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Adelle Blackett, docteure honoris causa de l’UCLouvain : "Nous méprisons le travail le plus fondamental, celui du soin"

27 Février 2023, 03:38am

Publié par hugo

Adelle Blackett, docteure honoris causa de l’UCLouvain : "Nous méprisons le travail le plus fondamental, celui du soin"

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16 févr. 2023 à 22:38

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6 min
Par Sarra El Massaoudi pour Les Grenades
 
L’UCLouvain a décerné le titre de docteur·es honoris causa, ce 16 février, à Adelle Blackett, professeure de droit œuvrant notamment contre l’exploitation au travail, en particulier celle des travailleuses migrantes, Oleksandra Matviichuk, militante en faveur des droits fondamentaux, dont l’ONG a reçu le Prix Nobel de la paix ; et Elia Suleiman, cinéaste palestinien, dénonçant toute forme de violence.

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"Ce qui les rassemble ? Leurs combats contre toutes les formes de violences, qu’elles soient sur le lieu de travail, au cœur des guerres ou intrinsèques à la société à l’encontre des libertés individuelles", écrit L’UCLouvain dans son communiqué.

Les Grenades ont rencontré Adelle Blackett à cette occasion.

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe


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Politiser le travail domestique
Les recherches d'Adelle Blackett, professeure de droit à l’université McGill, à Montréal, ont permis d’élargir les perspectives du droit du travail aux réalités des personnes les plus vulnérables. C’est ce travail minutieux, et de longue haleine, qui lui vaut aujourd’hui le titre de docteure honoris causa de l’UCLouvain.

Son principal cheval de bataille : la reconnaissance du travail domestique comme un travail à part entière, c’est-à-dire indéboulonnable d’une série de droits sociaux, assurant des conditions de vie dignes aux travailleuses. "Je dis ‘travailleuses’ parce que 90% des travailleur·euses domestiques sont des femmes", souligne la chercheuse. En plus de ses recherches académiques, Adelle Blackett a collaboré avec l’Organisation internationale du travail (OIT) pour élaborer une convention visant à assurer un travail décent à ces travailleuses domestiques, des gardiennes d’enfants, cuisinières, femmes de ménage, etc.

"Les négociations ont duré deux ans. Ça a été un moment d’apprentissage pour tout le monde : les gouvernements, les représentantes des employeurs et des travailleuses." Et ces dernières, premières concernées, ont bien eu leur mot à dire sur la réalisation des recommandations. "Elles ont été très claires : elles voulaient un instrument fort qui reflète leurs souhaits, leurs droits, leur vie. Elles étaient présentes tout au long du processus pour veiller à ce que la convention soit à la hauteur."

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"Les initiatives les plus créatives viennent du Sud global"
Pour être à la hauteur, Adelle Blackett et ses collègues ont dû relever un défi de taille : développer une vision internationale du travail du soin tout en respectant les réalités spécifiques de chaque état et région du monde. Leur travail a donc commencé par une analyse en droit comparé des situations régionales. "J’ai été frappée par le fait que les initiatives les plus créatives venaient du Sud global, certainement parce que c’est de là que sont issues les personnes concernées. Des personnes qui ont lutté pour la décolonisation, la levée de l’apartheid et pour que les femmes, particulièrement dans ce genre de métier, aient des conditions de travail décentes."

La chercheuse évoque entre autres l’Uruguay comme exemple intéressant en matière d’inspection du travail mais aussi l’Inde pour la sécurité sociale et la Belgique et la Suisse pour le système des titres-services. La convention internationale est ainsi construite sur base de cas pratiques concrets, à la fois de pays du Sud global et de pays occidentaux. Une méthode loin d’être anodine.

90% des travailleur·euses domestiques sont des femmes

Son objectif est de prouver le caractère applicable de l’outil. "Au début, certains membres de l’OIT pensaient que ce n’était pas possible. Ils disaient que ce n’étaient pas de vraies travailleuses et qu’on ne pouvait rien faire de concret." Aujourd’hui, presque tous les pays ont adopté la convention, soit en la ratifiant soit en modifiant leurs lois. Des changements juridiques et de pratiques sont observés sur tous les continents. "Pas assez, il y a encore beaucoup à faire", précise-t-elle.

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Si les initiatives nationales sont valorisées par la convention, elles font aussi l’objet de critiques. L’OIT propose aux États qui le souhaitent d’échanger sur leurs pratiques et de bénéficier des retours et d’un appui technique de son comité d’expert·es. "Il y a tellement à apprendre. Et l’une des façons d’apprendre, c’est d’expérimenter. On a démontré que des initiatives existent, même si elles sont imparfaites. Nombre d’entre elles excluent toujours une partie des travailleuses du soin, comme les personnes sans papier."

Le système des titres-services formalise quant à lui le travail informel des femmes de ménage, majoritairement racisées et issues de classes sociales défavorisées. En maintenant des bas salaires dans ce secteur, il tend cependant à enfermer les travailleuses dans la précarité financière.

Pour Adelle Blackett, ces dispositifs restent malgré tout indispensables pour lutter pour de meilleures conditions de travail et pour une meilleure compréhension des droits des travailleuses, notamment auprès des assistant·es sociales et des élu·es politiques. "Il ne s’agit pas de choisir entre travail formel ou informel mais de se demander quelles conditions permettent d’assurer un travail digne pour tout le monde. A ce sujet, on apprend beaucoup des mouvements féministes et antiracistes."

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“Ce sont des responsabilités sociétales qu’on met sur les épaules des femmes”
Un autre enjeu central de ces luttes est le choix des mots : la capacité à se définir soi et son travail, à poser ses propres mots sur son histoire. Un droit à l’autodétermination auquel n’ont pas, ou peu, accès les personnes minorisées.

La professeure de droit a ainsi d’abord dû convaincre certains de ses pairs que le travail domestique était bien un travail. Il a ensuite fallu repenser la façon de désigner ces travailleurs et travailleuses. "Une expression que j’évite, c’est le soi-disant ‘travail au noir’. Je pense que ça renforce encore un lien entre un travail sous-valorisé, fait à l’ombre et les personnes qui font ce travail et qui sont racialisées."

Il s’agit de se demander quelles conditions permettent d’assurer un travail digne pour tout le monde

Dans cette optique, le changement passe par le choix d’images et de paroles qui revalorisent ce travail, ces personnes, ces corps humains. "J’ai l’impression que même les mouvements féministes occultent cette transformation fondamentale et son impact sur nos sociétés si on y croyait vraiment."

Arrive alors la question de la responsabilité. Individuelle d’une part mais surtout collective. Actuellement, notre société valorise la production et le travail dit ‘intellectuel’. "Nous méprisons le travail le plus fondamental, celui du soin. Nous n’allons pas nous en sortir si nous ne réussissons pas à considérer ce travail à sa juste valeur."

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Et cette responsabilité-là est commune, martèle la chercheuse. "Ça demande des capacités émotionnelles, humaines, créatives, d’humour, de patience, de bienveillance." A ce titre, elle veille à garder une vision holistique dans ses propres travaux. Le secteur du soin est souvent décrit comme une relation de pouvoir déséquilibrée entre les femmes blanches des pays occidentaux qui profitent du travail des femmes racisées du Sud global. "Je refuse de m’en tenir à ça parce que ce sont des responsabilités sociétales qu’on met sur les épaules des femmes. Or, par la suite, les règles de participation dans la société ou dans l’économie imposent un modèle masculin."

Sa solution : sortir de ce prisme réducteur pour comprendre à qui sert concrètement le travail domestique.

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La force de ses recherches réside par ailleurs dans sa capacité à les inscrire dans le temps, c’est-à-dire à relier le passé au présent pour mieux comprendre ce dernier. "On est, de façon plutôt inconsciente, en train de transposer des normes qui émanent de l’esclavage et du colonialisme", explique-t-elle.

Une réalité qui renforce selon elle les préjugés selon lesquels il est normal que certaines personnes soient maintenues dans ces formes de travail précarisant. "Tout d’un coup, il y a des revendications. Certaines personnes veulent être considérées comme des êtres humains et d’autres doivent assumer tout un tas de responsabilités, ce qui demande de changer la société."

Car c’est bien cela que vise Adelle Blackett : une meilleure compréhension de l’histoire et des conditions de vie des personnes minorisées pour modifier une trajectoire qui reproduit les relations de subordination et de servitude. Pour transformer le monde.

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https://www.rtbf.be/article/adelle-blackett-docteure-honoris-causa-de-luclouvain-nous-meprisons-le-travail-le-plus-fondamental-celui-du-soin-11154281

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En Italie, la victoire de Giorgia Meloni fait craindre un recul des droits des femmes et des minorités

29 Septembre 2022, 23:54pm

Publié par hugo

 En Italie, la victoire de Giorgia Meloni fait craindre un recul des droits des femmes et des minorités

27 sept. 2022 à 16:16

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5 min
Par Caroline Bordecq, correspondante en Italie pour Les Grenades
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Après la victoire de son parti de droite radicale Fratelli d’Italia aux élections italiennes, Giorgia Meloni pourrait devenir la prochaine première ministre. Une perspective qui fait craindre aux féministes un recul des droits des femmes et des minorités.

Ce dimanche 25 septembre, l’Italie a tourné une nouvelle page de son histoire. Le parti de droite radicale Fratelli d’Italia a remporté les élections législatives anticipées, avec 26% des suffrages. Permettant ainsi à la coalition des droites – rassemblant La ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi – d’obtenir une large majorité au Parlement (44%).

Cette nette victoire pourrait propulser la cheffe de file de Fratelli d’Italia, Giorgia Meloni, au poste de Première ministre, une première pour une femme dans l’histoire politique italienne. Le pays serait alors dirigé par une droite située à l’extrême de l’échiquier politique.

Il pourrait y avoir des batailles très fortes si les droits devaient être attaqués.

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Un risque pour les droits des femmes
Pour Elisa Ercoli, présidente de Differenza Donna, une association qui lutte contre les violences faites aux femmes, ce nouvel équilibre politique est un risque pour les droits des femmes. "On a vu au niveau international que les souverainistes partent du corps des femmes pour imposer une politique traditionaliste de leurs gouvernements", s’inquiète-t-elle. En Pologne, par exemple, l’avortement est presque totalement interdit depuis 2021.

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Avec l’arrivée de Fratelli d’Italia au pouvoir, l’une des inquiétudes porte justement sur l’accès à l’avortement. Lors de sa campagne, si Giorgia Meloni a assuré qu’elle ne toucherait pas la loi 194 (qui autorise l’IVG), Elisa Erdicoli estime qu’"elle n’en a pas besoin. Dans un contexte où l’objection de conscience est si élevée, c’est facile de limiter la loi sans la modifier". En effet, en Italie 65% des gynécologues sont objecteur-trices de conscience, c’est-à-dire qu’ils ou elles refusent de pratiquer les IVG au nom de leur moral ou de leurs croyances, imposant à certaines femmes un véritable parcours du combattant pour avorter.

Pour appuyer son propos, la féministe met en lumière la politique menée par Fratelli d’Italia dans les régions où le parti gouverne. En 2021, la région des Marches (Italie du centre), où 70% des médecins sont objecteurs-trices de conscience, a éliminé la possibilité d’effectuer les avortements médicamenteux dans les plannings familiaux, ce qui oblige les femmes à se déplacer dans les hôpitaux, sachant que dans cette région certains d’entre eux ont 90% de médecins objecteur-trices, et retarde donc leur prise en charge. En Belgique, où l’avortement est sorti du Code pénal en 2018, des femmes ont également témoigné des complications liées au délai légal de douze semaines pour avorter.

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Défense d’une société traditionaliste
Dans la lignée des partis souverainistes européens, Giorgia Meloni défend une société traditionaliste. En 2019, elle avait d’ailleurs participé à un congrès mondial ultra-conservateur sur la famille traditionnelle, à Vérone. "Je suis Giorgia, je suis une femme, je suis une mère, je suis Italienne, je suis chrétienne et vous ne me l’enlèverez pas", avait-elle scandé lors d’un meeting la même année, s’attaquant à ce qu’elle appelle "le lobby LGBT". Un discours devenu célèbre notamment pour son remix techno.

Mais là encore, Giorgia Meloni assure ne pas vouloir toucher la loi permettant l’union civile entre les personnes du même sexe. "C’est une loi assez inoffensive car elle ne permet pas l’adoption pour les couples homoparentaux, ou ne simplifie pas l’adoption de l’enfant du ou de la partenaire", analyse Giorgia Serughetti, chercheuse en philosophie politique à Milan. Toutefois, la chercheuse ne serait pas surprise de voir émerger des mesures limitant les droits des personnes LGTBQI +. Elle imagine, par exemple, une interdiction pour les communes d’enregistrer des couples homosexuels comme deux parents d’un enfant.

L’Italie est déjà un pays où il n’est pas facile de vivre en tant que gay, lesbienne ou d’origine étrangère.

Quant aux migrant·es, "l’agenda est clair : un contrôle sévère des frontières. Les règles d’accès à la citoyenneté italienne ne seront pas non plus améliorées", assure la chercheuse.

Plus qu’une grande rupture sur les droits civiques existants, Giorgia Serughetti s’attend à des mesures symboliques "qui rendront la vie plus difficile aux femmes et aux communautés LGBTQI +, qui renforceront l’idée du retour à une identité hétérosexuelle, italienne, etc., tout en conservant cette image modérée que Giorgia Meloni a réussi à se construire surtout auprès des interlocuteurs internationaux", résume-t-elle.

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L’Italie a "les anticorps pour repousser un vrai danger autoritaire"
Ainsi, peu de risques dans l’immédiat de voir surgir en Italie un modèle calqué sur la Hongrie ou encore la Pologne (dont les dirigeants sont proches de Giorgia Meloni), assure la chercheuse. De plus, "le pays a une Constitution solide, des organismes de contrôle, elle a les anticorps pour repousser un vrai danger autoritaire", rassure Giorgia Serughetti.

Sans compter le tissu militant féministe diffus dans la société italienne. "Il pourrait y avoir des batailles très fortes si les droits devaient être attaqués", analyse à son tour Olivia Guaraldo, professeure de philosophie politique à Vérone. La manifestation organisée ce mercredi 28 septembre par le collectif Non Una Di Meno à l’occasion de la journée internationale du droit à l’avortement en est un bon exemple.

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Ainsi, à court terme, plus qu’un risque de dérive autoritaire "le vrai thème c’est le climat qu’on va respirer dans le pays", assure Giorgia Serughetti. Pour la chercheuse, si les choses ne vont pas radicalement changer – "l’Italie est déjà un pays où il n’est pas facile de vivre en tant que gay, lesbienne ou d’origine étrangère", explique-t-elle – les personnes très hostiles aux homosexuel.les, aux migrant·es, ou encore aux femmes "se sentiront plus autorisées à faire du bruit, à être plus agressives", continue la chercheuse.

Un climat qui s’était déjà fortement ressenti lorsque Matteo Salvini était ministre de l’Intérieur (2018-2019). À l’époque, les inquiétudes face à une escalade de la xénophobie et des épisodes de violences racistes en Italie étaient même remontées jusqu’aux Nations Unies.

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https://www.rtbf.be/article/en-italie-la-victoire-de-giorgia-meloni-fait-craindre-un-recul-des-droits-des-femmes-et-des-minorites-11074800

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Équateur : le président limoge le ministre de l’Intérieur après un féminicide dans une école de police

26 Septembre 2022, 02:49am

Publié par hugo

Équateur : le président limoge le ministre de l’Intérieur après un féminicide dans une école de police
Patricio Carrillo, ex-ministre de l’Intérieur de l’Équateur, à Quito, le 15 juin 2022.
24 sept. 2022 à 07:28

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1 min
Par Belga, édité par Marie-Laure Mathot
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Le président équatorien Guillermo Lasso a annoncé vendredi l’éviction de son ministre de l’Intérieur Patricio Carrillo et de hauts gradés de la police à la suite du meurtre d’une avocate dans une école de formation de la police.

"Le général Patricio Carrillo a consacré sa vie et sa loyauté à l’idéal d’un pays sûr. Cependant, après les événements de ces derniers jours, j’ai décidé que son service prendrait fin aujourd’hui", a déclaré M. Lasso sur une chaîne de télévision nationale.

Le président a qualifié de "féminicide" le meurtre de Maria Belen Bernal, retrouvée morte mercredi après avoir disparu il y a une dizaine de jours dans une école de police de Quito.

Plus tôt dans la journée, le président – qui est rentré en Équateur en soirée après avoir assisté à l’Assemblée générale des Nations unies – a ordonné le limogeage de deux généraux de police et demandé la démission du haut commandement de la police.

Beaucoup de violences sexistes
Le corps de l’avocate de 34 ans, morte étranglée, a été retrouvé sur une colline de la banlieue de la capitale, à environ 5 km de l’École supérieure de police (ESP) où elle était venue retrouver son mari, le lieutenant Germán Cáceres. Celui-ci, aujourd’hui principal suspect, est en fuite dans cette affaire devenue un nouvel étendard de la lutte contre les féminicides dans le pays.

L’Équateur connaît des taux élevés de violences sexistes. Selon le bureau du procureur général, au moins 573 féminicides ont été commis depuis 2014, date à laquelle ce crime est entré dans le Code pénal équatorien. Mais selon la Fondation Aldea, une organisation de défense des droits, 206 féminicides ont été enregistrés depuis le début de l’année.

"Ces décisions ne sont que la première étape d’un long chemin à parcourir pour transformer notre police nationale et guérir en tant que pays", a déclaré M. Lasso à la presse.

Le président a également donné au commandant de la police, le général Fausto Salinas, un délai d'"une semaine pour fournir des résultats définitifs qui permettront la capture de Germán Cáceres".


https://www.rtbf.be/article/equateur-le-president-limoge-le-ministre-de-linterieur-apres-un-feminicide-dans-une-ecole-de-police-11073016

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Les représentations médiatiques de "la femme asiatique" : entre stéréotypes persistants et revendications militantes

26 Septembre 2022, 01:59am

Publié par hugo

 Les représentations médiatiques de "la femme asiatique" : entre stéréotypes persistants et revendications militantes
Ghost in the Shell (Rupert Sanders, 2017).  
23 sept. 2022 à 11:02

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3 min
Par Lilia Vanbeveren*, une chronique pour Les Grenades
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Cet article est le résumé d’un mémoire, ce travail de recherche universitaire est publié en partenariat avec le master Genre.

Différentes interrogations et combats actuels traduisent un réel progrès sociétal en faveur de l’inclusion et de la reconnaissance de la multiplicité des identités. Dans ce contexte, cet article s’intéresse à l’exemple spécifique de "la femme asiatique" et de sa représentation publique – culturelle et médiatique – au sein du cinéma occidental actuel.

L’"identité féminine asiatique" : une représentation biaisée ?
Mais d’abord, qu’est-ce qu’une femme asiatique ? Une vaste question qui recouvre autant de définitions que de personnalités humaines.

Certain·es observateur·rices constatent que, derrière l’appellation "anodine" et banalisée de femme asiatique, se cache en vérité une méconnaissance de la diversité des cultures composant l’Asie, ainsi qu’une étiquette (in) volontairement généralisante cristallisant des stéréotypes et fantasmes populaires. Parmi ces clichés récurrents – régulièrement cités – une femme assignée comme étant asiatique serait :

"douce et invisible" ; "pareille aux autres femmes asiatiques et interchangeable" ; "souple et soumise (au lit)" ; une "masseuse ou une prostituée docile et lascive, au service des hommes et au vagin plus serré que celui des autres femmes" ; une "geisha" ou encore "une femme tigre".

Les femmes asiatiques n’échappent donc pas – comme la majorité de leurs consœurs – à une objectivation, une marchandisation, une érotisation, une fétichisation ou encore une hypersexualisation de son corps. Subordonnée aux hommes (et à leurs désirs), elle est en outre ponctuellement présentée comme étant servile et timide.

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Il n’est guère surprenant, de ce fait, que dans les représentations culturelles et médiatiques (cinéma, photographie, publicité…), elle soit associée, tantôt à une "jeune fille (polie), soumise et craintive", tantôt à une "femme (exotique), tentatrice et cruelle".

Mystères de Londres (Alexander Hall, 1934).
Mystères de Londres (Alexander Hall, 1934). © Tous droits réservés
Mémoire d’une geisha (Rob Marshall, 2005).
Mémoire d’une geisha (Rob Marshall, 2005). © Tous droits réservés
La (re) visibilisation culturelle et médiatique des femmes asiatiques : une avancée contemporaine ?
Plurielles sont les analyses journalistiques, mais aussi universitaires et scientifiques, explorant le lien entre culture, média et identité des femmes asiatiques. Certaines recherches se penchent notamment sur le cinéma et ses influences sur la perception et la construction identitaire des femmes et de la communauté "asiatiques".

Par exemple, des films récents comme Crazy Rich Asians (du réalisateur Jon Chu, sorti en 2018) mettent en avant leur distribution entièrement "racisée", se servant de ce casting asiatique comme d’un argument marketing et une façon de visibiliser la communauté asiatique.

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D’autres encore, des productions hollywoodiennes à grands budgets (blockbusters), destinées à un large public, surfent sur la tendance des (ré) adaptations en se réappropriant des mangas iconiques japonais. Des réalisations cinématographiques qui permettent – d’après ces créateur·rices – de visualiser et de célébrer des œuvres de la culture japonaise, mais qui recourent fréquemment à des acteurs et actrices caucasien·nes pour incarner des personnages d’origine asiatique (un procédé que l’on nomme whitewashing).

Pour n’en citer que deux, on peut évoquer les très controversés, par les critiques et le public, Ghost in the Shell (Rupert Sanders, 2017) et Alita Battle Angel (Robert Rodriguez, 2019).

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Whitewashing à Hollywood : qu’est-ce que c’est ?

Crazy Rich Asians (Jon Chu, 2018).
Crazy Rich Asians (Jon Chu, 2018). © Tous droits réservés
Alita Battle Angel (Robert Rodriguez, 2019).
Alita Battle Angel (Robert Rodriguez, 2019). © Tous droits réservés
En conclusion, et dans un contexte actuel d’exacerbation du racisme anti-asiatique dû à la pandémie de COVID, la (re) visibilisation et la (re) visitation occidentales contemporaines de la représentation des femmes asiatiques constituent-elles une amélioration sociale et militante, fruits des revendications et aspirations de ce siècle ? Ou reflètent-elles au contraire un nouvel outil de pouvoir stigmatisant, une forme de repli communautaire ou encore un asianwashing opportuniste servant le marketing et le merchandising ?

La réponse, loin d’être unique, se situe probablement entre ces divers raisonnements : l’important étant d’expliciter, de considérer et de respecter les points de vue de chacun·e.

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Sororasie, unies pour dénoncer l'invisibilisation et la stigmatisation des femmes asiatiques


*Lilia Vanbeveren se présente comme une idéaliste rêvant à un monde plus ouvert, créatif et sensible où chacun.e pourrait s’épanouir librement selon ses valeurs.


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https://www.rtbf.be/article/les-representations-mediatiques-de-la-femme-asiatique-entre-stereotypes-persistants-et-revendications-militantes-11072074

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Exposition : Queering Brussels ou comment concevoir une architecture plus inclusive pour les minorités LGBTQIA +

26 Septembre 2022, 01:31am

Publié par hugo

 Exposition : Queering Brussels ou comment concevoir une architecture plus inclusive pour les minorités LGBTQIA +

20 sept. 2022 à 17:07

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3 min
Par Maxime Maillet

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Associer architecture et droits des personnes LGBTQIA + *, c’est l’ambition de l’exposition Queering Brussels proposée aux Halles Saint-Géry cet automne. " Dans cette exposition, nous questionnons la norme - architecturale ou liée à une orientation sexuelle ou une identité de genre. Comment peut-on déconstruire cette norme ? Et comment le fait d’être une personne " hors-norme " nous pousse à concevoir différemment l’espace ? " explique Camille Kervella, architecte et commissaire de l’exposition.

Cette exposition part d’un constat. Dans notre capitale, l’espace public et son agencement ne permettent pas toujours de se sentir en sécurité quand on est une personne queer**. Camille Kervella nous donne deux exemples : la Place de la Bourse et les toilettes publiques.

Si vous vous baladez sur le Boulevard Anspach pour rejoindre la place de la Bourse, vous pouvez constater que cet endroit reste majoritairement masculin et hétérosexuel. Sur les marches de la Bourse, avant les travaux, les hommes seuls ou en groupe s’y sentent plus légitimes de se poser alors que les femmes et les minorités LGBTQIA + préfèrent traverser la place et ne pas s’y attarder. "La place de la Bourse ne favorise pas le vivre-ensemble et la sérénité. Cela peut s’expliquer aussi par l’environnement et son organisation. Tout ce qu’on trouve (ou non) aux alentours : les terrasses, les types de commerces, les lieux culturels. "

De même, non seulement les toilettes ne sont pas assez nombreuses en ville, mais elles se révèlent aussi peu inclusives en ne proposant par exemple que des urinoirs ou que des toilettes genrées. " Cela peut représenter une forme de violence pour les personnes dont l’identité de genre ne correspond pas à la norme. Or, on parle ici de répondre à un besoin humain. Avec un prisme queer, on peut donc s’interroger : pourquoi ne pas proposer davantage de toilettes non genrées, même si ce n’est pas forcément adapté dans toutes les situations ? "

>> A voir : l’émission hors-cadre de BX1 nous présente l’association l’Architecture qui dégenre, en charge de l’exposition

A Bruxelles, on trouve aussi un quartier LGBTQIA +, majoritairement pour les hommes gays avec des bars concentrés autour de la rue Marché au Charbon. Pour Camille Kervella, ces espaces doivent être préservés. " Ces lieux garantissent un refuge, une sécurité pour les personnes LGBTQIA +, mais il faut aussi " hacker " d’autres espaces : occuper des lieux qui ne sont pas propres à la communauté LGBTQIA +, voire moins accueillants pour susciter des réflexions et mieux favoriser le vivre-ensemble. "

Concevoir autrement l’espace public
Pour Camille Kervella, ces exemples montrent que nous devons questionner notre architecture urbaine et notre espace public. Comment peut-on les rendre plus accessibles et plus sûrs pour que les personnes LGBTQIA + puissent se les approprier ? C’est là qu’interviennent des associations et des experts, dont des architectes et des urbanistes. " L’architecture est un outil pour concrétiser les besoins et les désirs existant dans la société, y compris chez des minorités LGBTQIA + ", explique Camille Kervella.

L’exposition Queering Brussels ne nous donne pas de réponses toutes faites, mais se présente plutôt comme un point de départ pour concevoir autrement notre espace public. Les artistes et les architectes – des jeunes diplômé·e·s – soulèvent des problématiques, nous proposent des alternatives, modifient des lieux déjà présents pour les rendre plus inclusifs aux minorités LGBTQIA +. Bref, il s’agit de mettre en avant un autre futur possible pour la ville de Bruxelles sous les prismes queer.

Le projet est porté par l’association " L’architecture qui dégenre ", à la base des journées du Matrimoine. Cette exposition est à découvrir gratuitement jusqu’au 21 novembre aux Halles Saint-Géry dans le centre de Bruxelles. Le vernissage de l’exposition se tient ce jeudi 22 septembre 2022. Des visites guidées sont également organisées ce week-end dans le cadre des journées du Matrimoine, ainsi que des conférences sur la thématique du genre et de l’architecture en octobre et en novembre.

* LGBTQIA + pour Lesbienne, Gay, Bisexuel, Trans, Queer, Intersexe, Asexuel et + pour ceux et celles qui ne se reconnaissent pas dans les orientations sexuelles et les identités de genre citées précédemment.

** Une personne queer ne se reconnait pas dans la norme hétérosexuelle et cherche à redéfinir les questions de genre – indépendamment de son orientation sexuelle.


https://www.rtbf.be/article/exposition-queering-brussels-ou-comment-concevoir-une-architecture-plus-inclusive-pour-les-minorites-lgbtqia-11070557

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"Quand tu écouteras cette chanson" de Lola Lafon : des émotions à fleur de peau

26 Septembre 2022, 01:25am

Publié par hugo

"Quand tu écouteras cette chanson" de Lola Lafon : des émotions à fleur de peau
Lola Lafon.
18 sept. 2022 à 12:40

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4 min
Par Fanny De Weeze*, une chronique pour Les Grenades
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"Je vais pouvoir te confier toutes sortes de choses, comme je n’ai encore pu le faire à personne, et j’espère que tu me seras d’un grand soutien", ainsi commence le journal d’Anne Frank en juin 1942. À ce moment-là de l’Histoire, la jeune fille est encore "libre".

Un mois plus tard, sa famille et elle emménageront dans l’Annexe du 74 Westermarkt à Amsterdam. L’autrice Lola Lafon a choisi cet endroit pour passer dix heures entières en août 2021. Quand tu écouteras cette chanson, édité dans la collection Ma nuit au musée, est le fruit de cette nuit. Troublante, intime et précieuse.

Cette collection dirigée par Alina Gurdiel offre à des écrivains et écrivaines l’opportunité de s’isoler dans un musée de leur choix et d’en tirer un livre hybride entre expériences, fictions et pensées nocturnes.

Lola Lafon nous propose un récit alliant l’Histoire, celle de la persécution juive, mais également son histoire personnelle avec ses traumatismes familiaux, les différentes cultures auxquelles elle est attachée et aussi son désir d’écrire. Lire ces mots-là, c’est ressentir des émotions à fleur de peau, de la justesse et de la précision dans chaque paragraphe et chaque virgule placée.

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Donner la parole aux femmes

Si Lola Lafon nous émeut autant, c’est qu’il est évident que cela tient également de sa capacité à donner la parole à des femmes que trop peu écoutent. En se rendant dans l’Annexe et en écrivant sur Anne Frank, elle affirme ce désir de proposer ce genre de roman.

Comme elle l’explique, la jeune fille est devenue au fil des années une porte-voix et les lecteurs·rices ont commencé à oublier sa véritable identité. Il faut voir comment certains cinéastes et metteurs en scène ont gommé des éléments jugés "problématiques" pour défendre une image un peu trop lissée.

Lola Lafon avec son récit permet de comprendre toute la machinerie qui s’est mise en place lors de la parution du Journal afin de l’ériger au rang de témoignage de l’horreur de la Shoah. L’autrice écrit très justement :"Il y a tant d’amour, tellement d’amour autour d’elle : un amour fou, dévorant, qui autorise les prétendants à parler pour celle qu’ils disent aimer, plus fort qu’elle, à sa place."

Tout au long de ce livre, elle se livre comme Anne Frank l’a fait dans son journal. Elle confie qu’Anne l’obsède plus que de raison et qu’elle a été réveillée par le besoin d’écrire sur elle et par l’envie de s’immerger totalement à l’endroit où l’adolescente a passé plus deux ans.

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Lola Lafon nous raconte la trajectoire de ses propres grands-parents juifs, du fait que sa mère a appris très jeune à ne jamais mentionner son identité juive. Elle retrace ensuite son enfance sous le régime de la terreur, celui de Nicolae Ceaușescu en Roumanie et son arrivée en France à l’âge de douze ans.

De ces années en Roumanie, de l’histoire familiale jamais racontée, elle garde un sentiment qu’il ne faut pas toucher à ce qui n’est plus. Qu’il est inutile de creuser les traumatismes. Elle écrit à ce propos : "Les mots se sont révélés impuissants, se sont éclipsés de ces familles-là, de ma famille. L’histoire qu’on ne dit pas tourne en rond, jamais ponctuée, jamais achevée. Elles sont en lambeaux, ces lignées hantées de trop de disparus, dont on ne sait même pas comment ils ont péri. Gazés, brûlés ou jetés, nus, dans un charnier, privés à jamais de sépulture. On ne pourra pas leur rendre hommage. On ne pourra pas clore ce chapitre."

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Dans les méandres de la mémoire
En faisant le parallèle avec les souvenirs tus et scellés par les survivant·es de la Shoah, l’autrice se raconte, se dévoile de manière intime, nous emmène dans les méandres de sa mémoire dont elle n’avait jusque-là pas parler.

Cette nuit dans l’annexe et dans le musée y attenant apporte à Lola Lafon la clé pour pouvoir évoquer avec nous son histoire faite de déchirures, "dans ces familles, on conjuguera tout au 'plus jamais' : il y a ces pays où plus jamais on ne reviendra – la Pologne, la Russie – des terres de persécutions. Il y a les langues que plus jamais on ne parlera."

L’histoire qu’on ne dit pas tourne en rond, jamais ponctuée, jamais achevée. Elles sont en lambeaux, ces lignées hantées de trop de disparus, dont on ne sait même pas comment ils ont péri.

Quand tu écouteras cette chanson ne peut se réduire à un livre sur la Shoah ou sur Anne Frank. Il est beaucoup plus grand qu’il n’y parait. Les mots de Lola Lafon trouvent avec ce livre une portée universelle car en parlant de cette jeune fille que "tout le monde connait", elle arrive à distiller son histoire ainsi que celle d’autres millions de personnes et crée le lien entre les déraciné·es et les oublié·es.

Tour à tour chanteuse et écrivaine, Lola Lafon a publié sept romans, a participé à plusieurs recueils de nouvelles et écrit ponctuellement dans le magazine Le 1 et dans Le Monde. C’est en 2003 qu’elle publie son premier livre Une Fièvre impossible à négocier. Son précédent ouvrage, Chavirer, a reçu des distinctions telles que le Prix du roman des étudiants et le Prix Landerneau des lecteurs.

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*Fanny De Weeze est une lectrice passionnée qui tient un blog littéraire (Mes Pages Versicolores) depuis 2016 sur lequel elle chronique des romans, des essais et des bandes dessinées.

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Épisode 116 - Lola Lafon • La Poudre (spotify.com)

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Femmes noires au cinéma : aller "au-delà des histoires d’immigration, de gangs et de prostitution" ,

30 Août 2021, 20:20pm

Publié par hugo

 Femmes noires au cinéma : aller "au-delà des histoires d’immigration, de gangs et de prostitution"
 
Tiphaine Counali, pour Les Grenades
 Publié le dimanche 29 août 2021 à 09h29
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En mars dernier, sortait le film Regard noir, co-réalisé par l’actrice Aïssa Maïga. Le documentaire questionne les origines du racisme à l’encontre des noirs dans le cinéma.

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Le long-métrage interroge les origines du racisme du cinéma français, américain et brésilien. La comédienne avait déjà mis en lumière la problématique en publiant, en 2018, Noire n’est pas mon métier. L’ouvrage est un essai collectif co-rédigé par seize actrices françaises noires et métisses dont Firmine Richard, Shirley Souagnon et Karidja Touré.

Dans l’ouvrage, les comédiennes dénoncent les discriminations à l’encontre des femmes noires et métisses dans le cinéma français, à la télévision, au théâtre et dans le milieu culturel plus largement. Moment marquant : pour promouvoir le livre et son message, les seize contributrices  ont monté ensemble les marches du Festival de Cannes, point levé.

Mis en lumière en 2018 déjà, la question de la place des actrices noires a depuis peu évolué. Stéréotypes historiquement ancrés, manque de visibilité ou rôles creux, les rôles complexes se font toujours rares.


"Si l’on demande à des gens de donner le nom d’une actrice ou d’un acteur noirs, ils buguent. À part Omar Sy, les gens vont dire : 'aah mais oui, c’est celui qui joue dans ce film…'". Priscilla Adade est actrice et comédienne depuis presque dix ans. Belge d’origine béninoise, ghanéenne et togolaise, elle remarque que dans l’industrie du cinéma francophone, en tant que personne noire, "On a pas de nom et d’identité comme ont les acteurs blancs. C’est le cas de tous les non-blancs".

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Pour Djia Mambu, journaliste et blogueuse, il y a certes aujourd’hui "une volonté d’ouvrir le débat, mais dans les faits, rien n’est mis en place pour changer". L’auteure de Peaux noires, médias blancs, affirme que "même en prenant en compte le contexte minoritaire en France et en Belgique [...], les personnages noirs au cinéma sont sous-représentés". Les femmes noires, stigmatisées du fait de leur sexe et de leur couleur de peau, sont encore moins visibles au cinéma.

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Priscilla Adade lors d’un filage de la pièce « Fire will become ashes but not now » de Pitcho Womba © Nafi Yao
"Légère, prostituée, victime, immigré, fragile"
Priscilla Adade constate une évolution dans l’industrie, mais un peu superficielle. Les personnages de couleurs sont certes présents, mais souvent invisibles car accessoirisés. "Ce n’est pas l’histoire principale du film, ni le protagoniste central. C’est l’un des potes. Aujourd’hui on va toujours mettre un noir à un moment, mais parce qu’il ‘faut’ et le personnage n’est pas élaboré, creusé, défini". 

Lorsqu’ils ne sont pas invisibles, les personnages noirs sont stéréotypés. L’actrice remarque que beaucoup de castings sont "soit un rôle secondaire, on le voit peu et on va mettre une personne de couleur mais dont l’origine a très peu d’importance, soit tu es un gangster, un immigré, une prostituée, une aide-soignante".  En France, la plupart des rôles pour les acteurs et actrices noir·es se passent en milieu urbain. En Belgique, les rôles tournent souvent autour de l’immigration et la prostitution décrit Priscilla Adade. Djia Mambu cite le film “Black” d’Adil El Arbi et Bilall Fallah, comme l’un des seuls long-métrages belges avec plusieurs rôles principaux de femmes de couleur. "Il y a un personnage ou deux de femmes noires, mais là aussi ça concerne des luttes entre communautés ethniques".


Djia Mambu affirme que dans le paysage cinématographique, la femme noire, soit "on la montre légère, prostituée, victime, immigrée, fragile", soit "elle est mystérieuse, sauvage". Cette représentation de la femme noire comme exotique et hypersexualisée s’ancre dans le passé colonial belge et français et le mythe du “bon sauvage”.

►►► A lire aussi : Colonisation: aux origines de l'hypersexualisation des femmes noires

Le rôle de Joséphine Baker dans Zouzou l’illustrait déjà en 1934. Zouzou y est est sensuelle et clownesque. Le personnage a une identité ethnique ambigüe : Zouzou est née en Polynésie, elle est jouée par une américaine, qui revient de Martinique et chante "Qui me rendra mon pays, Haïti". Le personnage est écrit comme un personnage “noir”, sans identité définie. La journaliste et activiste Rokhaya Diallo explique que dans le cinéma français, les personnages noirs sont historiquement des "supports de diffusion des préjugés".

Le cinéma américain, un idéal ?
Le cinéma américain est cité comme un exemple à suivre par les deux femmes. Priscilla Adade a grandi avec ce cinéma. "Je me suis demandée pourquoi. C’est parce qu'il y a plus de personnages noirs auxquels je peux m’identifier". L’industrie a commencé une prise de conscience après la lutte pour les droits civiques dans les années 1950 et 1960.

Aujourd’hui de nombreux studios accueillent davantage de producteurs, d’acteurs et de réalisateurs non-blancs. Des chaînes communautaires destinées à une audience noire permettent à la population d’exister dans l’espace médiatique, à l’instar de BET.

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Jackie Robinson et Louise Beavers dans une scène du film The Jackie Robinson Story. 1950 © Tous droits réservés
Mais ce cinéma n’est pas  non plus exempt de toute critique.  Aux Etats-Unis et en France, l’industrie fait preuve de colorisme. "On voit une distinction des femmes noires selon la carnation de leur peau. La femme la plus noire est la méchante, la moins jolie", explique la journaliste.

Un autre phénomène, particulièrement présent aux Etats-Unis, irrite Djia Mambu: la super-black woman. "Celles qu’on va mettre en avant, sont celles qui sont déjà confirmées dans un autre art". Lorsqu’on a commencé à voir des rôles importants de femmes noires dans des films à destination d’un public international, ils étaient alors joués par des stars internationales. Whitney Houston dans Bodyguard, Janet Jackson dans Poetic Justice, et récemment Rihanna dans Ocean’s 8 liste Djia Mambu. "On a tendance à aller chercher une personnalité à la place de comédiennes de métier [...]. On a peur de miser sur une comédienne noire non-confirmée, on se dit qu’il faut prendre une star pour que ça marche".

►►► A lire aussi : Le racisme dans les médias, un fait divers plutôt qu'un phénomène de société ?

Les femmes noires dans le cinéma américain n’échappent pas aux rôles stéréotypés. Trois représentations, issues de l’histoire esclavagiste du pays, reviennent historiquement. La Mammy maternelle et servile, la Jezebel sexualisée et amorale et la Sapphire, forte et agressive. Ces stéréotypes à l'écran renforcent les clichés dont sont victimes les femmes noires. Michelle Obama et Serena Williams ont, par exemple, été à de nombreuses reprises taxées d’ "angry black woman" (femmes noires en colère).


Un manque de personnes non-blanches dans l’écriture
Priscilla Adade est catégorique, le fond du problème se trouve au niveau de la création artistique. "Tant qu’on n’aura pas plus de réalisateurs, de scénaristes, de producteurs noirs, les choses ne changeront pas". Djia Mambu précise que les créateurs de contenus audiovisuels ont tendance à créer des choses qui leur ressemblent. "On est les meilleurs pour créer ce à quoi on est habitué. C’est humain". Les créateurs et créatrices noir·es n’ont pas assez accès aux positions où ils pourraient créer des personnages et du contenu qui leur parle et leur ressemble.

Si c’est pour parler de gangs à Matongé, là on donne de l’argent, là c’est une histoire ‘de noirs’. Par contre, si c’est plus subtil, c’est plus compliqué

Comment ouvrir l’industrie à davantage de personnes non-blanches ? En la démocratisant. "Il faut être riche pour être producteur. C’est un truc d’homme bourgeois blanc, comme dans beaucoup de milieux où il y a de l’argent". L’actrice estime qu’il faut plus d’aides comme la Commission du cinéma, qui finance des projets de longs et courts-métrages.

Des fonds avec un système d’anonymisation des œuvres, pour éviter aux mêmes scénaristes connus d’être sélectionnés chaque année grâce à leur nom. La comédienne recommande également l’imposition de quotas dans les membres du jury dans un premier temps. ""La raison pour laquelle certaines histoires ne sont pas racontées [...] c’est que le jury n’est pas diversifié. Il aime un certain genre d’histoires. [...] Si c’est pour parler de gangs à Matongé, là on donne de l’argent, là c’est une histoire ‘de noirs’. Par contre, si c’est plus subtil, c’est plus compliqué".

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Du changement à venir ?
Depuis 2018, l’industrie du cinéma a-t-elle évolué ? "Je ne vois pas de progrès en Belgique", assure Djia Mambu. "Ça me fait plaisir quand je vois des actrices comme Babetida Sadjo dans une série Netflix, mais c’est encore insuffisant". Pour Priscilla Adade aussi, "ça n’a rien changé. Babetida et moi on a été touché par ça, clairement c’est exactement la même situation ici". 

Priscilla Adade pense que le nombre réduit d’actrices noires en Belgique est une raison, le manque de rôles aussi. "On a pas encore eu de mouvements comme ça ici. On y pense. J’étais surprise de voir qu’il n’y avait pas beaucoup de liens entre les actrices noires, comme il avait très peu de rôles. C’est moins unifié que maintenant". Mais la comédienne assure que le changement n’est pas fini: "On est prêtes à tout faire péter !"

"Ce qu’on ne voit pas n’existe pas"
Mais pourquoi la question de la représentation est-elle si importante? "Parce que ce qu’on ne voit pas n’existe pas", répond Djia Mambu. Le cinéma, comme d’autres médias audiovisuels, peut donner l’illusion de représenter le réel. Les représentations communiquées peuvent alors nourrir les clichés et stéréotypes préexistants sur la population noire.

"Moi on m’a demandé plusieurs fois comment ça se fait que je n’ai pas l’accent! [...] Peut-être parce que la personne, l’image qu’elle a de la femme noire, elle a un accent d’une partie de l’Afrique prononcé", précise Djia Mambu.

Priscilla Adade, quant à elle, milite pour "qu’on arrête de dire un noir, une noire. Que cela soit aussi difficile de réduire un personnage à ça que ça l’est pour un personnage blanc".

Cet article a été écrit dans le cadre d'un stage au sein des Grenades-RTBF.

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Au Tigré, le viol est utilisé comme arme de guerre , femmes, feminisme,

20 Août 2021, 23:46pm

Publié par hugo

 Au Tigré, le viol est utilisé comme arme de guerre
Camille Wernaers
 Publié le jeudi 19 août 2021 à 10h26
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Elle s’est rendue dans de nombreux pays en guerre pour documenter les violences sexuelles qui se cachent derrière tous les conflits armés. Donatella Rovera est pourtant catégorique quand elle parle de ce qu’il s’est passé en Éthiopie, dans la région du Tigré. "Ces 20 dernières années, j’ai été en Irak, en Somalie et au Soudan. La situation au Tigré est la plus grave que j’ai vue, en termes d’ampleur géographique et temporelle des viols", explique aux Grenades cette enquêtrice spécialisée dans les crises et les conflits au sein du siège d’Amnesty International.

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En novembre 2020, les Forces de défense nationales éthiopiennes, les Forces de défense érythréennes - le pays voisin -, les Forces spéciales de police de la région Amhara et de la milice amhara Fano ont investi et pris le contrôle de la région du Tigré, plongeant le pays dans un conflit armé. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a récemment appelé son armée et les milices alliées à donner "une fois pour toutes" un coup d'arrêt aux combattants du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Le chef du gouvernement enjoint tous "les Éthiopiens aptes et majeurs" à "montrer leur patriotisme" et à rejoindre les forces de défense nationale.

"On parle trop peu de ce conflit, notamment parce que le gouvernement éthiopien a instauré un black out dans la région, il n’y a pas de réseau téléphonique, pas d’accès à internet. C’est très difficile de savoir ce qu’il se passe. Les humanitaires sont fortement restreint·es dans leur travail et sont accusé·s de soutenir les rebelles. Nous avons pu contacter des personnes sur place de la mi-mars de cette année au début du mois de juin. Depuis, c’est à nouveau impossible", observe Donatella Rovera.

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"Je ne sais pas s’ils se sont rendu compte que j’étais une personne"
Selon un rapport d’Amnesty International publié le 11 août et intitulé "Je ne sais pas s’ils se sont rendu compte que j’étais une personne", le viol a été utilisé comme arme de guerre au Tigré par les soldats gouvernementaux et les différentes milices. "Il y a eu énormément d’exactions commises dans ce contexte, des meurtres de masse, des pillages, des mises en détention et aussi des violences sexuelles", souligne Donatella Rovera. "Les forces gouvernementales et les milices ont commis des attaques systématiques contre les femmes et les filles, y compris donc les mineures, dès les premiers jours de leur arrivée au Tigré et tout au long du conflit. Ce ne sont pas des actes isolés. Ce sont des viols de masse, cela signifie que les femmes sont violées par plusieurs hommes, durant plusieurs jours. Certaines sont retenues comme esclaves sexuelles pendant des semaines, pendant lesquelles elles sont violées chaque jour."

Elle s’arrête pour respirer un instant. Puis reprend : "Ces viols s’accompagnent de torture, comme des passages à tabac. Ils ont inséré du gravier et du plastique dans le vagin de plusieurs femmes pour leur faire encore plus mal, plus de dégâts, pendant les viols. Elles n’ont pas pu le retirer d’elles-mêmes, elles ont attendu parfois de semaines avant de pouvoir trouver un hôpital et recevoir des soins. Elles subissent aussi des insultes et des commentaires ethniques humiliants, des menaces de mort envers elles, leur famille ou leur communauté. On constate aussi qu’elles sont enlevées dans des contexte très différents : chez elles, dans les transports publics, en essayant de quitter le pays ou de se cacher dans les régions rurales. Plusieurs femmes ont été violées devant des enfants ou devant des membres de la communauté, d’autres femmes ou des hommes. Cela indique une volonté claire d’infliger le plus de dégâts possible, aussi bien physiquement que psychologiquement".

Amnesty International s’est entretenue avec 63 victimes de violences sexuelles, ainsi qu’avec des professionnel·es de la santé. 28 victimes ont désigné les forces érythréennes comme les seuls auteurs des viol.

Leurs auteurs foulent aux pieds les principes qui fondent notre humanité. Cette situation doit cesser

Letay* (20 ans, de Baaker) a indiqué à Amnesty International que des hommes armés qui s’exprimaient en amharique et portaient un mélange d’uniformes militaires et de vêtements civils l’avaient agressée à son domicile en novembre 2020. "Trois hommes sont arrivés dans la pièce. C’était le soir, il faisait déjà nuit […] Je n’ai pas crié ; ils m’ont fait comprendre par des gestes que je ne devais pas faire de bruit, sinon ils me tueraient. Ils m’ont violée l’un après l’autre [...] J’étais enceinte de quatre mois ; je ne sais pas s’ils s’en sont rendu compte. Je ne sais pas s’ils se sont rendu compte que j’étais une personne", témoigne-t-elle. Nigist* (35 ans, mère de deux enfants, de Humera) que des militaires érythréens l’ont violée ainsi que quatre autres femmes le 21 novembre 2020. Elle a déclaré : "Trois d’entre eux m’ont violée devant mon enfant. Il y avait une femme enceinte de huit mois parmi nous, ils l’ont violée aussi [...] Ils se sont rassemblés comme des hyènes flairant quelque chose à manger [...] Ils ont violé les femmes et massacré les hommes."

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"Ils nous ont toutes violées"
Tseday* (17 ans) a indiqué à Amnesty International qu’elle avait été enlevée par huit militaires érythréens et maintenue en captivité pendant deux semaines. Elle explique : "Ils m’ont emmenée à la campagne, dans un champ. Il y avait beaucoup de militaires ; huit d’entre eux m’ont violée […] En général, ils sortaient monter la garde en deux équipes. Quand quatre partaient, les quatre autres restaient et me violaient." Blen* (21 ans) a quant à elle expliqué que des militaires érythréens et éthiopiens l’ont enlevée le 5 novembre 2020 et détenue 40 jours avec une trentaine d’autres femmes. "Ils nous violaient et nous affamaient. Ils étaient tellement nombreux, ils nous violaient à tour de rôle. Nous étions une trentaine de femmes [...] Ils nous ont toutes violées.", témoigne-t-elle.

Selon l’organisation, les services de santé du Tigré ont enregistré 1.288 cas de violences liées au genre entre février et avril 2021. L’hôpital d’Adigrat a recensé 376 cas de viol entre le début du conflit et le 9 juin 2021. Cependant, de nombreuses victimes ont indiqué à Amnesty International qu’elles ne s’étaient pas rendues dans un centre de santé, ce qui laisse à penser que ces chiffres ne représentent qu’une petite fraction des viols commis dans le contexte du conflit.

"Des crimes de guerre, voire contre l’humanité"
"La gravité et l’ampleur des infractions de nature sexuelle qui ont été commises sont particulièrement choquantes et ces actes constituent des crimes de guerre, voire des crimes contre l’humanité. Leurs auteurs foulent aux pieds les principes qui fondent notre humanité. Cette situation doit cesser", a réagi Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International. "Il faut que l’État éthiopien prenne des mesures immédiates pour empêcher les membres des forces de sécurité et des milices alliées de commettre des violences sexuelles et que l’Union africaine fasse tout ce qui est en son pouvoir pour que le Conseil de paix et de sécurité se penche sur ce conflit", continue-t-elle.

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C’est d’autant plus important que l’impunité dont bénéficient les auteurs, outre les conséquences graves pour les victimes, aurait une autre répercussion dans la région. "Le conflit est entré dans une autre dynamique, les combattants du Front de libération du peuple du Tigré ont réussi à récupérer le contrôle du Tigré et sont entrés dans deux régions voisines. On a reçu des indications, que nous devons encore vérifier, qu’ils se livreraient désormais eux aussi à des viols, dans un esprit de revanche. Ça devient une excuse, une justification. Ce ne serait pas la premières fois que des victimes deviennent bourreaux, que des retournements de ce genre se produisent dans des conflits armés ou des guerres. Il faut traduire les auteurs de violences sexuelles dans cette région en justice", conclut Donatella Rovera.

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Jeux vidéo : la fin d’un "boys’ club" ? , femmes,

18 Août 2021, 08:45am

Publié par hugo

 Jeux vidéo : la fin d’un "boys’ club" ?
 Jeux vidéo : la fin d’un "boys’ club" ?
Jeux vidéo : la fin d’un "boys’ club" ?
   
Tiphaine Counali
 Publié le mardi 17 août 2021 à 08h59
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Depuis fin juillet, l’orage gronde à Blizzard. La mythique société de développement et d’édition de jeux vidéo américaine est accusée de promouvoir une culture du harcèlement sexuel et de discrimination envers ses employées femmes. Énième scandale sexiste dans l’industrie du jeu vidéo. Les mentalités changent-elles vraiment ?


"Ça a un furieux air de déjà-vu. Les affaires de sexisme dans le jeu vidéo, c’est des serpents de mer". Isabelle Collet est chercheuse à l’Université de Genève sur les questions de genre dans la technologie. Elle n’est pas surprise par la plainte déposée contre le studio Activision Blizzard pour culture de harcèlement sexuel et pratiques discriminatoires envers les femmes.

La société américaine développe et édite des jeux vidéo bien connus, tels que Call of Duty ou World of Warcraft. Licenciements faciles, ambiance de boys’ club, évaluations négatives en cas de congé maternité… Les 20% d’employées femmes de l’entreprise seraient moins bien traités que leurs collègues masculins. La plainte a été publiée par une agence de l’Etat de Californie. Elle détaille également des faits de harcèlement sexuel impunis. Suite à sa publication le 20 juillet, de nombreux employés manifestent : ils critiquent la réaction de l’entreprise et estiment que l’éditeur n’a pas pris la mesure de la gravité des accusations.

Pour Isabelle Collet, le scandale Blizzard, c’est la suite du mouvement Metoo dans le jeu vidéo. "Les directions n’ont pas encore compris le sérieux de l’affaire parce que, comme d’habitude, on commence par nier, minimiser".

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Un milieu de "gros pistolets, voitures et filles à forte poitrine" 
La chercheuse pointe deux obstacles à la prise de conscience du sexisme dans les industries du jeu vidéo : un système de cooptation qui dessert les femmes et un manque de femmes dans les postes stratégiques. Dans le secteur du numérique, un système d’entre-soi, "entre copains", est très présent continue l’universitaire. "On choisit les gens qui nous ressemblent et l’un des critères premiers est : ‘on est du même sexe et on a vécu les mêmes expériences ensemble’".  Ce système nuit à la diversité de sexe et d’ethnicité et favorise un fonctionnement en vase clos.

Plus l’informatique a rapporté de l’argent et assuré des métiers, moins il y a eu de femmes explique Isabelle Collet. A l’origine, le jeu vidéo n’était pas considéré comme une activité dite ‘masculine’. "Tetris, on ne peut pas dire que c’est un jeu qui glorifie les valeurs viriles". L’industrie du jeu vidéo a un moment décidé de se concentrer sur un public masculin car il a été estimé que celui-ci était plus prometteur et plus prompt à dépenser son argent.

Une partie du jeu vidéo dit ‘féminin’ a été abandonné à la société Mattel, fabricant de Barbie, qui a "tout peint en rose et produit des jeux vidéo intellectuellement très pauvres". Bien qu’il y ait eu de grandes créatrices de jeu d’aventure dès les débuts du secteur, il y a eu historiquement une masculinisation du jeu vidéo, en glorifiant des attributs considérés virils. "Gros muscles, gros pistolets, voitures et filles à forte poitrine", liste la chercheuse.

►►► A lire aussi : Activision Blizzard accusé de discrimination et harcèlement : la fois de trop pour le secteur du jeu vidéo ?

Une certaine fatalité s’est installée, qui a ensuite justifié une culture virile et laissé croire que le milieu du jeu vidéo est fondamentalement masculin. "Mais l’univers geek, ce n’est pas que Conan le Barbare". Ce type de jeux est peut-être celui qui rapporte le plus aux studios, mais cela laisse de côté toute une partie de l’industrie. On voit du changement aujourd’hui : les créateurs de jeux vidéo se sont rendus compte qu’ils passaient à côté de la moitié des acheteurs potentiels. Les jeux se diversifient et on voit de plus en plus de personnages féminins apparaître. "Aujourd’hui dans quasiment tous les jeux tu peux incarner un homme ou une femme", confirme Manonolita, une jeune streameuse carolorégienne. L’univers gaming se diversifie, mais un problème persiste : la féminisation du métier.

Où sont les femmes ? 
Manonolita est streameuse depuis cinq ans sur Twitch, une plateforme de streaming de vidéo. La gameuse se filme en jouant en direct à différents jeux.

Cette année, elle a été victime de harcèlement pendant plusieurs mois. Un déferlement de commentaires sexistes, de menace de viol et de menaces de mort. Pour la joueuse, le sexisme dans l’industrie du jeu vidéo est un cercle vicieux. Beaucoup de femmes ne se tournent plus vers ces études par crainte de devoir faire face à un milieu sexiste, mais alors "s’il y a peu de femmes qui font ce genre d’étude, il y a peu de femmes qui vont rejoindre ce type d’entreprises et du coup forcément, le secteur reste masculin", et la mentalité d’entre-soi viril perdure. "On est de plus en plus de femmes à s’investir dans le gaming et dans le développement. Quand il y aura 50% de femmes, là ça changera la donne". Les femmes sont également très tôt orientées vers d'autres filières d'étude, à causes des préjugés.

►►► A lire aussi : #Protectmanonolita : vaste mouvement de soutien à Manon, streameuse belge, victime de menaces de mort et de viol


Isabelle Collet est catégorique : pour embaucher davantage de femmes dans l’informatique, il faudrait déjà un meilleur respect des droits du travail. "Le harcèlement, la discrimination salariale et le fait de licencier des femmes enceintes, c’est interdit". La culture de cooptation, les représentations viriles des jeux vidéo ainsi que l’abondance et la férocité des scandales dans le milieu du jeu vidéo freinent les potentielles étudiantes.

"On me dit souvent qu’on ne comprend pas pourquoi les femmes ne veulent pas venir dans le numérique. Quand on regarde Blizzard, on comprend. […] À partir du moment où les programmeuses considèreront que ce milieu n’est pas toxique, là on pourra commencer à essayer de recruter". Mais depuis le mouvement Meetoo, la chercheuse remarque tout de même un changement dans le secteur. "Quand les femmes disent qu’il y a une culture du viol et du harcèlement, on les écoute, avant on disait qu’elles exagéraient et ne comprenaient pas l’humour". L’affaire Blizzard est en elle-même une avancée : "beaucoup d’employés masculins se sont joints aux revendications pour arrêter de dire que c’est juste une affaire de femmes, non c’est une affaire qui concerne tout le monde". Les femmes qui dénoncent aujourd’hui sont moins isolées qu’auparavant.

►►► A lire aussi : Nouvelles technologies: à la recherche des programmeuses de la sororité

Et en Belgique ?
Jean Gréban est le coordinateur de la Wallonia Games Association (WALGA), qui représente, structure et anime le secteur du jeu vidéo en Wallonie. Il assure que la question du genre fait partie des points de réflexion du secteur. Depuis quatre mois, le coordinateur travaille comme consultant indépendant avec la ville de Bruxelles, les écoles et centres de formation pour faire un état des lieux du secteur et discuter, entre autres, de la question du genre.

Il a été proposé de mettre en place de séances d’initiation au jeu vidéo dans les écoles dès la primaire pour favoriser l’accès de l’activité aux jeunes filles. L’entrepreneur cite également l’association bruxelloise Interface 3, qui propose des formations en informatique pour femmes, et notamment un cursus de développement en jeu vidéo réservé au public féminin.

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En Belgique, elles ne seraient que 7% contre 93% d’hommes à travailler dans la conception de jeux vidéo. Joyka de Reyst est artiste technique pour Larian Studios, la plus grosse société de développement de jeux en Belgique. Entre programmation et art, la technicienne travaille depuis six ans dans le studio gantois. Pour elle, son environnement de travail n’est pas toxique comme celui des studios Blizzard ou Ubisoft, d’où sont issues plusieurs affaires de sexisme.

Dans son bureau à Gand, elle n’a pas remarqué de comportements qui pourraient témoigner d’une culture de harcèlement ou de ‘boys’ club’. Elle estime tout de même qu’il manque d’un vrai espace d’échange entre les femmes et leurs collègues masculins dans l’industrie. "Il faudrait que nous puissions être plus honnêtes sur ces questions. Par exemple, si au bureau on pense qu’un collègue nous fixe un peu trop, la réponse habituelle sera de ne rien dire. On devrait pouvoir en discuter sans se sentir mal à l’aise". Pour la technicienne, les scandales, comme celui de Blizzard, sont désastreux, mais permettent de créer ce dialogue.

Créations de Joyka De Reyst, artiste technicienne pour la société Larian Studios.

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La programmeuse pointe également du doigt un autre problème : l’absence de syndicats dans l’industrie du jeu vidéo. "Beaucoup de gens quittent ce métier après cinq ou six ans, parce qu’ils sont épuisés, qu’ils veulent fonder une famille ou tout simplement, pour plus de stabilité". Il n’existe à ce jour aucune instance de représentation des travailleurs. La raison ? La nouveauté du secteur et le travail d’entrave de certaines sociétés. Suite au scandale à Blizzard, un groupe d’employés mobilisés ont créé la "ABK Workers Alliance", pour continuer à faire protester contre la gestion de l’affaire et étendre leurs revendications au secteur. Joyka de Reyst s’en réjouit. Elle espère que cela sera une première étape "pour instaurer un environnement de travail sain dans les grandes entreprises du secteur".

 

Cet article a été écrit dans le cadre d'un stage au sein des Grenades-RTBF.

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Double féminicide à Gouvy : "C’est un homme qui a tué deux femmes parce qu’elles se désiraient" , femmes,

18 Août 2021, 08:42am

Publié par hugo

 Double féminicide à Gouvy : "C’est un homme qui a tué deux femmes parce qu’elles se désiraient"
 
Double féminicide à Gouvy : "C’est un homme qui a tué deux femmes parce qu’elles se désiraient"
Double féminicide à Gouvy : "C’est un homme qui a tué deux femmes parce qu’elles se désiraient"
   
Camille Wernaers
 Publié le lundi 16 août 2021 à 17h24
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Le numéro gratuit pour les victimes de violences conjugales est le 0800 30 030. 


Nathalie Maillet, la directrice générale de Francorchamps, et Ann Lawrence Durviaux, avocate et professeure à l’Université de Liège, ont été retrouvées mortes dans la nuit de samedi à dimanche. Il s’agit selon tout vraisemblance d’un double féminicide et le meurtier est le mari de Nathalie Maillet, Franz Dubois.

"A 00h10, le corps sans vie de deux dames et d’un homme ont été découverts par les services de police dans une habitation à Gouvy, tous trois présentant des blessures par balles. D’après les premières informations recueillies, l’individu masculin aurait fait volontairement usage de son arme à l’égard des deux femmes, parmi lesquelles figurait son épouse, entraînant leur décès, avant de se donner la mort", a indiqué le parquet dimanche dans un communiqué. L’enquête est en cours.

Un double féminicide lesbophobe ?
Il est possible qu'il s'agisse d'un crime lesbophobe. Sandrine Detandt est professeure de psychologie et des sexualités à l’Université Libre de Bruxelles. Elle connaissait également Ann Lawrence Durviaux à titre personnel. "La façon dont les médias parlent de cette affaire est à pleurer. Dans un premier temps, le nom de l’homme qui a tué ces deux femmes n’a pas été cité. Ensuite, dans un deuxième temps, on a cité son nom mais entre autres pour lui trouver des excuses. Il y a des articles qui titrent qu’il allait fêter son anniversaire dimanche ou qu’il était très charmant ! C’est insupportable", explique-t-elle. "Pour moi, il est important de rétablir le vérité des faits. Ils étaient séparés, Nathalie Maillet lui avait annoncé qu’elle était tombée amoureuse d’Ann Lawrence. Ils étaient en procédure de divorce. Il a prétendu que cela ne lui faisait rien, il a même rencontré Ann Lawrence… On est loin de l’homme trahi qui rentre chez lui à l’improviste retrouvant sa femme dans les bras d’une autre ! C’est une manière de romancer cette affaire. Nous sommes face à un homme qui a tué deux femmes parce qu’elles se désiraient. Il n’en avait tout simplement pas le droit. Il y a là des rapports de pouvoir qui se jouent."

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe

"C’était aussi deux femmes de pouvoir, elles évoluaient dans des cercles habituellement masculins. Et Ann Lawrence n’a jamais caché qu’elle était lesbienne. Il y a une semaine, au restaurant, elle me disait encore qu’elle avait probablement perdu la bataille pour le rectorat de son université entre autres pour cette raison. Parce qu’elle était une femme, mais une femme lesbienne. Cela convoquait tout un imaginaire absolument incroyable autour d’elle. On voit aussi dans les commentaires comment la sexualité est mise en avant par rapport aux fantasmes sous-jacents et à l’objectification des femmes et encore plus des lesbiennes (avec des remarques comme "il aurait pu proposer un plan à trois"). Comment cet homme devient le héros trahi nécessitant de nettoyer son honneur. Ceci nous renvoie aux siècles précédents où l’on considérait comme normal qu’un homme possède sa femme. Cette dernière était alors la seule punie par la justice pour adultère, quand elle ne correspondait pas aux attentes imposées par le couple, et par les hommes", continue-t-elle. "Je suis très mal par rapport à cette histoire, c’est la première fois que je suis mobilisée si personnellement et fortement sur la question des féminicides. On ne possède pas quelqu’un, jamais".  

Si on s’intéresse au fond du problème des féminicides, on découvre que ce sont des hommes violents qui ne supportent pas de perdre le contrôle sur leur conjointe

Mal connue et invisibilisée, la lesbophobie n’est pas la même chose que l’homophobie. "La lesbophobie, c’est l’intersection entre le sexisme et l’hétérosexisme. Les violences que vivent les lesbiennes ne sont pas comparable à celles que vivent les homosexuels. Il s’ajoute aux violences sexistes auxquelles les femmes sont confrontées", explique Irène Zeilinger, fondatrice de l’asbl Garance. "On n’a pas beaucoup de chiffres pour la Belgique, mais on constate que les lesbiennes sont plus souvent confrontées à la violence verbale, sexuelle ou physique que les femmes hétéros. Il y a cette idée en hétéropatriarcat que les femmes doivent être sexuellement disponibles pour les hommes, par définition, les lesbiennes ne le sont pas. C’est comme si elles volaient quelque choses aux hommes qui doivent alors affirmer leur domination, leur droit à cette disponibilité sexuelle. Il y a par exemple les viols correctifs, destinés à ‘guérir’ les femmes lesbiennes." Et de continuer : "Cette lesbophobie est institutionnalisée dans la pornographie mainstream, où on va voir des femmes qui commencent une relation sexuelle et puis l’homme arriver. Et elles n’attendaient que ça. Cela donne l’image d’une sexualité lesbienne dépendante des hommes. Je suis bisexuelle, j’ai été en couple avec des femmes et j’ai déjà été face à des hommes qui voulaient s’inviter dans mon couple..."

"La lesbophobie se croise avec le sexisme car sont vues comme lesbiennes toutes les femmes qui ne correspondent pas aux normes de genre. Elles sont jugées ‘trop’ masculines par exemple, ce n’est pas pour rien qu’on ‘accuse’ les féministes d’être lesbiennes, parce que quelque part on est moins disponibles pour les hommes, on s’émancipe", observe Irène Zeilinger. "Dans les recherches sur la lesbophobie, on voit que beaucoup de violences se produisent dans le contexte privé. Ce sont les voisins, les amis, la famille, etc. Dans ce cas-ci, c’est considéré comme une grande trahison pour cette femme de ne plus avoir été disponible sexuellement pour son mari. Il y a aussi cette idée chez certains hommes que ça va s’ils sont quittés pour un homme, parce que c’est être en concurrence avec un autre homme, mais quand c’est pour une femme, cela signifie perdre face à une femme. C’est pire. Cela met en jeu une virilité et une masculinité stéréotypé."

On constate que les lesbiennes sont plus souvent confrontées à la violence verbale, sexuelle ou physique que les femmes hétéros. Il y a cette idée en hétéropatriarcat que les femmes doivent être sexuellement disponibles pour les hommes, par définition, les lesbiennes ne le sont pas

Selon Irène Zeilinger, la lesbophobie est particulièrement invisibilisée, même au sein de la communauté LGBTQIA+. "Il faut visibiliser la lesbophobie et ses spécificités, il faut en parler, et également de la biphobie qui est encore moins bien connue, parce qu'on ne sait pas si elles étaient lesbiennes toutes les deux, l'une d'elles était mariée à un homme", conclut-elle. Garance a publié un guide d’auto-défense à destination des personnes LGBTQIA+ : Libres à tous les coups.

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Un "crime passionnel" ?
Très vite sur les réseaux sociaux, de nombreuses personnes ont réagi pour expliquer qu’il ne s’agissait pas de féminicides mais bien d’un "crime passionnel", l’homme ayant agi "sous le coup de la passion". "Crime passionnel", une expression bien connue qui minimise les faits, culpabilise les victimes et dédouane l’agresseur. C’est d’ailleurs le constat d’une étude de l’Association des journalistes professionnels (AJP) sur la médiatisation des violences faites aux femmes. L’AJP recommande d’ailleurs de ne plus l’utiliser, ainsi que "drame familial" ou encore "amoureux éconduit". "Parler de 'chagrin d’amour' ou de 'crime passionnel' pour qualifier un meurtre conjugal, c’est parer la réalité d’un voile romantique et induire un sentiment de compréhension par rapport au meurtrier", écrit l’AJP. " ‘Drame’ comme ‘passionnel’ évoquent le domaine du théâtre. L’idée est que l’individu est emporté par une force qui le dépasse et n’est donc plus responsable de ses actes. Parler de ‘crime passionnel’ conduit aussi à déplacer l’accent du crime vers la passion amoureuse et, de ce fait, à dédouaner au moins en partie le coupable, lui-même victime de ses passions", explique quant à elle la linguiste française Anne-Charlotte Husson au site Journal des Femmes.

L’AJP recommande également aux journalistes "d’expliquer la nature du phénomène, son caractère systémique. Ces violences sont des actes récurrents, structurels. Elles découlent de rapports de force historiquement inégaux entre hommes et femmes, qui ont instauré des relations de domination et des discriminations". En juin, c'est le Conseil de déontologie journalistique qui a publié des recommandations sur le traitement journalistique des violences de genre.

"Si on s’intéresse au fond du problème des féminicides, on découvre que ce sont des hommes violents qui ne supportent pas de perdre le contrôle sur leur conjointe. La séparation est d’ailleurs un moment particulièrement à risque pour les femmes, expliquait aux Grenades Josiane Coruzzi, directrice du refuge Solidarité Femmes à La Louvière. [...] Le dominant ne supporte pas de perdre l’objet de sa domination. Ce n’est pas “je ne supporte pas de vivre sans toi”, c’est plutôt : “je ne supporte pas que tu vives sans moi”. On parle de contrôle coercitif, qui fait partie des violences conjugales. Pourtant, il y a encore cette image qui entoure le féminicide, qui serait le fruit d’une pulsion incontrôlée, d’un crime passionnel. C’est complètement faux.”

►►► A lire aussi : Au moins 13 féminicides en Belgique en 2021 : "Il faut sortir du déni"

Le féminicide est défini par l’Organisation Mondiale de la Santé comme le meurtre ou l’assassinant d’une femme parce qu’elle est une femme. La Belgique a récemment annoncé sa volonté de comptabiliser ces actes qui font donc partie du continuum plus large des violences faites aux femmes pour mieux les contrer.

Selon le décompte des associations de terrain, via le blog Stop Féminicide, Nathalie Maillet et Ann Lawrence Durviaux sont respectivement les 14ème et 15ème victimes de féminicide cette année dans notre pays.


La directrice du circuit Spa-Francorchamps a été tuée - JT 15/08/2021

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https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_double-feminicide-a-gouvy-c-est-un-homme-qui-a-tue-deux-femmes-parce-qu-elles-se-desiraient?id=10824858

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