Sondages de l'Elysée: le domicile et le bureau de Buisson perquisitionnés
photo : Miguel Medina, AFP
Contacté par l'AFP, Patrick Buisson s'est refusé à tout commentaire. Pour Jérôme Karsenti, l'avocat de l'association Anticor dont les plaintes ont lancé l'enquête, ces actes sont "une étape
importante".
Selon une source proche de l'enquête, outre le domicile, c'est le bureau dont dispose au sein du groupe TF1 Patrick Buisson, directeur général de la chaîne Histoire, qui a été perquisitionné.
Interrogée par l'AFP, TF1 n'a toutefois pas confirmé.
Au centre des préoccupations du juge dans cette perquisition, une convention signée en 2007 entre l'ex-directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy à l'Elysée, Emmanuelle Mignon, et la société de
conseil Publifact de Patrick Buisson, également conseiller politique officieux mais très influent de l'ancien chef de l'Etat.
La Cour des comptes s'était étonnée en 2009 de ce contrat, passé sans qu'"aucune des possibilités offertes par le code des marchés publics pour respecter les règles de la mise en concurrence
(...) n'ait été appliquée".
En 2010, Anticor, s'appuyant notamment sur des documents (factures, conventions, contrats) recueillis par le militant écologiste grenoblois Raymond Avrillier, déposait plainte avant d'obtenir,
au prix d'une longue bataille procédurale, qu'un juge puisse enquêter à la fin de l'année dernière.
Mais désormais, la justice ne s'intéresse plus uniquement à ce contrat initial puisqu'en janvier, les investigations ont été étendues à l'ensemble des sondages commandés durant le quinquennat
Sarkozy aux sociétés Publifact, PubliOpinion, Giacometti-Peron, Ipsos, Ifop, OpinionWay, Sociovision, TNS Sofrès et CSA.
En jeu, d'éventuels faits de "favoritisme", de "détournements de fonds publics", de complicité et de recel de ces délits.
Pour Jérôme Karsenti, que le premier acte spectaculaire de l'enquête concerne Patrick Buisson est logique: "L'affaire débute par cette convention" de 2007, "il est cohérent que le juge
d'instruction commence par aller chez Buisson voir ce qu'il y a chez lui."
"J'imagine que son idée est de recouper les documents fournis par Anticor, le rapport de la cour des comptes, et de voir s'ils sont cohérents avec ce qu'il trouve chez Buisson", a ajouté Jérôme
Karsenti, qui avait annoncé la semaine passée que les sondages commandés lors des deux dernières années du quinquennat de Nicolas Sarkozy étaient introuvables à l'Elysée.
Très discret publiquement, Patrick Buisson a joué un rôle central dans la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012, prônant une stratégie très clivante, parfois jugée droitière, y
compris dans son camp.
Après la défaite, l'ex-porte-parole de Nicolas Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet, lui avait reproché de n'avoir pas poursuivi l'objectif "de faire gagner Nicolas Sarkozy", mais celui "de
faire gagner Charles Maurras".
L'enquête ne vise pas directement Nicolas Sarkozy. Mais selon Jérôme Karsenti, "elle le touchera implicitement" en cas de mises en examen de membres de son entourage.
"Cette affaire touche directement l'argent public dépensé par l'ancien président de la République", juge l'avocat, pour qui "se pose toujours la question de l'immunité du chef de l'Etat" pour
des faits commis dans l'exercice de ses fonctions.
Nicolas Sarkozy est par ailleurs mis en examen pour "abus de faiblesse" dans le dossier Bettencourt. Le nom de l'ancien chef de l'Etat ou de ses proches apparaît dans plusieurs autres dossiers
sans qu'il ne soit judiciairement mis en cause: Karachi, arbitrage Tapie-Lagarde, accusations de financement occulte de sa campagne de 2007 par Mouammar Kadhafi.