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"De l’amour, pas la guerre" : à Bruxelles, des femmes dénoncent les viols commis en Ukraine

10 Mai 2022, 02:43am

Publié par hugo

 "De l’amour, pas la guerre" : à Bruxelles, des femmes dénoncent les viols commis en Ukraine
"De l’amour, pas la guerre" : à Bruxelles, des femmes dénoncent les viols commis en Ukraine
dimanche dernier à 16:30

3 min
Par Camille Wernaers pour Les Grenades
Les Grenades

Ce dimanche 8 mai, une trentaine de femmes ont participé à une action devant le Parlement européen contre les violences sexuelles et les viols "utilisés comme arme de guerre en Ukraine".

Les femmes portaient des sous-vêtements blancs maculés de faux sang. Elles tenaient des drapeaux ukrainiens (ainsi que celui de la République démocratique du Congo) et des pancartes avec des messages comme : "Le corps des femmes n’est pas un champ de bataille", "Soldat, ton pénis n’est pas un tank", "On ne pourra pas dire qu’on ne savait pas". "Le viol est un crime", ont également crié les femmes, le poing levé.

"Par notre action, nous souhaitons dénoncer ces violences, en Ukraine et ailleurs, et réaffirmer que nous, citoyennes, femmes, entendons et soutenons les survivantes", écrit le collectif. Elles font également le lien avec la culture du viol en général "qui favorise l’impunité des agresseurs, a fortiori dans un contexte de guerre".


"Faire ensemble"
Laura (prénom d’emprunt) a participé à l’action. Elle explique aux Grenades : "Il s’agit d’une action assez spontanée de femmes qui s’intéressent à ce qu’il se passe en Ukraine. Notre action fait écho à celles qui ont déjà eu lieu à Tallinn et Riga mais aussi à Bruxelles ce vendredi 6 mai."

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Ce jour-là, une quinzaine de personnes, essentiellement des réfugiées ukrainiennes, avaient participé à la même action, appelant les dirigeants européens à faire leur possible pour que des enquêtes soient menées en Ukraine.

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Le 26 mars, un autre collectif féministe avait mené une action à Bruxelles contre l’exploitation sexuelle des réfugiées, demandant également à l’Union européenne de réagir.

Nous souhaitons dénoncer ces violences, en Ukraine et ailleurs, et réaffirmer que nous, citoyennes, femmes, entendons et soutenons les survivantes

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"Bruxelles, merci"
Des Ukrainiennes sont également impliquées dans l’action de ce dimanche 8 mai. "Nous ne pouvons pas parler d’elles sans les entendre d’abord. Il faut aussi dire que cela n’existe pas qu’en Ukraine, cela se produit sur tous les lieux de guerre", réagit Laura. "Je suis très émue, c’est beau ce que nous arrivons à faire ensemble."

"Bruxelles, merci", lance une femme qui assiste à la scène. Alors que certaines femmes commencent à pleurer, une des participantes demande : "Est-ce qu’on peut se faire un câlin ?"

Les femmes s’assemblent, se prennent dans les bras puis forment un cercle. "Nous voulons de l’amour, pas la guerre", se mettent-elles à scander toutes ensemble, de plus en plus fort. L’action se termine par la lecture de deux poèmes, l’un en français, un autre en ukrainien.


Les témoignages se multiplient
Depuis le 24 février dernier, date de l’invasion russe en Ukraine, les témoignages se multiplient, notamment celui de Katarina (prénom d’emprunt) : "Je vous raconte tout. Une fois pour toutes, il faut que les femmes sous occupation russe sachent qui ils sont et de quoi ils sont capables. Il faut que le monde sache. Ce n’est pas à moi d’avoir honte […] J’étais terrorisée. Ils pointaient leurs armes sur moi. Ils tiraient en l’air. […] tous les jours, ils venaient me violer."

Le viol devient alors un outil utilisé pour humilier, détruire et prendre le pouvoir

Amnesty International a également alerté à plusieurs reprises avoir recueilli des témoignages de viols et d’homicides extrajudiciaires en Ukraine. Une habitante d’un village situé à l’est de Kiev a déclaré à Amnesty International que, le 9 mars, "deux soldats russes étaient entrés chez elle, avaient tué son mari, puis l’avaient violée à plusieurs reprises sous la menace de leurs armes pendant que son jeune fils se cachait dans une pièce voisine servant de chaufferie. Cette femme a réussi à s’enfuir de son village et à rejoindre une zone sous contrôle ukrainien avec son fils."

L’organisation souligne : "Les homicides délibérés de civil·e·s, les viols, la torture et les traitements inhumains de prisonniers de guerre constituent des violations des droits humains et des crimes de guerre. Toutes les personnes qui commettent des crimes de guerre doivent être amenées à rendre des comptes devant la justice."

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"Si le viol dans la guerre a toujours existé ; le viol comme outil de guerre est lui, devenu endémique et quasi systématique dans les conflits contemporains. Le viol devient alors un outil utilisé pour humilier, détruire et prendre le pouvoir", analyse quant à elle l’ONG We Are Not Weapon of War ("nous ne sommes pas des armes de guerre").

Le 5 mai dernier, le Parlement européen a adopté une résolution exhortant les institutions européennes à s’emparer des conséquences de la guerre spécifiquement pour les femmes.

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Sur tous les continents, les femmes sont des moteurs de paix

10 Mai 2022, 02:41am

Publié par hugo

 Sur tous les continents, les femmes sont des moteurs de paix
Sur tous les continents, les femmes sont des moteurs de paix
07 mai 2022 à 09:58

6 min
Par Esmeralda de Belgique, une chronique pour Les Grenades
Les Grenades

Les femmes sont rarement à l’origine des guerres. Elles sont en revanche parmi les premières victimes. En moyenne, trois quarts des personnes déplacées par les conflits sont des femmes et des enfants. Actuellement, parmi les millions de réfugié·es Ukrainien·nes en Europe, la proportion frôle les 90%.

Au milieu des combats, sur le chemin de l’exil ou dans les camps, les femmes et les jeunes filles subissent brutalité et exploitation. Kidnappées pour en faire des esclaves, mariées de force ou victimes d’agression sexuelle, elles doivent faire face à de multiples formes de violence, physique émotionnelle et psychologique.

Selon le rapport de la Conférence mondiale de Pékin en 1995, "cette violence traduit les rapports de force historiques qui ont abouti à la domination des femmes par les hommes et à la discrimination".

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Les Nations Unies estiment à plus de 200.000 les victimes de viol lors du génocide rwandais, 40.000 au cours des guerres civiles au Liberia et plus d’un demi-million en République démocratique du Congo. Au Myanmar, les réfugiées rohingyas ont vécu le même enfer. En Syrie, en Colombie, au Guatemala, au Yemen, le viol est utilisé comme arme de guerre pour détruire, humilier, anéantir.

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Quand les femmes réparent
Cependant, dès que les armes se taisent, ce sont les femmes qui réparent les communautés, les villages et les familles. Des milliers d’entre elles s’activent dans l’ombre, souvent dans l’insécurité et la crainte. Elles ne reçoivent ni reconnaissance, ni soutien, ni honneurs mais poursuivent leur mission avec détermination.

En octobre 2000, la résolution 1325 des Nations Unies, votée à l’unanimité, fut une étape majeure affirmant le changement des mentalités et la nécessité d’inclure la thématique du genre dans les conflits. Celle-ci demande en effet d’instaurer une représentation accrue des femmes à tous les niveaux dans les processus de paix, comme observatrices de l’ONU dans les conflits et dans les opérations de maintien de la paix.

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Le Conseil de Sécurité y exhorte également tous les intéressés, lors de la négociation et de la mise en œuvre d’accords de paix, à prendre en compte les besoins spéciaux des femmes et des jeunes filles dans les conflits armés, à soutenir les initiatives de paix prises par des femmes et à respecter le droit international humanitaire.

Une étape essentielle, je le répète. Mais où en sommes-nous aujourd’hui, deux décennies plus tard ? Dans les processus de paix au niveau mondial, les femmes ne représentent toujours que 6% des médiateurs et 14% des négociateurs !

Il est impératif que plus de pays intègrent le principe d’égalité des genres au niveau des décisions.

Pourquoi est-ce important ? Parce que la femme est un moteur de paix. Selon un proverbe africain : "La mère est une école". Et c’est vrai. Dans les familles, ce sont les mères qui transmettent et communiquent les valeurs culturelles et sociales, la tolérance et la patience. Elles élèvent leurs enfants en professant la non-violence, en prônant la paix, la conciliation. Au sein des communautés, elles tissent des liens et forgent des alliances. A la table de négociations, elles cherchent des solutions constructives et engagent facilement le dialogue.

Dès que les armes se taisent, ce sont les femmes qui réparent les communautés, les villages et les familles. Des milliers d’entre elles s’activent dans l’ombre, souvent dans l’insécurité et la crainte. Elles ne reçoivent ni reconnaissance, ni soutien, ni honneurs

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Inclure les femmes dans les pourparlers de paix, c’est 35% de chances en plus de résolution pacifique
J’ai eu la chance de rencontrer la plupart des lauréates du Prix Nobel de la paix encore en vie. Rappelons d’ailleurs que depuis 1901, seules 17 femmes l’ont remporté mais cela représente le meilleur pourcentage parmi toutes les catégories de Nobel.

Comble d’ironie, il semble que ce soit deux femmes, l’Anglaise Florence Nightingale et l’Autrichienne Bertha von Suttner, qui auraient persuadé Alfred Nobel d’ajouter un prix pour la paix à ceux pour les sciences et la littérature. Une façon pour lui de s’acheter une bonne conscience après son invention de la dynamite !

Le prix récompense ainsi "la personnalité ou la communauté ayant le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation des progrès pour la paix".

Voici comme exemple, l’histoire des lauréates du prix de 1976, deux Irlandaises qui décidèrent de s’unir pour arrêter la violence et instaurer le dialogue. Des femmes qui réalisèrent l’exploit de réunir pour une même cause des individus de religion et d’ethnies différentes qui se déchiraient auparavant, posant ainsi les premiers jalons qui mèneraient, vingt ans plus tard, aux accords de paix.

Le combat pour la paix de Betty Williams et Maired Corrigan
Dans les années 70, l’Irlande est à feu et à sang. Cette guerre civile en Europe dont on se souvient à peine est magnifiquement évoquée dans “Belfast”, le film de Kenneth Branagh récemment récompensé aux Oscars de Hollywood. On y apprend qu’il y a 50 ans, des bombes explosaient presque chaque jour et des groupuscules nationalistes ou loyalistes faisaient parfois irruption tard le soir dans les immeubles n’hésitant pas à exécuter tous les membres d’une même famille.

Le 10 août 1976, un fait divers tragique va déterminer le destin de deux femmes qui ne se connaissaient pas : Betty Williams et Maired Corrigan.

Cet après-midi-là, Anne Maguire, la sœur de Mairead rentre à pied chez elle avec ses 4 enfants. Joanne, 8 ans, pédale en tête sur sa bicyclette, Mark, 7 ans et John, 2 ans, marchent près de leur maman qui pousse le landau dans lequel somnole le petit Andrew, âgé de six semaines. La famille entend soudain des coups de feu et voit une voiture déboucher en trombe du coin de la rue, poursuivie par deux jeeps militaires. Au volant de la première, Danny Lennon, un militant de l’IRA (le groupe para-militaire de l’Armée Républicaine Irlandaise) qui tente d’échapper à une patrouille de l’armée britannique. Les soldats ouvrent le feu.

Le jeune homme est tué sur le coup mais la voiture continue sa course folle sur le trottoir. Mark parvient à sauter hors de sa trajectoire avant que le véhicule ne fauche Anne et les trois autres enfants. Joanne et Andrew meurent instantanément. John et sa mère, grièvement blessé·es et transporté·es à l’hôpital où le petit garçon décède quelques heures plus tard. Mairead, avertie par un bulletin à la radio, se précipite au chevet de sa sœur plongée dans le coma, le bassin et les jambes fracturées.

Au même moment, quelques minutes seulement après le drame, Betty Williams, en voiture avec sa fille de 4 ans, passe par Finaghy Road. Horrifiée, elle découvre le tas de ferraille de la voiture avec le cadavre du jeune Danny, la bicyclette tordue, la poussette désarticulée et les petits corps sans vie des enfants sur le trottoir maculé de sang. De retour à la maison, elle saisit un bloc de papier et un crayon et va frapper aux portes de tous ses voisins puis de tout son quartier pour leur faire signer une pétition de paix. Des femmes se joignent à elle.

Ces protestations pacifiques des femmes qui ont semé les graines et amorcé le processus de paix

En quelques heures, elles recueillent 6000 signatures pour arrêter le carnage. Devant les caméras de télévision, Betty dénonce la violence qui, dit-elle "assassine nos fils, nos pères et nos frères" et demande à toutes les catholiques et protestantes de se mobiliser. Mairead entend ce message et lui téléphone pour l’inviter aux funérailles de ses neveux le jour suivant. Les deux femmes se rencontrent pour la première fois au cimetière. Le soir, Mairead apporte quelques fleurs détachées des couronnes mortuaires à la mère de Danny Lennon pour lui témoigner sa compassion et lui dire qu’elle partage son chagrin de mère.

Le lendemain, 10.000 personnes se rassemblent pour une marche pacifique. 96% sont des femmes qui ne veulent plus vivre dans la terreur. Pour les catholiques et les protestant·es, traverser les fameuses lignes de démarcation, des fils de fer barbelés ou parfois des murs érigés entre les quartiers, représente un acte de courage car ils risquent de se faire exécuter pour traîtrise par les groupes paramilitaires.

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Tous les dimanches, les marches s’organisent dans différentes villes de l’Irlande du Nord puis de l’Angleterre et bientôt des États-Unis où la communauté irlandaise est importante. Mairead et Betty sont à la une des journaux et sur toutes les chaînes de télévision. Leur initiative provoque un véritable réveil des consciences.

Et même s’il faudra encore attendre 22 ans pour que soient signés les accords du “Vendredi Saint”, ce sont certainement ces protestations pacifiques des femmes qui ont semé les graines et amorcé le processus de paix.

Retrouvez les chroniques d’Esmeralda de Belgique chaque mois sur Les Grenades.

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Fatima refoulée à l’entrée de la commune d’Etterbeek. En cause : le port du voile

10 Mai 2022, 02:39am

Publié par hugo

 Fatima refoulée à l’entrée de la commune d’Etterbeek. En cause : le port du voile
Fatima refoulée à l’entrée de la commune d’Etterbeek. En cause : le port du voile
06 mai 2022 à 10:39

9 min
Par Camille Wernaers pour Les Grenades
Les Grenades
Belgique

Le mercredi 27 avril, à l’hôtel communal de la ville d’Etterbeek, l’asbl Les Ambassadeurs d’expression citoyenne devait animer une joute verbale avec un groupe de jeunes. Créé en 2017, ce projet vise à outiller les jeunes pour leur apprendre à débattre ou à régler des conflits. Au début, les "ambassadeurs" étaient dix jeunes qui avaient participé à des projets citoyens et qui voulaient poursuivre leur engagement.

Aidé·es de deux enseignant·es, Monia Gandibleux et Bruno Derbaix, ces jeunes ont commencé à animer des ateliers d’expression dans les classes et à former des élèves. Il y a désormais plus de 200 "ambassadeurs" réuni·es au sein du projet, qui ont déjà animé plus de 150 événements et des ateliers d'expression encore plus nombreux.

Il n’y aura pas d’animation ce 27 avril. Arrivé·es sur place, les animateurs et animatrices apprennent en effet que l’animation est annulée. Les jeunes bénéficiaires sont pourtant présent·es mais la commune a appris qu'une des animatrices portait le voile, ce qui est considéré comme une infraction au principe de neutralité dans l’enseignement et dans le service public.

"On se concentre plus sur ce bout de tissu que sur ce que j’ai à dire"
Fatima, 23 ans, est l’animatrice en question. "Ce n’est pas la première fois que cela m’arrive. On m’a déjà refusé une animation dans une autre école de la commune d’Etterbeek parce que je porte le voile et que je ne serais pas neutre. Au sein des Ambassadeurs, nous ne sommes pas d’accord avec cette interprétation. Je ne suis pas fonctionnaire, je suis une personne extérieure, une jeune qui vient partager l'art du débat avec d'autres jeunes dans la maison communale, qui est une institution démocratique. On a préféré annuler l'animation et renvoyer tout le monde à la maison plutôt que de me permettre à moi, citoyenne, d’y entrer. C’est violent. Souvent, on me demande d'enlever mon voile pour que l'activité puisse avoir lieu", explique-t-elle aux Grenades. "Mon voile est considéré comme le symbole de ma soumission, qui empêcherait mon émancipation. Mais comment fait-on si mon émancipation passe par l’animation de groupes de jeunes et qu’on me prive de cette activité ? C’est le serpent qui se mord la queue."

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Elle continue : "Je pense que pour former correctement les jeunes, il ne sert à rien de les empêcher de se confronter au monde extérieur, de leur cacher la diversité qui existe à Bruxelles. On se concentre plus sur ce bout de tissu que sur ce que j’ai à dire. Les femmes qui portent le voile ont pourtant des choses à apporter dans ce genre d’animation, elles aussi. Nous étions justement là pour débattre et échanger."

"La goutte d’eau"
Coordinatrice des Ambassadeurs, Monia Gandibleux réagit : "Cela nous était déjà arrivé, oui, mais cette fois-ci, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Nos ambassadeurs sont des jeunes qui sont riches de leur histoire, qui ont vécu des choses difficiles dans leur passé. Notre équipe est très diverse, c’est important pour nous. Nous débattons de tout avec tout le monde, à partir du moment où le cadre est sécurisé et bienveillant. Nos animatrices et animateurs sont formé·es à créer un cadre pour qu’un débat puisse avoir lieu."

Les femmes qui portent le voile ont pourtant des choses à apporter dans ce genre d’animation, elles aussi. Nous étions justement là pour débattre et échanger

"Par ailleurs, la neutralité n’est pas définie clairement, il y a une zone de flou qui laisse place à l’appréciation, mais elle ne peut en aucun cas être synonyme d’exclusion. Dans nombre d’établissements scolaires, il est interdit de porter 'un couvre-chef', en réalité il s’agit d’une astuce langagière qui vise le port du voile. Je vous assure que les élèves entrent avec un bonnet sans problème. Un jour, une animatrice qui portait le voile se trouvait dans une école et un éducateur l’a prise à partie en exigeant qu’elle le retire. Quand il a compris qu’elle n’était pas une élève, il s’est excusé, mais en fait c’est pire ! C’est comme cela qu’ils parlent aux élèves dans leurs murs ?", soutient-elle.

La formatrice cite le sociologue américain Saul Alinsky : "Il a expliqué que pour changer le système, il faut rester dans le système. Il faut rester à la table des négociations et faire preuve de patience, on y arrive à force d’usure. Confronté·es à certaines écoles qui trient nos animatrices, nous avons eu ce débat en interne et nous avons décidé de continuer à essayer de nous y rendre, même si ce n’est pas facile. On le fait car le débat est un outil précieux pour les jeunes, on ne lâche pas pour eux."

"Un non-événement"
Selon Vincent De Wolf (MR), bourgmestre d’Etterbeek, "Il s’agit d’un non-événement, créé par des personnes qui veulent le faire mousser." Il met en avant le fait que Les Ambassadeurs étaient payés par la commune d’Etterbeek. "A Etterbeek, nous estimons que la neutralité s’applique dès lors que l’activité est financée par des fonds publics et d’autant plus que cette activité se déroulait dans une salle très symbolique, la salle du conseil. Les personnes qui exercent l’autorité communale ne peuvent pas porter de signes politiques, syndicaux ou religieux. On peut être pour ou contre, mais c’est ce qui est dans nos textes ! Je n’étais pas disponible ce jour-là, j’aurais peut-être pris une autre décision. Il faut aussi dire qu’une des coordinatrices nous a appelés d’elle-même pour demander si cela posait un problème qu’une des animatrices portait le voile." Il continue : "Je précise que nous avons reporté l’activité et que nous avons proposé d’en discuter avec les personnes concernées."

Monia Gandibleux reconnaît qu’il leur arrive de prévenir les écoles de la présence d’animatrices portant le voile : "C’est un vrai dilemme car en posant la question à l’avance, on fait parfois émerger le problème là où il n’existait pas toujours. Si on ne prévient pas, on met l’établissement devant le fait accompli : parfois on peut entrer sans problème, parfois pas. Pour nous, cette situation ne devrait pas exister du tout. Dans une société idéale, nous ne devrions prévenir personne !"

Tout le monde ne semble pas partager l’avis du bourgmestre à l’intérieur de l’administration communale. L’échevin en charge de la Cohésion Sociale et de la Démocratie Participative, Karim Sheikh Hassan (Ecolo), explique aux Grenades : "Ma position est claire. Le principe de neutralité ne s’applique pas à un prestataire extérieur. Chaque administration a ses propres règles, cela veut dire que l’asbl doit s’adapter à chaque fois qu’elle travaille dans une autre commune ? Les réponses à cette question divergent. Selon moi, il ne faut pas entrer en contradiction avec la liberté religieuse. Le débat aura lieu au conseil communal, c’est dommage qu’on ait attendu cette affaire pour en discuter."

Le débat est un outil précieux pour les jeunes

Quoi qu’il en soit, Fatima a contacté à ce sujet Unia, le service public indépendant qui lutte contre la discrimination. Pour Nathalie Denies, cheffe du service Soutien individuel au sein d’Unia, cette affaire interroge d’abord "ce qu’on entend par service public. Il est de plus en plus difficile de déterminer qui sont les agent·es du service public, notamment parce qu’un certain nombre d’entreprises privées fonctionne avec du financement public et reçoivent des missions de service public, la STIB par exemple. Est-ce que le principe de neutralité s’applique à toutes ces personnes ?"

Elle précise : "Quand on aborde la question de la neutralité des agent·es du service public, on ouvre la boite de pandore. La neutralité n’est définie nulle part, on sait seulement qu’un·e agent·e doit traiter tou·tes les citoyen·nes de la même manière."

Neutralité inclusive et exclusive
Cette neutralité possède deux dimensions, la neutralité d’apparence et de comportement. "Certains estiment que pour rassurer le public, il vaut mieux ne rien montrer, notamment ne pas porter le voile. C’est une conception exclusive de la neutralité. De cette neutralité d’apparence découlerait la neutralité de comportement. Parce qu’on ne montre rien, on traite tout le monde de manière égale. D’autres personnes, qui ont une vision inclusive de ce principe de neutralité, vont dire que l’apparence ne dit rien des comportements, qu’on ne peut pas déduire une neutralité de comportement à partir d’une neutralité d’apparence. Ce n’est pas parce que je porte simplement un pantalon et un t-shirt que je ne vais jamais avoir des propos homophobes, par exemple", indique Nathalie Denies qui poursuit : "Chez Unia, nous ne tranchons pas cette question. Nous plaidons seulement pour une société dans laquelle chacun·e peut prendre sa place."

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Outre le flou juridique qui entoure la notion de neutralité, chaque service public peut décider de la manière dont il interprète ce principe. Chaque commune, via son règlement communal, adopte les règles qui s’appliquent à ses agents communaux. "Certaines communes, comme Mechelen, autorisent tous les signes convictionnels et religieux et forment leurs agent·es à avoir une attitude neutre. D’autres, comme Anvers, ont des règles mixtes : les signes convictionnels et religieux sont interdits au personnel en contact avec le public mais autorisées pour les personnes en back office. Parfois, pour décider qui peut porter ces signes ou pas, on prend le critère d’exercice de la puissance publique, à la place de celui de contact avec le public. Cela pose des questions intéressantes. Est-ce qu’un membre du personnel communal qui se trouve derrière un guichet exerce la puissance publique ? Enfin, certaines communes les interdisent complètement", souligne Nathalie Denies.

Les règles concernant la neutralité ne peuvent pas se baser sur des stéréotypes sexistes ou racistes

Le cas de la STIB
Quand une affaire comme celle-ci arrive dans les mains d’Unia, le service va entamer une discussion avec l’administration concernée par le litige et va s’intéresser au règlement communal. "On va se demander sur quoi sont fondées les règles concernant la neutralité. Elles ne peuvent pas se baser sur des stéréotypes sexistes ou racistes", explique-t-elle.

C’est ce qu’il s’est passé dans l’arrêt STIB du tribunal du travail de Bruxelles qui a condamné l’entreprise de transport public pour discrimination fondée sur les convictions religieuses et sur le genre. La plaignante était une femme portant le voile qui postulait pour une fonction où elle n’aurait pas été en contact avec le public. Sa candidature n’a jamais été retenue.

Le 3 mai 2021, le tribunal a finalement jugé que la plaignante a été bien victime d’une double discrimination, la STIB n’ayant pas été en mesure de prouver que le refus d’embauche n’était pas discriminatoire. Le tribunal ordonne également à la STIB de mettre fin à sa politique de "neutralité exclusive" dans son recrutement. La STIB justifiait le refus du port du voile par "la paix sociale", c’est-à-dire le fait de vouloir éviter les conflits.

"Le juge rappelle que les préférences discriminatoires des clients ne peuvent pas justifier la discrimination et qu’il n’existe pas de droit à ne pas être exposé à des convictions ou opinions. […] le juge rejette l’argument de paix sociale dans la mesure où une telle affirmation présente un risque de préjugé à l’égard des croyants portant un signe convictionnel en général et des femmes portant le voile islamique en particulier. Ces travailleurs seraient considérés, par la simple manifestation de leur religion, comme des éléments perturbateurs empêchant leurs collègues de vivre leur propre religion ou leur propre conviction en toute sérénité", écrivait Unia à l’époque.

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La STIB condamnée pour double discrimination : "Une longue péripétie semée d'embûches"
"Le comité de gestion de la STIB n’a finalement pas fait appel de cette décision mais il existe aujourd’hui une initiative politique visant à mettre en place la neutralité exclusive dans toute la fonction publique bruxelloise", observe Nathalie Denies. Unia a d’ailleurs été auditionné au parlement bruxellois et a rappelé la réalité de la diversité bruxelloise qui doit "entrer dans la balance".

Du côté des Ambassadeurs, le groupe de jeunes qui devait participer à la joute verbale à Etterbeek a pris contact avec l’association. Ils ont décidé ensemble que l’animation aura finalement lieu dans les locaux de l’asbl.

Edit

Quelques heures après la publication de cet article, Vincent De Wolf a fait savoir par voie de communiqué que "Le principe de neutralité doit être proportionné. Il n’y a ainsi pas lieu d’exiger, de façon automatique, à des associations citoyennes qui collaborent avec l’autorité publique les mêmes principes que ceux qui s’appliquent aux fonctionnaires de l’État."

Le bourgmestre d'Etterbeek a précisé à l’administration communale, par note de service, "que les principes légaux en vigueur n’empêchent pas le port de signes religieux et/ou philosophique dans le chef des associations citoyennes auxquelles la Commune d’Etterbeek fait ou fera appel dans le cadre des activités communales."

Il a par ailleurs adressé une proposition de rencontre aux formateurs et formatrices de l’association Les Ambassadeurs d’expression citoyenne en vue de "concrétiser, au sein de l’hôtel communal, la poursuite des formations qui étaient prévues en faveur des jeunes Etterbeekois·es.", selon le même communiqué.


Si vous souhaitez contacter l’équipe des Grenades, vous pouvez envoyer un mail à lesgrenades@rtbf.be

Les Grenades-RTBF est un projet soutenu par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui propose des contenus d’actualité sous un prisme genre et féministe. Le projet a pour ambition de donner plus de voix aux femmes, sous-représentées dans les médias.


https://www.rtbf.be/article/fatima-refoulee-a-lentree-de-la-commune-detterbeek-en-cause-le-port-du-voile-10987873

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Le Shot des Grenades : femme au volant, mort au tournant ?

10 Mai 2022, 02:37am

Publié par hugo

 Le Shot des Grenades : femme au volant, mort au tournant ?

04 mai 2022 à 16:56

31 min
Par Camille Wernaers et Mathieu Neuprez pour Les Grenades
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Les stéréotypes ont encore la vie dure concernant les femmes qui roulent en voiture, soupçonnées de ne pas savoir maitriser leur véhicule.

Pourtant, en s’intéressant aux chiffres des accidents graves, une chose apparait : ils sont, dans leur très grande majorité, causés par des conducteurs masculins.

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe

Dans ce nouveau Shot, Les Grenades n’ont pas appuyé sur le champignon et ont pris le temps d’interroger les liens entre voiture et masculinité avec Simon Dubois-Yassa, spécialiste de ces questions au sein de l’ONG Le Monde selon les femmes.

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Voiture et masculinité : un lien pas si anodin ?
Le Shot des Grenades est un podcast qui se penche chaque mois sur une question genrée, diffusé sur La Première. Un podcast signé Mathieu Neuprez et Camille Wernaers.


https://www.rtbf.be/article/le-shot-des-grenades-femme-au-volant-mort-au-tournant-10986770

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L’Afropolitan Festival visibilise les talents féminins

10 Mai 2022, 02:25am

Publié par hugo

 L’Afropolitan Festival visibilise les talents féminins
L’Afropolitan Festival visibilise les talents féminins
04 mai 2022 à 14:52

5 min
Par Marine Mélon pour Les Grenades
Les Grenades
Culture

Pour cette cinquième édition de l’Afropolitan Festival, qui aura lieu du 26 au 29 mai prochain, le thème sera "Women Power". Cinéastes, créatrices, autrices, activistes et artistes belges africaines et afrodescendantes se retrouvent le temps d’un week-end pour partager avec le public leurs créations et leurs combats antiracistes et féministes.

Siré Kaba, fondatrice et designer d’Erratum Fashion, est à l’initiative du NAW (New African Waves) pop-up fashion qui réunit douze créateurs de mode lors du festival, dont dix femmes, à partir du 27 mai. "Ce ne sont pas juste des vêtements et de la mode, on porte aussi un message."

C’est la troisième fois que NAW est convié au festival Afropolitan. Et promouvoir le travail des femmes est une évidence pour Siré Kaba. "Dans les sociétés africaines, la femme est le pilier de la famille. On se rend compte en fait du pouvoir qu’elles ont toujours porté. Et les festivals féminins font bouger les choses et permettent enfin de mettre leur travail en avant."

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Déficit de représentation
Lorsqu’elle a fondé Erratum Fashion, le projet de base de Siré Kaba était de participer à la société, en tant que femme, mère et citoyenne. Elle s’est aussi rendu compte du manque de représentation des personnes africaines et afrodescendantes. Même si beaucoup de personnes de nationalités différentes vivent à Bruxelles, "elles ne se mélangent pas forcément."

La culture pourrait permettre, selon elle, de faire de la capitale de l’Europe, un réel spot multiculturel. "Pour créer un monde plus varié, il faut avoir des propositions plurielles. Je pense que c’est à travers la culture qu’on va faire avancer la société. Elle permet de toucher les gens au cœur, au fond d’eux-mêmes, et c’est à ce moment-là qu’ils prendront conscience qu’il faut faire bouger les choses."

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Siré Kaba a sélectionné douze designers provenant tous de pays différents (Afrique du Sud, Algérie, Angola, Belgique, Cameroun, Congo, France, Guinée, Grande-Bretagne, Maroc, Nigéria et Portugal) pour le NAW pop-up fashion afin de montrer la pluralité et la diversité des communautés africaines. "J’ai choisi des créateurs avec des directions artistiques différentes, mais avec des points communs. Ils sont innovants, travailleurs et leurs réalisations plaisent beaucoup."

Deux ateliers seront aussi proposés lors du festival, en collaboration avec NAW. L’un animé par Twaska pour apprendre à tisser, et l’autre proposé par Aurélie Dinganga pour customiser son propre tote bag.

"Qu’est-ce que je peux raconter ?"
L’Afropolitan Festival, c’est aussi une collaboration entre créatrices d’univers différents. Le samedi 28 mai à 14h aura lieu la projection du film "The ones who keep walking" d’Amarachi Nwosu qui célèbre la créativité africaine sous toutes ses formes. La projection sera suivie d’un débat avec la réalisatrice et d’une performance de Siré Kaba.

Pour la préparer, la fondatrice d’Erratum Fashion s’est alors posé une question qui revient souvent dans son travail : "Qu’est-ce que je peux raconter ?". Elle a finalement décidé de réaliser dix silhouettes qui représentent la résilience et la puissance des femmes. Le tout, raconté par l’artiste bruxelloise MPLI.

Siré Kaba cherche toujours à porter un message au travers de la mode. Le 25 mai, cela fera deux ans que George Floyd est mort sous le genou d’un policier, aux États-Unis. Beaucoup de manifestations ont eu lieu par la suite et des mouvements antiracistes se sont crés ou ont pris plus d’importance sur la place publique. Siré Kaba s’en souvient et constate une prise de conscience. "Mais elle est individuelle. Il n’y a eu pas de réels changements structurels, tout est encore à faire. Il y a en effet une libération de la parole, mais aujourd’hui on retourne quand même à ce qu’on a toujours fait." Il semble donc important à ses yeux, voire essentiel, que les créatifs s’emparent de causes pour faire bouger les lignes de la société.

Je pense que c’est à travers la culture qu’on va faire avancer la société

Deux films, deux réalisatrices
Durant le festival, d’autres activités sont aussi proposées. "Khartoum offside", récompensé à plusieurs reprises, sera projeté le 28 mai à 17h. Le film de Marwa Zein raconte l’histoire de Soudanaises déterminées à monter une équipe de football féminine, malgré l’interdiction du gouvernement militaire islamique en place.

Ce film réalisé sur plusieurs années montre le combat de ces femmes pour être reconnues en tant qu’équipe nationale du Soudan. Elles continuent d’être marginalisées malgré les subsides qu’elles ont perçus de la FIFA, mais elles sont bien décidées à ne pas lâcher l’affaire.

Le film de la comédienne et réalisatrice Aissa Maïga, "Marcher sur l’eau", clôturera l’Afropolitan le 29 mai à 17h. Faisant partie de la sélection officielle du Festival de Cannes en 2021, ce long métrage aborde la problématique de l’eau, dans un village du Niger asséché par le réchauffement climatique. Le spectateur suit l’histoire de Houlaye, une jeune fille de 14 ans qui doit s’occuper de ses frères et sœurs parce que leurs parents sont absents. Chaque jour, elle parcourt plusieurs kilomètres pour rapporter de l’eau. Les journées sont longues et rythmées par les conséquences bien visibles du changement climatique.

Musique, danse, etc.
Dans un autre registre, la comédienne flamande Soe Nsuki proposera une parenthèse stand up, entre la performance de la danseuse et chorégraphe Jeny BSG, et celle du groupe de slameurs et slameuses "Next outspoken generation". Monique Mbeka Phoba animera aussi une masterclass sur la rumba congolaise, fraîchement reconnue au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.

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Elle mettra en avant la place des femmes dans cette musique. Elles ont non seulement inspiré dans l’ombre de grands noms masculins de la rumba, mais aussi chantés avec beaucoup de talent, sans pour autant être mises dans la lumière. Et justement, côté musique, l’artiste ASA fera également un concert le vendredi 27, avec la Bruxelloise Oriana Ikomo en première partie.

L’artiste britannico-kényane Grace Ndiritu, accompagnée par de groupes locaux de la diaspora africaine à Bruxelles et par le public, expliquera ce que signifie une grève de femmes. À travers la méditation, l’écriture de lettres, des jeux de mots et avec des textes de la féministe italienne Silvia Frederici, les participants sont invités à prendre part à une installation textile qui reprend une image emblématique du mouvement "Women’s strike" (grève des femmes) fondé dans les années 1970. Cette performance de Grace Ndiritu fait partie de son travail "Healing the museum" dans lequel elle réactive l’espace d’art "mourant" en tant qu’espace de partage, de participation et d’éthique.

Siré Kaba insiste, ce festival "est un très beau voyage pour tous les amoureux de l’art et de la culture, à quelques arrêts de métro."

Informations pratiques
L’Afropolitan Festival aura lieu à Bozar du 26 au 29 mai 2022.

Cet article a été écrit lors d'un stage au sein de la rédaction des Grenades.

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https://www.rtbf.be/article/lafropolitan-festival-visibilise-les-talents-feminins-10986542

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Négociations fédérales : la loi IVG ne doit pas servir de "monnaie d'échange", prévient le Conseil des femmes francophones , femmes, feminisme,

6 Septembre 2020, 09:12am

Publié par hugo

 Négociations fédérales : la loi IVG ne doit pas servir de "monnaie d'échange", prévient le Conseil des femmes francophones
Négociations fédérales : la loi IVG ne doit pas servir de "monnaie d’échange", prévient le Conseil des femmes francophones
Négociations fédérales : la loi IVG ne doit pas servir de "monnaie d’échange", prévient le Conseil des femmes francophones - © BENOIT DOPPAGNE - BELGA
 Publié le jeudi 03 septembre 2020 à 20h32
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Le Conseil des femmes francophones et son équivalent néerlandophone signent jeudi, avec une trentaine d’associations, un communiqué dans lequel il fait part de ses craintes de voir la loi dépénalisant l’avortement servir de "monnaie d’échange" lors des négociations gouvernementales.

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Mercredi soir à la VRT, le président du CD&V Joachim Coens a indiqué que son parti était disposé à discuter avec les libéraux, les socialistes et les écologistes en vue de former un nouveau gouvernement fédéral. Il a toutefois averti que son parti souhaitait voir y figurer des points de son programme, citant notamment la loi IVG. Le CD&V en est un farouche opposant et le vote du texte a une nouvelle fois été reporté le 15 juillet dernier.

Cette loi prévoit notamment la réduction de délai obligatoire de réflexion qui passerait de six à deux jours. Autre élément clé du texte, le passage de la durée dans lequel l’IVG peut se pratiquer de 12 à 18 semaines.

►►► À lire aussi : Zakia Khattabi sur la loi IVG : "Il y a un marchandage politique qui se joue singulièrement par des hommes"

La proposition de loi est censée revenir à l’automne, après les vacances parlementaires.

A la suite de la sortie de Joachim Coens mercredi, le Conseil des femmes craint que le texte ne soit pas voté. "A l’heure où nous écrivons ces lignes, les chefs de partis sont en train de négocier l’avenir du pays avec, dans la corbeille des monnaies d’échange pour la formation d’un gouvernement, la proposition de loi IVG", relève-t-il. "Nous ne pourrions pas admettre que les formations politiques qui – durant ces dernières années – ont soutenu leurs parlementaires qui ont discuté et voté en commission de la Justice ces améliorations indiscutables au droit et à l’accès des femmes à l’IVG, laissent tomber les femmes de notre pays. […] Il n’est pas acceptable que, pour sortir de la crise politique, la contrepartie pour former un gouvernement soit cette loi emblématique en faveur des femmes. Une loi qui ne coûte rien en termes budgétaires, mais qui demande en revanche du courage politique pour ne pas céder au chantage."

Les signataires du communiqué demandent enfin "aux formations politiques de résister aux pressions indignes sur cette question éthique ainsi que de faire respecter la séparation des pouvoirs : le gouvernement doit laisser le Parlement voter sans interférer dans le processus législatif."


https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_negociations-federales-la-loi-ivg-ne-doit-pas-servir-de-monnaie-d-echange-previent-le-conseil-des-femmes-francophones?id=10575797

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Tinder Surprise , articles femmes hommes, AMOURS ,

29 Juillet 2020, 23:37pm

Publié par hugo

 Tinder Surprise
Tinder Surprise 
Tinder Surprise - © Tous droits réservés
 
Une chronique de Cindya Izzarelli
 Publié le samedi 25 juillet 2020 à 09h50
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Cette chronique a été écrite pour l'émission radio "Les Grenades, série d'été", à retrouver chaque samedi de l'été sur La Première, de 9h à 10h.


Épisode 4 : sommes-nous tous égaux, toutes égales face aux applications de rencontre ?

Toutes les machines ont un cœur, paraît-il. Nous, en tout cas, ça fait un bail qu’on a sous-traité les nôtres, de cœurs, aux machines...

Les machines, c’est pas toujours ce qu’on croit. Celle dont je vous parle aujourd’hui ont des courbes douces, de tendres sentiments, et de jolis noms tout ronds : Fruitz, Lovoo, Badoo, Bumble, Meetic, Happn. Des noms qui glissent en bouche comme des bonbons. Je les ai à peu près tous goûtés, au cours des 20 dernières années. C’est pas ma faute à moi si j’ai reçu la puberté en même temps que l’ADSL.

Quand les apps de rencontre ont débarqué, 10 ans plus tard, me proposant la même chose, en mieux, j’étais déjà mûre à point pour y croquer à pleines dents

C’était l’époque où il fallait prendre le bus et être rentré avant minuit, l’époque où on n’avait pas encore le monde dans sa poche et où internet n’était encore qu’un vaste territoire non cartographié, un champ des possibles où on avançait masqué ou à découvert, et où la mise en scène permanente de nos avatars n’était pas encore de mise. C’est dans ce tiède océan d’anonymat que je cherchais l’amour. Ou plutôt “de l’amour”. C’est à dire qu’à 17 ans, chercher de l’amour revient à chercher quelqu’un qui vous entend, qui vous comprend, qui vous ressemble, qui vous espère, depuis la solitude de sa chambrine personnelle, sous les mêmes posters que vous.

J’ai excellé dans le flirt épistolaire, la romance à distance, l’amourette anonyme. Ce faisant, toutes à mes passions virtuelles, j’ai loupé quelques rendez-vous, persuadée que les gens qui m’aimaient étaient forcément ailleurs, loin, je n’ai jamais songé à répondre aux œillades discrètes de Boris, Wesley, Quentin, Laura ou Giancarlo. Tout ça pour dire que quand les apps de rencontre ont débarqué, 10 ans plus tard, me proposant la même chose, en mieux, j’étais déjà mûre à point pour y croquer à pleines dents.

L'arrivée de Tinder, un point de bascule
Dans l’histoire encore récente de la rencontre amoureuse sur internet, on note un point de bascule clair dans les rapports: c’est l’arrivée de Tinder en 2012...

Tinder, c’est la lanterne magique qui a déchaîné nos cœurs et libéré nos culs, l’entremetteur 2.0, le pourvoyeur de bonne compagnie, sorte de catalogue Neckermann de la drague qui, d’un simple effleurement du doigt quasiment reptilien, te permet de te procurer une dose d’amour à usage unique sans sortir de chez toi.

“Usage unique” ou pas en fait, vu qu’il y en a même qui disent qu’ils connaissent quelqu’un qui connaît quelqu’un qui a trouvé le grand amour sur internet. En attendant, ça marche: Tinder, c’est plus de 10 millions d’utilisateurs journaliers qui, pris dans la valse infernale du choix infini, mus par l’espoir d’un baiser, d’un orgasme du cœur, d’un élan du cul, effectuent 850 millions de “swipe” par jour.

La performance n'est pas sans risques, car une IA n'est jamais neutre. Elle se nourrit des bases de données qu'on lui fournit, qui peuvent comporter des biais que l'algorithme va ensuite généraliser. Dans une société régie par le Big Data et les algorithmes, une IA pourrait par exemple déduire une situation socio-économique d'un code postal et ne proposer que des profils issus du même milieu à ses utilisateurs 

Beaucoup s’y perdent aussi, pris dans la multipotentialité de ce dédales de corps et d’âmes présélectionnées pour toi, oui rien que pour tes yeux, parce que cette sublime blonde aux yeux bleux ou ce grand brun plein d’humour ne feront jamais le poids face au fantasme de la photo suivante, celle qui est peut-être encore mieux, encore plus sur mesure, cachée en dessous de la pile qui ne se réduit jamais.

►►► A lire : Les femmes et Tinder : Je t'aime moi non plus

Nous sommes toujours aussi seul.es
Et en tout cas, ça paie: Tinder aujourd’hui c’est plus de 6 millions d’utilisateurs premium, donc payants, et c’est aussi, depuis 2015, une action cotée en Bourse...

Oui, célibataire en goguette, depuis 2015, on a part de marché sur ta lune ! C’est même la tête de gondole qui fait battre pavillon aux actions du groupe Match depuis plus de 5 ans. Cette entrée en Bourse nous montre surtout que le marché de la solitude se porte bien.

France Gall chantait la solitude dans les villes de l’an 2000. 20 ans plus tard, on est toujours aussi seuls, mais on a moins de temps à consacrer à régler le problème, et on tolère de moins en moins l’incertitude, celle de devoir, peut-être, sortir de sa zone de confort physique et mentale, de s’ajuster à la différence de l’autre, à l’inconnu, à l’incertain. Alors, on sous-traite nos vies aux intelligences artificielles, sans vraiment assumer. Parce que swyper, ça reste un peu tricher.

Cette entrée en Bourse nous montre surtout que le marché de la solitude se porte bien

Pas sans risque
Plus romantique, l'app de rencontre française Happn se démarque en proposant à ses utilisateurs et utilisatrices de faire un premier pas virtuel avec des personnes croisées "dans la vraie vie". Mais, il y a forcément un mais...

Contrairement à ce que l'app affirme officiellement, elle ne peut pas géolocaliser les rencontres qui ont lieu à moins de 250 mètres, pour des raisons évidente de sécurité et de respect de la vie privée. C’est surtout l’algorithme derrière Happn qui, gavé de nos multiples faits et gestes géolocalisés, se charge de trianguler des corrélations qui dépassent l’entendement de nos petits cerveaux humains pour nous proposer des gens, pas loin de chez nous, qui ont tout pour nous plaire et s’insérer clé sur portes dans le programme de nos petites vies bien remplies. Parce que rencontrer quelqu’un OK, mais décaler ma session de crossfit, ça jamais ! 

Si on a inventé l’hyperchoix, on n’a pas encore mis la main sur l’hypertemps qui irait avec. Je t’engagerais donc, grand explorateur des multipotentialités romantiques, à poser ton téléphone et à ouvrir les yeux et les oreilles

Évidemment, la performance n'est pas sans risques, car une IA n'est jamais neutre. Elle se nourrit des bases de données qu'on lui fournit, qui peuvent comporter des biais que l'algorithme va ensuite généraliser. Dans une société régie par le Big Data et les algorithmes, une IA pourrait par exemple déduire une situation socio-économique d'un code postal et, constatant un phénomène d'endogamie dans ses bases de données, ne proposer que des profils issus du même milieu à ses utilisateurs.

►►► A lire : Quand les algorithmes reproduisent les stéréotypes sexistes


Des machines stupides
Idem, par exemple, avec la couleur de peau. C’est déjà ce qui se passe régulièrement. Et cela nous force à un constat un peu décevant pour nos imaginaires complotistes: les machines, ne sont pas malveillantes, elles sont juste stupides, trop limitées par leur logique pour saisir la pleine mesure d’un système aussi complexe et irrationnel que les envies et les attirances humaines. Dans la grande soupe des probabilités, parfois ça marche.

Mais ça prend du temps. Et si on a inventé l’hyperchoix, on n’a pas encore mis la main sur l’hypertemps qui irait avec. Je t’engagerais donc, grand explorateur des multipotentialités romantiques, à poser ton téléphone et à ouvrir les yeux et les oreilles. A te reconnecter avec ton voisin ou ta voisine de table avant que les gestes barrières, les confinements à répétition et les apps de rencontre n’atrophient définitivement nos mœurs. Parce que je pense sincèrement que le plus beau des profils ne remplacera jamais un face à face, si imparfait soit-il.

Épisode 4 : sommes-nous tous égaux, toutes égales face aux applications de rencontre ?

 

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Déconstruire les masculinités toxiques (2/4): "Je suis un monstre qui vous parle" , article femmes hommes, egalite,

29 Juillet 2020, 20:56pm

Publié par hugo

 Déconstruire les masculinités toxiques (2/4): "Je suis un monstre qui vous parle"
Déconstruire les masculinités (2/4): "Je suis un monstre qui vous parle" 
Déconstruire les masculinités (2/4): "Je suis un monstre qui vous parle" - © Tous droits réservés
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Une chronique de July Robert
 Publié le mercredi 22 juillet 2020 à 09h42
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Cet été, Les Grenades décortiquent les stéréotypes de genre qui engendrent des comportements masculins toxiques. Quatre articles pour creuser le sujet et faire valser les étiquettes. Parce que l'égalité femmes-hommes passe aussi par une remise en question des rôles sociaux qu’endossent ceux qui forment la moitié de la population. Pour ce deuxième article, intéressons-nous à l'auteur Paul B. Preciado qui critique la binarité qui nous enferme.

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Premier article - Déconstruire les masculinités toxiques: "Sois fort, ne pleure pas"

Né Béatriz Preciado en 1970 dans une Espagne encore franquiste, Paul B. Preciado est diplômé de la prestigieuse université américaine de Princetown. Philosophe, chercheur associé à l’université Paris VIII, il est aujourd’hui une des voix reconnues du mouvement féministe queer à travers le monde francophone. Mais ses réflexions portent bien au-delà de la seule question du genre.

S’affirmant longtemps comme lesbienne, Béatriz Preciado fut la compagne de Virginie Despentes avant d’entamer un long processus de ce qu’il nomme aujourd’hui une libération. Creusant un long tunnel, il a tracé sa voie vers la liberté et l’affirmation de sa transsexualité en s’injectant de la testostérone afin de sortir de la "cage politique" dans laquelle la société hétéro-patriarcale l’avait enfermé. Une démarche salvatrice.

Puisque dans le cirque du régime binaire hétéro-patriarcal, les femmes ont alternativement le rôle de belle et celui de la victime, et puisque je n’étais et ne me sentais pas capable d’être l’une ou l’autre, j’ai décidé de cesser d’être une femme. (…) Je sentais que, à force d’être écrasé entre les deux murs de la masculinité et de la féminité, je finirais par crever, inévitablement

Une binarité qui n'est plus d'actualité
"Je suis un monstre qui vous parle" est la retranscription de sa récente prise de parole devant 3500 psychanalystes réuni.es à Paris à l’initiative de l’École de la cause freudienne. La thématique de la journée était "Femmes en psychanalyse".

Régulièrement coupé, interrompu et hué, ce jour-là, Paul B. Preciado n’a pas eu l’opportunité d’aller au bout de son discours. Au cours de celui-ci, il affirme avoir fait le choix conscient de faire de sa vie une légende littéraire, un show biopolitique, plutôt que de laisser la psychiatrie, la pharmacologie ou encore la médecine construire une représentation de lui en tant qu’homosexuel ou de transsexuel.

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe

Et c’est précisément cette prise de position qui lui vaut d’être conspué par une grande majorité du monde académique. Ayant toute sa vie étudié les "différents types de cages sexuelles et de genres" dans lesquelles les humains s’enferment, il dénonce la société actuelle fondée sur des principes (opposition femme/homme, noir/blanc, etc) forgés et imaginés il y a des dizaines d’années. Il affirme que la binarité sur laquelle elle se base n’est plus d’actualité et qu’il est grand temps de la remettre en question.

Le temps est venu de sortir les divans sur les places et de collectiviser la parole, de politiser les corps, de débinariser la sexualité et de décoloniser l’inconscient

Quatre éléments fondateurs
Dans cette démarche, il pointe quatre éléments fondateurs de ce changement de paradigme : l’apparition de la bombe atomique qui constitue l’apparition, pour l’humain, de la possibilité de détruire la totalité de la vie sur la planète ; l’invention de la notion de genre par un pédopsychiatre américain lorsque ce dernier comprend qu’une part importante de nouveaux nés ne correspond pas au système binaire ; l’invention de la pilule contraceptive comme un système de contrôle et de régulation de la sexualité (selon Preciado, la pilule contraceptive marque l’arrivée de l’industrie pharmacologique à l’intérieur de ce système, elle qui fut introduite avec pour objectif de stopper la reproduction des races non blanches selon la pensée raciste de l’époque. Elle est donc, à l’origine, un outil d’eugénisme et de contrôle racial) ; et enfin la pornographie, devenue culture de masse après la Seconde Guerre Mondiale.

Ces quatre événements constituent pour Paul B. Preciado les jalons de ce changement sociétal auquel le monde de la psychanalyse est incapable de faire face aujourd’hui.

"Ce que je dénonce, c’est la fidélité de la psychanalyse, élaborée au cours du 20ème siècle, à l’épistémologie de la différence sexuelle et à la raison coloniale dominante en Occident", affirme-t-il dans son essai. Il y fait le parallèle, voire assimile, le processus de binarisation des corps à celui des frontières nationales et qualifie ainsi la transition de genre comme un processus de décolonisation du corps dont un des objectifs, moins personnel, est donc pour lui la déconstruction du patriarcat hétéro-colonial.

►►► A lire : Colonisation: aux origines de l'hypersexualisation des femmes noires

Enthousiaste face aux mutations actuelles de la différence sexuelle, le philosophe se positionne comme "un lanceur d’alerte de la violence épistémologique de la différence sexuelle et comme chercheur d’un nouveau paradigme". Selon lui, cela ne peut se faire que par une mutation révolutionnaire de la psychanalyse et un dépassement des présupposés patriarcat-coloniaux.

Empêché de prononcer l’entièreté de son discours à l’époque, Paul B. Preciado entend aujourd’hui par la publication de son texte dans son intégralité, élargir le débat car pour lui "Le temps est venu de sortir les divans sur les places et de collectiviser la parole, de politiser les corps, de débinariser la sexualité et de décoloniser l’inconscient".

Je suis un monstre qui vous parle ; Grasset ; 10 juin 2020

Corps en transition, corps mutilés avec Paul B. Preciado et Paul Rocher

July Robert, traductrice et autrice.

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https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_deconstruire-les-masculinites-2-4-je-suis-un-monstre-qui-vous-parle?id=10546575

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