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Le blog de hugo,

Et Claudette Colvin, 15 ans, refusa de céder sa place

30 Avril 2023, 22:00pm

Publié par hugo

 Et Claudette Colvin, 15 ans, refusa de céder sa place
Claudette Colvin :<em> "Je suis fière de ce que j'ai fait. Je pense que cela a été une étincelle et qu'elle a pris. " </em>
Claudette Colvin : "Je suis fière de ce que j'ai fait. Je pense que cela a été une étincelle et qu'elle a pris. "
Capture écran reportage Great big story
03 AOÛ 2019
 Mise à jour 29.04.2023 à 08:02 par 
TerriennesFrantz Vaillant
En 1955, dans l'Alabama, Claudette Colvin refuse de céder sa place à une femme blanche dans l'autobus. Scandale. Procès. L'affaire se passe neuf mois avant celle de Rosa Parks, figure emblématique de la lutte contre la ségrégation aux États-Unis. Mais l'histoire a longtemps oublié le nom de Claudette Colvin. En 2023, une exposition lui est consacrée au Centre Pompidou, à Paris. 
"Les jeunes pensent que Rosa Parks a mis fin à la ségrégation le jour où elle s'est assise dans le bus, mais ce n'était pas ça du tout", déclarait Claudette Colvin au New York Times en novembre 2009. Elle sait de quoi elle parle.

► Aller sur le site de l'installation consacrée à Claudette Colvin au Centre Pompidou, à Paris, jusqu'au 29 mai 2023.
 


Celle qui n'était pas Rosa Parks
Toute sa vie, cette infirmière du Bronx, aujourd'hui à la retraite, a payé cette journée du 2 mars 1955. Ce jour-là, l'adolescente de 15 ans prend place dans le bus comme chaque après-midi après les cours. Elle rentre chez elle, à King Hill, le quartier pauvre de Montgomery.

En Alabama, où elle vit, la ségrégation régit la vie publique. "Elle était partout confiera-t-elle à la BBC. Les églises, les autobus et les écoles étaient séparés et on ne pouvait même pas aller dans les mêmes restaurants. Je me souviens qu'à Pâques, je devais acheter une paire de chaussures noires vernies, qu'on ne pouvait se procurer que dans les magasins blancs. Ma mère a tracé le contour de mes pieds sur un sac en papier brun afin de trouver la taille la plus proche, parce que nous n’avions pas le droit d’aller les essayer. "

"J'avais vraiment peur"
Le bus, cet après-midi là,  n'est pas complet. Près de Claudette, trois sièges sont libres. A un arrêt monte une femme blanche. Le chauffeur demande alors à Claudette Colvin de lui céder son siège. La gamine refuse. Scandale. Protestations. Le chauffeur immobilise le bus et va chercher la police. Deux agents montent. L'un des deux la frappe tandis que l'autre lui passe les menottes.
 
Coupure de presse annonçant le verdit du procès contre Claudette Colvin
Coupure de presse annonçant le verdit du procès contre Claudette Colvin
Direction le commissariat. Claudette Colvin est terrorisée, d'autant que sur le chemin, les policiers blaguent sur la taille de son soutien-gorge.  Que va-t-il se passer derrière les murs ? "J'avais vraiment peur, parce que vous ne saviez tout simplement pas ce que les blancs pouvaient faire, à l'époque," se souvient-elle.

Elle est arrêtée pour plusieurs chefs d'accusation, à commencer par violation des lois municipales sur la ségrégation. La voici en prison pour quelques heures, complètement terrorisée.  Mais ses parents paient la caution. Elle sort.
 
Laisse Rosa Parks être la bonne. Sa peau est plus claire que la tienne et les blancs l’aiment bien.

La mère de Claudette Colvin à sa fille
Son arrestation fait grand bruit. The Alabama Journal titre "Une jeune fille noire coupable de violation de ségrégation". Martin Luther King,  pasteur principal de l'église baptiste de l’avenue Dexter, est prévenu. Claudette Colvin  garde un souvenir très ému de ce pasteur pas comme les autres : "C’était un garçon ordinaire, mais quand il ouvrait la bouche, il était comme Charlton Heston jouant Moïse."

Martin Luther King  prend fait et cause pour son affaire, ainsi qu'une certaine Rosa Parks, membre du Mouvement pour les droits civiques (American Civil Rights Movement). Elle travaille comme secrétaire à Montgomery pour la section du National Association for the Advancement of Colored People (NAACP). 
Plus de 100 lettres de soutien parviennent à Claudette Colvin, qui plaide non coupable. Ses parents ne peuvent payer les frais d'avocat. Qu'à cela ne tienne. Une collecte est mise en place par des leaders noirs et Rosa Parks y participe activement.  L'adolescente écope d'une simple mise sous probation.
Claudette Colvin vs Rosa Parks
Mais les figures politiques du mouvement noir s'interrogent. Cette arrestation a déchainé les passions. Il y a peut être moyen de récupérer cette publicité afin de servir la cause... Et si Claudette Colvin devenait le symbole de leur lutte contre les lois sur la ségrégation ?

Tant pis si ses parents, très modestes, ne voient pas ce projet d'un très bon oeil. En fait, ils détestent cette agitation autour de leur fille. Les études avant tout.
L'Association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP) décide finalement de ne pas utiliser Claudette Colvin comme figure de proue de leur mouvement.
 
Rosa Parks en 1955
Rosa Parks en 1955
USIA / National Archives and Records Administration Records of the U.S. Information
Trois raisons sont avancées. Claudette Colvin  est tombée enceinte d'un homme marié et il serait hasardeux d'être représenté  par une mère célibataire dans la bataille juridique qui s'annonce. De plus, son jeune âge pose problème, ainsi que son charisme trop fluctuant. Enfin, contre toute attente, les dirigeants  du NAACP estiment qu'elle est "trop noire".

Trop noire ? Claudette Colvin encaisse le coup. "Ma mère m'a dit de rester silencieuse sur ce que j'ai fait. Elle m’a dit : " Laisse Rosa être la bonne. Les blancs ne vont pas déranger Rosa. Sa peau est plus claire que la tienne et ils l’aiment bien", se souviendra-t-elle.

Un temps, une autre adolescente, Mary Louise Smith, fut également envisagée pour représenter le mouvement.  Elle aussi, dans le même bus, a connu la même mésaventure que Claudette Colvin, quelques semaines après elle. Mais son profil est pareillement écarté. La rumeur affirme que son père boit. Impossible. Il  faut une personne solide, aux parents irréprochables. Les leaders antiségrégationnistes savent que toute la vie de la personne choisie sera fouillée, disséquée.

On connaît la suite. Le 1er décembre 1955, à Montgomery, toujours dans l'Alabama, Rosa Parks refuse de céder sa place à un passager blanc. Elle écope d'une amende de 15 dollars. La militante fait appel de ce jugement. Martin Luther King, avec Ralph Abernathy et Edgar Nixon, orchestre aussitôt un immense mouvement de protestation. Il appelle au boycott contre la compagnie de bus et, le 13 novembre 1956, c'est la victoire : la Cour suprême des États-Unis casse les lois ségrégationnistes dans les bus. Elles sont déclarées anticonstitutionnelles.

Claudette Colvin et Rosa Parks se sont pourtant connues. Cette dernière l'a même invitée plusieurs fois à passer la nuit chez elle. Elle dira aux journalistes de The New York Times l'avoir trouvée "réservée mais gentille".
Claudette Colvin, résidente du Bronx, le jeudi 5 février 2009 à New York.
Claudette Colvin, résidente du Bronx, le jeudi 5 février 2009 à New York.
(AP Photo / Julie Jacobson)
"Rosa Parks était la bonne personne"
Pour Claudette Colvin, la vie a continué. Son fils, baptisé Raymond, est né en mars 1956. Il avait la peau claire. On a aussitôt accusé sa mère d'avoir eu un enfant avec un blanc. Claudette Colvin a toujours caché l'identité du père. Comme sa situation de fille-mère dérangeait, elle s'est résolue à
Phillip Hoose, lauréat du Prix national du livre 2009 de la littérature jeunesse pour <em>Claudette Colvin : deux fois pour la justice</em>, et Claudette Colvin le 18 novembre 2009 à New York.
Phillip Hoose, lauréat du Prix national du livre 2009 de la littérature jeunesse pour Claudette Colvin : deux fois pour la justice, et Claudette Colvin le 18 novembre 2009 à New York.
(Photo AP / Tina Fineberg)
quitter l'Alabama pour s'installer à New York. Trente-cinq ans durant, elle a été aide-soignante dans un foyer à Manhattan. Claudette Colvin ne s'est jamais mariée. Son fils Raymond, drogué et alcoolique, est mort chez elle. Il avait 37 ans. Son deuxième fils, lui, est comptable à Atlanta.

Elle n'a jamais revendiqué quoi que ce soit pendant ces journées historiques qui ont changé les Etats-Unis. Après plusieurs décennies d'un mutisme choisi, un jour, un écrivain, Phillip Hoose, a retrouvé sa trace. Il lui aura fallu quatre longues années de discussions pour la convaincre de parler. L'écrivain a raconté son histoire dans un ouvrage intitulé Claudette Colvin : Twice Toward Justice, paru en 2009, et qui a remporté plusieurs grandes récompenses.

Voilà comment les américains ont découvert, stupéfaits, l'histoire de cette infirmière pas comme les autres.

Claudette Colvin est aujourd'hui âgé de 83 ans. Elle assure n'avoir gardé aucune amertume de son passé et de la célébrité mondiale qu'a connu Rosa Parks. "Je sais dans mon cœur qu'elle était la bonne personne", a-t-elle confiée aux journalistes de The New York Times.
 

A lire aussi dans Terriennes :

► Quand Barack Obama rendait hommage à Rosa Parks
► "Hidden figures", femmes occultées de la conquête spatiale aux Etats-Unis
► Destins de femmes : Mary Surratt, première condamnée à mort aux Etats-Unis
​► Destins de femmes : Marie-Christine, veuve de Léo Ferré
► Destins de femmes : Johanna van Gogh, à l'ombre des deux frères


https://information.tv5monde.com/terriennes/et-claudette-colvin-15-ans-refusa-de-ceder-sa-place-300846

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Kirsten Neuschäfer, première vainqueure d'un tour de monde à la voile en solitaire

30 Avril 2023, 21:56pm

Publié par hugo

 Kirsten Neuschäfer, première vainqueure d'un tour de monde à la voile en solitaire
Kirsten Neuschäfer, fin août 2022, juste avant le départ de la Golden Globe Race qu'elle remportera sept mois plus tard (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=XSwyg5YUiBg&t=21s">capture d'écran</a>).
Kirsten Neuschäfer, fin août 2022, juste avant le départ de la Golden Globe Race qu'elle remportera sept mois plus tard (capture d'écran).
28 AVR 2023
 Mise à jour 29.04.2023 à 10:13 par 
Terriennes
 
avec AFP
La nouvelle héroïne de la course au large s'appelle Kirsten Neuschäfer. La navigatrice Sud-Africaine est entrée dans l'histoire ce soir du 27 avril 2023, devenant la première femme à remporter une course autour du monde en solitaire, à son arrivée aux Sables-d’Olonne, en Vendée, en tête de la Golden Globe Race.

La navigatrice de 40 ans s’est imposée après 235 jours en mer d'une folle épopée où les 16 concurrents au départ devaient partir de Vendée avant de passer par les trois caps de référence – Bonne Espérance, Leeuwin, Horn – sans escale, assistance et moyen de navigation moderne.


Sourire aux lèvres et pieds nus, Kirsten Neuschäfer a franchi ce 27 avril 2023 à 21h43 la ligne d'arrivée située au large des Sables-d'Olonne, à bord de son petit monocoque de 1988 baptisé Minnehaha, qui a résisté à de nombreuses tempêtes pendant huit mois.

"C'est incroyable, c'est beaucoup après tous ces mois en solitaire", a-t-elle déclaré en mettant le pied à terre devant une foule de Sablais. "Je suis très émue et honorée qu'il y ait autant de gens ici et je ne pense pas pouvoir revivre une telle chose une deuxième fois dans ma vie", a-t-elle ajouté avant d'enlacer sa mère sous les applaudissements.


Parmi la foule, le navigateur Jean-Luc Van Den Heede, 77 ans, vainqueur de la précédente édition de cette aventure vintage, en 2019, venu saluer une "grande championne" de la course au large. "C'est une course qui est très dure, il n'y a pas de communication, on est pas poussé. Il faut avoir un mental très fort et je pense que Kirsten fait partie des gens qui ont un mental très fort", a-t-il dit.


Aventurière -
Le 15 février, Neuschäfer était déjà devenue la première femme de l'histoire à passer le Cap Horn en tête d’un tour du monde, quelques semaines seulement après avoir secouru son concurrent finlandais Tapio Lethinen, naufragé au large de l’Afrique du Sud.

Originaire de Port-Elizabeth, elle est navigatrice professionnelle depuis 2006, spécialisée dans le transfert et la livraison de voiliers par la mer. Avant le départ de la course en septembre, son premier voyage autour du monde, elle avait raconté à l'AFP l'autre "grand périple" de sa vie à 22 ans seulement: un parcours à vélo de l'Europe en direction de son pays d'origine, soit 15 000 km à parcourir. "Quand cela devient vraiment dur, je lis un roman comme ça je peux m’échapper de mes propres pensées et me mettre dans celles de quelqu’un d’autre", avait-elle dit.

C'est juste génial. C'est bon pour la voile et pour les femmes.

Catherine Chabaud, navigatrice

Seule femme à avoir pris le départ, elle a été rejointe sur la ligne d’arrivée par la navigatrice et députée européenne Catherine Chabaud, première femme à boucler un tour du monde à la voile en solitaire, lors du Vendée Globe 1996-1997. "C'est juste génial. C'est bon pour la voile et pour les femmes", s'est-elle réjouie. "Les femmes qui naviguent ne se regardent pas comme des femmes qui naviguent, mais juste comme des individus passionnés. C'est un beau message", a-t-elle commenté.


Avec sa victoire, Neuschäfer est entrée au panthéon des grandes navigatrices hauturières de l'histoire moderne aux côtés de Florence Arthaud, Isabelle Autissier ou encore Ellen MacArthur.

Sur les 16 partants de la Golden Globe Race, seuls deux autres marins étaient encore en lice jeudi pour terminer la course. L’Indien Abhilash Tomy devait arriver en Vendée dans les prochains jours tandis que l’Autrichien Michael Guggenberger se trouvait encore au large des Canaries.

Le Britannique Simon Curwen a passé la ligne à la mi-journée mais ne pouvait plus prétendre à la victoire finale car il a effectué pendant son périple une escale dans un port chilien pour réparation.

Revivez le départ de la Golden Globe Race, en septembre 2022, avec TV5MONDE : 


Lors de la première édition de cette course, entre 1968 et 1969, le Britannique Robin Knox-Johnston a été le seul des 9 marins alignés au départ à boucler son voyage, devenant du même coup le premier homme à avoir navigué seul autour du monde sans escale. Une épopée qui avait ensuite inspiré la création d'un certain Vendée Globe.
 
(Re)lire aussi dans Terriennes : 


https://information.tv5monde.com/terriennes/kirsten-neuschafer-premiere-vainqueure-d-un-tour-de-monde-la-voile-en-solitaire-496823

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Le Japon post-#metoo découvre les vertus des coordinatrices d'intimité

30 Avril 2023, 21:53pm

Publié par hugo

 Le Japon post-#metoo découvre les vertus des coordinatrices d'intimité
Détail de l'affiche de <em>L'empire des sens</em>, film de Nagisa Ōshima sorti en 1976
Détail de l'affiche de L'empire des sens, film de Nagisa Ōshima sorti en 1976
Détail de l'affiche de <em>L'empire des sens</em>, film de Nagisa Ōshima sorti en 1976Détail de l'affiche du film de François Truffaut <em>Baisers Volés (</em>1968)
27 AVR 2023
 Mise à jour 27.04.2023 à 12:31 par 
TerriennesLiliane Charrier
 
avec AFP
Désamorcer les crises, prévenir les abus et mettre tout le monde à l'aise pour tourner les scènes intimes sur les plateaux de cinéma : telles sont les missions des coordinatrices d'intimité. Essentiellement féminine, cette nouvelle profession née dans l'Amérique post-#metoo perce maintenant au Japon.
Assise à côté du réalisateur, Momoko Nishiyama observe sur l'écran de contrôle un acteur déshabillant sa partenaire. Elle est l'une des deux premières "coordinatrices d'intimité" du Japon, où l'industrie audiovisuelle a été secouée ces derniers mois par des accusations d'agressions sexuelles. Engagée sur des tournages pour le cinéma ou la télévision, comme pour cette série aux nombreuses scènes "intimes" filmée près de Tokyo, elle veille au bien-être des acteurs en servant d'interface avec le réalisateur, qu'elle aide à mettre en images sa vision.

Aux Etats-Unis, tout le monde sait ce qu'est une coordinatrice d'intimité, mais au Japon je dois expliquer ce que je fais.

Momoko Nishiyama, coordinatrice d'intimité

Cette profession, de plus en plus courante sur les tournages hollywoodiens depuis le mouvement #MeToo né de l'affaire Harvey Weinstein en 2017, est encore balbutiante dans l'archipel nippon. "Aux Etats-Unis, tout le monde sait ce qu'est une coordinatrice d'intimité, mais au Japon je dois expliquer ce que je fais, que je ne suis pas l'ennemie du réalisateur", dit Momoko Nishiyama, 43 ans.

Anticipation, facilitation
Son travail commence avant le tournage par une lecture attentive du script : "Je dis au réalisateur 'il est écrit que A enlace B, est-ce que ça va plus loin ? Jusqu'où se déshabillent-ils ?'" Elle s'entretient ensuite avec chaque acteur et actrice pour lui demander ses limites : "C'est une scène sans soutien-gorge. Si on ne voit pas votre poitrine êtes-vous d'accord ?"


"Grâce à sa présence, les échanges étaient plus faciles", confie Asuka Kawazu, 23 ans, l'une des actrices de la série. Sans coordinatrice d'intimité, "il arrive qu'on s'aperçoive le jour du tournage qu'on va plus loin que ce qui était prévu". La présence de Momoko Nishiyama "nous fait sentir qu'on prend soin de nous", ajoute l'actrice.
Une relation plus égalitaire 
Le réalisateur, Kenji Kuwashima, apprécie lui que la coordinatrice "défende les deux parties. Finalement tout le monde veut la même chose : fabriquer la meilleure production possible... Jusqu'à maintenant il y avait une relation assez verticale où le réalisateur disait : 'fais ça', mais elle devient plus égalitaire et les deux côtés en sortent grandis".

Pour tourner des scènes réalistes tout en protégeant les acteurs, Momoko Nishiyama ne se déplace jamais sans une panoplie de pads en silicone pour éviter les contacts entre les parties intimes et de maebari, des cache-sexes fabriqués sur mesure.
Elle sort d'un sac des culottes et strings de toutes formes dans plusieurs nuances de beige, pour s'adapter au mieux à chaque situation. "J'en ai toujours une trentaine avec moi", rit-elle.
Adapter, mais pas trop
Momoko Nishiyama a suivi en 2020 des cours en ligne organisés aux Etats-Unis pour se former à son nouveau métier, qu'elle adapte aux tournages japonais. "Je fais aussi attention de ne pas trop l'adapter, car cela empêcherait les nécessaires changements à la façon de faire japonaise", précise-t-elle.

Elles veillent à la sécurité et à la dignité des acteurs et de l'équipe pour créer une atmosphère dissuadant le harcèlement.

Miwa Nishikawa, réalisatrice

Ces derniers mois, les médias nippons ont relayé les accusations d'agressions sexuelles de plusieurs actrices, provoquant une réaction indignée d'un collectif de cinéastes, dont Koji Fukada, prix du jury au Festival du cinéma de Cannes 2016 pour Harmonium et Hirokazu Kore-eda, présent à Cannes en 2023 avec Monster et lauréat de la Palme d'or en 2018 pour Une affaire de famille. 

"Nous avons été choqués" par les faits rapportés et l'absence de réaction de l'industrie, explique Miwa Nishikawa, membre de ce collectif, qui a dénoncé les "actes impardonnables" des cinéastes abusant de leur statut pour commettre des violences. "Nous avons pensé que cela permettrait de faciliter la prise de parole", ajoute la réalisatrice de Under the Open Sky, estimant que le harcèlement "a toujours été là, sous la surface". 

"Malheureusement, contrairement à l'Occident ou la Corée du Sud où le mouvement #metoo a pris, l'industrie japonaise n'a pas su évoluer", signe, selon Miwa Nishikawa, "d'un manque de solidarité entre les travailleurs de l'industrie et d'une structure qui les unirait et les protégerait".
Effet dissuasif
<p>Miwa Nishikawa en 2016, au Festival du film de Rome où elle présentait son film <em>Nagai Iiwake</em>.</p>
Miwa Nishikawa en 2016, au Festival du film de Rome où elle présentait son film Nagai Iiwake.

©AP Photo/Domenico Stinellis
Le collectif appelle à la mise en place de formations et de règles à l'échelle de l'industrie pour encadrer castings et tournages, et à la généralisation des coordinatrices d'intimité. Selon Miwa Nishikawa, il serait cependant naïf de croire que la seule présence de ces coordinatrices va faire cesser le harcèlement sexuel. Mais leur présence montre à tous "qu'elles veillent à la sécurité et à la dignité des acteurs et de l'équipe", ce qui peut créer "une atmosphère dissuadant le harcèlement", pense la cinéaste.

Momoko Nishiyama avoue se sentir parfois "un peu impuissante" face à l'inertie de l'industrie pour combattre le harcèlement : "Il y a des gens qui veulent changer les choses, et de plus en plus de plateaux de tournage à l'atmosphère saine, mais je me dis qu'il faut que ça change davantage".

(Re)lire aussi dans Terriennes : 

► Théâtre : "l'emprise ne laisse aucune preuve"
► Anoushka, réalisatrice, promeut la "pornographie féministe"
► La pornographie s’expose à Bruxelles, grandeurs et misères d’une mécanique de l’intime
► En Espagne, Amarna Miller s’affiche actrice, réalisatrice porno, et féministe
► Retour de bâton ou "backlash" : une dynamique mondiale contre les droits des femmes ?

TerriennesLiliane Charrier
 
avec AFP
 Mise à jour 27.04.2023 à 12:31
SUR LE MÊME THÈME


https://information.tv5monde.com/terriennes/le-japon-post-metoo-decouvre-les-vertus-des-coordinatrices-d-intimite-489641

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Le gouvernement iranien traque les femmes sans voile en public

30 Avril 2023, 21:51pm

Publié par hugo

 Le gouvernement iranien traque les femmes sans voile en public
Fidèles iraniennes en prière lors de l'Aïd al-Fitr à la fin du Ramadan, à Téhéran, en Iran, le 22 avril 2023. 
Fidèles iraniennes en prière lors de l'Aïd al-Fitr à la fin du Ramadan, à Téhéran, en Iran, le 22 avril 2023. 
©AP Photo/Vahid Salemi
26 AVR 2023
 Mise à jour 26.04.2023 à 12:40 par 
TerriennesLiliane Charrier
 
avec AFP
La police de Téhéran porte plainte contre deux célèbres actrices apparues en public sans le voile obligatoire. Mi-avril, elle annonçait qu'elle allait utiliser des caméras pour sanctionnercelles qui persistent à ne plus porter le voile, ou à le porter de manière "incorrecte".

"La police de Téhéran a annoncé le dépôt d'une plainte en justice contre Katayoun Riahi et Pantea Bahram pour avoir commis le crime de retirer le hijab en public et avoir publié des photos sur internet", annonçait le 23 avril l'agence de presse iranienne Tasnim. Les deux actrices ont été primées à plusieurs reprises au festival Fajr de Téhéran, la plus importante manifestation cinématographique du pays.


Le crime de Pantea Bahram ? Poser tête nue lors d'une projection dans un cinéma de la capitale. Ses photos étaient devenues virales sur les réseaux sociaux.


En représailles, le directeur du cinéma a été licencié en raison des scandales suscités lors de la projection du dernier épisode de Lion’s Skin, déclarait le 20 avril un directeur adjoint de l’Organisation du cinéma d’Iran, affiliée au ministère de la culture, cité par l’agence de presse iranienne Mehr. 

Le 16 avril, les autorités annonçaient que plus de 150 établissements commerciaux avaient été fermés en 24 heures parce que leur propriétaire ou gérant ne respectait pas l'obligation du port du voile par des employées.


L'actrice de 61 ans Katayoun Riahi a publié de nombreuses photos similaires, prises dans les lieux publics à Téhéran. Elle était la première actrice iranienne à oser publier de telles images sur les réseaux sociaux pour soutenir le mouvement de contestation. Elle a été libérée fin novembre sous caution après plus d'une semaine de détention pour avoir publié des photos sans voile sur sa page Instagram en solidarité avec les manifestants. 


Comme Katayoun Riahi et Pantea Bahram, plusieurs artistes et célébrités ont exprimé leur soutien au mouvement de protestation mené par les femmes sous le slogan "femme, vie, liberté" depuis la mort en détention de Mahsa Amini, arrêtée pour infraction au strict code vestimentaire. Accusés par les autorités de la République islamique d’"attiser les flammes des émeutes", certains contestataires ont été convoqués par les autorités, voire interdits d'exercer leur métier, et maintenant arrêtés. 

Le ministre de la Culture a notamment interdit aux femmes artistes de retirer leur hijab en public. Or ces derniers mois, de plus en plus de femmes sont apparues sans voile dans la rue. 

Une jeune femme se promène sans le foulard islamique obligatoire dans le centre de Téhéran, le 23 décembre 2022. 
Une jeune femme se promène sans le foulard islamique obligatoire dans le centre de Téhéran, le 23 décembre 2022. 
©AP Photo/Vahid Salemi
Tant et si bien que la police iranienne a mis en place des caméras intelligentes pour sanctionner les femmes qui persistent à ne plus porter le voile – ou à le porter de manière incorrecte en public – comme elle le fait déjà pour traquer les infractions au code de la route. Selon une vidéo publiée sur le site d’information officiel Tasnim, les femmes filmées sans hijab à l’intérieur d’un véhicule recevront des avertissements par SMS de la part de la police et que leur véhicule pourrait être confisqué si elles ignorent ces avertissements. Difficile de dire, pourtant, combien de ces caméras ont été installées pour l'heure.

Lire la vidéo
De nombreuses femmes iraniennes ne semblent pas découragées par cette surveillance accrue. Une série de vidéos jugées crédibles circulent sur les réseaux sociaux, qui montrent des femmes non voilées en public, dans différentes régions du pays, au mépris de la loi sur le hijab.

Une vidéo reçue par l'opposante en exil Masih Alinejad et diffusée sur sa chaîne Telegram montre une femme tête nue, marchant dans une rue la nuit et levant les bras dans un geste de défi alors qu’elle et d’autres femmes chantent "Radan, va-t’en", une référence au chef de la police iranienne, et "mort au dictateur", une référence au guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei.

(Re)lire aussi dans Terriennes : 

► L'espace vital des femmes vu par les photographes iraniennes
► Intoxications dans les écoles en Iran : qui veut nuire à l'éducation des filles ?
► Le voile, symbole d'un "apartheid de genre" en Iran, selon Chowra Makaremi
► "La valise rouge" : la cause des Iraniennes dans un court métrage
► Iran : la police des moeurs abolie, une diversion ?

TerriennesLiliane Charrier
 
avec AFP
 Mise à jour 26.04.2023 à 12:40
SUR LE MÊME THÈME


https://information.tv5monde.com/terriennes/le-gouvernement-iranien-traque-les-femmes-sans-voile-en-public-496460

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Femmes pasteures, pionnières avant l'heure

30 Avril 2023, 21:47pm

Publié par hugo

 Femmes pasteures, pionnières avant l'heure
<p>Détail de la couverture de <em>Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures </em>par Lauriane Savoy paru le 08/03/2023<a href="https://www.lalibrairie.com/livres/auteurs/lauriane-savoy,0-12024752.html" style="font-family: Roboto, sans-serif; font-size: 1.7em; font-weight: 700;"> </a>chez Labor et Fides.</p>
Détail de la couverture de Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures par Lauriane Savoy paru le 08/03/2023 chez Labor et Fides.

22 AVR 2023
 Mise à jour 22.04.2023 à 08:31 par 
TerriennesLiliane Charrier
Alors que le débat autour des femmes prêtres dans l'Eglise catholique, régulièrement, déchaîne les passions, l'Eglise protestante, elle, a depuis longtemps franchi le cap. Aujourd'hui, près de la moitié des pasteurs sont des pasteures. Entretien avec Lauriane Savoy, historienne, théologienne et autrice du livre Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures.
"Non, on ne peut pas dire que le protestantisme est un bastion du patriarcat ! " s'exclame Lauriane Savoy en riant. Aujourd’hui, en France, comme en Suisse, environ 40 % des pasteurs sont des femmes. Dans les Eglises protestantes d'Allemagne ou de Suède, les femmes représentent déjà plus de 50 % des pasteurs. "En quelques décennies, on est passé d'aucune femme pasteure à une quasi parité. Certes, elles ont eu un statut un peu différent, subalterne, jusqu'à la fin des années 1960, mais depuis, elles ont vraiment le même statut que les hommes," explique Lauriane Savoy. 
L'Eglise protestante : un paradis égalitaire ?
Cela fait maintenant une soixantaine d’années qu'une femme peut être pasteure au même titre qu'un homme. Avec le recul, constate l'historienne, l'expérience s'est banalisée et la plupart des paroisses ont déjà eu une ou plusieurs pasteures.
 
Il y a toujours des paroisses qui sont réticentes à engager une jeune femme pasteure parce qu'elles craignent qu'elle ait des enfants et s'absente plusieurs mois.

Lauriane Savoy, historienne, théologienne
Cela ne veut pas pour autant dire que les Eglises protestantes soient un paradis de l'égalitarisme, souligne-t-elle, elles ne se distinguent pas du reste de la société : "Il y a toujours eu et il peut toujours y avoir du sexisme et des relations désagréables entre les personnes. Il y a toujours des différences au niveau du congé maternité, qui reste plus important que le congé paternité, et qui impacte davantage les carrières des jeunes femmes. Il y a toujours des paroisses qui sont réticentes à engager une jeune femme pasteure parce qu'elles craignent qu'elle ait des enfants et s'absente plusieurs mois. Ce genre de problèmes, communs à l'ensemble de la société, n'épargne pas l'Eglise."

Une Eglise au diapason des temps
Lauriane Savoy juge néanmoins positive la situation dans les Eglises protestantes, qui ont su évoluer avec leur époque et se saisir de la révolution du statut des femmes au XXᵉ siècle : "Les femmes ont obtenu des droits considérables au cours du XXᵉ siècle, surtout dans le dernier tiers. Et les Églises protestantes en ont tenu compte, elles sont pleinement entrées dans ce mouvement et ne sont pas restées en décalage. C'est très salutaire".  

Le lien entre l’accès des femmes au pastorat et celui à d'autres métiers est évident : "Quand le champ professionnel s'ouvre pour les femmes, au début du XXᵉ siècle, et qu’elles ont accès aux études, différents métiers leur deviennent accessibles. Parmi ces professions, celle de pasteur", explique la théologienne.

Certes, c'est un cumul de plusieurs facteurs qui permet aux femmes d'accéder au pastorat dans le protestantisme, mais le principal reste l'accès aux études universitaires : "La principale condition pour devenir pasteure est d'être formée en théologie au niveau académique, continue Lauriane Savoy. Il y a, dans le protestantisme, une corrélation très forte entre l'accès aux études universitaires et l'accès au ministère pastoral – elle l’est moins entre les études universitaires en théologie et la prêtrise."

Lauriane Savoy, historienne, théologienne et autrice du livre <em>Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures</em>
Lauriane Savoy, historienne, théologienne et autrice du livre Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures
©Labor et Fides
Révolution discrète
Les études universitaires de théologie ont été une étape importante de l'accès des femmes au pastorat, mais avant qu’elles puisse exercer pleinement, elles sont passées par différents statuts intermédiaires, créés spécifiquement pour elles. Pour vaincre progressivement les obstacles patriarcaux qui subsistaient dans la société, les églises ont imaginé d'autres métiers, comme assistante de paroisse ou aide de paroisse. "C'était une manière de donner une place à des femmes qui voulaient travailler pour l'Église, sans leur donner le statut pastoral. Car les pasteurs avaient quand même une expertise, une autorité, un rôle de notables, dans les villages par exemple. Au début du XXᵉ siècle, il paraissait difficilement concevable de donner cette fonction à des femmes, et c'est resté un fait vraiment exceptionnel pendant plusieurs décennies, entre les années 1920 et 1960," souligne Lauriane Savoy.

Sacrés arguments 
Au cours de l'enquête menée pour écrire Pionnières, comment les femmes sont devenues pasteures, Lauriane Savoy a dû se rendre à l'évidence : dans les années 1920 et 1930, ce sont avant tout des arguments patriarcaux que l’on opposait aux femmes qui voulaient devenir pasteures.

"Ce ne sont pas tant les arguments théologiques qui ont pesé dans les débats sur l’ouverture du pastorat aux femmes, mais ceux qui avancent que les hommes sont faits pour avoir l'autorité, du pouvoir, alors que les femmes sont faites pour servir, pour être mère, éduquer les enfants et s'occuper du foyer. Certains avançaient que Jésus a choisi douze hommes comme apôtres, ou encore que les versets de certaines épîtres du Nouveau Testament disent que les femmes doivent rester silencieuses dans les assemblées ou que les épouses doivent être soumises à leur époux. Ce genre de choses que l'on trouve dans les textes bibliques ont pu servir d'argument, mais l’essentiel, c'est la conception de l'époque des rôles des hommes et des femmes, avec l'idée que les femmes ont un rôle subalterne. C’est cela, surtout, qu’elles ont dû surmonter pour accéder au pastorat." 

Les femmes ont commencé par épauler les pasteurs en les soulageant de certaines tâches sous lesquelles ils croulaient, comme par exemple les visites au sein des familles : "Au début du XXᵉ siècle, les pasteurs se plaignaient d'avoir beaucoup, beaucoup de visites à faire. En même temps, ils voyaient ces femmes qui voulaient travailler dans les Eglises et se disaient que leur permettre de travailler les soulagerait. D’où l'invention de certaines fonctions et formations qui préparaient les femmes à des ministères spécifiquement féminins".

À égalité avec les hommes 
Ainsi les femmes ont-elles progressivement accédé à davantage de responsabilités, mais subalternes dans un premier temps. Puis elles se sont fait une place et ont fini par être acceptées pleinement, à égalité avec les hommes : "Elles ont pu faire leurs preuves, montré qu'elles étaient capables, qu'elles pouvaient même prêcher, et qu'elles le faisaient bien, voire qu’elles avaient des aptitudes certaines pour tenir le rôle de pasteure." 

Les premières femmes pasteures sont admirables dans la transgression, quand elles osent et qu'elles sont dans l'audace.

Lauriane Savoy

Les premières femmes pasteures circulaient beaucoup entre différentes villes d’Europe pour prêcher et célébrer les cultes hors de leurs paroisses. Une femme, pensait-on, n’a pas la voix pour être audible et intelligible dans un vaste édifice, comme un temple ou une cathédrale, à une époque où la sonorisation n'existait pas. "Les femmes ne peuvent pas prêcher, puisqu’elles n'ont pas la voix qui porte, donc elles ne peuvent pas être pasteurs. Même pas besoin d'arguments théologiques contre le pastorat des femmes", explique Lauriane Savoy.

Dès 1920, une première femme vient prêcher à la cathédrale Saint-Pierre à Genève. "Et l'on se rend compte que, en fait, elle le fait très bien, assure la théologienne. C'est un moment qui est perçu comme historique et qui touche beaucoup les gens qui y assistent. Elle prêche devant une cathédrale comble et montre que c'est possible."

Sacrifices et solitude

Mues par leur vocation, les premières femmes des Eglises protestantes ont dû faire face à des conditions difficiles, prêtes à faire des concessions pour répondre à l'appel impérieux qu'elles ressentaient pour la religion. "Ce sont des femmes très courageuses, qui ont transgressé les normes sociales à leur époque et l’ont payé un prix assez élevé, en acceptant des conditions de vie très simples et n'ayant pas la reconnaissance salariale que pouvaient avoir les hommes pasteurs, constate Lauriane Savoy. Elles sont admirables dans la transgression, quand elles osent et qu'elles sont dans l'audace. Mais j'ai un peu de peine quand elles font des concessions que je trouve trop fortes, quand elles acceptent de travailler gratuitement, par exemple."

Celles dont Pionnières : comment les femmes sont devenues pasteures raconte le parcours étaient tout entière dévolues à leur service pour l'église. "Les premières pasteures, souvent, sont restées célibataires en Suisse, non pas par contrainte, mais parce que socialement, il paraissait inconcevable d'être mère et pasteure à la fois. Si elles n’ont pas consciemment fait le sacrifice d'une vie de mère et de famille, elles sont restées très seules. D'autres femmes ayant fait des études de théologie, elles, ont préféré se marier, souvent à la fin de leurs études, parfois avec des pasteurs. Elles sont devenues théologiennes, mais pas pasteures", explique l'autrice. 

C'est le tournant de 1968 qui a remis en question l'autorité paternaliste des institutions et des Eglises... Les femmes qui entrent ensuite en pastorat ne restent plus célibataires, se marient, deviennent mères.

Lauriane Savoy, historienne, théologienne

Car oui, la solitude a été un frein considérable au pastorat des femmes jusque jusqu'à la fin des années 1960, affirme Lauriane Savoy : "C'est le tournant de 1968 qui a remis en question l'autorité paternaliste des institutions et des Eglises. D'ailleurs, beaucoup de jeunes pasteurs, mais aussi de prêtres, sont actifs dans ce mouvement autour de mai 1968. Cette révolution culturelle et sociale fait réellement bouger les lignes, si bien que les femmes qui arrivent ensuite dans le ministère pastoral ne restent plus célibataires, se marient, deviennent mères. C'est à ce moment-là que s’efface la différence de statut des pasteures". 

Pionnières modèles
Les pionnières mises en avant par Lauriane Savoy se distinguent par différents profils. "La Genevoise Marcelle Bard était la fille d’un pasteur et professeur de théologie, avec une mère féministe suffragette, explique l'autrice. Elle a grandi dans un milieu familial favorable à ce qu'elle puisse être la première à faire des études de théologie à l'université de Genève, puis la première femme pasteure à Genève."

Marcelle Bard fait partie de ces femmes restées très seules durant des décennies : "Marcelle Bard n’a pas eu d'enfant ; elle a eu une longue carrière de pasteure pendant laquelle elle a souvent été la seule femme. Et c'est seulement quand elle est arrivée à la retraite, à la fin des années 1960, que d'autres femmes ont pris le relais," dit Lauriane Savoy.

Détail de la Une de ©<a href="https://www.unige.ch/theologie/files/4715/5179/0540/Buloz_pastorat_Courrier_20190301.pdf">LE COURRIER</a> 
Détail de la Une de ©LE COURRIER 
 
Lydia von Auw
Lydia von Auw
D'autres pionnières ont fait leur chemin à leur manière, même si elles n'étaient pas filles de pasteur. Lydia von Auw fut la première docteure en théologie de Suisse dans les années 1940, à la fois chercheuse universitaire et pasteure – la seule pendant plusieurs décennies. "Elle était pourtant envoyée dans des paroisses plutôt reculées dans les montagnes du Jura, là où les hommes ne voulaient pas aller, et elle devait changer de paroisse assez régulièrement", note Lauriane Savoy.

Jeanne Ertel, elle, a dû se contenter d'un statut subalterne pendant plusieurs décennies, servant dans l'Église vaudoise sans statut de pasteure à part entière. "Elle avait un statut appelé 'ministère féminin de première classe', alors qu'il y avait aussi des 'ministères féminins de deuxième classe', explique l'autrice. Jeanne Ertel a longtemps travaillé bénévolement, seulement indemnisée pour ses trajets de train pendant la première année, avant que l'Eglise admette qu’elle ne pouvait pas continuer à la faire travailler sans la payer correctement."
 
Le ministère pastoral des femmes était au coeur de l'émission Présence protestante diffusée le 22 mai 1977. Elle est allée à Luins et Begnins à la rencontre de la pasteure Anne Maillard, première Vaudoise à être la titulaire unique d'une paroisse, à Genève où Marcelle Bard, première femme pasteure de Suisse romande exerçait ses fonctions depuis 1929, à Lancy, où Francine Guelbert partageait avec un collègue masculin un ministère en milieu urbain et donnais enfin la parole à la réalisatrice de l'émission, Loyse Andrée, elle-même pasteure.
 


Dans le regard, les clichés persistent
Si aujourd'hui certaines pasteures ne rencontrent aucune difficulté dans leur communauté, d'autres ont des expériences un peu différentes, souvent ramenées à leur statut de femme : "On s'attend parfois à ce que la pasteure fasse plus la vaisselle à la fin des fêtes de paroisse, par exemple, alors que cela n'arriverait jamais à un homme. Certains paroissiens et paroissiennes continuent à scruter leur habillement ou leur voix, et les jeunes pasteures peuvent faire face à des remarques spécifiques, mais qui ne sont pas forcément malveillantes ni proférées de manière très consciente."

La question de la voix n'est pas forcément liée au genre, mais cela reste quand même dans l'imaginaire collectif.

Lauriane Savoy

A la fin des cultes, raconte la théologienne, il y en a toujours pour dire : 'Je vous comprends pas bien ou je ne vous entends pas bien'. Et pourtant, dit-elle, "de nombreuses pasteures parlent de manière très claire et intelligible, alors que certains hommes ont un peu plus de peine à se faire entendre. La question de la voix n'est pas forcément liée au genre, mais cela reste quand même dans l'imaginaire collectif"

Certains continuent à observer comment une femme pasteure s'habille, à faire des remarques sur sa coupe de cheveux ou ses vêtements, remarque la théologienne : "Pourtant, en Suisse romande, elles portent le plus souvent une robe pastorale pour célébrer le culte, cette robe noire avec un rabat blanc qui a l'avantage de cacher les vêtements et de prêter le flanc à moins de critiques sur l'habillement, mais il reste les cheveux, les chaussures. Ces petits éléments qui peuvent paraître anecdotiques, même s'ils varient selon les paroisses et les communautés, continuent à peser sur certaines jeunes femmes et peuvent être un peu usants par moments. Il faut avoir une sacrée carrure pour y faire face."

Carolina Costa, pasteure protestante réformée à Genève, le 25 décembre 2018.<br />
©<a href="https://www.rts.ch/info/suisse/10096121-les-femmes-font-partie-de-lhistoire-de-dieu-jesus-les-a-mises-au-centre.html" rel="nofollow">RTS</a>
Carolina Costa, pasteure protestante réformée à Genève, le 25 décembre 2018.
©RTS
Une mixité libératrice 
L'arrivé des femmes au pastorat a ouvert le champ des possibles et diversifié les manières d'exercer le ministère, "mais sans qu'il y ait une manière qui soit féminine et une manière qui soit masculine. Il y a des différences entre les individus, voilà tout", constate Lauriane Savoy à l'issue d'un grand nombre d'entretiens et des recherches menées pour son ouvrage. "On aurait pu penser qu'en accédant au pastorat, les femmes amèneraient la douceur et l'empathie. C'est bien sûr le cas de certaines femmes douées, dans leurs fonctions, de ces qualités-là, mais on les trouve aussi chez les hommes. A l'inverse, certaines femmes ne sont pas très à l'aise avec l'empathie et la douceur ; elles préfèrent exercer leur pastorat avec autorité et sont plus à l'aise dans la prédication."

Des pasteur.es à l'image de la société
Depuis que le pastorat s'est ouvert aux femmes, les profils des pasteurs se sont beaucoup diversifiés et les hommes aussi se sentent plus libres, dit la théologienne : "L’arrivée des femmes dans le pastorat a amené de la diversité et davantage de liberté à tous, y compris aux hommes pasteurs. On attend plus forcément d'eux qu'ils soient dans la posture un peu paternaliste de celui qui a une expertise et qui détient une vérité." L’arrivée des femmes au pastorat a aussi amené de la créativité dans la manière d'exercer, dit Lauriane Savoy, "parce qu'il y a des femmes, mais aussi des hommes qui ont inventé de nouvelles manières d'être pasteur.e, de nouveaux ministères. Cette diversité de profils et cette créativité enrichit vraiment les Eglises."

L’arrivée des femmes dans le pastorat a amené de la diversité et davantage de liberté à tous, y compris aux hommes pasteurs.

Lauriane Savoy

Les pasteurs pouvant se marier, les pasteures, comme leurs "collègues" masculins, convolent et font famille, parfois même avec un.e conjoint.e rencontré.e sur les bancs de la facultée de théologie. "Un certain nombre de couples de pasteurs se forment, qui n'officient pas forcément dans la même paroisse, car ils préfèrent ne pas travailler dans le même lieu, remarque Lauriane Savoy. Aujourd'hui, il y a des pasteurs divorcés, des pasteurs en couples homosexuels, des pasteurs gays, des pasteures lesbiennes, des pasteurs trans..." Pour la théologienne, cette diversification des profils est une réelle richesse, car elle donne à voir à la société des pasteur.es qui ne sont pas foncièrement différents : "Ils partagent les joies, les peines et les turpitudes de la vie de tous les paroissiens. Ils sont confrontés aux mêmes problèmes."  


Aux racines théologiques de l'ouverture
Dès la Réforme, la conception théologique de ce qu'est un prêtre ou ce qu'est un pasteur est différente. Un prêtre, dans l'Eglise catholique, n’a pas le même statut que les fidèles. "Il est l'intermédiaire entre Dieu et les fidèles, car c’est lui qui va recueillir la confession et qui permet aux personnes qui viennent se confesser d'obtenir le pardon de Dieu. Le prêtre est aussi un intermédiaire quand il célèbre l'Eucharistie, car il représente le Christ. Du fait de ce statut particulier, il reste célibataire dans l'Église d'Occident – contrairement aux Eglises orientales catholiques, où les prêtres peuvent être mariés. Sans ce statut d'intermédiaire, le pasteur est moins sacralisé, ce qui a aussi permis que les femmes aient plus facilement accès au pastorat," explique Lauriane Savoy

Ce qui s'est passé dans les églises protestantes au cours du XXᵉ siècle peut encourager les femmes qui essaient de faire bouger leurs traditions religieuses.

Lauriane Savoy

Un autre élément important différencie les Eglises protestantes de l'Eglise catholique : leur organisation décentralisée. Elles ne sont pas obligées d'évoluer d'un même pas, de parvenir à une sorte de consensus au niveau mondial. "Si l'Eglise catholique a beaucoup de peine à évoluer sur la question des femmes, ces choses-là, dans les Eglises protestantes, se décident au niveau national, voire même régional en Suisse. C'est un fonctionnement qui est calqué sur celui de la démocratie, où les décisions sont synodales, les synodes étant l'équivalent des Parlements en politique. Ce sont les élus des paroisses qui discutent ensemble et peuvent prendre la décision de donner accès aux femmes à plus de responsabilités." dit la théologienne.

Sally Ibrahim Azar, chrétienne palestinienne et membre du Conseil de la Fédération luthérienne mondiale, ordonnée première femme pasteur en Terre sainte, à Jérusalem, le 22 janvier 2023. 
Sally Ibrahim Azar, chrétienne palestinienne et membre du Conseil de la Fédération luthérienne mondiale, ordonnée première femme pasteur en Terre sainte, à Jérusalem, le 22 janvier 2023. 
(©AP Photo/Maya Alleruzzo
Pasteures, sources d'inspiration
Un exemple inspirant pour les autres traditions religieuses ? "Il y a des femmes rabbins et des femmes imams, s'enthousiasme Lauriane Savoy, même si elles restent très minoritaires, voire exceptionnelles en ce qui concerne les femmes imams, mais il y en a. Il y a aussi eu une évolution du côté des églises évangéliques, où, à certaines époques, il y a eu des femmes pasteurs, et puis plus du tout. Or ces dernières années, il y a de plus en plus d'églises évangéliques qui admettent des femmes pasteurs. Ce qui s'est passé dans les églises protestantes au cours du XXᵉ siècle peut encourager les femmes qui essaient de faire bouger leurs propres traditions religieuses, leur montrer que les choses peuvent changer."

(Re)lire aussi dans Terriennes : 

► Emmanuelle Seyboldt : une femme à la tête de l’Eglise protestante de France
► Rola Sleiman, femme, libanaise, première pasteure au Moyen Orient
► L’Église et le mariage des prêtres : l'inéluctable bouleversement 
► A quand le mariage des prêtres ? Entre mensonges et secrets, témoignages de femmes et filles de...
► Une "Bible des femmes" propose une relecture de textes périmés et misogynes
► Féminisme et religion, même combat ?

TerriennesLiliane Charrier
 Mise à jour 22.04.2023 à 08:31
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Afghanistan : le Conseil de sécurité de l'ONU appelle le gouvernement taliban à annuler ses mesures contre les femmes

30 Avril 2023, 21:44pm

Publié par hugo

INFO
En Afghanistan, les Talibans au pouvoirFemmes afghanes sous régime taliban : au nom de la liberté
Afghanistan : le Conseil de sécurité de l'ONU appelle le gouvernement taliban à annuler ses mesures contre les femmes
Des femmes afghanes dans une clinique à Kaboul, en Afghanistan, le jeudi 26 janvier 2023.<br />
 
Des femmes afghanes dans une clinique à Kaboul, en Afghanistan, le jeudi 26 janvier 2023.
 
(AP Photo/Ebrahim Noroozi)
28 AVR 2023
 Mise à jour 28.04.2023 à 13:22 par 
TV5MONDEAFP
Le Conseil de sécurité de l'ONU a appelé jeudi 27 avril, le gouvernement taliban à "revenir rapidement" sur toutes les mesures de restrictions contre les femmes, condamnant en particulier l'interdiction faite aux Afghanes de travailler pour les Nations unies.

La résolution, adoptée à l'unanimité des 15 membres et co-sponsorisée par quelque 90 Etats membres de l'ONU, "condamne la décision prise par les talibans d'interdire aux femmes afghanes de travailler pour les Nations unies en Afghanistan", décision annoncée début avril qui "compromet les droits humains et les principes humanitaires".

(Re)lire Afghanistan : "Les femmes ont des rôles décisifs dans nos opérations humanitaires"

Plus largement, le Conseil "lance un appel aux talibans pour qu'ils reviennent rapidement sur les politiques et les pratiques qui restreignent le plein exercice par les femmes et les filles de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales, notamment pour ce qui est de leur accès à l'éducation et à l'emploi, leur liberté de circulation et la participation pleine, égale et véritable des femmes à la vie publique".

(Re)lire Afghanistan : les femmes interdites de travailler, six ONG suspendent leurs activités

Il "exhorte" également "tous les Etats et organisations à utiliser leur influence (...) pour promouvoir l'annulation urgente de ces politiques et pratiques".

"Le monde ne restera pas silencieux alors que les femmes en Afghanistan sont effacées de la société", a commenté l'ambassadrice des Emirats arabes unis Lana Zaki Nusseibeh, qui a rédigé le texte avec le Japon.

(Re)voir Afghanistan : dilemme pour les ONG interdites d'employer des femmes

Soulignant la situation économique et humanitaire "désastreuse", la résolution "souligne qu'il importe au plus haut point de pouvoir compter sur une présence constante de la Manua (mission de l'ONU en Afghanistan) et des autres organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans tout l'Afghanistan".

Examen de la Manua
Le Conseil est également "conscient qu'il faut contribuer à remédier aux problèmes considérables qui pèsent sur l'économie afghane, notamment en s'efforçant de permettre l'utilisation des actifs appartenant à la Banque centrale d’Afghanistan au profit du peuple afghan".

(Re)voir "Ce coup de massue touche toutes les ONG car les femmes sont interdites de travailler avec nous en Afghanistan"

Lire la vidéo
Après le retour au pouvoir de dirigeants talibans en août 2021, Washington a gelé 7 milliards de dollars d'avoirs de la Banque centrale afghane déposés aux Etats-Unis. En septembre, les Américains avaient annoncé la création d'un fond en Suisse pour gérer la moitié de ces avoirs.

(Re)lire En Afghanistan, des hommes se lèvent pour défendre les femmes face aux talibans

L'ambassadeur russe Vassili Nebenzia, malgré son vote favorable, a regretté que les Occidentaux aient "bloqué" une approche plus "ambitieuse" notamment sur cette question. "Si vous êtes sincère, pourquoi ne pas rendre les avoirs volés, sans précondition", a-t-il lancé.

Les Nations unies ont annoncé le 4 avril que les autorités talibanes interdisaient désormais à leurs employées afghanes, jusqu'ici épargnées par ce type de mesures appliquées aux ONG, de travailler avec l'organisation dans tout le pays.

Depuis cette annonce, la Manua a lancé un examen du fonctionnement des opérations de l'ONU dans le pays, qui doit durer jusqu'au 5 mai.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres organise de son côté les 1er et le 2 mai à Doha une réunion avec des envoyés de divers pays chargés de l'Afghanistan pour "redynamiser l'engagement international autour d'objectifs communs vers un chemin durable concernant la situation en Afghanistan".

Depuis leur retour au pouvoir en août 2021, les dirigeants talibans sont revenus à l'interprétation austère de l'islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir (1996-2001). Le gouvernement taliban avait alors interdit aux femmes et aux filles de fréquenter les écoles et les universités, et mis en scène des flagellations publiques et des exécutions dans les stades.

TV5MONDEAFP
 Mise à jour 28.04.2023 à 13:22
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https://information.tv5monde.com/info/afghanistan-le-conseil-de-securite-de-l-onu-appelle-le-gouvernement-taliban-annuler-ses-mesures

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Pénurie des pilules abortives à Lille : les intérêts du patronat menacent le droit à l’IV

30 Avril 2023, 20:52pm

Publié par hugo

 GENRES ET SEXUALITÉS
Pénurie des pilules abortives à Lille : les intérêts du patronat menacent le droit à l’IVG
Alors que des acteurs de terrain dénoncent depuis plusieurs semaines une pénurie de Misoprostol, la molécule utilisée pour les avortements médicamenteux, les pilules sont désormais en rupture dans toutes les pharmacies de la ville de Lille.

Matthias Lecourbe

vendredi 14 avril

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Crédits photo : AFP

Ce vendredi 14 avril, l’Observatoire de la Transparence dans les politiques du Médicament (OTMed) a annoncé sur Twitter que le Misoprostol, la molécule utilisée dans les IVG médicamenteuses, était actuellement introuvable dans les pharmacies lilloises. Sans pouvoir avancer de chiffres, selon les retours des acteurs de terrain, la situation semble également très préoccupante en Île-de-France.


 
Après s’être installée progressivement ces dernières semaines, la pénurie arrive désormais à un point critique. L’OTMed avait déjà fait paraître une tribune dans Le Monde il y a une semaine, pour dénoncer la situation à la lumière des logiques de profit dans l’industrie pharmaceutique, qui pénalisent en premier lieu les femmes et les personnes LGBTI, perçues comme des populations « moins rentables » pour cette industrie.

Pauline Londeix, ancienne présidente d’Act Up Paris et co-fondatrice de l’OTMed nous explique : « Un des nombreux problèmes en matière de politique du médicament est la multiplication des pénuries de médicaments depuis plus de 10 ans ». En effet, les pénuries de médicaments ont déjà fait les gros titres dans la presse cet hiver, touchant déjà des molécules essentielles comme le Paracétamol, des antibiotiques comme l’Amoxicilline, mais aussi des anti-épileptiques ou encore des thrombolitiques utilisés en cas d’AVC.

Sandrine, une chercheuse gréviste chez Sanofi témoignait en décembre dernier dans Révolution Permanente de l’organisation des pénuries de médicaments par les patrons de l’industrie pharmaceutique : « Le nombre de pénuries de médicaments augmente de façon exponentielle depuis 10 ans. Cette pénurie n’est pas une fatalité mais résulte des choix stratégiques des géants pharmaceutiques, d’ailleurs elles ne touchent que les médicaments anciens, moins lucratifs ! Il faut sortir le médicament des logiques de marché, au lieu de donner des crédits d’impôts aux Big Pharmas il faut les obliger à rechercher et à produire ce dont on a besoin. »

Comme le développe Pauline Londeix : « On a été contactés début mars par plusieurs organisations de terrain sans se concerter entre elles pour dire qu’elles entendaient parler de ruptures de misoprostol. Je suis allée voir sur le site de l’ANSM, qui doit tenir un suivi des tensions et des pénuries de médicaments et il y avait une note du fabriquant depuis septembre, qui disait avoir constaté des impuretés dans sa production et avoir dû l’arrêter. Pourquoi n’y a-t-il qu’un seul producteur ? Parce que c’est sous brevet ! La seule firme qui produit le Misoprostol est Norgine, et cela recoupe tous les soucis structurels de l’industrie du médicament, qui est très concentrée et au moindre problème sur un site de production la production peut s’arrêter ! Et en pratique cela peut remettre en cause le droit à l’avortement pendant des mois et des mois. ». En l’occurrence, la pénurie est causée par le fait qu’un seul site en Europe produit le Misoprostol et que le producteur a constaté une impureté dans ses produits et a donc cessé la production en septembre dernier le temps de résoudre le problème.

Cette concentration de la production est liée aux logiques de rentabilité : les firmes pharmaceutiques peuvent faire le pari de concentrer leur production sur un seul site et, en cas de problème technique, la production d’une molécule peut se retrouver à l’arrêt pendant des mois, jusqu’à ce que les stocks s’épuisent et que la population doive faire face aux conséquences. Elle est aussi liée à l’existence de brevets sur les molécules dont les firmes cherchent à s’assurer l’exclusivité pour maximiser leurs profits, alors que le fait qu’il n’y ait qu’un producteur pour une molécule donnée renforce encore le risque de pénuries auquel le grand public devra faire face.

En l’occurrence, la pénurie de Misoprostol porte gravement atteinte au droit à l’avortement, ce que pointe Pauline Londeix : « On a décidé d’alerter le plus vite possible pour faire réagir, il y a eu un débat sur l’IVG dans la constitution, mais si en pratique les gens ne peuvent pas avorter c’est terrible ! Il y a des gens qui se rendent dans des centres et ne peuvent pas avorter, elles doivent aller dans une autre ville pour trouver du misoprostol, ce qui est terrible et d’autant plus que les délais pour une IVG médicamenteuse sont vraiment courts. On a des témoignages qui viennent du fin fond des Yvelines de sages-femmes qui disent qu’elles ont fait 10 pharmacies sans en trouver, et encore, on parle du Nord et de la région parisienne car ce sont les régions où on a le plus de relais d’acteurs de terrain, mais il n’y a aucune raison de penser que la situation soit circonscrite à ces régions... »

En effet, les conséquences sont dramatiques pour les personnes cherchant à avorter, puisque le délai pour une IVG médicamenteuse n’est que de sept semaines, ce qui correspond à environ deux mois de retard de règles. Pour les personnes vivant à Lille qui cherche à avorter, il faut donc qu’elles constatent la grossesse, aient deux rendez-vous médicaux espacés d’une semaine en raison du délai de réflexion imposé par la loi, organiser un voyage vers une autre ville et faire la queue dans plusieurs pharmacies pour espérer trouver une pilule abortive, tout cela dans ce délai très serré.

Une situation inacceptable, alors que le gouvernement se donnait un vernis féministe en inscrivant dans la Constitution la « liberté de la femme de mettre fin à la grossesse », pendant qu’il cajole le patronat qui accumule des profits sur le dos de la majorité de la population. La pénurie de Misoprostol montre à quel point la constitutionnalisation du droit à l’IVG ne vaut rien sans des politiques ambitieuses en matière de santé, pour rouvrir tous les centres IVG qui ont été fermés ces dernières années à cause de la casse du service public, mais aussi pour assurer une production de médicaments essentiels, que les logiques de marché ne peuvent pas assurer et pour laquelle il faudra se battre contre le patronat qui cherche à préserver ses intérêts.


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Canada: des hommes politiques chaussent des talons roses pour sensibiliser à la lutte contre les violences faites aux femmes

30 Avril 2023, 03:51am

Publié par hugo

  
Canada: des hommes politiques chaussent des talons roses pour sensibiliser à la lutte contre les violences faites aux femmes
Publié le 29 avril 2023 à 16h00
Canada: des hommes politiques chaussent des talons roses pour sensibiliser à la lutte contre les violences faites aux femmes
Canada: des hommes politiques chaussent des talons roses pour sensibiliser à la lutte contre les violences faites aux femmes - ©Gustavo Fring/Pexels

SAUVEGARDER
La campagne « Hope in High Heels » consiste pour des parlementaires canadiens à défiler en talons aiguilles. Cette opération vise à sensibiliser la population sur la lutte contre les violences faites aux femmes. Mais elle n’est pas du goût de tous. 

C’est une vidéo qui a fait beaucoup réagir. On y voit des hommes politiques canadiens, perchés sur des escarpins rose bonbon en train de tourner autour d’une table de réunion. La vidéo publiée par le ministre des Transports canadien Omar Alghabra la semaine dernière cumule déjà sept millions de vues. Il a accompagné la scène d’un texte soulignant que « la violence à l'égard des femmes est encore répandue dans notre société. “Hope in Heels” est un événement qui sensibilise à la violence contre les femmes tout en encourageant les hommes et les garçons à faire partie de la solution. Nous avons porté leurs talons roses emblématiques pour soutenir cette cause importante. »

UNE VIDÉO QUI N'EST PAS DU GOÛT DE TOUS
Comme il fallait s’y attendre, la vidéo a rapidement été tournée en dérision sur les réseaux sociaux. L’auteure de Harry Potter, J.K. Rowling, connue pour sa mobilisation contre les violences faites aux femmes mais aussi pour ses propos jugés transphobes, a ironisé: « combien de féminicides sont évités » grâce à l’action des parlementaires. Les internautes sont nombreux à qualifier l’action de « ridicule ». 

ACTUALITÉ DES MARQUES

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La commentatrice anglaise Bernadette Spofforth, très suivie sur Twitter, a exprimé son opinion sans concession: « des hommes politiques paradent en talons hauts rose "signature" pour faire partie de la solution à la violence contre les femmes. Je suis tellement gênée pour vous. » En France, c’est la députée RN Mathilde Androuët qui s’est insurgée contre cette action: « à part dénoncer les cors aux pieds, cela sert à quoi ?! Quelle indécence pour toutes les victimes de viols, de coups etc. qui attendent qu'on les protège de leurs bourreaux ! ».

Le ministre des Transports Omar Alghabra s’est défendu suite à ces tentatives de décrédibilisation: « c'est ironique que ceux qui se plaignent de la facilité avec laquelle la société est offensée soient facilement offensés par un simple geste », a-t-il affirmé. 


https://www.elle.fr/Societe/News/Canada-des-hommes-politiques-chaussent-des-talons-roses-pour-sensibiliser-a-la-lutte-contre-les-violences-faites-aux-femmes-4125239
 

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STOP A LA REPUBLIQUE DES PORCS 🐷🐷🐷🐷🐷

30 Avril 2023, 02:54am

Publié par hugo

MOI  J EN AI MARRE DES MECS  QUI SE CONDUISENT COMME DES PORCS , des  abad , darmanin , Depardieu , roman Polanski , PPDA ,   qui ne sont pas inquiété de leurs  viols car protege par l état Français pour ABAD DARMAIN et d autres  protege par le  fait  que  ce soit  des stars de la télé  cine DEPARDIEU ROMAN POLANSKI ET  UN AUTRE PAR  TF1 , PPDA ,   NORMAL  CE GENRE DE MEC  QUI RESTE EN PLACE ET QUI PEUVENT  VIOLER 10 20  FEMMES ????  pourquoi  le système  protege  des stars qui violent qui abusent  des femmes ???  LA LOI  DOIT ETRE  PAREIL POUR TOUS LE MONDE  !!!! J  EN  VOMI  DE CE GENRE DE MEC !!! 🤮🤮🤮🤮QUE ON PUISSE  AVOIR  ENVIE DE CETTE FEMME  LA C EST UNE CHOSE , LA  DRAGUER EST UNE AUTRE CHOSE , et que éventuellement elle soit  d accord pour  sortir avec toi  et  de coucher  avec toi  mais LE  VIOL NON !!!!! LES FEMMES  NE SONT PAS DES  MORCEAUX  DE VIANDES !!!! LES FEMMES NE SONT PAS NON PLUS DES USINES A BEBES !!! 

PARFOIS  JE ME DEMANDE QUEL JUTICE  SI UNE FEMME FAISAIT PAREIL ET QUE CETTE FEMME  SOIT  CONNUE  ??  elle aurait  une justice  a  égalité avec le peuple ??? OU COMME PPDA DEPARDIEU ROMAN POLANSKI ??? 

LES MECS JE  VOUDRAIENT  SAVOIR POURQUOI VOUS  FAITES  CELA !!!!! ????? QUESTCE QUI  VOUS TRAVERSENT LA TETE ??? 

JESPERE QUE   TOUS  CES GENS  LA SERONT MIS EN TAULES  POUR  15 ANS FERME !!!! 

CONTACTEZ  NOUS TOUTES OU  OLF  ,  osez le  féminisme , OU LES EFFRONTEES , ces  assos auront des avocats pour vous aidez !!! 

 

#BALANCETONPORCS 

#BALANCETONVIOLEUR 

 

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Tribune : « Face aux haines d’aujourd’hui et de demain, honorer la mémoire de tou·te·s les déporté·e·s »

30 Avril 2023, 02:48am

Publié par hugo

  Tribune : « Face aux haines d’aujourd’hui et de demain, honorer la mémoire de tou·te·s les déporté·e·s »
Publié le : 28 avril 2023 | Mis à jour : 28 avril 2023 | Auteur : Jean-Benoit RICHARD

A l’occasion de la Journée nationale du Souvenir des Victimes et Héros de la Déportation qui se déroulera le 30 avril, nous donnons la parole à la Fédération LGBTI+, qui regroupe les associations et centres lesbiens, gays, bi, transgenres et intersexes en France. Dans le texte que nous reproduisons ci-dessous, leur porte-parole rappelle combien le devoir de mémoire est nécessaire et qu’il sert aussi à éclairer le présent.

générique journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation

Face aux haines d’aujourd’hui et de demain, honorer la mémoire de tou·te·s les déporté·e·s
Le dernier dimanche du mois d’avril a lieu une journée nationale d’hommage aux personnes dont le destin a croisé l’infamie humaine des camps de concentration et d’extermination. Les associations et Centres LGBTI+ seront au rendez-vous pour honorer les victimes et héros de la déportation et porter le souvenir des victimes de persécutions à raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre pendant la Seconde Guerre mondiale.

C’est seulement en 2005 que dans son discours à l’occasion de la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation, le Président de la République, Jacques Chirac, reconnait officiellement qu’il y a bien eu des personnes déportées à raison de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre depuis le territoire français. Les associations LGBTI+ et les historien·ne·s travaillant sur la mémoire avaient apporté des preuves de ces faits depuis de nombreuses années. Désormais, que des Français·e·s aient porté le triangle rose (homosexuels) ou le triangle noir (asociaux, dont les femmes lesbiennes) n’est plus remis en question. Le rôle actif de la police française et des services de l’État Français est quant à lui trop souvent oublié.

Il est pourtant fondamental d’entretenir ce devoir de mémoire et de porter un regard éclairé sur les erreurs atroces de notre passé sous peine d’avancer aveugles vers de nouvelles horreurs. Nous nous joignons à l’exigence nationale d’honorer la mémoire de tous les déportés, “sans distinction”, comme l’exprime la loi du 14 avril 1954. Une délibération ancienne de la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité) le rappelle : les préfectures doivent associer les associations LGBTI+ à l’organisation des cérémonies (Délibération 2009-2022 du 8 juin 2009). Cette décision n’est hélas pas toujours mise en œuvre par les services de l’État.

La perméabilité de plus en plus forte des idées d’extrême-droite dans la société, aidée d’une complaisance dans les médias et les milieux politiques, nourrit une grande inquiétude dans nos associations LGBTI+. L’extrême-droite porte une opposition viscérale aux droits des minorités sexuelles et de genre. L’historique des votes d’élu·e·s et les prises de position publique répétées de membres des partis d’extrême-droite ne ment pas. Nous ne sommes pas dupes de leurs opérations de séduction. Celles-ci rendent leur populisme encore plus détestable.

Depuis plusieurs années, nous assistons aussi à une stigmatisation grandissante des minorités en Europe : rejet des populations exilées, violences sur les minorités sexuelles, remise en question des avancées féministes… Ce sont parfois les gouvernements de pays membres de l’Union Européenne qui orchestrent les persécutions, comme en Hongrie ou en Pologne. La France n’est pas exempte de la montée de ces courants haineux.

La Fédération LGBTI+ note aussi la pente autoritaire adoptée par plusieurs gouvernements en Europe et en particulier en France. Le durcissement des pouvoirs face à sa population, la répression des mouvements sociaux au mépris de la loi, la militarisation des forces de l’ordre sont des indicateurs sans équivoque d’un glissement pré-fascisant. Il ne s’agit pas là d’une analyse orientée que nous ferions mais bien de l’analyse partagée par plusieurs expert·e·s internationaux (ONU, Conseil de l’Europe, Amnesty International…).

Les militant·e·s qui chaque jour défendent les droits humains des personnes LGBTI+ aujourd’hui s’inscrivent dans une histoire commune de survie face à la barbarie et le mépris. C’est toujours le même élan qui les animent : la solidarité et le respect des libertés ont toujours été plus fortes que la haine et la violence.

Cette histoire nous oblige dans notre devoir de mémoire. Elle nous oblige dans la défense de toutes les minorités exposées à la haine.

La Fédération LGBTI+ ne peut donc qu’encourager la participation de tou·te·s et tous aux cérémonies dimanche. Portons la mémoire de celles et ceux qui ont croisé l’horreur humaine sur leur chemin car nous savons que le ventre est encore fécond et qu’il a commencé à germer à nouveau.

Kévin Galet-Ieko, porte-parole
Antonin Le Mée, porte-parole adjoint


https://www.gaypride.fr/tribune-face-aux-haines-daujourdhui-et-de-demain-honorer-la-memoire-de-tou-te-s-les-deporte-e-s/
 

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