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Mères prisonnières : quelles réalités pour les femmes incarcérées ?

30 Octobre 2023, 23:48pm

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 Mères prisonnières : quelles réalités pour les femmes incarcérées ?

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aujourd’hui à 10:12

9 min
Par Jehanne Bergé pour Les Grenades
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Être mère en situation d’incarcération, qu’est-ce que cela signifie ? Comment vivre son enfermement accompagnée de son bébé ? Ou au contraire, comment maintenir le lien lorsqu’on est séparée de son enfant, que les murs de la prison font barrage ? Derrière chaque situation, une histoire singulière et complexe. Les Grenades ont tenté de saisir les enjeux de ces réalités silenciées.

Octobre 2023, prison de Haren, nord Bruxelles. De hauts murs de béton. À l’entrée : "l’access", où les proches de détenu·es forment une longue file en attendant l’autorisation de rentrer.

Marie Mornard, responsable de la section femmes, nous accueille. Badge à la main, nous passons des portiques, des sas, des portes, beaucoup de portes. Après les espaces autorisés au "public", nous pénétrons dans les enceintes fermées de la prison, dans les milieux dits "de vie".

Dans les haut-parleurs, les messages d’annonce d’appels retentissent. À gauche, la maison d’arrêt d’où sortent des cris. À côté, la maison de peine. Et tout au fond de la cour, le bâtiment des femmes.

►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe

Nouvelle prison, les femmes en minorité
"Pour l’instant, il y a 109 femmes, c’est trop, nous allons devoir opérer des déplacements avec d’autres prisons", introduit Marie Mornard en entrant dans la section femmes. Derrière les portes, les détenues vont et viennent. Certaines sortent du "travail", d’autres discutent du paiement du salaire, des objets permis à l’intérieur des murs, de la planification de leur sortie prochaine.

La directrice répond aux questions des femmes, des gardien·nes. Avant Haren, Marie Mornard a dirigé la prison non-mixte de Berkendael pendant 12 ans. C’est en novembre 2022 que les détenues ont été transférées dans la maxi-prison mixte de Haren. Selon plusieurs travailleuses sociales en milieu carcéral, ce changement aurait entrainé une perte d’humanité et une réduction de marge de manœuvre.

"C’est vrai qu’il y avait quelque chose de plus simple au niveau de l’organisation et de la flexibilité. Ici, le règlement est le même pour tout le monde, c’est plus rigide", concède la directrice. Ce qui se passe à Haren est symptomatique de la réalité carcérale générale : les femmes ne forment que 4 à 5% de la population en prison. Le fait qu’elles soient largement minoritaires en prison peut faire d’elles des "variables ajustables".

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Même en prison, les femmes sont "les variables ajustables"
Accueillir un bébé en prison
Concernant la maternité, les femmes incarcérées (le cadre légal parle de parent, mais dans les faits, jusqu’ici, il n’y a que les femmes qui seraient concernées !) peuvent dans certains cas, garder leur enfant avec elles jusqu’à l’âge de 3 ans. "Il y a plusieurs possibilités : certaines dames sont arrêtées et enfermées directement avec leur bébé. D’autres déposent une demande pour faire venir l’enfant", éclaire Marie Mornard.

Parfois il y a plusieurs bambins en même temps, parfois il n’y en a pas. Pour l’instant à Haren, aucun enfant ne court les couloirs froids, mais les espaces de la section femmes ont été pensés (plus ou moins) pour leur accueil. Il y a des préaux spéciaux (un petit espace extérieur avec des jeux accrochés au sol en balatum) accessibles à la demande de la mère, peu importe le moment de la journée.

Concernant les cellules mères-enfants, comme le bâtiment a été conçu pour (et probablement par) des hommes principalement, les espaces comptent quelques manquements. Les unités mères-enfants sont constituées de deux pièces séparées par une porte. "Quand nous avons eu ici une maman avec son bébé, nous les avons installé·es dans une cellule duo, c’était plus confortable", livre Marie Mornard.


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Assurer le lien maman-enfants entre les murs
Derrière une porte, une petite salle remplie de jeux, de livres, de coussins. Par la fenêtre, à l’horizon, un tag anti-prison. L’espace aux allures de mini-garderie a été aménagé par l’ONE ; comme le préau pour enfants, il doit rester accessible à tout moment de la journée aux mères incarcérées avec leur enfant.

Au sein de la prison, à la suite du protocole d’accord, l’ONE assure un accompagnement médico-social ainsi qu’un soutien à la parentalité aux femmes enceintes et aux mères incarcérées avec leur enfant de moins de trois ans. "Nous construisons dans un lieu qui n’est pas du tout propice à ça le projet le plus bienveillant possible au déploiement d’une relation mère-enfant", explique Stéphanie Blondeau, psychologue pour l’ONE.

Il y a des règles et il nous arrive régulièrement de devoir les rappeler : dès qu’une femme est en présence de son bébé, on doit lui enlever les entraves

L’Office crée également des partenariats avec les crèches aux alentours des prisons pour pouvoir accompagner l’enfant dans sa vie à l’intérieur et à l’extérieur des murs. "La maman doit confier son enfant à une crèche qu’elle n’a jamais vue. Ce n’est pas facile. Nous assurons le lien", ajoute Aurore Dachy, coordinatrice du projet prison l’ONE.


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Aux côtés des bébés et des mamans
Si la mission première de l’ONE est d’assurer le bien-être de l’enfant, de facto, les équipes prennent également soin des mères. "Les femmes comprennent assez vite que le soutien est souvent bon à prendre au sein des murs de la prison. Nous leur apportons une aide concrète, parfois il s’agit de fournir des biberons, des bodys, un lit cododo…. Comme l’enfermement les rend très dépendantes, elles s’appuient sur nous pour à peu près toutes les démarches qui concernent l’enfant", témoigne Stéphanie Blondeau.

Elle continue : "Être une mère seule en dehors des murs de la prison, c’est déjà très lourd, mais être une mère seule sous le regard des équipes de gardien·nes à longueur de journée, avec les contraintes imposées par une prison sans jouir de la liberté de ses mouvements, c’est extrêmement lourd."

Concernant les naissances, les femmes accouchent dans des hôpitaux partenaires. "Il y a des règles et il nous arrive régulièrement de devoir les rappeler : dès qu’une femme est en présence de son bébé, on doit lui enlever les entraves", souligne la psychologue. Certaines mises au monde se déroulent dans des contextes très critiques : il peut arriver que la justice décide au moment de la naissance de retirer le bébé à sa mère.

"Les décisions sont prises au moment de la naissance. C’est alors extrêmement violent. Sans pouvoir préparer les choses en amont, le bébé se retrouve placé dans l’urgence et pas toujours dans les meilleures conditions, car les services d’aide à la jeunesse sont complètement débordés et manquent de moyens", indique Aurore Dachy.

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La santé des femmes en prison : "On est complètement infantilisées"
La double peine d’enfermement
Les deux expertes témoignent de la complexité des conditions dans lesquelles les enfants grandissent avec leur mère en prison et de l’impact inévitable sur la construction de l’attachement. "Dans cet environnement sensoriel extrêmement particulier, ce n’est pas simple de les rassurer autrement que par le peau-à-peau."

Elles continuent : "Quand on est jeune maman, il arrive qu’on puisse se sentir enfermées par toutes les nouvelles contraintes liées à l’arrivée du bébé. Les mères incarcérées sont donc potentiellement soumises à une double peine d’enfermement."

Beaucoup craignent que leur parent soit victime de violence ou pas bien nourri·e. Les petit·es veulent protéger leur parent, c’est important de leur expliquer les choses clairement,

Concernant les aménagements de Haren, l’ONE a pointé de nombreux manquements avant le déménagement des femmes. "Il y a le problème de la porte qui sépare les deux pièces de la cellule mères-enfants, mais aussi toute une série d’autres soucis. Par exemple, chaque femme se lave dans sa propre douche, c’est super mais l’eau sort du plafond et la température est automatique, Comment on remplit un bain de bébé dans ces conditions ? Quand nous sommes arrivées avec ces questions, nous nous sommes rendu compte que c’était un impensé dans le chef de la prison. Heureusement, nous avons travaillé (et continuons à le faire) de manière constructive avec la direction pour pouvoir faire avancer les choses", commente Stéphanie Blondeau.

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In Stéphanie Blondeau We Trust, accompagner les mères incarcérées et soutenir le lien avec leur enfant malgré les murs de la prison
Les enfants en visite
Après l’âge de trois ans pour les enfants qui ont grandi en prison, ou dès n’importe quel âge pour celles et ceux qui restent à l’extérieur des murs, c’est l’asbl "Relais Enfants-Parents" qui prend la main de l’accompagnement. Nous retrouvons Pauline Anne De Molina, psychologue du Relais Enfants-Parents dans une salle de visite de la prison de Haren.

Dans cet espace, pas la moindre verdure, mais de grandes vitres qui laissent passer la lumière naturelle. Ce lieu est réservé en priorité aux activités du Relais. Un petit carré de jeu intérieur et un autre à l’extérieur sont installés. "L’accès extérieur ne fait pas rêver, mais il y a du potentiel : j’espère un jour pouvoir amener des bacs à potagers pour que les enfants puissent planter avec leur parent." Dans une armoire, des crayons de couleur, des jouets. "J’aimerais que bientôt ces murs gris soient couverts de dessins colorés ; je suis convaincue que l’environnement dans lequel on se trouve et circule a un impact important sur les relations."

Et les relations, c’est sa spécialité. En effet, Pauline Anne De Molina œuvre, quand c’est dans l’intérêt de l’enfant, au maintenir du lien entre l’enfant et son parent incarcéré·e, père ou mère. "Parfois, il s’agit juste d’un échange de courrier, de photos, d’un carnet de correspondance…. Mais l’autre manière de maintenir le lien ce sont les visites, elles constituent la plus grosse partie de notre travail."


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Ensemble, un peu de joie
Concernant l’organisation des visites, le Relais Enfants-Parents opère selon deux modalités différentes. Premièrement, des visites individuelles, par exemple dans des situations de fait de mœurs ou de longues ruptures ; l’équipe est alors présente en soutien.

La deuxième formule (qui est la plus fréquente) consiste en l’organisation de visites collectives : plusieurs parents avec plusieurs enfants en même temps. "Ici pendant une heure et demie ça crie, ça rigole, ça saute. Nous tentons de créer un contexte presque normal de mise en relation", relate Pauline Anne De Molina. Pour garantir la mise en lien, le Relais accompagne les parents enfermé·es et les enfants à l’extérieur. Selon les chiffres de l’asbl, quand le père est incarcéré, dans 75% des cas, l’enfant reste chez la maman. Par contre, quand la maman est incarcérée, seulement 20 à 30% des enfants sont gardés par leur papa.

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Dès lors, quand une maman est incarcérée, dans la majorité des cas, les enfants sont placés en institution ou chez des proches, ce qui change évidemment l’impact de l’emprisonnement du parent sur leur vécu. Qu’ils ou elles vivent en famille ou dans un service d’aide à la jeunesse, dans le cadre des visites organisées par le Relais, les enfants peuvent être emmené·es par des volontaires de la Croix Rouge jusqu’à la prison. "Nous, on les attend à l’entrée, à ‘l’access’. Nous insistons pour qu’aucun adulte extérieur ne puisse entrer, afin de garantir un contact privilégié entre parent et enfant sans que les problèmes d’adultes ne prennent le dessus", continue la psychologue.

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Femmes proches de détenus : quand la prison s’insère dans leur quotidien
Rassurer, réconforter, sécuriser
L’accès aux chambres et espaces communs des détenu·es est interdit aux visiteur·rices. Une règle qui se révèle parfois très difficile à accepter pour les enfants. "L’avantage d’une nouvelle prison, c’est qu’il y a plein de photos sur le Net. Ça permet aux enfants de visualiser, ça peut aider à les rassurer. Quand on les rencontre en amont de leur visite, on essaye de déconstruire les peurs légitimes autour de la prison. Beaucoup craignent que leur parent soit victime de violence ou pas bien nourri·e. Les petit·es veulent protéger leur parent, c’est important de leur expliquer les choses clairement, de les aider à mettre des mots sur la prison", insiste la psychologue.

À savoir, en dehors du Relais, les enfants peuvent se rendre aux visites "à table", c’est-à-dire aux visites normales, mais ils et elles doivent être accompagné·es d’un·e adulte de l’extérieur. Les détenu·es peuvent aussi réserver des mini-studios familiaux pour quelques heures.

Alors que nous nous apprêtons à quitter les murs sécurisés de la prison pour retrouver le monde de dehors, Pauline Anne De Molina nous souffle : "J’assiste à tant de situations injustes et violentes pour les enfants… Ça vient parfois me chercher très loin, mais j’ai envie de croire que redonner aux détenu·es leur rôle de père, de mère permet de leur redonner une place dans la société aussi."

Si vous souhaitez contacter l’équipe des Grenades, vous pouvez envoyer un mail à lesgrenades@rtbf.be

Les Grenades-RTBF est un projet soutenu par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui propose des contenus d’actualité sous un prisme genre et féministe. Le projet a pour ambition de donner plus de voix aux femmes, sous-représentées dans les médias.


https://www.rtbf.be/article/meres-prisonnieres-quelles-realites-pour-les-femmes-incarcerees-11279427

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Rester parent derrière les barreaux,parents,famille,enfants,

23 Juin 2014, 23:04pm

Publié par hugo

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Rester parent derrière les barreaux


Honte, conditions de visite humiliantes, méconnaissance des droits… Une enquête de l’Université catholique de Lyon révèle qu’il n’est pas facile pour les détenus de maintenir des liens avec leurs enfants.


8/4/14 - 14 H 48
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Mots-clés :Être parent
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VERSION PAPIERVERSION WEB
L’espace pour les enfants de détenus dans la salle des parloirs de la maison d’arrêt de Poissy, d... Olivier Culmann/Tendance Floue
L’espace pour les enfants de détenus dans la salle des parloirs de la maison d’arrêt de Poissy, dans les Yvelines.
AVEC CET ARTICLE
cle Un mercredi après-midi au parloir «enfants-parents»
cle «Mon père a été incarcéré les dix-huit premières années de ma vie»
L’incarcération d’un parent produit une onde de choc sur toute sa famille. Elle a des répercussions matérielles, financières, des conséquences sur la santé, l’équilibre psychique de ses proches. Et ses enfants en sont souvent les premières victimes. À la douleur de la séparation, s’ajoute le sentiment de honte, conduisant certaines familles à déménager ou à changer d’école. Certaines mères dont le conjoint est incarcéré – 97% des détenus sont des hommes –, vont s’efforcer d’entretenir le lien, les emmener au parloir.


D’autres, pour diverses raisons (éloignement, séparation…), vont couper les ponts. De ces dommages collatéraux de l’incarcération sur les relations parents-enfants, on ne sait pas grand-chose, comme le soulignait un rapport remis par le défenseur des droits, en décembre 2013, intitulé Intérêt supérieur de l’enfant et maintien des liens familiaux à l’épreuve de l’incarcération (1). «Les enfants privés d’un parent emprisonné sont souvent appelés des “victimes cachées de la détention”, “orphelins de la justice”, “enfants oubliés de l’incarcération”, en raison du manque de considération apportée à leur situation.» En témoigne notamment «le peu d’informations sur la situation familiale des personnes détenues» et le peu d’études dont nous disposons sur l’impact de la détention sur les enfants.


Pour en savoir un peu plus, et en réponse à un appel à projets lancé par le ministère de la justice, une équipe de l’Institut des sciences de la famille de l’Université catholique de Lyon a décidé de mener une enquête de terrain dans trois établissements pénitentiaires de la région Rhône-Alpes, sous la direction de Marie Douris, juriste, spécialisée en droit de protection de l’enfance, et Pascal Roman, professeur de psychologie à l’Université de Lausanne. Des questionnaires ont été distribués aux détenus et des entretiens menés par petits groupes.


Les résultats de cette enquête seront présentés le 11 avril, lors d’une journée d’étude sur le thème «Liens familiaux et détention, comment être parents en prison? Un défi aux institutions», en présence, notamment, de Jean-Marie Delarue, contrôleur des lieux de privation de liberté, et de Marie Derain, défenseure des enfants.


Plus d’un tiers des parents incarcérés disent que leurs enfants ne sont pas au courant de leur situation. Ils invoquent la honte et la peur du regard des autres (de l’école notamment). Certains les voient, malgré tout (sans doute les plus petits), en leur mentant sur le lieu où ils se trouvent – ils leur font croire qu’il s’agit de leur lieu de travail par exemple. Mais d’autres préfèrent y renoncer «pour les préserver». La distance, le coût financier sont aussi les obstacles les plus fréquemment invoqués, ainsi que «l’empêchement de l’autre parent».


Seules des associations comme les relais «enfants-parents» (lire le reportage page suivante) permettent en effet aux enfants mineurs d’aller voir leur parent au parloir, accompagnés par un bénévole, à la demande du détenu lui-même. «Mais ils sont peu utilisés : la plupart des détenus qui nous ont répondu ne les connaissent pas, souligne Marie Douris. Et les bénévoles ne peuvent pas répondre à toutes les demandes.»


«D’une manière générale, observe la juriste, les parents incarcérés ne sont pas au courant de leurs droits. Certains ignorent qu’ils continuent à en avoir, ou sont persuadés qu’ils en ont moins, et le système carcéral renforce cette impression.»


Quand un enfant naît pendant leur détention, les pères peuvent difficilement le reconnaître, car il n’y a pas d’officier d’état civil qui passe. Souvent ils ne sont pas associés aux décisions concernant leurs enfants, alors qu’ils devraient l’être. Recevoir un bulletin scolaire ou un cahier est très compliqué, il faut sans arrêt demander des autorisations… «Ils peuvent bénéficier de l’aide du délégué au défenseur des droits. Mais son existence est peu connue, ajoute-t-elle. Et il faut beaucoup d’énergie pour se lancer dans des procédures.»


Les conditions des rencontres sont souvent peu dignes. «Certes, la situation est très contrastée d’un établissement à l’autre», souligne Pascal Roman. Certains ont mis en place des dispositifs pour accueillir les enfants. Mais la plupart du temps, les parloirs sont exigus ; on ne peut pas y apporter de jouets ni de dessins. Leurs horaires ne sont pas adaptés aux personnes qui travaillent et leur durée trop courte.


En cas de retard, les parloirs sont refusés, même quand les familles viennent de loin. Les procédures de fouilles sont souvent humiliantes. «Des détenus ont pu dire que les membres de leur famille étaient traités comme s’ils étaient eux-mêmes détenus, si bien que certains préfèrent renoncer à voir leurs enfants plutôt que de leur faire subir les rigueurs de l’accueil en prison», déplore Pascal Roman.


La question de l’autorité a été aussi abordée. «Les parents détenus ne se sentent pas légitimes pour l’exercer», constate-t-il. Il leur est en effet difficile d’incarner la loi quand ils l’ont eux-mêmes transgressée. «Et puis voir leurs enfants au parloir, ce n’est pas pour les engueuler», disent-ils. Ils craignent que leurs enfants ne viennent plus. «Beaucoup de parents incarcérés ressentent aussi une sorte de renversement des générations, ajoute le psychologue, car les enfants qui viennent les voir ont des préoccupations de soin à leur égard.» Ils ont donc du mal à se «sentir» parents.


Le maintien du lien est pourtant nécessaire à l’équilibre de nombreux enfants. «Il est important que l’enfant puisse se représenter de façon concrète la permanence de ce parent incarcéré… Le sentiment qu’il a disparu ou qu’il l’a abandonné peut être très angoissant pour lui.» Chaque cas est, certes, singulier. Et la dimension affective «ne se décrète pas», souligne Pascal Roman. «Si le père ne s’est jamais préoccupé de son enfant auparavant, ce n’est pas en prison qu’il va commencer.» Mais des relations fortes peuvent parfois se construire ou se perpétuer derrière les murs. Pour le bénéfice, aussi, des détenus eux-mêmes. «Les cadres de l’administration pénitentiaire constatent que le maintien des liens familiaux est une clé fondamentale pour leur réinsertion», souligne Marie Douris. Mais sa mise en œuvre se révèle si compliquée…


-------------


140 000 ENFANTS FRANÇAIS CONCERNES Au 1er mars 2014, 68 420 personnes étaient détenues en France, dont 2 209 femmes (3,4 %).
Environ 140 000 enfants seraient concernés chaque année par l’incarcération d’un de leurs parents, selon une évaluation du ministère de la justice.
Plus d’un enfant de moins de 5 ans sur deux n’est pas au courant de l’incarcération. Moins d’une famille sur deux en avertit l’école. Trois enfants sur dix accompagnent toujours leur parent (conjoint de détenu) au parloir (enquête Uframa 2012).
Uframa (Union nationale des fédérations régionales des associations de maisons d’accueil de familles et proches de personnes incarcérées) : 8 passage Pont-Amilion, 17100 Saintes Internet : uframa.listoo.biz


Christine Legrand
(1) disponible sur le site http://www.defenseurdesdroits.fr/
cle Un mercredi après-midi au parloir «enfants-parents»

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Suspension des peines de prison pour les femmes enceintes,femmes,prison,

8 Juin 2014, 14:48pm

Publié par hugo

Suspension des peines de prison pour les femmes enceintes
Suspension des peines de prison pour les femmes enceintes Un amendement veut suspendre les peines de prison des femmes pendant la grossesse.6/06/2014
L’Assemblée nationale a largement voté le 5 juin un amendement concernant la suspension des peines de prison pour les femmes enceintes.
Dans le cadre de la réforme pénale menée par la garde des Sceaux Christiane Taubira, plusieurs amendements sont actuellement en discussion à l’Assemblée nationale. Hier, l’Assemblée a voté la suspension des peines de prison pour les femmes enceintes. L’amendement, porté par le député Alain Tourret, du parti des radicaux de gauche, stipule que la prison doit être évitée voire suspendue, notamment pour les femmes enceintes. L’amendement exclu toutefois celles qui auraient commis des crimes ou des délits contre des mineurs. Si la peine est suspendue pendant deux ans pour les femmes enceintes, l’amendement précise que ce délai est ramené à quatre ans pour celles dont la grossesse est de plus de 12 semaines. Actuellement, les femmes ne représentent que 4 % de toute la population carcérale et 1 794 places leurs sont attribuées, dont 72 pour les mères et leurs enfants. Ainsi, 24 % des prisons ont aménagé une ou deux cellules pour les accueillir ensemble. En 2014, il y aurait 26 enfants âgés de moins de 18 mois vivant en prison, sachant qu’un bébé passe environ 5 mois en prison avec sa mère. Et, en Europe, on compte 500 nourrissons incarcérés. Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté, « rappelle que la détention des mères avec leurs enfants n'est qu'un palliatif visant à concilier l'inconciliable » : « la présence d'une enfant auprès de sa mère et le caractère insupportable de la présence d'un jeune enfant en prison ». Par ailleurs, en prison, la grossesse peut être perturbée tout comme les premiers mois de la vie d’un enfant. En effet, vers l’âge de 10 mois l’enfant commencerait à ressentir l’enfermement, ce qui pourrait perturber son développement. De plus, les femmes enceintes vivent moins bien leur grossesse, leur angoisse étant multipliée par l’enfermement, la peur d’accoucher seule, l’isolement. La loi permet aujourd’hui à une femme d’élever son enfant en prison jusqu’à ses 18 mois. Ensuite, les enfants sont soit confiés à la famille ou aux proches, soit placés en familles d’accueil.
Source : nosdeputes.fr
Auteur : Chloé Margueritte > COMMENTER5
Plus d'actus6/06/2014 CAF : la moitié de la population perçoit une prestation6/06/2014 PMA : le manifeste des « 343 fraudeuses » jette un pavé dans la mare

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La moitié des pays européens en surpopulation carcérale,articles femmes hommes,droits,droits de l hommes

5 Octobre 2013, 04:27am

Publié par hugo

La moitié des pays européens en surpopulation carcérale


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RÉAGIR !Mar, 18/06/2013 - 12:00Par
Ludovic Clerima (Paris) myeurop
Article du 6 mai 2013 mis à jour le 18 juin 2013
Record du nombre de détenus et surpopulation: les statistiques publiées ce 17 juin par l'administration pénitentiaire alertent une nouvelle fois sur la précarité des prisons françaises. Une situation loin d'être exceptionnelle: 50% des pays européens sont en surpopulation carcérale.


Selon un rapport du Conseil de l'Europe publié le 3 mai 2013, basé sur l'enquête 2011 des statistiques pénales annuelles du Conseil de l'Europe (SPACE I), la surpopulation dans les prisons concerne la moitié des pays européens.


En tête du classement, la Serbie (157,6 prisonniers pour 100 places), la Grèce (151,7 prisonniers pour 100 places) et l'Italie (147 prisonniers pour 100 places).


La France rejoint le banc des mauvais élèves et accède à la 11e place avec 113,4 prisonniers pour 100 places. Cette tendance n'est pas à la baisse: les chiffres publiés lundi 17 juin par la direction de l'administration pénitentiaire évoquent un taux actuel d'occupation de l'ordre de 118%. Au 1er juin 2013, la population carcérale en France s’élevait à près de 68.000 détenus pour quelque 57.000 places.


Saint-Marin s'en sort, lui, avec les félicitations du jury. Pour 100 places, le 3e plus petit État d'Europe ne compte que 16,17 prisonniers.


La France tire également son épingle du jeu avec un taux élevé de suicides. 15,5 morts pour 10 000 détenus, là où la moyenne en Europe est de 6,7 décès.


Le rapport du Conseil de l'Europe note cependant une diminution de la population carcérale totale. -2 % cette année. 95 % des détenus, selon le compte rendu, sont en moyenne des hommes de 33 ans.


Les auteurs appellent à la prudence dans les comparaisons. Chaque pays établit, à sa manière, la capacité d'accueil des ses prisons.

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Prisons : 68.569 détenus au 1er juillet, un nouveau record

28 Juillet 2013, 04:59am

Publié par hugo

S FORTSFaits diversJusticePoliceEnquêteEducationImmobilier
ACCUEIL > SOCIÉTÉ > PRISONS : 68.569 DÉTENUS AU 1ER JUILLET, UN NOUVEAU RECORD
Prisons : 68.569 détenus au 1er juillet, un nouveau record
Créé le 22-07-2013 à 18h39 - Mis à jour à 19h08Le Nouvel Observateur avec AFPPar Le Nouvel Observateur avec AFP
Nouveau record de la population carcérale française : la barre des 68.000 détenus a été franchie. La capacité d'accueil est, elle, de 57.320 places.


Mots-clés : prison, record, détenus, surpopulation, CARCERALE
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Le bâtiment D3 de la maison d'arrêt Fleury Mérogis, le 27 juillet 2010. (WITT/SIPA)
Le bâtiment D3 de la maison d'arrêt Fleury Mérogis, le 27 juillet 2010. (WITT/SIPA)
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» Surpopulation carcérale : les surveillants bloquent les prisons
» 67.977 détenus dans les prisons en France, un nouveau record
Le nombre de détenus dans les prisons en France a passé la barre des 68.000 au 1er juillet, avec 68.569 personnes incarcérées, un nouveau record, selon les chiffres publiés lundi 22 juillet par l'administration pénitentiaire.


Un record avait déjà été battu en juin, avec 67.977 personnes incarcérées. La "capacité opérationnelle" des établissements pénitentiaires - c'est-à-dire leur capacité d'accueil - était au 1er juillet de 57.320 places.


Hausse de 10% des aménagements de peine en un an


Le nombre de prévenus (personnes en attente de jugement) est en hausse de 1,1% par rapport à la même période l'année dernière, s'élevant à 17.318 personnes, pour 51.251 condamnés.


Les mineurs incarcérés sont au nombre de 799 au 1er juillet, soit une hausse de 2,7% par rapport au mois précédent. Ils représentent 1,2% de l'ensemble de la population carcérale.


Les aménagements de peine (placement à l'extérieur, semi-liberté, surveillance électronique) concernent 21,9% des condamnés écroués, soit 13.900 personnes. Ces aménagements ont progressé de 10,2% en un an et de 33,3% en deux ans.


Par ailleurs, 629 personnes sont placées sous surveillance éléctronique de fin de peine (Sefip), un chiffre en hausse de 1,9% sur un an.







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Prisons : la France se démarque par sa surpopulation carcérale et son taux de suicides,femmes, homme,sante,

24 Juillet 2013, 22:51pm

Publié par hugo



Prisons : la France se démarque par sa surpopulation carcérale et son taux de suicides
Le HuffPost/AFP | Publication: 03/05/2013 17h16 CEST | Mis à jour: 03/05/2013 17h31 CEST
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PRISON - La France fait partie des mauvaises élèves en matière de surpopulation carcérale, avec 113,4 prisonniers pour 100 places. C'est le principal enseignement d'un rapport du Conseil de l'Europe publié vendredi 3 mai.


La France se fait également remarquer par un taux élevé de suicides, avec 15,5 suicides pour 10.000 détenus (en 2010) contre une moyenne de 6,7 pour l’ensemble des 47 pays membres du Conseil de l'Europe. En 2010, les prisons françaises ont déploré 95 suicides de détenus et 123 en 2011.


Les auteurs du rapport appellent toutefois à la prudence dans les comparaisons, dans la mesure où chaque pays établit à sa manière la capacité d'accueil de ses prisons.


La moitié des pays européens en surpopulation carcérale


Une vingtaine des 47 pays membres de l'organisation paneuropéenne comptent plus de prisonniers que de places disponibles, dont la France (en 11e position avec 113,4 prisonniers pour 100 places), la Belgique (127,2) ou encore la Hongrie (138,2).


Le trio de tête est composé de la Serbie (157,6), de la Grèce (151,7) et de l'Italie (147), alors que les prisons européennes accueillent en moyenne 99,5 détenus pour 100 places. La moitié des pays européens sont en situation de surpopulation carcérale.


Au niveau de l'Union européenne, la moyenne se situe à 107,4 prisonniers pour 100 places et la France se place au 7e rang comme le montre l'infographie ci-dessous.




Le profil des détenus


Le rapport du Conseil de l'Europe permet aussi de définir un profil pour les personnes incarcérées dans les prisons européennes. L'âge moyen est de 33 ans et il s'agit à près de 95% d'hommes. La France n'échappe pas à ce constat, comme l'avait montré cette étude d'OWNI en 2011.


Parmi ceux déjà condamnés, environ un quart purgeaient une peine de moins d'un an et 14% de plus de 10 ans en 2011. Plus d'un détenu sur cinq est par ailleurs étranger, une proportion qui dépasse le tiers dans les pays d'Europe de l'ouest. Pour sa part, la France se démarque avec un pourcentage élevé de détenus purgeant une peine inférieure à un an de prison (35,4 %, soit le dixième rang européen).


Nombre de prisonniers : la France en dessous de la moyenne européenne


Les pays membres du Conseil de l'Europe comptaient au total quelque 1,86 million de détenus dans leurs prisons en 2011, soit 154 prisonniers pour 100.000 habitants.


Mais il y a de très fortes disparités derrière cette moyenne. On compte ainsi moins de 50 détenus pour 100.000 habitants dans certains pays comme l'Islande, alors que la proportion dépasse les 200 dans plusieurs pays d'Europe de l'Est. L'Ukraine (347,7 détenus pour 100.000 habitants), l'Azerbaïdjan (417), la Géorgie (541,2) et la Russie (546,1) sont les pays aux taux les plus élevés.


Au sein de l'Union européenne, avec la France fait partie des pays en dessous de la moyenne (111,3), tout comme l'Allemagne (86,8) et les Pays-Bas (69,5). La moyenne des 27, représentés dans le graphique ci-dessous, se situe à 142,1.




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Prison : la France condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme,femmes, hommes,lois,LDH,

24 Juillet 2013, 21:48pm

Publié par hugo

Prison : la France condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme
Le Monde.fr | 26.04.2013 à 16h55 • Mis à jour le 26.04.2013 à 16h57 |
Par Franck Johannès
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La prison des Baumettes à Marseille.
La France a été à nouveau condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme, jeudi 25 avril, pour "traitement dégradant", en raison des conditions de détention dans la maison d'arrêt de Nancy, finalement fermée en 2009.
Enzo Canali, 60 ans, avait été incarcéré pour meurtre à la prison Charles III de Nancy le 24 mai 2006, dans une cellule de 9 m2, avec un autre détenu. Lors d'une fouille de sa cellule, en juin, les surveillants lui confisquent un balai : il proteste, et écrit trois jours plus tard à la directrice de l'établissement pour réclamer son balai et des produits d'entretien. Il en profite pour réclamer une porte aux toilettes de la cellule, séparée par un simple petit muret des lits superposés, à 90 cm de là.


Il y a aussi une fuite dans la chasse d'eau, et "le manque de pression de la chasse d'eau m'oblige à réduire les excréments afin qu'ils puissent s'écouler normalement dans l'évacuation", écrit plus tard le détenu à un magistrat. D'ailleurs, ajoute-t-il, "ce qui est inhumain, c'est de faire ses besoins à la vue de tous". Le plateau de la table n'est pas non plus fixé, une prise électrique déboitée est tout près du lavabo, les cafards croissent et se multiplient dans cette antique prison – construite en 1857 – qui contenait à grand peine 283 détenus pour 262 places.


"ÉTAT D'HYGIÈNE PITOYABLE"


Enzo Canali réclame à nouveau par écrit son balai le 3 juillet, et fait valoir que "son collègue et lui-même étaient dans un état d'hygiène pitoyable". De guerre lasse, il dépose plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges de Nancy le 25 juillet 2006. En octobre, ce dernier estime la plainte irrecevable : il s'agit d'un problème qui relève de l'administration pénitentiaire, et donc du tribunal administratif.


Le détenu fait appel. La Cour lui donne raison et désigne un autre juge d'instruction. Il est enfin entendu par le magistrat en février 2008, mais le 20 janvier 2009, la Cour de cassation décide que les conditions de détention ne relèvent effectivement que du droit administratif. Enzo Canali, qui n'a été détenu que six mois à Nancy, saisit alors en juillet la Cour européenne des droits de l'homme.


Les juges de Strasbourg n'ont pas de standards spécialement exigeants : l'arrêt observe que partager une cellule de 9 m2 "lui permettait de disposer d'un espace individuel de 4,5 m2, réduit cependant par les installations sanitaires (lavabo et toilettes) et les meubles de la cellule (dont une table, un lit superposé et deux chaise)". Ce n'est pas Versailles, mais "un tel taux d'occupation correspond au minimum de la norme recommandée par le Comité européen pour la prévention de la torture" qui ne s'alarme qu'au-dessous de 3 m2 par personne – l'équivalent d'une pièce où l'on pourrait, du centre, toucher tous les murs.


"SÉRIEUX AVERTISSEMENT À LA FRANCE"


Mais la Cour note aussi que "d'autres aspects des conditions de détention sont à prendre en compte", notamment " la possibilité d'utiliser les toilettes de manière privée, le mode d'aération, l'accès à la lumière, la qualité du chauffage et le respect des exigences sanitaires de base", qui faisaient cruellement défaut à Nancy. D'autant qu'Enzo Canali passait vingt-deux heures sur vingt-quatre en cellule, et que la promenade se faisait dans une courette de 50 m2 où les détenus étaient trop serrés pour même tourner en rond.


Ainsi, "la Cour considère que l'effet cumulé de la promiscuité et des manquements relevés aux règles d'hygiène ont provoqué chez le requérant des sentiments de désespoir et d'infériorité propres à l'humilier et à le rabaisser". La Cour lui accorde 10 000 des 15 000 euros qu'il réclamait (le gouvernement français avait estimé que 600 euros étaient vraiment un maximum), et 4 784 euros de frais de procédure.


"C'est la première fois qu'est mis en avant le critère de surpopulation", se réjouit Me Patrice Spinosi, qui a obtenu – une cinquième fois – la condamnation de la France sur la question des prisons, au nom de l'Observatoire international des prisons (OIP). "Même si la surpopulation carcérale n'est pas constitutive à elle seule d'un traitement dégradant, c'est un critère à prendre en considération. C'est une avancée remarquable."


Pour l'OIP, il s'agit d'un "sérieux avertissement à la France", qui "doit amener le gouvernement à engager enfin une politique pénale faisant véritablement de l'emprisonnement un ultime recours, au bénéfice d'une probation renforcée et d'une réduction du champ d'intervention de la justice pénale."


Franck Johannès

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