Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de hugo,

"Quand je me suis retrouvée à la cave à 13 ans, j'ai compris ce qu'allait être mon quotidien",femmes,

30 Juillet 2013, 14:45pm

Publié par hugo

ESCLAVAGE MODERNE
"Quand je me suis retrouvée à la cave à 13 ans, j'ai compris ce qu'allait être mon quotidien"
Par Franck Berteau, publié le 13/09/2010 à 14:00


Tina a été adoptée au Nigéria à 12 ans par Godwin Okpara, ancien joueur du Paris-Saint-Germain originaire du même pays. Elle publie cette semaine Ma vie a un prix (Michel Lafon), le récit terrifiant de quatre années de réclusion barbare.


Imprimer
Zoom moinsZoom plus15 Voter (31)
1146 31 1 1285
"Quand je me suis retrouvée à la cave à 13 ans, j'ai compris ce qu'allait être mon quotidien"
Tina a décidé de raconter ses 4 ans sous l'emprise de sa famille adoptive.
L'Express
Tina Opkara. Ma vie a un prix. Esclave en France au XXIè siècle, aux éditions Michel Lafon (222 pages, 17,95 euros).
Tina Opkara. Ma vie a un prix. Esclave en France au XXIè siècle, aux éditions Michel Lafon (222 pages, 17,95 euros).
Michel Lafon
En 2001, Tina a 12 ans lorsqu'elle perd sa mère, décédée en couches. Son père, Simon, veut lui offrir un "avenir meilleur". Le 11 février, sa fille part en France rejoindre la famille d'un homme en qui il a toute confiance, Godwin Okpara, joueur professionnel nigérian du Paris-Saint-Germain. Tina ne sait pas encore les drames qui l'attendent...


Car la famille du footballeur fera de leur fille "adoptive" son esclave. Tina s'occupe à plein temps des quatre jeunes enfants du couple, exécute les tâches domestiques et dort sur un matelas, à la cave. Elle est privée de tout, d'amis, d'école, de liberté. Sa mère "adoptive", Linda, l'humilie, la violente et la torture. L'année de ses 15 ans, son nouveau père, Godwin, la viole pour la première fois. Il le fera quotidiennement, et plusieurs fois par jour.


Le 13 août 2005, Tina parvient enfin à trouver refuge chez des voisins. Trois ans plus tard, les bourreaux Okpara sont respectivement condamnés par la cour d'appel des Hauts-de-Seine à 15 et 10 ans de prison pour "viols, torture et asservissement". Aujourd'hui, les mêmes cauchemars la hantent pourtant. Mais à 22 ans, la miraculée affiche devant son interlocuteur une pudeur digne, qui force le respect. Elle tente simplement, assure-t-elle, d'être "une femme comme les autres". Entretien.





Quatre années après la fin de votre cauchemar, pourquoi avez-vous décidé d'écrire votre histoire ?
En 2007, alors que le procès de mes parents adoptifs venait de démarrer, on m'avait proposé de tout raconter dans un livre. A l'époque, il était trop tôt. Je voulais oublier et avoir une vie normale, comme tous les jeunes de mon âge. Aujourd'hui, j'ai besoin d'en parler. Ne serait-ce que pour donner du courage à ceux qui subissent ou ont subi des sévices similaires. Pour leur montrer qu'il faut toujours se battre et croire en l'avenir.


Lors de votre arrivée chez les Okpara, quand vous êtes-vous rendu compte que vous ne seriez pas seulement leur "fille adoptive"?
Pas tout de suite... Les six premiers mois, je gardais l'espoir que la situation évolue. Linda m'avait promis que je serai scolarisée lors de la prochaine rentrée. Je me disais qu'une fois à l'école, je n'aurais plus à exécuter toutes les tâches domestiques qu'elle m'assignait. Et nous avons déménagé. Je me suis rendue compte qu'il n'y avait rien pour moi dans cette nouvelle maison. Pas de chambre, pas de cartable ni de fournitures scolaires. Lorsque je me suis retrouvée, à presque 13 ans, couchée sur mon matelas, à la cave, j'ai définitivement compris ce qu'allait être mon quotidien.


Vous écrivez dans votre livre combien l'école vous a d'ailleurs manqué, plus que la liberté ?
Rien ne me fait plus souffrir que de ne pas avoir été à l'école. C'était pour cela que mon père m'avait fait venir en France. Il savait que la famille Okpara avait les moyens de me donner ce que lui ne pouvait pas m'offrir, les études, un avenir. Mon rêve était de devenir infirmière. Si j'avais été à l'école, peut-être aurais-je pu le réaliser.


En plus des violences et des humiliations quotidiennes que Linda Okpara vous fait subir, son mari abuse de vous dès vos 15 ans...
Je n'imaginais pas du tout que cela puisse arriver. Godwin Okpara était quelqu'un que je respectais beaucoup et en qui mon père avait confiance. C'est sa famille que mes parents connaissaient et non celle de Linda. En plus, il avait toujours été gentil avec moi, même s'il fermait les yeux sur ce que sa femme me faisait subir. Mais les viols ont commencé deux ans après mon arrivée en France. Ils sont ensuite devenus quotidiens. Un jour, je lui ai posé la question: "Il y a plein d'autres filles, pourquoi moi?" Il m'a répondu que moi, j'étais à la maison et que dehors, il y avait les maladies.


Une fugue vous conduit jusqu'au commissariat. Les policiers ne vous écoutent pas et convoquent vos prétendus parents adoptifs. Que ressentez-vous ?
Tina Okpara
16 octobre 1987. Naissance de Tina Omaku, au Nigeria


11 février 2001. Tina s'envole pour la France après la mort de sa mère. Elle est adoptée par la famille Okpara.


Février 2003. Pour la première fois, son " père adoptif " et footballeur Godwin Okpara la viole.


13 août 2005. Tina parvient à s'échapper. Des voisins lui viennent en aide. C'est la fin du calvaire.


25 mars 2006. Le vrai père de Tina décède au Nigeria.


1er juin 2007. La cour d'appel de Versailles condamne Linda et Godwin Okpara respectivement à 15 et 13 ans de prison pour viols, torture et asservissement.


Février 2008. Godwin Okpara voit sa peine réduite par la cour d'assises d'appel des Hauts-de-Seine à 10 ans de prison. Linda Okpara voit sa peine de 15 ans confirmée. 9 septembre 2010. Tina Okpara publie Ma vie a un prix, aux éditions Michel Lafon.


Je me sens trahie et vide. A ce moment-là, je comprends que mon calvaire va recommencer. Lorsque ces policiers se sont aperçus que j'étais de la famille du footballeur Godwin Okpara, ils ne m'ont plus écouté. Ils n'ont même pas cherché à comprendre les raisons de ma fugue ni les conditions dans lesquelles je vivais. Ils semblaient avoir une certaine admiration pour mon père adoptif et ne pas pouvoir s'imaginer qu'une personne connue fasse une chose pareille.


Pourquoi ne pas avoir fugué plus tôt ni tenter votre chance plusieurs fois?
Je ne connaissais personne. Je n'avais pas le droit de sortir, sauf pour faire les courses ou accompagner les enfants à l'école. Je devais courir. J'avais un emploi du temps très strict. Si je ne le respectais pas, je m'exposais aux violences de Linda. Et nous vivions dans un quartier pavillonnaire. C'était chacun chez soi. En plus, à l'époque, je ne parlais pas français.


Vient le jour de la "libération", tel que vous le décrivez vous-même dans votre livre. Vous vous enfuyez à nouveau. Des voisins vous viennent en aide. Quand réalisez-vous que votre calvaire s'achève ?
Ce jour-là, les voisins ont appelé la police. Je ne voulais pas qu'ils le fassent: j'avais peur d'être à nouveau trahie. Mais cette fois, les policiers m'ont paru déterminés. L'un d'entre eux m'a dit que c'était son dernier jour de travail et qu'il ne partirait pas en vacances tant que je ne serai pas en sécurité. Puis ils m'ont accompagnée à la maison récupérer mon passeport et ont tenu tête à mon père. Là, j'ai compris que mon cauchemar prenait fin.


En 2006, alors que se termine le premier procès de vos bourreaux, vous déclarez à l'audience: "Je ne veux plus les voir... mais je ne souhaite pas qu'ils aillent en prison à cause de moi". Pourquoi ?
Je suis soulagée et rassurée de ne plus jamais avoir affaire à eux. Mais demeure une seule peur. A l'époque, mon père était encore vivant. Je ne voulais pas que ma famille, au Nigeria, subisse des représailles à cause de moi. Les Okpara étaient des gens célèbres dans mon pays. Je me disais qu'ils pouvaient facilement payer quelqu'un pour faire du mal aux miens. Et, de toute manière, le fait qu'ils soient en prison n'effacera jamais les humiliations, les coups et les viols.


Pendant toutes ces années, vous n'avez jamais cessé d'écrire votre journal intime, sur des cahiers que vous trouviez dans la maison. L'écriture vous a-t-elle aidé à surmonter cette terrifiante épreuve?
Ces cahiers étaient mes seuls amis! Je pouvais leurs raconter tout ce que je vivais, raconter les démons qu'étaient mes parents adoptifs. Eux seuls ne me coupaient pas la parole et me laisser m'exprimer. Ils m'ont beaucoup aidé.


Les mauvais souvenirs se dissipent-ils?
J'y pense tous les jours quand je me lève et que je me regarde dans la glace. Lorsque ma mère adoptive a surpris son mari en train de me violer, elle m'a torturée pour se venger. A l'aide d'un rasoir, elle m'a mutilé le vagin. Elle m'a dit qu'elle allait m'infliger une cicatrice dont je me souviendrais tous les jours de ma vie. Elle ne s'était pas trompée.


Dans la dernière phrase de votre livre, vous exprimez la volonté de relever un défi, celui d'être une femme comme les autres. Aujourd'hui, pensez-vous avoir remporté ce pari?
A peu près, je crois. J'aime mon travail. Je m'occupe de personnes âgées. J'ai tellement manqué d'amour et d'affection que j'ai envie d'en donner aux autres. Mais je vis encore dans un foyer de jeunes travailleurs. Mon objectif est de réussir à avoir mon propre appartement, ma propre famille. Surtout, la France m'a aidée à traverser des moments atroces. Alors, j'espère pouvoir un jour obtenir la nationalité française. Cela me permettrait de porter à nouveau le nom de mon vrai père, Omaku. J'ai honte de porter encore aujourd'hui celui des Okpara.


L'esclavage moderne
Depuis sa création en 1994, le Comité contre l'esclavage moderne (CCEM) prend en charge des mineurs réduits à l'état d'esclavage, comme Tina Okpara. Avant la fin de l'année, le CCEM publiera sur son site Internet une étude fondée sur les témoignages de 79 victimes devenues majeures mais encore suivies par des équipes du Comité. Un panorama très révélateur du parcours de ces jeunes otages.


En moyenne, les mineurs séquestrés en France sont exploitées pendant six années. Leur âge de recrutement est d'environ 14 ans. Quotidiennement, ils effectuent 15 heures de travail. 92% d'entre eux ne sont pas scolarisés et ne reçoivent aucune rémunération. 96% n'ont aucun jour de congé ni de repos. A 99%, ces mineurs ne bénéficient d'aucun espace propre pour dormir. 75% subissent des violences physiques et 25% des violences sexuelles. 96 % sont des filles. Selon le Bureau international du travail (BIT), 12,3 millions de personnes dans le monde sont aujourd'hui soumises au travail forcé et près de la moitié ont moins de 18 ans.


D'autres vidéos Société




BFM STORY: 103 millions d'euros de bijoux volés a...


Orages: les images des témoins BFMTV dans le sud ...


Orages: deux maisons foudroyées dans l’Essonne ...


Plages de l'Hérault: appel à la prudence - 29/07


Des adolescents en surpoids profitent de l'été p...


Baisse de fréquentation des hôtels et campings e...


Vols de bijoux au Carlton de Cannes - 29/07


Braquage à Cannes: des millions d'euros de bijoux...


France : la vente en ligne de médicaments, risque...


Haute-Marne: trente blessés dans l'effondrement d...


Corse: des jumeaux de 3 ans portés disparus depui...


DSK renvoyé en correctionnelle: son avocat réagi...


Confondu par son ADN, 20 ans après le meurtre de ...


Double meurtre en Isère: le suspect n'a pas recon...


BFM STORY: Drame de Saint-Jacques de Compostelle. ...
[PERSONNE]
Michel Lafon
Suivez L'Express
Sur Facebook


Sur Twitter


Et aussi :
RSS
Newsletter
Mobile
Abonnez-vous !
L'Expansion, le mensuel de l'économie
L'Expansion, le mensuel de l'économie
6 mois - 9€
Toutes les offres
Réagir
15
L'EXPRESS: 3 mois pour 19 € seulement
En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/actualite/societe/quand-je-me-suis-retrouvee-a-la-cave-a-13-ans-j-ai-compris-ce-qu-allait-etre-mon-quotidien_919014.html#Bh5qpKJzX77whDWB.99

Commenter cet article