant un état de la population avec une multitude de données et un langage simple, accessible à tou·tes, ce rapport est un précieux document de plaidoyer. 

Quelques chiffres sur l’autonomie corporelle des femmes dans le monde

Le rapport rappelle tout d’abord que les femmes ne disposent en moyenne que de 75% des droits légaux des hommes à travers le monde et qu’elles n’ont souvent pas le pouvoir de contester ces inégalités de droits. C’est notamment cela qui permet au pouvoir patriarcal de contrôler les choix sexuels et reproductifs des femmes et des filles, ce qui, in fine, affecte l’ensemble de la vie des femmes. En effet, le rapport explique : “toute femme qui n’a pas la capacité de décider si, quand ou combien d’enfants elle veut avoir, de choisir de rester à l’école au lieu de se marier à un jeune âge, ou qui accepte la violence domestique comme seul destin, a peu de chances de gagner en autonomie sur le marché du travail ou de s’imposer dans les processus décisionnaires au sein de la communauté et au-delà. Elle perd ainsi ses droits non seulement dans un domaine, mais dans plusieurs, voire tous les domaines de sa vie”.

55%, c’est le pourcentage de femmes qui peuvent prendre leurs propres décisions en matière d’autonomie corporelle, c’est-à-dire en matière de santé, de moyens de contraception et de relations sexuelles. Dans certains pays, ce pourcentage tombe à 1 femme sur 10. C’est le cas, par exemple, au Mali, au Niger et au Sénégal.


Après une analyse plus précise des données, il apparaît que les femmes sont relativement plus libres en matière de contraception qu’en matière de relations sexuelles. Toutefois, même si l’utilisation de moyens de contraception a doublé depuis 1994, le rapport rappelle que “217 millions de femmes dans le monde éprouvent toujours des besoins insatisfaits en matière de contraception”. On observe également une baisse concernant les taux de mutilations génitales féminines et de mineures mariées mais le rapport appelle à la vigilance : “4 millions de filles étaient encore soumises à des mutilations génitales féminines en 2020 et environ 12 millions étaient mariées alors qu’elles étaient enfants, un nombre qui est d’ailleurs probablement sous-estimé”.

Les obstacles au pouvoir décisionnel des femmes

Le pouvoir décisionnel des femmes est, tout d’abord, lié à la connaissance de leur corps et de leurs droits en matière de sexualité et de santé. Toutefois, cette dimension individuelle de l’autonomie corporelle est influencée par des facteurs sociaux et économiques. Le niveau d’éducation d’une femme est par exemple un facteur clé : si le niveau d’éducation est faible, l’autonomie corporelle l’est aussi. Il faut aussi compter avec les relations interpersonnelles au sein des communautés. Le plus souvent, ce sont les hommes qui détiennent le pouvoir de décision. La santé sexuelle et reproductive n’échappe pas à la règle, d’autant plus que la sexualité des femmes est vue comme une menace. Les femmes se retrouvent donc avec la responsabilité de la santé reproductive mais sans pouvoir prendre de décisions à ce sujet.


En ce qui concerne les obstacles au pouvoir décisionnel des femmes, le rapport met aussi l’accent sur l’impact des lois sur l’autonomie corporelle. Les lois peuvent être des outils de contrôle du corps des femmes et des minorités : “en limitant l’accès des adolescents aux services de santé sexuelle et reproductive et aux informations en la matière ou en interdisant les relations homosexuelles, par exemple” précise le rapport.


Le rapport propose un zoom 

“Un jour, une femme a été amenée d’un village isolé ; elle était dans un état très grave… Elle avait essayé de provoquer elle‑même un avortement”, se souvient Nuriye Ortayli, gynécologue-obstétricienne en Turquie dans les années 1980 et 1990. “Aussi bien parmi les jeunes internes que parmi le personnel plus expérimenté, nous avons fait ce qui était en notre pouvoir pendant bien plus de 12 heures… près de 24 heures. On a tenté tout ce qu’on a pu. Mais elle est décédée.”

Pourtant, le témoignage de la Dre Ortayli ne concerne pas un avortement illégal pratiqué clandestinement. À l’époque, des services d’avortement médicalisé étaient légalement disponibles en Turquie. “Si elle avait pu venir à l’hôpital… on aurait pu procéder sous anesthésie locale”, explique‑t‑elle. Au lieu de cela, ce qu’elle raconte témoigne d’une réalité à laquelle se heurtent des femmes et des prestataires de santé du monde entier : des avortements sont pratiqués, souvent, même dans les endroits où cette procédure fait l’objet d’importantes restrictions ou est illégale, et les femmes sont régulièrement empêchées de bénéficier d’un avortement médicalisé, même dans les régions où cette pratique est légalement autorisée.

Par conséquent, quelle que soit la législation, ce sont souvent d’autres facteurs (ressources économiques, distance des services ou normes sociales, par exemple) qui déterminent si une femme pourra accéder à un avortement médicalisé. La Dre Ortayli a été témoin de ce phénomène à la fois en tant que docteure en Turquie et en tant que responsable de programme et conseillère en santé reproductive auprès d’organisations actives dans le domaine de la santé, parmi lesquelles l’UNFPA, en Europe de l’Est, au Moyen‑Orient, en Afrique de l’Ouest et dans les Amériques. “On voit ça sans arrêt. Peu importe le statut légal de l’avortement dans un pays, les femmes prennent cette décision et trouvent un moyen de la mettre à exécution”, confie‑t‑elle. “Les plus aisées parviennent en quelque sorte à rester en meilleure santé que les autres, parce qu’elles ont des opportunités, de l’argent, un réseau. Celles qui sont économiquement, socialement ou culturellement défavorisées souffrent davantage.”


A ce sujet, lors de la conférence de présentation du rapport, la jeune activiste béninoise Irmine Ayihounton a soulevé un paradoxe. L’Afrique de l’Ouest est la région du monde qui connait le plus grand taux de mortalité lié à l’avortement. Au Bénin, 15% des avortements clandestins sont la cause de décès. Dans cette région, beaucoup d’actions ont été menées ces dernières années en matière de soins post-avortement pour limiter les décès, mais paradoxalement, l’avortement y reste illégal.

Quelles solutions ?

Diene Keita, directrice exécutive adjointe de l’UNFPA et sous-secrétaire générale des Nations unies, a présenté le rapport en rappelant que les inégalités de genre sont un obstacle majeur à l’autonomie corporelle. C’est pourquoi elle voit l’éducation des hommes et la promotion d’une masculinité positive comme une étape nécessaire pour garantir aux femmes le droit à l’autodétermination. Comment faire ? Il s’agit de montrer aux hommes les désavantages de la domination masculine. A ce sujet, le rapport de l’UNFPA mentionne une étude menée en Europe par l’Organisation mondiale de la santé : “l’égalité des sexes est bénéfique à la santé des hommes : elle entraîne une diminution des taux de mortalité, divise par deux les risques de dépression et réduit de 40% les risques de mort violente”. En effet, l’égalité de genre augmente le taux de rapports sexuels protégés, ce qui diminue le taux de maladies sexuellement transmissibles. Elle fait aussi baisser les taux de suicide en rendant socialement acceptable le fait de prendre soin de soi pour les hommes.

Diene Keita insiste également sur le rôle essentiel des gouvernements dans la transformation des structures sociales, politiques et économiques qui perpétuent et consolident les normes sexistes. A cet égard, Frédéric Depétris, représentant du ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères, rappelle que “l’intime est un marqueur crucial de la liberté politique” et que c’est l’objectif de la diplomatie féministe menée par la France que de faire des droits de santé sexuelle et reproductive une priorité politique. Il indique que la France soutient la société civile de façon croissante sur cette question, notamment les organisations et mouvements féministes avec un fonds de 120 millions d’euros sur trois ans pour les ONG féministes des pays du Sud. 

Cependant, le représentant du ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères a été questionné par des activistes sur la cohérence des politiques publiques dites “féministes” menées par le gouvernement français : quid de la pérennisation de ces fonds ? Quid des modalités d’attribution ? Comment concilier une diplomatie féministe tout en dépensant des milliards pour la défense et l’armée ? Enfin, l’activiste béninoise Irmine Ayihounton a rappelé l’importance pour les gouvernements, notamment la France, d’assurer la protection des femmes défenseures des droits face aux menaces et aux discriminations.

Le rapport de l’UNFPA ouvre ainsi la voie pour la concrétisation de l’objectif d’égalité des sexes, formulé en 2015 dans le Programme de développement durable de l’ONU à l’horizon 2030. Et heureusement car il ne reste plus qu’une décennie pour agir…

Cependant, à propos de la prostitution, il est étonnant de lire dans ce rapport plusieurs référence au “travail du sexe” et de voir que l’UNFPA soutien des organisations comme le réseau OPSI, “qui plaide la cause des professionnel·les du sexe”. De plus, concernant la GPA, le rapport met en avant la parole d’une mère porteuse : “je voulais saisir cette occasion pour aider mes semblables à réaliser leur souhait: avoir un bébé” !

Maud Charpentier, 50-50 Magazine

Article actualisé le 26 avril 2021.

Voir plus : “Mon corps m’appartient” – Échanges autour du rapport UNFPA 2021


https://www.50-50magazine.fr/2021/04/23/mon-corps-mappartient-un-tour-dhorizon-du-droit-a-lautonomie-corporelle/

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Josiane Szymanski, une carrière de journaliste reporter d’images , femmes, femnisme , emploi

30 Avril 2021, 01:37am

Publié par hugo

 22 AVRIL 2021
DOSSIERS
Josiane Szymanski, une carrière de journaliste reporter d’images 

Si les femmes ont très vite trouvé du travail dans les journaux de mode et les journaux dits « féminins » dont elles avaient toutefois très rarement la direction ou la rédaction en chef, elles ont mis plus de temps à accéder à tous les niveaux de responsabilité dans le reste de la presse écrite ou télévisuelle. En particulier dans les professions liées aux savoirs techniques comme le son et l’image qui sont longtemps restées un pré carré masculin. Aujourd’hui il leur est très difficile de consolider les acquis obtenus dans les années1980/90. La concurrence est féroce et les missions, souvent à la pige ou en CDD, sont de plus en plus mal rémunérées. En 1984, Josiane Szymanski devient l’une des premières femmes journaliste reporter d’Images (JRI). En 1985, elles ne sont que 7 femmes à avoir une carte de presse sur un total de 251 JRI.

Issue d’un milieu rural, Josiane Szymanski est « montée » du sud de la France pour travailler à Paris. À cette époque on trouvait facilement du travail et elle a été embauchée dans une bibliothèque. Par ailleurs elle était déjà féministe et proche du Mouvement de libération des femmes (MLF) qui était très actif depuis le début des années 1970. En 1978-1979, alors qu’elle travaillait à la BPI de Beaubourg, elle rencontre une membre du groupe des Griffones et décide de faire un stage de vidéo. La vidéo était une technique nouvelle à l’époque, beaucoup plus légère et économique que le cinéma, elle permettait de documenter sur des sujets auxquels le cinéma ne s’intéressait pas. Carole Roussopoulos et Delphine Seyrig s’en sont d’ailleurs emparées à l’époque et proposaient des formations aux femmes afin qu’elles puissent témoigner elles-mêmes de leurs vécus et de leurs problèmes, toujours minimisés ou ignorés si ce n’est déformés par les regards masculins.

De rencontres stimulantes en rencontres militantes, elle participe, avec les Griffones, à la réalisation (en super 8) d’un court métrage documentaire assez unique sur le mouvement des femmes : ” Mais qu’est-ce qu’elles font ? ” Encouragée par les copines et grâce à leur bouche à oreille, elle découvre le CERIS qui organisait des stages de reconversion professionnelle.  Après sélection, le stage formait des opératrices/opérateurs de prises de vues en deux ans. Les stagiaires étaient rémunéré·es par le ministère du travail et le stage était gratuit, alors qu’actuellement la plupart des écoles sont payantes et donc peu accessibles aux moins fortuné·es.

Sur une trentaine de stagiaires, elles étaient 4 ou 5 femmes proches du MLF et 4 ou 5 autres très dynamiques, donc environ un tiers de femmes. Il leur fallait se battre un peu pour que les hommes ne fassent pas toute la technique ! Elles ont d’ailleurs fait deux films de fin d’étude entre femmes. Nombre des participant·es à ce stage sont entré·es dans le métier dans les années qui ont suivi.


Ce stage va changer la vie de Josiane Szymanski ! Quand elle en sort en 1984, elle est encouragée dans son nouveau projet professionnel par les affiches diffusées par le ministère des Droits des Femmes à la tête duquel œuvrait Yvette Roudy. Cette affiche affirmait ” A l’école, orientons-nous dans toutes directions “, poussant les filles et femmes à se sentir légitimes partout. Presque 40 ans plus tard, ce combat n’est pas encore gagné.

À l’époque il y avait une vague féministe encore assez forte. Quand elle se présente à la rédaction de France 3, l’homme qui la reçoit la regarde d’un air perplexe en lui disant:  ” c’est vrai qu’on n’a pas de femmes, je vous prends à l’essai ! “. Les écoles de journalisme ne formaient pas encore de JRI, cela lui permet donc d’entrer dans le journalisme avec une formation d’opératrice de prises de vues (OPV) plus axée cinéma. Elle fait son entrée dans une filière où globalement il y a une bonne ambiance, même si elle y rencontre parfois des machos. En 1985, elles ne sont encore que 7 femmes JRI à avoir une carte de presse sur 251. Très motivée Josiane s’accroche pour conquérir sa place.

Quand elle débute à France 3, son chef l’envoie faire des remplacements en province. Il y avait énormément de travail, on pouvait être envoyé un peu partout sur tous types de sujets. Cela lui a plu et elle s’est adaptée. Contrairement à nombre de ses collègues, elle aimait beaucoup la politique. Les journalistes rédacteurs avec lesquels elle travaillait aimaient avoir des JRI intéressé·es parce qu’elles/ils faisaient. Cela a fait qu’elle a beaucoup travaillé car ce sujet n’était pas très prisé. Josiane a réussi aussi parce qu’elle a accepté des missions que certains ne trouvaient pas assez prestigieuses, ou peu enviables. Etant en reconversion professionnelle, elle trouvait extraordinaire de pouvoir faire ce métier !

En 1987, lors de la création de La 5 privée, un collègue pigiste la pousse à postuler et elle décroche un CDI qui la protégera ensuite de certains collègues sexistes qui cultivaient l’entre soi, en particulier pour faire la noce après le boulot et qui préféraient partir en reportage à l’étranger avec des hommes. Certains allant jusqu’à conseiller aux femmes de « partir entre elles ».

Les rapports professionnels étaient beaucoup plus durs sur La 5 car il y avait une rivalité terrible entre les gens, et sur le terrain elle a parfois eu affaire à une certaine brutalité, il y en avait qui vivaient mal de voir arriver une petite nana au milieu des meutes de journalistes présentes sur les événements. Elle a dû parfois affronter des coups de coudes et se défendre face à des photographes qui la bousculaient pour être devant en l’empêchant de travailler.

Le matériel était très lourd, les caméras pesaient environ douze kilos, et Josiane a toujours fait très attention de bien gérer son corps pour éviter les douleurs et tous les problèmes dûs aux manipulations. Elle avait beaucoup de collègues qui pensaient que ce n’était pas un métier pour une femme, elle mettait donc un point d’honneur à ne pas se plaindre et à être endurante. Les hommes faisaient davantage les choses en force, quitte à se plaindre ensuite…

Au début de sa carrière, un jour Josiane Szymanski va filmer dans une usine humide qui semblait digne du 19e siècle, les ouvrières avaient les jambes gonflées, les cheveux blancs… et le patron lui demande : «  Mais ce n’est pas trop dur votre métier pour une femme ? », alors que ces femmes, comme tant d’autres dans l’agriculture, l’industrie, le nettoyage ou le service à la personne, avaient des conditions de travail bien pires qu’elle !


Josiane Szymanski en reportage pendant la guerre du golfe

Le problème n’est pas tant que les femmes rentrent dans un métier encore considéré comme « masculin », c’est qu’elles y restent et qu’elles y progressent, qu’elles accèdent aux postes d’encadrement, qui sont très convoités ! Josiane Szymanski a vu parfois ses supérieures se faire dénigrer parce que femmes. Si elle a parfois trouvé le métier dur, elle pense que c’est bien pire pour les jeunes aujourd’hui, en particulier les femmes. Il y a beaucoup de turn over et c’est très difficile de vieillir dans ces métiers sans avoir un CDI. On demande aux journalistes d’être polyvalent·es et de faire le son, le texte, l’image pour des salaires de misère. Précarisé·es, mal traité·es et sous payé·es, il est difficile de tenir dans la durée, surtout avec une famille.  Pourtant Josiane Szymanski a pu constater l’intérêt de travailler avec des équipes d’origines mixtes, souvent perçues comme moins agressives et plus proches d’elles par les personnes interviewées. Lors d’un reportage en Irlande du nord, elle a aussi expérimenté le machisme ordinaire de la police locale à laquelle elle avait remis une cassette vierge après un reportage dans une prison avec une collègue. Lors de son visionnement au poste de police, lorsque la journaliste s’est mise à se plaindre que Josiane Szymanski n’ait rien filmé, ils n’ont pas douté un instant que ce soit dû à l’incompétence technique de ces deux femmes… Face à des hommes ils auraient probablement éventé la supercherie… Les photographes avaient toujours une pellicule vierge dans le poche en cas de tentative de saisie inopinée d’un travail en cours.

A la suite de la fermeture de la 5, la JRI retourne sur France 3 comme pigiste pendant quelques années. Lasse de passer ses nuits dans les hôtels, elle fera même un passage sur Canal + où les salaires sont plus attractifs mais où le travail de plateau avec le showbizz ne l’intéresse guère. Elle finira enfin par obtenir un CDI sur France 3 où elle travaillera jusqu’à la fin de sa carrière.

Alors que la course à la rentabilité gangrène aussi le journalisme et que les équipes sont réduites par mesure d’économie, elle va se battre avec la CGT pour faire sécuriser l’emploi d’un maximum de pigistes. En 1997, en tant que déléguée du personnel, le premier dossier qu’elle aura à traiter concernera un cas de harcèlement sexuel qu’une collègue, fille d’un militante du MLF ne pouvait laisser passer ! Après la loi Génisson sur l’égalité professionnelle, elle constatera que les interruptions pour grossesse éloignaient les mères des CDI qui s’obtenaient à l’ancienneté, et les excluaient des primes de grossesse. Toutes ces questions l’ont amenée à renouer avec un féminisme collectif.

Josiane Szymanski reste convaincue que pour faire un travail de qualité, il faut un·e rédactrice/rédacteur qui circule sans caméra, se documente, échange avec ses collègues sur les sujets, quelqu’un qui regarde aussi autour de lui/elle, dans la rue à côté et qui vient dire au JRI : « il se passe quelque chose là-bas !». Avoir le temps de travailler un sujet en profondeur, c’est le plus important. Mais c’est un combat perdu, le profit et la superficialité semblent bien l’avoir emporté  !

En 2009 et 2010, la JRI proposera, pour le 8 mars, des magazines sur le féminisme qui l’amèneront ensuite à réaliser, non sans difficultés, un documentaire sur les 40 ans du mouvement de libération des femmes (MLF), réalisé grâce à l’appui de sa rédactrice en chef, une des rares femmes à ce poste à cette époque. Comme elle avait transféré en vidéo les films des années 1970 et 1980, le producteur a trouvé qu’elle avait des archives extraordinaires qu’il fallait exploiter, mais un des coproducteurs refusera de mettre MLF dans le titre parce qu’il trouvait que c’était «répulsif.»  Le film n’apparaît pas quand on fait une recherche sur le MLF. Même aujourd’hui le terme MLF n’est pas très bien connoté et les sujets touchants au féminisme restent souvent traités superficiellement par les chaînes mainstream.

Pourtant c’est bien le mouvement féministe qui a donné confiance en elle à Josiane Szymanski qui se disait qu’elle avait de la chance de faire ce travail et qu’elle représentait les femmes et ne devait donc pas se montrer faible. Cela lui donnait de la force et de la légitimité… Cette légitimité qui est encore si souvent refusée ou contestée aux femmes, c’est bien par l’action collective que les femmes l’obtiennent. Si toutes les femmes s’unissaient pour faire reconnaître leur légitimité et leurs droits, rien ne leur résisterait !

Marie-Hélène Le Ny 50-50 Magazine

Photo de Une : Josiane Szymanski au centre portant sa caméra.

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