TROIS DES CINQ CANDIDATES INTERROGÉES : CLOTILDE RIPOULL (GAUCHE), ANNE DEHESTRU ET LAURENCE ROUX-FOUILLET (DROITE)DR
SOCIÉTÉ 20 MARS 2014
Auteurs
Nathalie Leenhardt
Frédérick Casadesus
Philippe Bohlinger
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Municipales : des protestantes engagées
Cinq femmes protestantes expliquent les raisons de leur engagement au service de la collectivité.
Elles ont beau ne pas être sur les mêmes cases de l’échiquier politique, elles parlent de leur engagement avec les mêmes termes : le sens des responsabilités, inscrit dans leur ADN réformé, la volonté de servir, le refus des promesses gartuites. Elles, ce sont cinq femmes protestantes qui se présentent ou plutôt se représentent aux élections municipales, dimanche prochain.
Laurence Roux-Fouillet, 46 ans, a déjà fait deux mandats comme élue municipale à Sèvres (22 000 habitants), dans les Hauts-de-Seine. Après l’accident de santé dont fut victime François Kosciusko-Morizet à l’automne, elle a décidé de prendre la tête de liste et reçu l’adoubement de l’UMP, du MoDem et de l’UDI, elle qui, jusqu’alors, n’était pas « encartée ». Rencontrée quelques jours avant le premier tour, elle se dit « confiante et portée par son équipe ». Elle insiste beaucoup sur cette notion de « collectif ». Elle a choisi ceux et celles qui l’entourent (35 conseillers), en faisant un mixte entre les sortants et de nouveaux venus : « Il me fallait allier l’expérience et le renouvellement. »
Rendre ce que l’on a reçu
Travailler en équipe, c’est aussi ce qui séduit Marianne Barandon-Prat, première adjointe à Durfort-et-Saint-Martin-de-Sossenac (750 habitants) dans le Gard. Cette retraitée de 72 ans, « qui a toujours voté à gauche », se présente « pour servir ». Elle se réjouit de la composition de la liste apolitique (16 candidats) qui s’est constituée, avec des anciens du village et des « néo-durfortiens » arrivés récemment.
Mais pourquoi se lancer en politique ? Rendre ce que l’on reçu, ces mots reviennent de la même façon dans la bouche des candidates. « Le calvinisme, c’est le sens de la responsabilité, dit Anne Dehestru, tête de liste UDI à Guebwiller (11 500 habitants), dans le Haut-Rhin. La grâce existe, tout est grâce. Mais quand on a eu la chance d’avoir des repères et des valeurs, il est important de rendre ce qu’on a reçu. » C’est ce que dit aussi Laurence Roux-Fouillet, reprenant les mots de sa grand-mère réformée, qui vivait à Nancy. Elle poursuit : « Je ne pouvais m’imaginer passer ma vie à la regarder défiler. Pour moi, il est essentiel de prendre part à ce qui se passe et j’aime la proximité », en insistant sur le fait que son engagement paroissial a aussi été un vecteur d’encouragement. En 2000, la loi sur la parité, que pourtant elle n’approuvait pas, n’étant pas favorable au principe de discrimination positive, fut un déclic. « Une porte s’est ouverte, j’ai écrit au maire pour mettre mes compétences dans le domaine du handicap au service de la collectivité. »
Marianne Barandon-Prat fait elle aussi le lien avec ses engagements au sein de l’Église, elle qui fut engagée au Conseil régional de Centre-Rhône-Alpes et qui a aussi un passé dans l’aumônerie hospitalière. Elle commente : « C’est sûr qu’on marche davantage dans le même sens en Église que dans une municipalité. Mais le sens de l’engagement est le même. »
Des propos que ne renierait pas Anne Dehestru. Vice-présidente de l’Église protestante réformée d’Alsace-Moselle (EPRAL), conseillère d’opposition pendant deux mandats, cette femme de 55 ans, consultante en ressources humaines, estime que « la politique est dans les gènes des protestants. N’étant pas satisfaite du fonctionnement actuel de la démocratie, j’estime que le meilleur moyen de le faire changer, c’est d’agir de l’intérieur. »
C’est bien ce « y’a qu’à, faut qu’on » que refuse Martine Aubert, qui se présente comme 2e adjointe à Quissac (3 100 habitants), dans le Gard, sur une liste apolitique. Cette retraitée de 66 ans, qui se dit « du centre », elle aussi engagée dans l’Église, explique qu’un élu n’est pas là pour « se défiler » : « Nous devons assumer nos décisions et surtout ne pas promettre la lune pour ne pas décevoir. » Sur ce terrain, Laurence Roux-Fouillet préfère parler de « projets chiffrés » que de promesses, et se réjouit qu’au fil de la campagne les questions des citoyens deviennent de moins en moins idéologiques.
Réalistes, ancrées dans le quotidien, ces candidates interrogées insistent sur leur intérêt pour « l’humain ». « Mon ancrage protestant me conduit à m’attacher à l’aspect humain de la vie publique et sociale, dit ainsi Clotilde Ripoull, 42 ans, tête de liste de « Perpignan équilibre » (120 100 habitants). C’est pourquoi notre programme contient en premier lieu des propositions tournées vers le travail et l’emploi, dans une ville où le chômage est un fléau et touche près de 30 % des jeunes. »
Les jeunes, cette préoccupation revient souvent dans les propos, Marianne Barandon-Prat souhaitant créer un conseil municipal des jeunes, initiative dont se félicite Laurence Roux-Feuillet, qui souhaite élargir la mesure. Qu’elles soient de droite, de gauche ou du centre, ces candidates expriment le même désir de se battre, de mobiliser leur énergie pour des lieux de vie sereins et conviviaux et affirment la même vigilance à ne pas grever les finances de la commune, tant les impôts sont devenus une source d’allergie pour tous les citoyens.
Franchiraient-elles pour autant le pas de passer d’un bord à l’autre ? « Jamais, dit Marianne Barandon-Prat. La gauche est ma famille, j’ai été élevée dans un milieu de revendications ouvrières et syndicalistes. » « Je me revendique d’une droite sociale, répond en écho Laurence Roux-Fouillet. Les objectifs des élus sont les mêmes en fait, seuls les moyens d’y arriver diffèrent, je suis opposée au tout gratuit, à l’assistanat, il faut responsabiliser les citoyens, les informer du coût réel des services. »
Vivement la fin !
Interrogées sur le rôle des femmes en politique, Anne Dehestru juge que celles-ci « sont bien acceptées, quand elles restent dans les seconds rôles ». Laurence Roux-Fouillet dit aussi avec humour combien on l’a longtemps cantonnée au « social » alors que ce qui la passionne, c’est la voirie !
Une chose est sûre, toutes se réjouissent que la campagne s’arrête, notamment Clotilde Ripoull : « La campagne actuelle est particulièrement complexe. La dégradation de nos institutions, qu’il faut réformer en profondeur, provoque le mécontentement de nos concitoyens. Le fonctionnement des partis politiques a coupé les citoyens de leurs représentants. Les affaires politico-financières qui apparaissent de façon récurrente décrédibilisent l’ensemble de la classe politique. » Laurence Roux-Fouillet ajoute : « La campagne heureusement, ça n’a qu’un temps, après tout s’apaise, on peut recommencer à travailler avec ceux de l’autre bord, que l’on croise par ailleurs dans le domaine associatif. » « Moi, j’ai horreur de ces périodes de campagne, renchérit Martine Aubert, car trop d’individus se croient obligés de devenir batailleurs, agressifs. Or, nous savons bien que nous serons amenés à travailler ensemble, après. » Et Marianne Barandon-Prat de conclure : « J’ose croire qu’on peut avoir une vision fraternelle de la vie municipale. » Une belle vision...