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STEM : un événement à Charleroi pour visibiliser les femmes au cœur de l’innovation

6 Mars 2023, 04:40am

Publié par hugo

 STEM : un événement à Charleroi pour visibiliser les femmes au cœur de l’innovation

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hier à 11:19

Temps de lecture
4 min

La RTBF et A6K se mobilisent pour une meilleure inclusion des femmes dans le monde de la tech’. Ce mercredi 8 mars à Charleroi, cinq expertes déconstruiront les stéréotypes et partageront leurs expériences de l’innovation sous le signe de la diversité. Un événement à ne pas manquer !

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À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, la RTBF et A6K – l’écosystème industriel et numérique de Charleroi – unissent leurs forces et vous convient à la rencontre Nouv·ELLES technologies : pourquoi les femmes sont au cœur de l’innovation ? pour mettre en lumière les femmes actives dans les sciences et la tech’.

Ouvrir les filières et multiplier les profils
Pour réduire les écarts de genre dans les carrières liées aux technologies et aux sciences, il est essentiel de travailler sur les questions de représentations et la déconstruction des stéréotypes. "Chez A6K, en tant que lieu dédié à l’ingénierie, à la technologie, nous nous rendons compte qu’il n’y a pas assez de femmes dans ces secteurs. Or on a besoin des femmes : une meilleure inclusion se révèle primordiale si on veut réduire les biais de genre et mettre en place des projets véritablement innovants. Avec la RTBF, ensemble nous avons créé cet événement pour toucher les femmes en recherche d’emploi et leur rappeler que tout est possible, qu’elles peuvent intégrer ces filières. Aussi, nous souhaitons sensibiliser les professionnel·les à la nécessité de favoriser la diversité dans le recrutement des profils", éclaire Loubna El Messaoudi, Communication Manager chez A6K.

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"En tant que service public, il nous importe de porter ces messages auprès de la population. Mais ce n’est pas tout ! Chez nous également, il est essentiel de féminiser les professions techniques au sein de nos services, de recruter des talents issus de la diversité socio-économique", continue Valérie Druitte responsable du site de RTBF Charleroi.

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L’inclusion bénéfique pour toutes et tous
Après les constats, cette soirée veut apporter des solutions concrètes ! Pour déconstruire les stéréotypes et faire tomber les barrières, Laurence Guiot, responsable de la maintenance et de l’engineering pour GSK ouvrira la soirée avec une keynote dédiée à la nécessité de l’intégration des femmes dans les secteurs liés à l’innovation.

"Un écosystème d’innovation plus inclusif profite à tous, car il permet de développer de nouvelles idées ou de résoudre des problèmes complexes, ce qui mène à une meilleure performance, en plus d’un épanouissement personnel… c’est la raison pour laquelle je suis très motivée de promouvoir les métiers STEM (de l’anglais : science, technology, engineering and mathematics) auprès de jeunes filles", explique-t-elle.

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Des expertes rôles modèles
La présentation sera suivie d’une discussion. En plus de Laurence Guiot, la table ronde rassemblera quatre femmes de terrain au parcours inspirant.

Phédra Clouner Directrice générale adjointe de l’agence nationale de cybersécurité. Après des études d’histoire de l’Antiquité et un master en Sciences de l’information et de la documentation, elle a fait sa place dans le secteur de la cybersécurité qui reste très masculin. Aussi, pour motiver les femmes à se lancer dans cette filière, elle a co-fondé l’antenne belge de Women4cyber.

Nadia Aimé, un bel exemple de résilience et de réussite à toutes épreuves. Autodidacte, après un parcours scolaire très complexe, l’informatique a changé sa vie. Elle est aujourd’hui spécialiste en cybersécurité chez Microsoft et porte un message d’espoir et de confiance pour les femmes et particulièrement pour les mamans solos. Son histoire ouvre la voie…

Laure Lemaire est sociologue et économiste, ex-chercheuse spécialiste de l’étude de l’impact des Technologies de l’information et de la communication (TIC) sur les transformations du travail et des métiers (FTU Namur et Université de Liège – Lentic). Depuis 2007, elle est directrice d’Interface 3, une asbl de formations qualifiantes favorisant l’accès des femmes aux professions de l’informatique. Elle participe au plus près au développement de nouvelles carrières.

Enfin, Julie Henry, didacticienne en informatique, en TIC et en sciences. Chimiste de formation, elle est agrégée en chimie/biologie/physique et docteure en didactique de l’informatique. Elle occupe le poste de cheffe de projets STEAM à l’UNamur. Ses recherches portent sur l’éducation aux STEAM pour susciter de l’intérêt auprès des jeunes et particulièrement des filles, dans les matières scientifiques.

Ce programme qui s’annonce d’une grande richesse sera animé par Sofia Cotsoglou, journaliste à la RTBF.

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Infos pratiques
8 mars 2023, A6K | Advanced Engineering Center Square des Martyrs 6000 Charleroi

17 : 30 Ouverture des portes, 18 : 00 Keynote & table ronde, 19 : 30 Networking

Inscriptions par ici.

Interview avec Safia Kessas pour le documentaire "Casser les codes", sur les femmes dans les STEM

Interview avec Safia Kessas pour "Casser les codes"
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https://www.rtbf.be/article/stem-un-evenement-a-charleroi-pour-visibiliser-les-femmes-au-coeur-de-linnovation-11162245

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Comment lutter contre le harcèlement de rue ?

23 Novembre 2022, 21:06pm

Publié par hugo

 INITIATIVES LOCALES

Comment lutter contre le harcèlement de rue ?

© © Tous droits réservés

14 févr. 2022 à 10:09 - mise à jour hier à 11:06

Temps de lecture
7 min
Par Véronique Wese
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Harcèlement

Télésambre

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DATE20220219
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Le 25 novembre, c’est la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. L’occasion de sensibiliser chaque citoyen.ne à cette problématique, de mettre en lumière les violences systémiques faites aux femmes et de pointer la nécessité de développer plus de solutions efficaces pour faire face au harcèlement et à l’intimidation sexuelle en rue.

Des chiffres marquants
Les chiffres publiés par Plan International Belgique en juin 2021, dans le cadre de son programme Safer Cities, sont encore bien d’actualité. D’après les données récoltées, "95% des signalements de harcèlement sexuel proviennent de filles. 31% des cas de harcèlement se produisent lorsqu’elles marchent dans la rue, 15% dans les transports en commun et 17% lors d’une activité de loisir, comme une sortie ou une promenade au parc. Et si 31% des filles disent avoir été harcelées le soir, selon 25% d’entre elles cela peut arriver à tout moment". Des chiffres qui révèlent bien l’amplitude du harcèlement de rue en Belgique.

À lire aussi
"Cela arrive presque tous les jours" : le harcèlement de rue reste fort présent en Belgique

Le rapport montre aussi que 80% des victimes n’ont bénéficié d’aucune aide de la part de témoins. Un pourcentage qui peut notamment s’expliquer par le manque d’information et de campagnes de sensibilisation. C’est d’ailleurs l’un des points soulevés par Plan International et sur lequel les politiques mettent un coup d’accélérateur.

"Des villes comme Bruxelles, Charleroi, Anvers et Gand sont effectivement occupées à développer tout un tas de mesures anti-harcèlement," nous dit Jorn Vennekens, attaché de presse de Plan International Belgique. "Mais aujourd’hui, on espère voir naître encore plus de campagnes de sensibilisation. Des campagnes plus impactantes surtout, et ce, un peu partout en Belgique. La bonne nouvelle, c’est que ça évolue dans le bon sens. Le harcèlement de rue est de plus en plus pris en compte par les policiers, par exemple. Mais, c’est clair qu’il faut continuer à agir et à faire bouger les choses. Nos villes doivent être plus sûres pour tous et toutes." Comment ?

Les applications d’alerte, des outils efficaces ?
Face à cette réalité, la Ville de Liège qui avait étudié, en février dernier, la faisabilité de lancer une nouvelle application anti-harcèlement. D’après une annonce faite par le bourgmestre, Willy Demeyer, les Liégeoises devraient pouvoir bénéficier de cet outil d’ici quelques semaines. Un concept qui existe déjà, en réalité.

Parmi les outils existants, il y a par exemple The Sorority ou App-Elles : des applications mobiles gratuites destinées aux femmes victimes de violences et de harcèlement. Des app' qui leur permettent d’alerter rapidement les secours en cas de besoin, de signaler les cas d’intimidation sexuelle, qui proposent des espaces d’information, de conversation et qui renseignent les numéros d’urgence et d’aide en Belgique francophone.

► A lire aussi : L’application “App-Elles” déployée en Wallonie et à Bruxelles pour les femmes en danger

Des outils bien pratiques et rassurants selon certain.e.s... Mais, plus discutables selon d’autres. Pourquoi ?

À lire aussi
The Sorority, l’app qui lutte contre le harcèlement sexiste

Diariata N’Diaye, la créatrice d’App-Elles, est convaincue par l’efficacité de son application. Mais elle prévient quand même que ce type d’outils doit être développé avec prudence. "Beaucoup d’applications anti-harcèlement développées n’ont pas tenu, faute de sécurisation. Certaines sont inondées de fausses alertes. D’autres ne sont pas assez protégées et peuvent même se retourner contre les utilisatrices. Il arrive que des agresseurs trichent sur leur identité et téléchargent ces applis pour se mettre directement en lien avec les victimes. C’est donc très important d’opter pour quelque chose de sérieux."


@App-Elles
Catherine Péters, Chargée du Plaidoyer chez Plan International Belgique, n’est pas non plus convaincue à 100% par le concept. "L’idée n’est pas mauvaise en soi. Mais selon moi, ces applications mobiles ne régleront pas la problématique du harcèlement de rue sur le long terme. Comme c’est le cas de beaucoup d’initiatives, on reporte ici la responsabilité sur la victime. Ce qu’il faut faire, avant toute chose, c’est casser les clichés et briser les stéréotypes de genre et de sexisme. On doit s’attaquer à la cause et non aux symptômes. Malheureusement, la société dans laquelle on vit accepte le harcèlement de rue, comme s’il faisait partie des normes. Mais, ce n’est pas normal de se faire siffler, accoster, harceler en rue ! Et ça, ça doit rentrer dans les mentalités. C’est d’ailleurs la première chose sur laquelle il faut travailler."

"Il faut d’abord déconstruire les clichés !"
En lisant le rapport de Plan International Belgique, on se rend compte que le harcèlement sexuel impacte fondamentalement la liberté de mouvement de 50% des filles. "En réalité, on est même au-delà de ça", nous dit Catherine Péters. "Quand on sort de chez soi en tant que femme, on a des réflexes : on garde ses clés en main, on choisit des rues bien éclairées, on fait semblant d’être au téléphone… Ces gestes sont tellement ancrés dans les habitudes des femmes, que beaucoup ne s’en rendent même plus compte. La vulnérabilité féminine est présentée comme une évidence dans la société. Lorsqu’elles sont dans l’espace public, les filles et les femmes se doivent de faire attention. Ça ne devrait pas être le cas. Il faut donc déconstruire les clichés."

"En plus de ça", ajoute Catherine Péters, "seuls 6% des victimes osent porter plainte à la police. Pourtant, il faut savoir qu’appeler la police est le premier réflexe à avoir en cas de harcèlement de rue. Par contre, c’est vrai qu’il faut continuer à sensibiliser et à former les forces de l’ordre. Les connaissances des policiers au sujet du harcèlement de rue ne sont pas encore suffisantes, et du coup, leurs attitudes ne répondent pas toujours aux attentes des victimes," souligne la coordinatrice, avant de rajouter qu' "alors oui, des outils comme les applications mobiles peuvent servir de 'sparadraps' en attendant que les choses bougent, parce que ça peut rassurer certaines personnes, mais personnellement je crois plutôt dans les initiatives qui prônent la conscientisation."

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Plus d’une personne transgenre sur deux est victime de violence dans la rue


© Getty images / Plus d’une personne transgenre sur deux est victime de violence dans la rue, verbale ou physique.
Quels moyens de conscientisation ?
Il existe beaucoup d’initiatives anti-harcèlement en Belgique. Des campagnes de sensibilisations sont lancées régulièrement aux quatre coins du pays et impliquent peu à peu les groupes cibles (femmes, filles, femmes trans) dès leur création. "C’est essentiel de les intégrer pour que la conscientisation rayonne à tous les niveaux," explique Catherine Péters. "Les choses bougent dans le bon sens. On voit apparaître des campagnes et des projets de plus en plus impactants, qui font changer (petit à petit) les mentalités."

File-moi ton 04 !
"Bonjour. Si vous lisez ce message c’est que vous avez mis une personne mal à l’aise. Avec vous elle ne s’est pas sentie en sécurité. Si une personne vous dit " non ", inutile d’insister. Apprenez à respecter les autres et leurs décisions. Merci."

Voici le type de SMS envoyé par le 0460/20.39.29, un numéro anti-relou lancé par l’entreprise bruxelloise Stoomlink et dont le principe est tout simple : on donne ce numéro à une personne qui nous importune, en faisant croire que c’est le nôtre. Si le harceleur nous envoie un message, il en reçoit un en retour lui expliquant qu’il a été irrespectueux. S’il appelle, il tombera sur un répondeur anonyme. Une idée intéressante, destinée à se débarrasser plus facilement d’un.e relou, et surtout à conscientiser ce.tte dernièr.e aux harcèlements de rue.

Malheureusement, ce projet a dû prendre fin, faute de financement. Selon Hélène Ruelle, sa créatrice, “il faudrait un budget de 500 euros par mois pour faire fonctionner le système". Un projet qui pourrait être relancé s’il trouve une association preneuse.

La policière appât
Un autre dispositif axé 'conscientisation' (plus controversé) a été lancé par la police de Liège, en 2020. Il s’agit d’une brigade chargée de traquer les harceleurs de rue, avec comme appât, une policière en civil. Derrière elle, des policiers prêts à intervenir. L’objectif étant, certes de verbaliser des actes de sexisme ordinaire, mais surtout de faire prendre conscience aux gens de l’existence de l’infraction, de la peine rattachée et du caractère totalement inapproprié de leur comportement. La police de Liège a été récompensée pour cette démarche.

Poésie masculine
“Poésie masculine”, c’est le nom d’un projet immersif installé à Tour & Taxis, en début d’année et qui pourrait être relancé ! "Le but était de modifier les comportements, éduquer les hommes, déconditionner les femmes et aider les témoins," peut-on lire sur le site de l’initiative. Le public est invité à déambuler dans une installation interactive, et à vivre le harcèlement de rue. Selon les organisateurs, "les témoignages sont unanimes, l’expérience est très forte et amène au débat. Elle permet une prise de conscience aux hommes. Elle aide à déconditionner les femmes et libère leur parole."


Témoin, rôle essentiel pour aider les victimes
Le rapport de Plan International Belgique susmentionné montre que 80% des victimes de harcèlement de rue n’ont bénéficié d’aucune aide de la part de témoins. Or, l’ONG met en avant le rôle que peuvent jouer les témoins. Le problème, c’est que les gens n’interviennent pas, soit parce qu’ils ont peur, soit parce qu’ils ne savent tout simplement pas comment réagir.

Le plus important, c’est de ne pas fermer les yeux !

Pour aider au mieux les victimes lorsqu’on est témoin d’un harcèlement ou d’une agression en rue, le collectif américain Hollaback ! a développé "la méthode des 5D". Des gestes efficaces aujourd’hui adoptés un peu partout dans le monde, et déjà bien intégrés chez nous. Cette méthode se résume en 5 comportements, à savoir distraire, déléguer, documenter, diriger et dialoguer. Mathilde Bernard, Youth Officer chez Plan International, nous explique le concept des 5D dans ce reportage de Télésambre.

 


Besoin d’aide ?
Le site violencessexuelles.be propose des conseils et des ressources pour faire face au harcèlement sexuel et porter plainte. Le site maintenantjenparle.be, quant à lui, propose un chat confidentiel avec des professionnelles. Il est ouvert du lundi au vendredi, entre 18h et 21h.

Pour enregistrer les situations d’urgence et les plaintes, c’est la police qui est la mieux placée. Dans certains cas, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes et les centres de planning familial peuvent aussi être d’une aide précieuse.

Il existe un numéro gratuit aussi : le 0800 98 100. Cette ligne téléphonique est assurée par l’ASBL SOS Viol et s’adresse aux victimes de violences sexuelles. Il est opérationnel dans toute la Belgique, accessible pendant les heures de bureau.

Des moyens mis en place pour venir en aide aux victimes de harcèlement sexuel et les encourager à sortir de leur silence. Et à l’avenir ? "Il faut développer encore plus de moyens pour soutenir les victimes rapidement", conclut Catherine Péters, "C’est essentiel de conscientiser les gens, changer les mentalités. Il faut mettre en place plus de mécanismes de prévention, d’alerte, et amplifier l’assistance et le soutien aux victimes. Il est essentiel qu’on agisse tous ensemble contre le harcèlement de rue !"


https://www.rtbf.be/article/comment-lutter-contre-le-harcelement-de-rue-10931503

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Un parcours audio pour décoloniser l’UL ,

8 Août 2021, 04:19am

Publié par hugo

Un parcours audio pour décoloniser l’ULB
 
 
Jehanne Bergé
 Publié le samedi 07 août 2021 à 08h03
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Le Collectif Mémoire Coloniale et Lutte contre les Discriminations et ULB-Coopération viennent de lancer une visite guidée décoloniale de l’Université sous forme de podcast. Un résultat informatif, créatif et immersif. À vos casques audio !

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À chaque coin de rue, des noms, des titres, des monuments racontent l’Histoire et forgent notre mémoire collective. Depuis des années, le Collectif Mémoire Coloniale et Lutte contre les Discriminations (CMCLCD) organise des visites de l’espace public. Leur but ? Ouvrir les yeux sur les enjeux que sous-tend cette mise en avant de certains personnages historiques, déconstruire le passé colonial et lutter contre les discriminations. Grande première, à présent, l’une de leurs visites est désormais disponible en ligne. Durant 1h30, les auditeurs et auditrices peuvent explorer neuf lieux emblématiques du campus du Solbosch, tout en saisissant leurs connexions avec l’histoire coloniale belge au Congo.

Autonomie et déconstruction
"Chaque année, l’ULB organise une journée de la coopération. En 2020, la thématique était la décolonisation. Dans ce cadre-là, j’avais proposé de faire une visite guidée du campus avec le collectif CMCLCD qui avait déjà préparé et construit un parcours à l’Université. C’est le confinement qui nous a donné l’idée de faire le podcast", explique Audrey Villance de l’ONG ULB-Coopération.

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Le processus a été long et nourri de multiples réflexions. En effet, le collectif organise des visites aux quatre coins de Bruxelles depuis 2013, et ancrer le parcours sur la toile était une expérience inédite. "Pour chaque parcours, nous faisons des recherches historiques et scientifiques afin de rendre la visite la plus pertinente et objective possible. C’est clair que mettre tout le fruit de notre travail à disposition de tout le monde représentait un enjeu de taille, mais ainsi la visite est accessible au plus grand nombre. Désormais, chacun·e peut apprendre cette histoire-là, et ce à tout moment", commente Geneviève Kaninda, coordinatrice du CMCLCD.

Pendant une heure trente, les auditeurs et auditrices sont guidé·es par Thierno Aliou Balde et Gloria Mukolo. La visite est ponctuée par les slams poétiques et engagés de Joëlle Sambi, tandis que les beats du musicien StraZ rythment le pas. Ce sont les Studios Kimia qui ont assuré la réalisation du projet.

Entre passé et présent
"La déshumanisation ce n’est pas que le passé, c’est aussi aujourd’hui", introduit le podcast en faisant référence notamment aux violences policières. Tout au long de celui-ci, les personnes sont invitées à naviguer entre hier et aujourd’hui. À l’écoute, on découvre entre autres les liens entre les violences, les productions de savoirs et la légitimation du système colonial au travers de l’anthropologie, la botanique, la zoologie, la minéralogie….

L’espace public est sexiste et raciste. On y voit très peu les femmes, et quasi aucune femme noire ou africaine

"Le projet a posé beaucoup de questions et a soulevé de nombreux débats, on espère qu’il sera une porte d’entrée pour continuer le travail de mémoire au sein de l’institution", confie Audrey Villance. Concernant le visuel, l’équipe a d’ailleurs choisi une photo du médaillon de Léopold II qui était exposé dans le hall des bibliothèques et qui avait été tagué en 2018. "Depuis le médaillon a été retiré, mais nous ne savons pas où il se trouve", confie la coordinatrice de ULB-coopération.

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La place des femmes
Durant la visite, en termes de contenu, il n’y a que très peu (voire pas) d’allusion aux femmes. "Ceci nous indique à quel point, les personnes valorisées sur le campus étaient des hommes", rappelle Audrey Villance. En 2018, lors d’une action, la collective "Noms Peut-Être !" et des étudiantes de l’ULB avaient d’ailleurs renommé des auditoires de l’Université Libre de Bruxelles en visibilisant des femmes remarquables belges et étrangères.

Geneviève Kaninda ajoute : "L’espace public est sexiste et raciste. On y voit très peu les femmes, et quasi aucune femme noire ou africaine." Dans une approche intersectionnelle, le collectif fait son possible pour pallier cette réalité en essayant de mettre les femmes en avant. "On fait toujours un pont entre le passé et le présent. Par exemple, dans notre parcours de Matonge, en passant devant la pharmacie coloniale, on parle du syndrome méditerranéen [stéréotype consistant à considérer que les personnes nord-africaines, noires ou d’autres minorités exagèrent leurs symptômes et leurs douleurs, NDLR] ou des expériences de violences vécues par les femmes noires dans le milieu médical. L’espace public nous permet de réaliser une analyse de la société en général."

Les choses bougent
Même si la question de la décolonisation de l’espace public a été au centre de débats, le travail est encore long, selon l’association. "Au niveau institutionnel des choses se sont mises en place. On peut noter par exemple, la rebaptisation du tunnel Léopold II, ou la rebaptisation des stations STIB à l’instar de l’arrêt de bus Parc en Rosa Parks. On sent que c’est en train de bouger", éclaire Geneviève Kaninda.

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Le collectif a également été contacté par différentes administrations communales pour les accompagner dans la décolonisation de l’espace public. "On est militant·es. On essaye de faire avec ce qu’on a comme temps, énergie et disponibilité mentale. C’est beaucoup de sacrifices, mais quand on observe que ça paye, on se dit qu’on ne le fait pas pour rien et ça, c’est vraiment chouette."

Disponible gratuitement depuis le 26 juillet sur les plateformes d’écoute Spotify, Itunes, SoundCloud et YouTube, la visite fait déjà parler d’elle. "Pour l’instant, les retours sont assez positifs, les gens semblent assez satisfaits de l’expérience, on verra la suite", conclut la coordinatrice du collectif. Plus qu’à attendre la rentrée, pour qu’il résonne dans les couloirs de l’Université !


Mémoire Coloniale (CMCLD) · Visite guidée décoloniale de l'ULB
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https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_un-parcours-audio-pour-decoloniser-l-ulb?id=10819753

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Droits fondamentaux des personnes afrodescendantes : des expertes auditionnées au Parlement de la Cocof ,

28 Mai 2021, 17:09pm

Publié par hugo

Droits fondamentaux des personnes afrodescendantes : des expertes auditionnées au Parlement de la Cocof
Droits fondamentaux des personnes afrodescendantes : des expertes auditionnées au Parlement de la Cocof
Droits fondamentaux des personnes afrodescendantes : des expertes auditionnées au Parlement de la Cocof - © Tous droits réservés
   
Camille Wernaers
 Publié le mercredi 26 mai 2021 à 19h25
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Ce 25 mai, le parlement de la Cocof auditionnait trois premières expertes sur les questions de racisme et de sexisme. Cette série d'auditions est liée à la résolution sur les droits fondamentaux des personnes d’ascendance africaine en Europe, une résolution adoptée par le Parlement européen le 26 mars 2019.

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“Environ 15 millions de personnes d’origine africaine vivent en Europe aujourd’hui. Ces personnes sont confrontées à de la discrimination et à des stéréotypes négatifs profondément ancrés”, écrivait le Parlement européen au moment de l’adoption de la résolution. “Le Parlement exhorte l’Europe et les autorités nationales à développer des politiques antiracistes et à mettre un terme à la discrimination dans les domaines de l’éducation, du logement, de la santé, du droit pénal, de la participation politique et de la migration”. La résolution demande une attention accrue portée aux personnes d’origine africaine dans le budget européen.

La présidente de la séance était la parlementaire Magali Plovie (Ecolo) qui a ouvert les discussions se disant “très contente que cette série d’audition soient organisée sur un sujet aussi important”. “Travailler sur des recommandations qui feront avancer les droits fondamentaux des personnes afrodescendantes doit se mener de manière transversale, à tous les niveaux de pouvoirs”, estime-t-elle. Elle a ensuite donné la parole à l’anthropologue et chercheuse de l’UCL Jacinthe Mazzocchetti, qui travaille sur la question du racisme depuis 20 ans.

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Les effets de la colonialité
Jacinthe Mazzocchetti a expliqué aux parlementaires présent·es le principe de colonialité, c’est-à-dire le fait que les individus restent aujourd’hui encore directement influencés par des formes de pensées issues du colonialisme. “L’un des effets majeurs de la colonialité, c’est que l’on continue à hiérarchiser. Il n’y a pas de supérieur sans inférieur. Penser “l’autre” comme radicalement différent de soi permet de se construire soi-même. C’est pour ça que le racisme est un problème qui nous concerne tous et toutes et aussi les personnes blanches. Cela ne concerne pas qu’une seule partie de la société car cela affecte la manière dont nous vivons ensemble”, précise l’experte.

Selon elle, les causes des multiples discriminations que subissent les afrodescendant·es est à trouver dans ce mode de pensée, que l’on rencontre dans la société et dans les institutions. “C’est ce qu’on appelle le racisme structurel dont les conséquences sont visibles partout : dans les discriminations à l’embauche, dans les inégalités de l’accès au logement, dans le domaine de la justice mais aussi à l’école. Et c’est pire si on croise le racisme avec le genre, si on est une femme afrodescendante. A cela s’ajoute le racisme ordinaire : les insultes, les regards en coin, le harcèlement. On ne peut pas lutter contre le racisme en prenant des mesures uniquement contre ces actes individuels. Il faut aussi lutter contre le racisme structurel pour arriver à une société où l’égalité est pleine et entière et pas uniquement à un discours sur l’égalité, teinté de méritocratie avec des injonctions à s’intégrer sans que les conditions soient réellement présentes pour le faire”. 

►►► A lire aussi : Au programme du premier panel des Assises contre le racisme : l'importance des statistiques

Plongée dans l’Histoire
Jacinthe Mazzocchetti estime que l’on ne peut pas se priver de plonger dans l’Histoire pour comprendre les violences actuelles. “Il faut prendre conscience que l’Europe et le continent africain partagent une histoire commune. Celle de la traite transatlantique des esclaves et puis de la colonisation. La Belgique y a participé. Cela reste dans notre mémoire collective, qui se transmet. Il y a des traces et des effets du passé sur notre présent. Il faudrait reconnaitre la contribution des personnes afrodescendantes à la construction de notre société. C’est ça qui nous permettra d’avancer ensemble, c’est donc tout l’inverse des accusations de communautarisme”.

Il faut aussi lutter contre le racisme structurel pour arriver à une société où l’égalité est pleine et entière

La résolution du Parlement européen invite d’ailleurs “les institutions et pays de l’UE à suivre l’exemple des États membres ayant déjà pris des mesures pour compenser les injustices et crimes contre l’humanité commis dans le passé.” “Ces crimes historiques, perpétrés au nom du colonialisme européen, ont toujours aujourd’hui un impact négatif sur les personnes d’origine africaine”, affirment les député·es qui proposent de procéder à des réparations telles que la présentation d’excuses publiques et la restitution des objets volés à leur pays d’origine. Le Parlement appelle aussi les pays de l’UE à déclassifier leurs archives coloniales et à présenter une perspective globale sur le colonialisme et l’esclavage dans leurs programmes scolaires.

C’est également l’avis de Jacinthe Mazzocchetti : “Il y a un lien entre les représentations, les discours et les pratiques. Si on ne représente les pays africains que comme des pays pauvres, violents ou exotiques, cela a des effets concrets. Pour prendre conscience qu’il s’agit d’un mode de pensée hérité et ne pas le reproduire, il est indispensable d’analyser les représentations et les discours. Cela peut passer par les médias et l’éducation. Il faut s’attaquer aux causes de la transmission de cet imaginaire raciste, notamment par la production de contenu académique qui traite du racisme et qui pourrait être utilisé dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, surtout dans les études de sciences politiques ou sociales. Il faudrait décoloniser les institutions publiques comme l’école, les musées, l’espace public, et cela en écoutant les personnes concernées qui sont les principales expertes sur le sujet et que l’on retrouve mobilisées partout et aussi sur les questions d’écologie, de capitalisme et de féminisme.”


Changer les représentations
Safia Kessas a ensuite expliqué son travail au sein de la RTBF. Journaliste, réalisatrice et créatrice des Grenades, elle est également responsable diversité et égalité au sein de la RTBF. “Cela signifie que nous travaillons avec toutes les équipes qui produisent du contenu pour améliorer la représenter de tous les groupes sociaux de la société”, souligne-t-elle. Une tâche ardue compte tenu des chiffres des derniers baromètres : les derniers chiffres du baromètre radio du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) indiquent 12% de personnes issues de la diversité à l’antenne. Le baromètre concernant la télévision indiquait quant à lui 14% de personnes issues de la diversité en 2017. Ces intervenant·es se retrouvent essentiellement dans les sujets sports ou consacrés à l’actualité internationale. Si on croise ces données avec celles du genre, on se rend compte que les femmes afrodescendantes sont presque invisibles à l’écran et sur les ondes.

Les personnes excluent du débat médiatique le sont aussi du débat démocratique

Derrière les murs des rédactions, le portrait-type du journaliste reste encore trop homogène : c’est un homme de 45 ans dont la langue maternelle est le français, dont les parents sont belges et issu·es des classes moyennes ou supérieures. C’est dans ce contexte que l’animatrice de Cécile Djunga a été cyberharcelée et a décidé de porter plainte. Cette procédure a mené à la condamnation d’un des cyberharceleurs. Les femmes racisées ont plus de risques d’être cyberharcelées sur Twitter, selon Amnesty International.

“Le traitement médiatique des personnes afrodescendantes dans les médias est encore traversé par des images réductrices. A la RTBF, nous avons choisi de travailler à partir de la psychologie sociale et nous formons les journalistes sur la question des biais inconscients, des stéréotypes. On le sait : dans nos cerveaux, nous classons, nous hiérarchisations les individus. Cela a un impact concret”. S’en rendre compte est une première étape pour modifier le traitement médiatique. “Nous pensons aussi qu’il faut utiliser les bons mots, et ne pas hésiter à interroger les expert·es de la société civile. Nous avons une responsabilité sociale puisque notre parole est publique”, continue la journaliste qui conclut : “Les personnes excluent du débat médiatique le sont aussi du débat démocratique. MeToo et Black Lives Matter ont été des catalyseurs, la société bouge. Il faut raconter correctement cette société et représenter chacun·e de manière digne et respectueuse”.

Des difficultés spécifiques pour les femmes afrodescendantes
La politologue Louise Ngandu a été la dernière intervenante de cette première série d’audition. Elle est également présidente de l’association Aire de Femmes. “Trop souvent, dans les discours médiatiques et politiques, les femmes afrodescendantes sont considérées comme un bloc homogène. Elles vivent pourtant des difficultés spécifiques et différentes selon qu’elles soient jeunes filles, femmes actives professionnellement ou du troisième âge”, a-t-elle commencé, continuant : “En Afrique, on dit qu’on ne connaitra la véritable histoire du lion que lorsque les lions écriront leur propre histoire. Sinon, elle sera toujours écrite du point de vue du chasseur”.

Ces femmes se situent à l’intersection de plusieurs discriminations. “Elles vivent donc une discrimination qui leur est propre et elles subissent les nombreux clichés véhiculés par les médias, souvent de manière inconscient car cela est présent dans l’inconscient collectif. Il y a des étiquettes qui leur sont attribuées comme le fait que les femmes africaines sont corvéables ou incompétentes. Il y a aussi une sexualisation de leur corps. Cela a des effets comme la discrimination à l’embauche. Il y a aussi les agressions verbales, physiques et sexuelles”, précise Louise Ngandu.

►►► A lire aussi : Colonisation: aux origines de l'hypersexualisation des femmes noires

Selon l’experte, ce sont autant de discriminations qui entrainent des conséquences à long terme pour les femmes concernées, notamment psychologiques. “Et elles sont absentes des chiffres et des statistiques des institutions. On va par exemple apprendre qu’il y a eu 200 plaintes pour racisme auprès d’Unia. Mais combien de femmes afrodescendantes là dedans ? On ne le sait pas. C’est pareil quand on parle de la vulnérabilité des familles monoparentales. Il y a des femmes afrodescendantes dans le cas qui sont invisibilisées par cette expression, imaginez si vous êtes une femme afrodescendante, que vous êtes mère et que vous élevez seul vos enfants. Vous êtes encore plus vulnérable”, déplore-t-elle.

Il y a des étiquettes qui leur sont attribuées comme le fait que les femmes africaines sont corvéables ou incompétentes. Il y a aussi une sexualisation de leur corps

Autre exemple : l’expression “personnel de santé”, fort utilisée dans les médias durant la crise sanitaire. “Il y a beaucoup de femmes et beaucoup de femmes afrodescendantes dans ces métiers. Cela n’a pas été visibilisé. Quand j’entends que “le personnel de santé est épuisé par la crise”, il y a toute une réalité qui est passée sous silence !"

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Louise Ngandu propose d’impulser un travail de déconstruction transversal dans tous les domaines de compétences de la Cocof, avec la participation active des principales personnes intéressées. Outre des statistiques plus précises qui permettent de mieux comprendre la situation sur le terrain et la création d’une base de données des expert·es afrodescendant·es, elle demande aussi la création d’un espace socioculturel africain qui serait un lieu de référence et d’expression, ainsi que le renforcement des associations de la société civile qui travaillent sur ces questions.

La prochaine série d’audition sera consacrée à la santé. Des expert·es seront entendu·es au Parlement de la Cocof jusque la fin juin.

Femmes et colonisation: 60 ans d'indépendance du Congo

 

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In Angélique  de Lannoy We Trust, soulager les nœuds du corps , femmes,

22 Mai 2021, 22:54pm

Publié par hugo

 In Angélique  de Lannoy We Trust, soulager les nœuds du corps
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In Angélique  de Lannoy We Trust, soulager les nœuds du corps - © Tous droits réservés
 
Jehanne Bergé
 Publié à 11h31
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Dans la série In… We Trust (en français : "Nous croyons en"), Les Grenades vont à la rencontre de femmes arrivées là où personne ne les attendait. Pourquoi We Trust ? Parce qu’elles ont suivi leur passion, elles y ont cru. Et nous aussi. Des femmes de caractère qui déconstruisent les stéréotypes à leur manière… Treizième épisode consacré à Angélique de Lannoy, massothérapeute au rire communicatif.


Un après-midi de printemps, devant l’opéra de Bruxelles, comme chaque jour depuis le début de l’occupation de la Monnaie des artistes, activistes, citoyen·nes prennent le micro face à l’assemblée. Les discours sont politiques, engagés, ils prennent aux tripes. Et puis soudain, Angélique de Lannoy s’adresse à la foule, tout sourire et propose une séance de yoga du rire. Elle fait résonner les "ohohoh", les "ahahaha". Le public se laisse entrainer, en quelques minutes, toutes et tous sont détendu·es, gloussent et se saluent les un·es les autres... Une expérience collective hors du commun.

Tu es trop petite
Quelques semaines plus tard, nous retrouvons Angélique de Lannoy autour d’un thé. Elle n’est pas que faiseuse de rires, mais aussi massothérapeute. Faire du bien aux autres, dénouer les tensions, c’est sa passion. Aujourd’hui, elle nous conte son histoire de rapport au corps.

"Je suis plus petite que la moyenne, c’est vrai, mais l’avantage c’est qu’on me reconnait très vite", introduit-elle. "Mon père et ma sœur jumelle sont aussi des personnes petites de taille. Le mot nain a été péjoratif et le reste pour beaucoup de gens. Le terme a été associé au milieu de la magie, du surnaturel..."

In Angélique  de Lannoy We Trust, soulager les nœuds du corps
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Elle a six ou sept ans, quand elle commence à sentir le regard des autres. "Les enfants disaient ‘tu ne peux pas jouer avec nous parce que tu es trop petite’. C’était compliqué parce que souvent les enfants veulent être adultes avant l’âge, et être adultes, c’est être grand. C’était comme si moi je n’avais pas accès et n’aurais jamais accès à ce monde-là."

Si à l’école, le quotidien n’est pas toujours rose, à l’Université, la situation s’apaise. Après des études d’Histoire de l’Art, et une expérience en Angleterre, elle est embauchée par la Fédération Wallonie-Bruxelles comme gestionnaire des bases de données du patrimoine culturel. "Au boulot, certaines personnes pensaient que parce que j’étais petite, je n’avais pas de diplôme. J’étais un peu étonnée." Si l’emploi lui plait, Angélique de Lannoy sent bien que d’autres portes sont à ouvrir...

Soulager les tensions
En quête de nouveaux horizons professionnels, tout en continuant à travailler, elle entreprend un deuxième master en communication et se lance dans une formation de massothérapie. Il faut dire que le massage a toujours fait partie de sa vie : "J’ai eu de la kiné pendant des années, et enfant, je massais mes parents. Plus tard, dans ma coloc, on organisait des jams de massage." Cette première formation est un coup de cœur. Progressivement, elle apprend à déceler les zones de tensions et les techniques pour les soulager.

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En mars 2016, c’est le choc, elle perd une amie dans les attentats de Bruxelles. Ce drame entraine une série de remise en question. Elle a trente ans et décide de faire une pause carrière. Elle part en Australie, un vieux rêve.... "J’avais envie pendant mon voyage de rencontrer des femmes qui massaient." Après quelques semaines sur l’île-continent, elle bifurque vers la Nouvelle-Zélande. Elle y découvre la méthode maorie. "On défait les nœuds liés à des mémoires d’aujourd’hui, d’hier, d’une autre vie ou des ancêtres." Elle prolonge sa formation à Bali.

En rentrant au plat pays, elle explique avoir pensé : "Soit je reste comme un oiseau en cage dans mon petit CDI, soit je vole de mes propres ailes..." Elle quitte son travail et se lance pour de bon dans sa mission bien-être.  Elle ouvre un cabinet à Saint-Gilles et retape une micro-caravane : la RelaxMobile. Au programme des "mains angéliques" : un mélange de techniques issues des traditions des quatre coins du monde.

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Se libérer du regard des autres
Masser l’autre, c’est l’aider à se sentir bien dans son corps. Un rapport à soi qu’Angélique de Lannoy a particulièrement exploré. "Je ne suis pas dans les standards esthétiques de la masseuse donc peut-être que les personnes se jugent moins elles-mêmes."

A l’écran, les personnes en situation de handicap, et parmi celles-ci encore davantage les femmes, restent une minorité pratiquement invisible

Elle explique avoir l’habitude qu’on la regarde, qu’on la montre du doigt, que les gens se retournent sur son passage. Si aujourd’hui, cette jeune femme de 34 ans s’est libérée des jugements d’autrui, le regard validiste de nos sociétés n’est pas toujours simple à supporter. "Parfois je me dis que je me mettrais bien une cape de transparence, mais d’un côté ça me donne de la force aussi de me dire ‘bon voilà, on me regarde et je suis comme je suis’."

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Elle ponctue tout l’entretien de son rire vibrant. "J’adore rire, je trouve que ça permet de désamorcer tellement de problèmes... Je suis assez connue pour ce rire communicatif, je voulais pouvoir le propager." Récemment, elle s’est lancée dans le yoga du rire en plus de la massothérapie.  

"Le rire envoie une dose d’hormone du bonheur. Avec le yoga du rire, on apprend à se reconnecter à son corps, à lâcher l’esprit.  Ensuite, on fait des petits gestes qui ont l’air ridicules, mais qui permettent au fur et à mesure d’amener le rire. Je crois que les gens se disent ‘elle n’a pas peur du ridicule, alors allons-y aussi.’"

Visibiliser les corps
Angélique de Lannoy insiste : "On ne voit pas assez les personnes handicapées dans notre société." Pour expliquer cette invisibilisation, elle pointe un reliquat de l’éducation catholique qui a longtemps gardé les personnes porteuses de handicap à l’écart de la société, dans des institutions spécialisées.

Elle souligne également le manque de diversité dans les modèles proposés. "Je pense que les médias ont un énorme rôle à jouer. Il y a toujours ces représentations idéalisées qui sont très loin du monde réel. Et quand on représente des personnes handicapées, c’est souvent en chaise, le handicap est porté sur la chaise plus que sur le corps."

De fait, comme l’indique l’analyse des Femmes Prévoyantes Socialistes : "A l’écran, les personnes en situation de handicap, et parmi celles-ci encore davantage les femmes, restent une minorité pratiquement invisible sur nos écrans et réduite dans les fictions à des rôles stéréotypés très éloignés des vécus réels." "Le nombre de fois où on ne m’a pas appelée ‘Passe Partout’ ou ‘Mimie Mathy’...", soupire Angélique de Lannoy.

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La masseuse dénonce également les discours misérabilistes. "Ça m’énerve cette image de la pauvre personne handicapée. Parfois il faut un peu batailler pour rappeler que je suis un être humain comme tout le monde avec mes besoins, mes envies, mes désirs, mes colères. Je n’ai pas besoin de la pitié."

Femme porteuse de handicap, c’est la double discrimination : le sexisme et le validisme. "Il faut apprendre à prendre sa place et pas que quelqu’un te la donne. Et quand tu es petite encore plus."

Elle rigole : "Je suis l’être humain du futur, je consomme moins, je mange moins, j’ai besoin de moins grand espace. Faire la fête, ça en revanche, c’est au même niveau..."

Pour découvrir les massages d’Angélique de Lannoy.

La série In... We Trust (Nous croyons en...)
In Virginie Pierre We Trust, la force des abeilles
In Astrid Genette We Trust, maman solo et maraîchère
In Siré Kaba We Trust, créatrice d'une mode qui décloisonne
In Sukma Iryanti We Trust, rebondir face à toutes les difficultés
In Jeanette Van der Steen We Trust, première femme maître de chai en Belgique
In Zoila Rosa Palma We trust, vendeuse de frites et de réconfort
In Zofia Wislocka We Trust, cheffe d'orchestre à la baguette libre
In Leïla Maidane We Trust, entrepreneuse sociale et féministe
In Gia Abrassart We Trust, créatrice de synergies et de rencontres
In Euphrasie Mbamba We Trust, la passion du chocolat
In Rihab Mohamadi We Trust, se libérer des peurs
In Selma Benkhelifa  We Trust, défendre les droits des opprimé·es


https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_in-angelique-de-lannoy-we-trust-soulager-les-n-uds-du-corps?id=10767270

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Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque" , femmes , feminisme,

17 Mai 2021, 21:27pm

Publié par hugo

 Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque"
Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque"4 images 
Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque" - © Tous droits réservés
   
Une chronique de Laurence Rosier
 Publié le samedi 15 mai 2021 à 08h56
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Quand on cite un héros dessiné belge, on a tout de suite en tête Tintin. Mais tout le monde a aussi en mémoire les aventures de Martine, l’héroïne des albums pour enfants du duo Gilbert Delhaye et Marcel Marlier dont les illustrations vintages charment encore, sans dissimuler les stéréotypes et le ton moralisateur véhiculés par cette série inaugurée en 1954.

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Laurence Boudart, docteure en lettres modernes et directrice des Archives du Musée de la littérature, a consacré un essai à ce personnage, plus complexe qu’il n’y paraît et qui a évolué à petits pas, sous le titre Martine, une aventurière du quotidien (Les Impressions nouvelles, La Fabrique des héros, Bruxelles 2021). Elle s’est entretenue avec les Grenades en chaussant les lunettes de genre pour relire la célèbre série.

Alors Martine, féministe ?

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe

Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec Martine ?

Je ne me souviens pas exactement de la première fois où j’ai fait connaissance avec le personnage. En revanche, je me souviens très bien de trois de ses albums que j’aimais particulièrement : Martine et les quatre saisons, Martine est malade et Martine apprend à nager. Je revois ma mère me les lisant, d’abord, puis mes propres lectures, ensuite, nombreuses.

Ce qui me frappe aujourd’hui, quand je repense à ces lectures d’enfance, c’est d’une part le plaisir sans cesse renouvelé que je trouvais dans ces trois albums que j’avais fini par connaître par cœur : aucune surprise, donc, aucun mystère mais plutôt le réconfort du connu. C’est du moins comme cela que je l’analyse avec le recul. Ensuite, la deuxième chose qui me surprend, maintenant que j’ai passé en revue l’ensemble de la collection, c’est que ces trois albums sont, en fait, assez différents les uns des autres et qu’ils représentent chacun une "tendance". Le premier est l’exemple typique de l’album descriptif sans aucune péripétie, le second est très moralisateur tandis que le troisième souligne l’idée de l’émancipation à travers le sport tout autant que les vertus de la persévérance et de la camaraderie.

Jai été surprise par l’impression permanente de mouvement qui s’en dégage. On dirait que Martine n’arrête jamais, qu’elle a toujours quelque chose à faire

Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque"
Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque" - © Tous droits réservés
Enfant, vous étiez plutôt Les malheurs de Sophie, Fifi Brindacier, Claude du Club des 5 ou Martine ?

En fait, j’étais tout cela à la fois ! J’ai toujours été une grande lectrice, j’aimais le contact des histoires mais surtout des personnages. J’ai adoré (j’avoue) la plupart des livres de la Comtesse de Ségur que j’ai lus – et sans le savoir, j’avais ceux de la série Casterman, illustrés par Marcel Marlier. J’aimais Sophie même si son effronterie collait peu avec la petite fille plutôt sage et réservée que j’étais ; je m’identifiais plus avec les Petites filles modèles, même si je jalousais leurs bonnes manières et leur élégance… Fifi Brindacier m’amusait beaucoup : je la trouvais tellement audacieuse, j’aurais voulu lui ressembler. J’ai acheté l’essai de Christine Aventin à son propos, que je me réjouis de découvrir. Quant au Club des 5, la série a également fait partie de mes modèles, Claude en tête.

►►► A lire aussi : Christine Aventin : "Lutter est une joie et les moments de victoire sont d'une telle puissance"

Quel rôle pensez-vous ont ces "modèles" pour l’éducation des filles et des garçons ?

Dans une vie passée, je me suis beaucoup intéressée aux manuels scolaires et au discours que ceux-ci véhiculaient. Je pense qu’il y a un parallélisme à faire entre ce type de discours-là et la littérature pour l’enfance, dans le sens où l’un et l’autre sont les vecteurs d’un message, souvent conformiste, plus rarement révolutionnaire bien que celui-ci puisse surgir à rebours.

Ces modèles ont une inscription historique forte, on ne peut les lire qu’au travers du prisme de l’époque et de la société qui les a produits. Cela ne veut évidemment pas dire qu’on ne peut pas les critiquer mais je pense qu’il faut faire preuve de nuance quand on les analyse aujourd’hui. Globalement, je pense que ces modèles, quels qu’ils soient, ont une influence sur les enfants qui les côtoient mais que celle-ci reste difficile à évaluer précisément. Comment mesurer l’impact des lectures d’enfance ? C’est une vraie question à laquelle, personnellement, je ne peux pas répondre. Il me semble que l’influence s’exerce souvent de biais et comme elle passe forcément par le filtre de l’affect, ce qu’il en reste ne répond pas à des critères objectifs.

Pouvez-vous expliquer la genèse de votre livre ?

Je connaissais déjà quelques titres de la collection La Fabrique des héros. En discutant de celle-ci avec l’un de ses directeurs, je lui ai fait remarquer, un peu par provocation souriante, que le catalogue manquait cruellement d’héroïnes (à l’époque, Barbarella n’était pas encore sorti). Il m’a répondu de manière tout aussi provocante et souriante qu’il était tout à fait disposé à étudier ma proposition, si j’en avais une. Un peu prise au dépourvu, j’ai laissé mon cerveau fonctionner en roue libre et ma mémoire a fait resurgir Martine du fond de mon enfance. Voilà comment tout a commencé !

Vous montrez très bien le côté rassurant que l’on éprouve à la lecture des Martine les plus classique en évoquant ce temps en boucle (qu’on retrouve dans le fait que Martine a éternellement 8 ans même si elle fait des choses qu’une petite fille de huit ans ne fait pas ou ne devrait pas faire. Je me souviens que Martine petite maman m’effrayait justement parce que les parents n’étaient présents que dans le texte et pas sur les images).

Je pense qu’une des forces de Martine réside précisément dans ce côté rassurant, celui qui conforte aussi l’enfant dans l’ordre établi, où tout se trouve bien à sa place. Si ce n’est certes pas très progressiste comme idée, il n’empêche que je pense que l’enfant a aussi besoin de cela pour s’épanouir et pour grandir de manière sereine. La littérature tout comme le monde qui s’ouvre à lui en général lui donne une multitude d’occasions de se confronter à la dureté, à la difficulté. Martine offre en revanche un univers placide, irénique, dépourvu de dangers : une sorte de havre de paix mais qui n’est pas incompatible avec une certaine dose d’aventure et de prise de risques tout de même, comme dans Martine petite maman.

Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque"
Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque" - © Tous droits réservés
La diversité (sociale, ethnique) apparait-elle au fil du temps dans les récits ?

C’est une question complexe et plus nuancée qu’il peut y paraître de prime abord. On peut dire que l’univers adulte qui entoure Martine, depuis sa famille jusqu’aux autres adultes "référents" qui l’accompagnent parfois, répond globalement à une répartition genrée traditionnelle. Les femmes s’occupent de l’intérieur et des enfants, tandis que l’homme exerce des activités de responsabilité à l’extérieur. La mère de Martine, par exemple, ne travaille pas en dehors de la maison mais, au cœur de celle-ci et de la gestion domestique en général, elle est très active. Certaines femmes exercent une profession mais, à nouveau, celle-ci est genrée : couturière, professeure de danse, institutrice… Cependant, Martine obéit à une double logique, en apparence contradictoire. D’un côté, elle reproduit certains des comportements traditionnels qu’elle observe chez sa mère et d’autres femmes de la même génération – être coquette, être polie, être discrète, par exemple. Mais d’un autre côté, elle profite de la grande liberté qui lui ai laissée et s’épanouit dans des activités qui ne sont pas forcément genrées, comme pêcher, skier ou monter une tente.

►►► A lire aussi : Martine : les raisons d’un succès

Martine est le pur produit de la génération qui l’a vue naître et se développer pendant les premiers albums. Elle incarne la vitalité des Trente Glorieuses, la foi en un développement matériel mais aussi social sans entraves. Cette position idéologique va également avoir des conséquences sur les possibilités qui lui sont offertes de s’ouvrir à une émancipation non marquée par le genre. Le cas le plus emblématique est le sport, activité faisant l’objet de nombreux albums. A part Martine petit rat de l’opéra, toutes les autres activités physiques se pratiquent sans différenciation : filles et garçons y prennent part et Martine, en bonne héroïne littéraire, parvient souvent à dépasser tout le monde, tout en se surpassant elle-même. En outre, il me semble que l’on peut aussi lire certaines des activités réputées féminines, que Martine prend plaisir à réaliser – faire la cuisine ou le ménage, par exemple – en renversant les codes. Pourquoi en effet faut-il les déprécier "pour le principe" ? Son frère y prend d’ailleurs part, en souriant, et se laisse souvent diriger par sa grande sœur…

Quant à la diversité sociale, celle-ci devient sensible de manière subtile à partir de la moitié des années 1970. Martine quitte peu à peu son monde petit bourgeois aisé pour entrer progressivement dans une milieu de classe franchement moyenne. Si je reprends l’exemple du sport, on constate par exemple qu’elle délaissera les activités socialement marquées et pratiquée individuellement – comme le ski ou l’équitation – au profit de stages ou de cours en groupe, où davantage de mixité sociale se fait jour. Quant à la diversité ethnique, elle est très peu présente dans les albums, voire pas du tout.

 Pour ce qui est du féminisme stricto sensu, [...] le personnage progresse sans cesse vers une image plus émancipée et, en définitive, moins genrée au fil des années

Pouvez-vous nous dire un mot autour de la question de la sexualisation et de la fameuse petite culotte de Martine ?

Il semblerait que Marcel Marlier ait été très attristé de l’interprétation que l’on a pu faire de ses dessins, surtout ceux de la première époque, où la petite culotte apparaissait fréquemment par-dessous les jupes de son héroïne. Il s’expliquait en disant que les jupes courtes étaient à la mode, que toutes les petites filles en portaient et qu’il voulait que Martine ressemble à ses jeunes lectrices, mais que jamais il n’a songé à en faire un objet de sexualisation. Il faut reconnaitre qu’à partir des années 1970, Martine ne porte presque plus jamais de jupes ou de robes, auxquelles elle préférera le pantalon. Effet de mode ou prise de conscience ? Je n’ai pas la réponse.

Il est vrai que certains dessins montrent la fillette dans des positions quelque peu lascives. Je pense qu’aujourd’hui, de tels scènes ne passeraient plus – et on comprend pourquoi – mais que dans le chef du dessinateur, et sans doute de l’équipe éditoriale de l’époque, il n’y avait pas d’ambigüité volontaire. Dans leur esprit, Martine est une enfant, non sexuée, et si sa petite culotte est visible, c’est précisément parce qu’elle n’a pas la conscience du fait que son corps peut être un objet de désir.

Avez-vous lu Martine avec vos enfants ?

Oui, mes enfants – j’ai une fille et un garçon – connaissent Martine à travers les lectures que j’ai pu leur faire. A l’époque, nous habitions à l’étranger, dans un milieu non francophone, et leur faire connaître Martine répondait pour moi à un geste tout autant linguistique que culturel.

Laurence Boudart : "Martine agit, décide, provoque"
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Martine, une aventurière au quotidien ? Plus qu’une héroïne ?

Si l’on s’en tient aux définitions classiques, disons narratologiques, de l’héroïne, on peut en effet dire qu’elle est plus une "aventurière du quotidien" qu’une véritable héroïne, qui a une quête à mener. La plupart de ses aventures restent très cadrées et balisées, elles laissent peu de place aux dangers et à l’improvisation. Mais il n’empêche qu’elle reste très active et particulièrement vive.

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La notion de mouvement invoquée me semble une très belle ouverture de lecture : pouvez-vous en dire plus dans le rapport au corps qui serait émancipateur pour la figure de Martine ?

En observant les dessins de Marcel Marlier dans une perspective sérielle, j’ai été surprise par l’impression permanente de mouvement qui s’en dégage. On dirait que Martine n’arrête jamais, qu’elle a toujours quelque chose à faire. Toutes les parties de son corps, en ce compris son visage sont très souvent en alerte ou en pleine action. Comme je l’ai expliqué plus haut, le corps, notamment à travers les pratiques sportives, devient dès lors un puissant vecteur d’émancipation. Martine agit, décide, provoque, réalise et toutes ces actions passent par une incarnation corporelle forte. Elle est donc une héroïne du faire, bien plus que de la pensée, de l’intellect, sauf peut-être sur la fin de la série, où une part croissante est accordée à des opérations d’organisation et de gestion, qui demandent une implication à la fois physique et intellectuelle.

Une Martine féministe ? Dans les derniers tomes, on voit Martine préparer une manifestation contre la pollution, finalement ça ne fait que poursuivre le travail d’adaptation au réel que faisaient Marlier et Delhaye ?

La série lue dans son ensemble, de manière chronologique, témoigne d’une véritable évolution, aux prises directes avec les changements et mutations de la société, en ce compris le féminisme. Bien entendu, Martine ne devient pas une militante engagée ni une révolutionnaire de la gauche radicale mais il n’empêche que ses activités s’ancrent dans un réel de moins en moins idéalisé et de plus en plus en phase avec la société. Ainsi sa position en faveur de la défense de l’environnement, qui passe par une vraie implication et des actions concrètes. Pour ce qui est du féminisme stricto sensu, j’aime à penser que, malgré toute une série de marqueurs présents dans les premiers albums, le personnage progresse sans cesse vers une image plus émancipée et, en définitive, moins genrée au fil des années.

Martine : les raisons d’un succès - Un Jour dans l'Histoire

Laurence Rosier est licenciée et docteure en philosophie et lettres. Elle est professeure de linguistique, d’analyse du discours et de didactique du français à l’Université Libre de Bruxelles.

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Les Grenades-RTBF est un projet soutenu par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui propose des contenus d’actualité sous un prisme genre et féministe. Le projet a pour ambition de donner plus de voix aux femmes, sous-représentées dans les médias.


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La STIB condamnée pour double discrimination : "Une longue péripétie semée d'embûches" , femmes, racisme

9 Mai 2021, 08:33am

Publié par hugo

La STIB condamnée pour double discrimination : "Une longue péripétie semée d'embûches"
La STIB condamnée pour double discriminations : "Une longue péripétie semée d'embûches"
La STIB condamnée pour double discriminations : "Une longue péripétie semée d'embûches" - © Belga
 
Camille Wernaers
 Publié le vendredi 07 mai 2021 à 11h14
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Le 3 mai, le tribunal du travail de Bruxelles a condamné la STIB pour discrimination fondée sur les convictions religieuses et sur le genre. La plaignante est une femme de confession musulmane qui se disait discriminée parce qu’elle portait le foulard.

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Elle a en effet candidaté deux fois à la STIB en 2015 et 2016 et sa candidature n’a jamais été retenue, malgré ses compétences souligne dans un communiqué Unia, le Centre interfédéral pour l’égalité des chances. Les agences de recrutement lui font savoir que la STIB applique une politique de neutralité qui n’autorise aucun signe convictionnel et qu’elle devrait s’y conformer en retirant son foulard.

"Un risque de préjugé pour les femmes voilées"
Elle saisit alors Unia qui intente une action en cessation en 2019 devant le tribunal du travail de Bruxelles. La plaignante et la Ligue des Droits Humains se sont ensuite jointes à la procédure.

Dans son ordonnance du 3 mai 2021, le tribunal a finalement jugé que la plaignante a été victime d’une double discrimination : directe d’abord sur la base de sa religion, la STIB n’ayant pas été en mesure de prouver que le refus d’embauche n’était pas discriminatoire. Le tribunal ordonne également à la STIB de mettre fin à sa politique de "neutralité exclusive" dans son recrutement.

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“Le juge rappelle que les préférences discriminatoires des clients ne peuvent pas justifier la discrimination et qu’il n’existe pas de droit à ne pas être exposé à des convictions ou opinions. […] le juge rejette l’argument de paix sociale dans la mesure où une telle affirmation présente un risque de préjugé à l'égard des croyants portant un signe convictionnel en général et des femmes portant le voile islamique en particulier. Ces travailleurs seraient considérés, par la simple manifestation de leur religion, comme des éléments perturbateurs empêchant leurs collègues de vivre leur propre religion ou leur propre conviction en toute sérénité”, écrit Unia.

Discrimination basée sur le genre
Une discrimination indirecte, sur base du genre, est également reconnue. Toujours selon Unia, “[Le juge] se base entre autres sur des dossiers traités par Unia de 2017 à 2020 en matière d'interdiction de port de signes et de couvre-chef sur le lieu de travail. 95% d’entre eux concernent le foulard islamique et donc des femmes. Selon Unia, il s’agit d’une lecture intersectionnelle de la discrimination pratiquée par la STIB. Le juge tient compte de l’intersection des rapports de force et de discrimination dans lesquelles les femmes voilées se trouvent face à ce type d’interdiction”.

La STIB s’est défendue de toute discrimination. La direction de la STIB a indiqué le 6 mai qu’elle examinait l’opportunité ou non d’aller en appel du jugement. Le Centre d’Action Laïque (CAL) a réagi à cette ordonnance du tribunal du travail, en appelant le monde politique à adopter une législation qui protège la neutralité des agent·es de la fonction publique. "Le port de signes convictionnels n'est bon ni pour l'impartialité de l'État, ni pour les agents de la fonction publique", soutient le CAL qui "presse les responsables politiques de ne pas laisser détricoter cette neutralité par des négociations au cas par cas, et d'adopter au plus vite une législation garantissant sans équivoque la neutralité des agents de la fonction publique".

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La plaignante dans cette affaire était assistée par Me Ibrahim Akrouh et Me Hajar Lawrizy.  “Nous sommes contents de la qualité de l’ordonnance qui est claire et bien argumentée. Cette décision existe désormais dans l’arsenal juridique et pourrait faire jurisprudence”, explique Me Hajar Lawrizy. “À propos du principe de neutralité dans le secteur public, nous le reconnaissons bien entendu, mais nous contestons l’interprétation qu’en fait la STIB”, continue-t-elle.

La plaignante quant à elle est “très soulagée”, selon son avocate. “Il faut rappeler qu’elle est la victime et que cette action a été une longue péripétie semée d’embûches. Elle a subi cette discrimination deux fois, puis elle a dû livrer une bataille juridique qui a un coût financier mais aussi une charge mentale. Pour elle, il était très important que la discrimination basée sur le genre soit prise en considération”, ajoute Me Hajar Lawrizy.

Pour rappel, en 2015, l'interdiction des signes convictionnels au sein d’Actiris était également jugée discriminatoire, à la suite de la plainte de trois travailleuses.


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https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_la-stib-condamnee-pour-double-discrimination-une-longue-peripetie-semee-d-embuches?id=10756966

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Féminicide d'Ahlam Younan : pourquoi il ne faut pas parler de crime d'honneur , femmes, feminisme, violences ,

15 Janvier 2021, 13:15pm

Publié par hugo

 
Féminicide d'Ahlam Younan : pourquoi il ne faut pas parler de crime d'honneur
Féminicide d'Ahlam Younan: pourquoi il ne faut pas parler de crime d'honneur
Féminicide d'Ahlam Younan: pourquoi il ne faut pas parler de crime d'honneur - © Tous droits réservés
 
Une carte blanche de Noura Amer
 Publié le mercredi 13 janvier 2021 à 11h21
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La Belgique a été secouée il y a quelques jours par un crime odieux commis à Liège contre une femme de 28 ans d’origine syrienne, Ahlam Younan.


L’enquête est en cours mais des éléments donnent à croire que le crime a été commis ou médité par l’un des cinq frères de la victime. Il lui reprochait un mode de vie ne correspondant pas aux valeurs de la famille. Ahlam est issue d’une famille chrétienne orthodoxe.

La presse a mis le crime dans la case de "crime d’honneur", ce qui était d’usage traditionnellement dans ces circonstances, comme le terme de "crime passionnel" utilisé quand un conjoint assassine sa conjointe. Cependant, depuis plusieurs années, des féministes se sont mobilisées et des recommandations ont été données à la presse pour abolir ces termes qui, à travers leur usage, donnent une justification aux crimes commis.

►►► A lire aussi : Femmes, violences et médias : comment en parler ?

On ne tue pas par "honneur"
On ne tue pas par amour ou par passion comme il n’y a aucun honneur dans un crime. Il y a des féminicides, des femmes tuées par ce qu’elles sont femmes, considérées comme des propriétés privées du couple, de la famille nucléaire ou élargie (la tribu).

Selon les Nations Unies, le foyer reste l’endroit le plus dangereux pour les femmes. La majorité des femmes victimes de féminicide dans le monde sont tuées par leur partenaire ou leur famille.

►►► A lire aussi : Retour sur le terme "féminicide" après une tentative de meurtre

Dans certains pays du Moyen Orient et ailleurs dans le monde, plusieurs femmes sont assassinées au sein de leurs familles parce qu’elles les auraient "déshonorées" en adoptant des comportements qui vont à l’encontre de ce qui est attendu d’elles : pureté et soumission.

On ne tue pas par amour ou par passion comme il n’y a aucun honneur dans un crime

Des féministes en lutte sur ce sujet
Plusieurs pays gardent encore dans leurs lois des circonstances atténuantes quand un crime est commis dans ce cadre. Cependant, des pays comme le Liban et la Tunisie ont réalisé des avancées à ce niveau en abolissant ces circonstances atténuantes, ce crime est désormais traité comme n’importe quel autre crime.

Dans d’autres pays comme la Jordanie, la Syrie, le Koweït et l’Égypte, les mouvements féministes continuent leurs luttes pour changer la loi et pour sensibiliser l’opinion publique. Ces dernières années, plusieurs cas en Jordanie et en Palestine ont secoué la société et nous avons pu observer via les débats vifs sur les réseaux sociaux que la dénonciation de ces pratiques était de plus en plus grande et que les efforts des associations féministes pourraient bien finir par s’imposer.

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En Belgique, et suite à la mobilisation du monde associatif, la violence liée à l’honneur et les mariages forcés ont figuré parmi les priorités du Plan d’action national de lutte contre toutes les formes de violence liée à l’honneur (2015-2019).

Dans le plan intrafrancophone de lutte contre les violences faites aux femmes (2020-2024), nous nous réjouissons également qu’une mesure spécifique, la mesure 59, appelle au "Renforcement de l’accueil et de la prise en charge des victimes de mariages forcés et de violences liées à l’honneur".

Des recommandations ont été données à la presse pour abolir ces termes qui, à travers leur usage, donnent une justification aux crimes commis

L’accueil et la prise en charge des victimes sont très importants à côté d’un travail de prévention et de sensibilisation des jeunes et des adultes à travers des animations, des campagnes d’information en collaboration avec les différents médias nationaux et communautaires.

D’autre part, un accompagnement adapté et rapide des familles où ces tensions se présentent nous semble essentiel. Les écoles et les associations tout public confondu sont des acteurs clés dans la prévention et l’orientation des familles en difficulté. Le soutien aux associations spécialisées dans ces questions est nécessaire afin qu’elles puissent proposer un accompagnement à la hauteur de la problématique et du danger.

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Enfin, la tolérance zéro vis-à-vis de cette violence, comme toutes les autres violences faites aux femmes, doit être de mise, toute atteinte aux femmes est une atteinte aux droits humains. Le privé est politique, les féministes n’ont pas arrêté de le dire et il est temps de changer la donne selon laquelle, comme le dit Letty Cottin Pogrebin : "Quand les hommes sont opprimés, c’est une tragédie. Quand les femmes sont opprimées, c’est la tradition". Toutes les traditions discriminatoires doivent être abolies.


Noura Amer est présidente d’AWSA-Be, Arab Women’s Solidarity Association-Belgium

AWSA-Be est une association féministe, laïque et mixte qui milite pour la promotion des droits des femmes originaires du monde arabe, dans leurs pays d’origine et/ou d’accueil. Nous sensibilisons à la condition des femmes originaires du monde arabe, brisons les clichés et nous construisons des ponts entre les cultures. Nos actions et nos publications visent à améliorer l’image des femmes originaires du monde arabe en Belgique et à faire entendre leurs voix. Reconnue comme une association d’éducation permanente et de cohésion sociale, AWSA-Be propose des activités socioculturelles variées. Nous participons aussi à de nombreux événements culturels, festivals et autres manifestations pour soutenir la paix, l’égalité et la justice.

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Sur le même sujetFemme Liège Sexisme Féminicide


https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_feminicide-d-ahlam-younan-pourquoi-il-ne-faut-pas-parler-de-crime-d-honneur?id=10672287

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Pas assez de femmes ? "40 Under 40", une initiative qui fait débat , femmes, feminisme,

28 Décembre 2020, 11:45am

Publié par hugo

Pas assez de femmes ? "40 Under 40", une initiative qui fait débat
"40 Under 40", une initiative utile mais qui fait débat
"40 Under 40", une initiative utile mais qui fait débat - © Mongkolchon Akesin - Getty Images/iStockphoto
 Emma Mestriner
 Publié le mardi 22 décembre 2020 à 08h57
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L'initiative belge "40 Under 40" a été lancée au début du mois de décembre. Son objectif est de "réunir de jeunes leaders talentueux de moins de 40 ans et de leur donner une plateforme pour développer leurs idées et avoir un impact positif sur la société belge". Si l’initiative a été saluée, le panel de ce projet (majoritairement masculin) fait grincer des dents sur les réseaux sociaux.

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Depuis 1999, les 40 Under 40 sont une liste de personnes que le magazine économique américain Fortune considère comme étant les jeunes leaders les plus influent·es de l’année. Cette liste est diversifiée : dirigeants d’entreprises, personnalités politiques, sportifs, créateurs de mode et autres personnalités de moins de 40 ans.

Belgium’s 40 Under 40 est une version belge inspirée de celles des Etats-Unis. Les trois initiateurs du projet (qui promet la possibilité de publier du contenu médiatique dans L'Echo et De Tijd), Pierre Gurdjian (ULB), Gaëtan Hannecart (Matexi) et Laurent Coulie (IDeA Europe Foundation), expliquaient dans un article de l’Echo : "Notre pays regorge de jeunes talentueux, aux profils multiples".

Un site web a été créé (40under40.be) ainsi qu’un panel de 40 leaders, "prêts à transmettre leur expérience a été mis sur pied". Des personnes issues du monde des affaires, du public, de l’associatif et de la sphère académique. Ce panel est chargé de sélectionner les jeunes talents puis de les accompagner dans leur parcours. Les candidatures sont ouvertes jusqu’à la mi-janvier.

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Sans remettre en cause la qualité des personnes qui soutiennent l’initiative, c’est le manque de parité et de diversité du panel qui a suscité de nombreuses réactions. Au lancement du projet 40 Under 40, le panel comptait 33 hommes pour 6 femmes. Aujourd’hui, il compte 42 hommes et 9 femmes.

"Nous recevons de plus en plus de candidatures de femmes"
Pierre Gurdjian (ULB) est l'un des trois initiateurs du projet. Il répond à ce déséquilibre en mettant deux points en exergue: "D’abord : le groupe de participant·es sera composé avec un grand soin pour la diversité et sera donc paritaire entre les femmes et les hommes.

Ensuite : le panel de sélection sera composé à parité d’hommes et de femmes ainsi que d’autres critères de diversité. Le groupe de soutien n’est pas le panel de sélection. Le groupe de soutien est toutes une série de personnes qui ont accepté de mettre leur expérience et leur temps au profit des participant·e·s. Le panel de sélection sera composé à parité d’hommes et de femmes. Ce ne sera pas compliqué car le groupe de soutien sera un groupe ouvert.

Le panel de sélection sera composé à parité d’hommes et de femmes

Le panel de sélection ne sera pas composé de 40 personnes, ce sera une quinzaine de personnes. Et déjà aujourd’hui, si nous devions le composer, nous avons amplement de femmes de très grande qualité qui ont rejoint le groupe. Les participant·es auront le choix de travailler avec les membres de groupe de soutien, avec celles et ceux qu’ils et elles souhaitent approcher et avec qui ils et elles désirent travailler.

Nous sommes très impressionnés par la qualité (de tous les membres du soutien) et la qualité des femmes qui ont proposé de soutenir le projet. On reçoit tous les jours de nouvelles candidatures. Nous recevons de plus en plus de candidatures de femmes."

"Un panel loin d’être paritaire et diversifié"
Ana Seré, directrice du Wagon (une école d’informatique ciblée sur le développement web et la data), est à l’initiative d’une carte blanche qui pointe "un projet se voulant diversifié et inclusif alors que son panel ne l’est pas".

Je trouve que l’initiative n’aurait pas dû être lancée tant que la parité et la diversité n’étaient pas plus atteintes

Le début de la lettre ouverte donne le ton : "Vous vous direz peut-être : 'C'est une initiative formidable'. Nous aussi, avant de nous rendre compte que ces leaders accomplis sont composés à 82,5% d'hommes et à 17,5% de femmes. (…) Nous ne nous appliquerons pas au programme '40 under 40' ni ne l'encouragerons en aucune façon tant que cette question n'aura pas été abordée et résolue" (traduction de l'anglais).

Et cela intervient alors que le prix de l’Entreprise de l’année ("la distinction la plus prestigieuse pour une entreprise belge", peut-on lire dans cet article) a été remis le 7 décembre 2020 par un jury composé... de 11 hommes et d’une femme.


Ana Seré : "L'argument qu'il y a moins de femmes CEO ne tient pas la route"
Pourquoi avez-vous écrit une lettre ouverte contre l’initiative "40 Under 40" ?

A.S :" Ce n’est pas du tout une démarche contre l’initiative en tant que telle que je ne trouve pas mauvaise. Simplement, j’ai été assez choquée de voir que parmi la liste des personnes qui soutenaient l’initiative, au moment du lancement, il y avait 33 hommes pour 6 femmes. J’ai abordé ce sujet en le faisant d’abord de manière assez informelle (principalement sur les réseaux sociaux, via Linkedin), et les premières réponses, arguments qui sont revenus étaient du type "oui mais c’est parce qu’il y a moins de femmes CEO" ou encore "il n’y a que 3 femmes CEO dans le BEL20".

Sauf que, selon moi, cet argument ne tient pas la route : oui c’est vrai il y a moins de femmes CEO que d’hommes CEO dans le monde, de manière générale, mais ici on rassemble un panel de plus ou moins 40 personnes et donc c’est tout à fait possible de trouver des femmes. Je trouve ce raisonnement assez fallacieux, surtout que dans ce panel, il n’y pas que des chefs d’entreprises : il y a également des personnes issues du monde académique, de l’associatif, etc. Je ne comprends pas et je trouve ça un peu hypocrite que ce projet mise sur la diversité dans les candidatures mais qu’elle ne se retrouve pas dans le jury majoritairement masculin."

►►► A lire aussi : Où sont les femmes dans le monde de la finance?

Quelles seraient des pistes de solutions, selon vous ? 

"Je pense que plusieurs éléments de réponses sont possibles. Sur Linkedin, via des commentaires, certaines personnes qui participent à l’initiative ont expliqué qu’ils sont encore à la recherche d’autres personnes pour le jury et qu’ils allaient essayer de trouver plus de femmes. Sauf que, je trouve que l’initiative n’aurait pas dû être lancée tant que la parité et la diversité n’étaient pas plus atteintes. Selon moi, une des solutions pour remédier à ce problème aurait été très simple : faire un appel ouvert pour ce panel sur les réseaux sociaux.

Si vraiment ils ne trouvaient pas davantage de femmes (ce que je trouve désolant) cela aurait permis à plus de femmes de postuler. Je veux être dans une approche constructive, c’est un bon projet, je pense juste qu’il faut y mettre un stop et le reprendre lorsqu’on aura un jury plus paritaire et plus diversifié. Nous attendons un panel équilibré en termes de genre et un ensemble de mentors vraiment diversifié. 

J’ai également été agréablement surprises des personnes qui ont signé cette carte blanche. Parmi ces dernières, plusieurs personnes dirigent des entreprises, font partie du monde des affaires et réalisent l’importance de la situation. Notre but, au final, c’est de faire avancer la société, on a décidé d’écrire une carte blanche pour cela. Nous ne sommes pas dans la logique d’une pétition "contre"."

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https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_40-under-40-une-initiative-qui-fait-debat?id=10657430

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Cyberharcèlement, insultes: le monde du vin n'est pas épargné , femmes, feminisme, SEXISME

19 Décembre 2020, 07:17am

Publié par hugo

 Cyberharcèlement, insultes: le monde du vin n'est pas épargné
Cyberharcèlement, insultes: quelle place pour les femmes dans le monde du vin?
Cyberharcèlement, insultes: quelle place pour les femmes dans le monde du vin? - © Ababsolutum - Getty Images/iStockphoto
 
 
Une chronique de Sandrine Goeyvaerts
 Publié le mardi 15 décembre 2020 à 18h21
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Des micro-agressions, au dénigrement caractérisé, jusqu’à la violence physique ou sexuelle, tout est en place pour que ces comportements non seulement se produisent mais également perdurent dans le petit monde du vin. Il y a deux semaines, des femmes ont été menacées et harcelées après la publication d'un dessin jugé dégradant et sexiste.

Toutes des commères
Un jeudi de novembre, festif, a été l’occasion pour l’interprofession du Beaujolais de communiquer avec un clip de promotion.

A peine distinguera-t-on vaguement quelques femmes vendangeant avant de refaire la place aux hommes : arpentant les vignes, croisant les bras dans le resto en patron, goûtant du raisin, puis du vin, trinquant... Les mots renforcent encore le pouvoir de l’image : pas une seule fois on n’entendra le terme vigneronne.

Isabelle Perraud, justement vigneronne en Beaujolais a tout de suite réagi à ce clip. Ce qu’elle a récolté en échange ? Un coup de fil très énervé émanant de cette interprofession, et une réponse par presse interposée où elle est qualifiée de "commère". On peut toujours prétendre que c’est de la maladresse, du manque de moyens mais ce qui est intéressant de noter, c’est la réaction de l’interprofession qui balaie les critiques en disqualifiant son autrice et en utilisant des femmes pour porter son discours.

Bien sûr, on peut entendre l’argument "covid" et du montage d’anciens rushs pour faire un clip. Cela veut donc dire qu’il n’y a pas d’images exploitables de femmes dans leurs archives ? On rappelle à toutes fins utiles que les interprofessions sont financées par les vigneronnes et les vignerons, et censées les représenter dignement.

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Ou des emmerdeuses
On pourrait penser que ces deux affaires n’ont pas de lien entre elles, que c’est juste une affreuse coïncidence : des femmes s’érigent contre le sexisme ou l’absence de représentativité féminine, et elles subissent en retour mépris ou attaques personnelles. Pire, on leur dénie même le droit essentiel d’émettre une critique.

Il est intolérable, qu’en 2020, pour avoir émis un avis, une femme soit méprisée, vilipendée, harcelée ou menacée

Dénoncer ces attitudes vous donne le rôle de l’emmerdeuse, de celle par qui vient "la polémique", autrement dit une critique agressive. Le problème est aussi là : n'importe quel propos qui va un poil à contre-sens du communément admis est qualifié de "polémique".

Un modèle de société basé sur le mâle dominant
Les prises de bec sont fréquentes sur les réseaux sociaux entre hommes  mais elles ne résultent pas du même mécanisme et ne produisent pas les mêmes effets. Quand des femmes interrogent une attitude ou une publication sexiste, la nature même des insultes est différente : pour les femmes, elles ont trait le plus souvent à la sexualité, et à la santé mentale : la fameuse "hystérie féminine" revisitée. Ce que cela suggère ici, c’est le sentiment de pouvoir absolu qu’ont ces hommes et de l’impunité qui va avec. Le monde du vin, son industrie, est encore et toujours formée sur l’idée du mâle dominant : ils ont, ils croient avoir l’ascendant et cela se manifeste par leur refus absolu de remettre en question ce qui pour eux constitue le monde. 

►►► A lire aussi : Genre et santé mentale : Bande d'hystériques!

Si considérer que les femmes n’ont pas à être traitées comme des bouts de viande, réifiées ou insultées est de la pudibonderie, alors pudibondes de tous pays, levons-nous et cassons-nous  

Les clichés méprisants, sexistes que l’industrie du vin véhicule à propos des femmes continuent d’être utilisés sans vergogne. Les micro-agressions sont permanentes, et c’est tout le problème. Prises de manière isolées, elles ne semblent pas bien "méchantes", mais c’est l’addition de ces insultes qui use.

Certains hommes se permettent encore d’écrire de tels articles, reflétant leur vision de la femme : il ne peut exister que deux types de femmes, vendeuse d’amours tarifées ou canons décérébrées. "Des putes blondes, il y en a des centaines dans le Mondovino", écrit en toute décontraction ce même blogueur.

Et les réactions autour ? On se gausse de la "nouvelle pudibonderie" : soit, si considérer que les femmes n’ont pas à être traitées comme des bouts de viande, réifiées ou insultées est de la pudibonderie, alors pudibondes de tous pays, levons-nous et cassons-nous.  

Le masculin neutre
Les femmes sont en permanence sexualisées au travers des objets que sont les bouteilles de vin et leurs étiquettes. Combien contiennent des femmes à poil, des références aux mœurs légères féminines, combien des jeu de mots hasardeux?

Le langage du vin, indubitablement participe également à l’oppression systémique des femmes et des minorités. De même que toutes ces "blagues" permanentes, sur les aptitudes, la compétence, le goût des femmes, les prétendues promotion canapé … Le nombre de femmes présentes dans le monde du vin n’y change rien : il ne fait pas la position.

►►► A lire aussi : Sexiste, le langage du vin?

Si de plus en plus de femmes travaillent dans le milieu, elles n’ont pour autant pas encore autant de "poids médiatique" ou de voix au chapitre que leurs homologues masculins. Comme dans beaucoup de domaines, l’Homme est vu comme la valeur par défaut. Si dans un domaine, la ou les femmes ne sont pas clairement identifiées, on considérera que c’est un vigneron.

Il est encore incongru de voir à l’heure actuelle des campagnes de communication utilisant le mot "vigneronne" : c’est presque partout – et dans nombre de régions - le terme "vigneron" qui englobe toutes les réalités du terrain. Peu importe que de nombreuses femmes soient cheffes d’exploitation, viticultrices en solo, ou en duo (masculin/ féminin ou féminin/ féminin d’ailleurs) : elles sont effacées derrière ce masculin neutre.

Cela participe à entériner l’idée que les femmes dans le milieu sont rares puisqu’on ne les voit pas ou peu, et contribue à assoir l’idée que c’est un monde dur, où elles n’ont pas leur place. Travailler sur la représentativité permettrait déjà d’équilibrer la balance, et rétablirait dans l’imaginaire des gens ce qui est une vérité de terrain.

Les femmes du vin sont nombreuses et ceci, quels que soient les secteurs. On connait tous et toutes des sommelières, des vigneronnes, des cavistes, des critiques brillantes : certaines se sont hissées à des niveaux de "pouvoir" important. Ces femmes influentes sont utilisées régulièrement comme "paravent antisexiste" : si elles ont réussi, si elles obtiennent certaines récompenses, alors c’est la preuve que le monde du vin n’est pas misogyne.

►►► A lire aussi : Femmes et alcool: une longue histoire de stéréotypes

De la différence culturelle au sexisme systémique
Le sexisme n’est pas une exception culturelle : en guise d’excuses, certains évoquent l’esprit gaulois cher aux francophones. Mais il s’agit de tout autre chose de systémique et quasi universel. Même la contreculture du vin nature s’est nourrie de la culture sexiste et du patriarcat :  il suffit de lorgner du côté des étiquettes voire d’écouter certains de leurs vignerons.

Dans le monde anglo-saxon, le sexisme s’exerce avec les mêmes mécanismes, les mêmes pressions et le même immobilisme: lire à ce sujet la tribune de Vinka Danitza. La goutte d’eau a peut-être fait déborder le vase avec une affaire sensiblement dans la même veine que celle qui me concerne : le WineBitch.  Ce hashtag devenu viral a une explication : un célèbre critique vins a partagé – avec un cercle restreint d’amis semble-t-il – des "blagues" sur Whatsapp, toutes portant atteinte à la "génération montante du vin", et à d’autres représentants hommes et femmes.

Ici, ce n’est pas seulement de la misogynie qui s’exerce, mais aussi ce sentiment qu’ont certains hommes du vin d’être légitimes à juger d’autres personnes, particulièrement leurs subalternes. Il a beaucoup été question dans ce cas de "satire" : mais la satire en soi est censée être un levier permettant de dénoncer ceux et celles qui exercent et possèdent le pouvoir, pas l’inverse.

Ce critique a abusé de sa position de "dominant" pour rudoyer d’autres personnes, sans absolument aucune raison valable : c’est inadmissible. Tim Atkin s’en est fait l’écho. D’autres femmes ont relayé, comme Laura Donadoni ont dit enfin tout haut ce qu’en secret on est très nombreuses à espérer. Stop. It’s not okay.

Les clichés méprisants, sexistes que l’industrie du vin véhicule à propos des femmes continuent d’être utilisés sans vergogne

Porter plainte ? Ignorer ?
"Ferme internet, coupe tes réseaux, ignore-les". "Porte plainte". "Ne judiciarise pas tout !". " Dénonce-le. As-tu des preuves ? Montre-les !". "Es-tu sûre d’avoir bien compris ? N’est-ce pas toi qui l’a provoqué ?". "Ça ne doit pas être débattu en place publique". "Publie-les ces menaces".

Quelques-unes des injonctions contradictoires que l’on fait peser sur les femmes victimes, au point qu’elles finissent par douter à la fois de ce qu’elles ont vécu, et du bien-fondé de leur réaction. As-tu employé les bons mots ? Ne l’as-tu pas un peu cherché ? A force, on en vient à douter et à se demander si on ne voit pas des choses qui n’existent pas. La rhétorique est la même que dans des affaires plus graves : interroger la forme avant le fond, et ainsi déstabiliser les femmes. 

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C’est absolument injuste : pourquoi devrait-on se taire et éviter de "provoquer un conflit" alors qu’en réalité, tout ce que nous demandons – et auquel nous avons droit – c’est le respect ? Pouvoir simplement travailler, évoluer, émettre des critiques sans craindre pour notre intégrité, tant mentale que physique.

C’est précisément cet état d’esprit, de remise en question de la parole des femmes qui conduit à des actes bien plus graves. Une affaire a défrayé le monde de la sommellerie anglophone, impliquant des sommeliers à très haut niveau. Le résultat ? Des hommes écartés, une cour renouvelée mais guère de progression au niveau représentativité.

Combien sont les femmes à avoir dû quitter le monde du vin après le rendu d’un jugement dans une affaire de harcèlement, même si ledit jugement les a reconnu victimes ?

Après l’affaire Sibard, toutes les femmes concernées ont quitté soit le monde du vin, soit le pays dans lequel elles travaillaient. Un prix à payer très élevé, n’est-ce pas ? Les micro-agressions quant à elles, si elles ont bien un impact psychologique énorme, sont très difficiles à prouver.

Installer la rivalité entre femmes
La violence est aussi là : dans le manque de réactions ou de soutien, massif et inconditionnel des professionnels et professionnelles du vin. Nous devons relayer, soutenir, porter la voix d’autres femmes. Peu importe que nous ayons parfois quelques divergences d’opinion : la sororité doit primer.

Encourageons-nous les unes les autres. Et peut-être que ce Vieux Monde du vin deviendra plus respectueux envers les femmes et toutes les minorités qui en font aussi partie.

Le témoignage de Sandrine Goeyvaerts
Les Grenades ont récolté le témoignage de la sommelière, directement concernée par l'affaire de cyberharcèlement.

"Je suis caviste depuis plus de 10 ans, professionnelle du vin depuis 20 ans et autrice, et j’ai été victime d’une véritable campagne de cyber-harcèlement il y a une quinzaine de jours pour avoir pointé le sexisme du dessin paru dans un magazine du vin. Ce n’est pas si étonnant que ça : des micro-agressions, au dénigrement caractérisé, jusqu’à la violence physique ou sexuelle, tout est en place pour que ces comportements non seulement se produisent mais également perdurent ", explique-t-elle.

"Tapin", "psychotique", "paranoïaque aiguë", "Féministérique", "boulet", elle raconte avoir reçu toutes ces insultes. "En public, et quasi en toute impunité. On m’a aussi attaquée sur mes compétences professionnelles, tant de journaliste que de caviste, sur mon apparence… Cette tentative de décrédibilisation et d’intimidation a rapidement pris des proportions inouïes".

Elle poursuit : "Au tout début, un des comptes auxquels je suis abonnée partage ce dessin que je retweet avec un commentaire, pointant son sexisme évident. Julien Fouret me répond. Le parallèle avec l’agente en vins pour moi est évident, comme pour de nombreuses personnes connaissant bien le milieu du vin, parisien et/ou nature. L’autrice du tweet initial me confie l’avoir envoyé au compte instagram Paye-tonpinard qui relaie également".

"En ce qui me concerne, je diffuse ce dessin, sur Facebook avec mon compte perso. C’était ouvrir la boite de Pandore. Durant la soirée, je reçois d’un numéro inconnu une série de SMS : il s’avère qu’ils proviennent du rédacteur en chef de cette revue".

Si tu cherches la bagarre, tu sais que je ne me dérobe jamais, et je ne manque pas de moyens pour ce faire 

"Ces SMS, désagréables puis menaçants ensuite sont doublement violents : par les mots qu’ils contiennent et par le contexte dans lequel ils s’inscrivent. Je les perçois comme une violation de mon intimité", précise Sandrine Goeyvaerts.

Les choses évoluent rapidement : le magazine poste un droit de réponse ; puis des journalistes du magazine, son rédacteur en chef, ou des sympathisants écrivent des posts, concentrés sur quelques comptes, où les insultes et allusions fusent. "Cette campagne de harcèlement a connu un pic d’une bonne semaine durant laquelle il m’était impossible d’ouvrir le réseau sans tomber sur ou l’autre de ces attaques. Elle est très bien racontée dans un article.

"A noter que d'autres journalistes féminines ont été prises à partie, et attaquées sur leurs compétences ou leur probité comme Ophélie Neiman. "Arriviste", lui écrit ainsi Michel Bettane, par SMS. "Tu en assumeras les conséquences". Le ton de la conversation suinte à la fois de condescendance et de mépris. Depuis les insultes et allusions, si elles se sont faites plus discrètes n’ont pas vraiment cessé".

"Double effet pervers : certains hommes du vin se sont emparés de l’histoire pour la raconter par le menu, ils sont eux-mêmes devenus cibles d’insultes et donnent donc l’impression que cette histoire n’est qu’un règlement de compte entre hommes de milieu du vin différents, effaçant ainsi la dimension sexiste de l’affaire", conclut-elle.

Le magazine En Magnum a été contacté et n'a pas donné suite.

Si vous souhaitez contacter l’équipe des Grenades, vous pouvez envoyer un mail à lesgrenades@rtbf.be.

Les Grenades-RTBF est un projet soutenu par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui propose des contenus d’actualité sous un prisme genre et féministe. Le projet a pour ambition de donner plus de voix aux femmes, sous-représentées dans les médias.


https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_cyberharcelement-insultes-le-monde-du-vin-n-est-pas-epargne?id=10653468
 

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